II.2.2.2.5 Les autres orientations économiques avec les traits évolutionnaires

Certaines caractéristiques en commun avec la biologie évolutionnaire peuvent être trouvées encore dans deux autres courants (voir la figure n. 5). Il s’agit de « l’école autrichienne » (Austrian Economics) et de l’école de la régulation. L’école autrichienne est apparue dans les années trente du siècle passé. Marshall l’a décrite comme l’école évolutionnaire et le concept d’équilibre y est compris comme un état théorique qui ne peut jamais être atteint. Parmi ses représentants, il faut mentionner Hayek et Mises, même si Hayek est classé aussi comme un partisan de l’économie évolutionnaire (Palermo, 1999). L’école de la régulation, avec ses représentants principaux : Menger, Aglietta et Lipietz représente d’après Hodgson (2002) une liaison entre le marxisme et de nouveaux thèmes évolutionnaires.

L’étape de 1955 à 1974 est marquée de nouveau comme une « période d’obscurité »à cause de l’influence forte de l’économie keynésienne et du marxisme et parce que la littérature économique était très pauvre en références biologiques, à l’exception de Copeland et Hayek (Hodgson, 1998). Dans ses ouvrages, Hayek prêtait son attention à l’évolution des institutions politiques, sociales, juridiques et économiques.

Une interruption de cette longue période de déclin n’était pas autant causée par des économistes, même si ni cette fois-ci la source des idées économiques évolutionnaires ne s’est tarie totalement (par exemple Hayek, Copeland, Downie), mais plutôt par des biologistes. En 1975, « Sociobiologie: The New Synthesis » de E. Wilson était publié. Cet auteur s’intéresse aux applications générales de la théorie de l’évolution dans le domaine des sciences sociales et dans son dernier livre « Consilience – The Unity of Knowledge » il a considéré cette théorie comme l’un des ponts du rapprochement des sciences naturelles et sociales.

Figure 5 : Schéma fondamental de l’évolution de l’économie institutionnelle
Figure 5 : Schéma fondamental de l’évolution de l’économie institutionnelle

Un autre biologiste, Dawkins, un grand vulgarisateur du darwinisme, a publié, en 1976 le livre « Le gène égoïste » où il prête attention, entre autres, à la culture comme à un phénomène qui évolue. Il propose un terme pour un réplicateur dans le milieu des sciences sociales, c’est-à-dire une certaine analogie pour le gène – « le mème ».

Néanmoins, certains auteurs (par exemple Hodgson, 1993) n’apprécient pas notamment l’effort de réduction forte de cette attitude qui explique de façon très simplifiée des problèmes qui demandent une compréhension plus large. Dawkins et Wilson considèrent les gènes comme la force motrice principale pour le comportement des organismes individuels, des groupes d’organismes ou de toutes les espèces.

L’écologie de la population

Tant que l’on mentionne la littérature biologique, il est indispensable d’inclure dans la liste aussi les auteurs de l’écologie de la population, ou bien l’anthropologie sociale. À savoir principalement Hannan et Freeman qui, depuis à peu près les années soixante-dix du 20e siècle, ont publié beaucoup d’articles importants qui sont souvent cités aussi dans la littérature économique. Ils ne perçoivent pas l’entreprise, ou éventuellement d’autres institutions, comme un organisme particulier, mais plutôt comme une population d’une certaine espèce, justement en accord avec l’écologie comme la discipline scientifique.

D’après eux, l’écologie de la population devrait s’occuper de la distribution des organisations sous les conditions diverses de l’environnement et de leur propagation générique. Ils profitent des concepts comme une niche, des informations sur les rapports entre l’environnement et des unités étudiées (un organisme – une organisation), des espèces, des mécanismes d’évolution – sélection et adaptation, etc., de l’écologie, de la biologie et de la biologie évolutionnaire. Leur terme le « blueprint » devrait probablement remplacer un génotype en biologie comme une analogie à la génétique de la population. Il s’agit des formes d’organisations, dans le sens des instructions pour la construction des organisations et pour la direction du comportement collectif (Hannan, Freeman, 1986), en d’autres mots, le fondement pour la transformation des entrées (inputs) aux (sorties) outputs (Hannan, Freeman, 1977) (pour des exemples plus concrets au dessous du texte).

Naturellement, ils sont conscients de leur principal point faible – les formes d’organisations ne sont pas « lisibles » comme le code génétique36. Cela peut être partiellement résolu par la déduction de la structure formelle, des modèles d’activité et des formes d’autorité (Hannan et Freeman, 1977) ou de la structure d’une niche de biocénose, et cela d’après des objectifs officiels, des formes d’autorité, des technologies centrales et des stratégies de marketing (Hannan et Freeman, 1986).

Certains auteurs économiques contemporains avec la tendance marquée au raisonnement évolutionnaire

Selon Mlčoch (1996), Hodgson est vraisemblablement l’un des auteurs européens les plus marquants qui s’intéresse non seulement à l’origine et à l’évolution de l’économie institutionnelle. Dans ses œuvres, il a aussi mis un accent évident sur l’application explicite de la théorie de l’évolution et d’autres analogies biologiques à l’économie. Hors de son activité de publication, il mène aussi une activité pédagogique et d’organisation dans cette orientation en organisant annuellement « International Workshop in Institutional Economics » à University of Hertfordshire où il a fondé Centre for Research in Institutional Economics. Il est aussi le membre de European Association for Evolutionary Political Economy qui cependant ne regroupe pas seulement des scientifiques à orientation institutionnelle (Mlčoch 1996).

De notre point de vue, sa contribution principale consiste dans son activité menant à la compréhension de l’évolution et l’éclaircissement de certaines étapes essentielles de l’économie évolutionnaire et institutionnelle. Néanmoins, cette orientation n’est pas typique pour tous ses ouvrages. Il oriente son programme scientifique actuel vers les processus d’apprentissage, le changement technologique et le développement économique (Geoffrey Hodgson’s website).

Son activité d’éditeur lui permet d’apprécier la contribution des auteurs de ce courant économique alternatif, de résumer leurs ouvrages les plus importants et grâce à tout cela de les rendre accessibles pour un cercle de lecteurs plus large. Il a édité ou co-édité plusieurs livres qui intègrent les articles pertinents des auteurs d’une même orientation. On peut sans doute nommer « Economics and Biology » qui apporte une vue intéressante de l’évolution des rapports mutuels des deux disciplines ou « The Elgar Companion to Institutional and Evolutionary Economic », un dictionnaire d’explication qu’il a co-édité avec Samuels et Tool. C’est rélativement récemment qu’un nouveau journal dont il est éditeur principal est apparu - Journal of Institutional Economics.

D’ailleurs, Samuels et Tool s’orientent de façon similaire. Samuels a édité un livre de deux tomes en 1988 « Schools of Thought in Economics – Institutional Economics » et Tool la même année, un ouvrage de trois tomes « Evolutionary Economics ».

Winter et Nelson, déjà mentionnés, continuent à développer leur recherche dans la direction évolutionnaire et biologique. Leur travail le plus connu est peut-être « An Evolutionary Theory of Economic Change » de 1982 mais ils sont également les auteurs d’ouvrages individuels.

Sans doute, l’ouvrage de Nelson de 1995 « Recent Evolutionary Theorizing About Economic Change » ne peut pas être omis car on y trouve un résumé clair des concepts principaux, de la contribution et des perspectives de l’économie évolutionnaire. Nelson prête attention également à la recherche du processus du changement économique de longue durée, où il accentue l’évolution des institutions économiques et le progrès technologique (d’après son programme scientifique présenté sur ses pages d’internet37).

Quant à Winter38, on peut y trouver une orientation similaire, c’est-à-dire – le progrès technologique, les avantages comparatifs et les capacités des firmes. Pour Gowdy39, un autre auteur pertinent, il s’agit plutôt du développement économique régional durable, de l’économie écologique et évolutionnaire. Une orientation vers la recherche de la dynamique et du changement des systèmes socioéconomiques est néanmoins évident chez tous.

Concernant la thématique de l’économie institutionnelle et évolutionnaire, il existe plusieurs associations, dont l’aperçu proposé par Hodgson, Samuels et Tool (1994). Les plus connues sont : European Association for Evolutionary Political Economy; Association for Evolutionary Economics, qui publie Journal of Economics Issues; Association for Institutional Thought; Association for Social Economics qui édite Review of Social Economy et Journal of Evolutionary Economics.

Notes
36.

Actuellement, tout le génome humain est déjà lu ce qui cependant ne signifie pas que nous savons comment chaque gène fonctionne ou quel gène a exactement lancé quelle caractéristique.

37.

SIPA, Columbia University (2003)

38.

Wharton, University of Pennsylvania (2003)

39.

Rensselaer of Economics (2003)