II.2.2.3.2 La contribution de la biologie évolutionnaire pour la géographie, avec l’accent mis sur le développement régional

Il est possible d’identifier la contribution de la biologie évolutionnaire pour la géographie de manière analogue au chapitre II.2.2.2, concentré sur la contribution de la biologie évolutionnaire pour l’économie. D’après le modèle de Nelson (1996) nous allons chercher des voies par lesquelles la biologie évolutionnaire a influencé la géographie surtout dans les deux niveaux : il s’agit de l’inspiration de la biologie évolutionnaire pour des modèles (cette partie n’est pas développée dans le résumé française) et des concepts théoriques.

Il est possible de supposer que la dynamique plus importante attribuée au langage évolutionnaire laquelle Nelson (1996) comprend comme l’un des apports pour l’économie, est utile pour l’économie, géographie et aussi pour d’autres sciences sociales. D’après Nelson (1996), le langage évolutionnaire décrit des changements qui arrivent au cours de l’évolution des diverses structures de façon plus compréhensible et démonstrative. Cet aspect ne sera pas discuté davantage en détail pour la situation en géographie car des conclusions générales du chapitre précédent peuvent en principe être considérés comme valables aussi pour d’autres sciences sociales, y compris la géographie socioéconomique.

Par contre l’inspiration offerte par la biologie évolutionnaire pour certaine modèles et concepts théoriques géographiques a ses spécificités, c’est la raison pour laquelle un chapitre indépendant est réservé à ce sujet. Ce chapitre tente d’esquisser (à l’exception de la façon des applications des concepts de la biologie évolutionnaire) certains caractéristiques de l’évolution comme elle est comprise dans les théories du développement régionale. L’accent est ainsi mis surtout sur la problématique du développement régional. Cela peut être compris comme certaine inspiration implicite de la biologie évolutionnaire.

La manière de la réflexion des aspects évolutionnaires dans les théories du développement régional

Cette partie se concentre sur l’attitude du développement régional à l’évolution en général ou plutôt sur la manière par laquelle des théories du développement régional sélectionnées comprennent l’évolution socioéconomique. L’attention est prêtée notamment aux trois facteurs où une certaine inspiration de la biologie évolutionnaire peut être dépistée, même si ces facteurs représentent plutôt un regard plus général sur l’évolution. Sur la base de ces trois aspects, nous allons discuter l’attitude des théories du développement régional sélectionnées envers le caractère de l’évolution socioéconomique. Il s’agit surtout de ses trois aspects :

Ces aspects peuvent être compris comme certains antipôles et les théories donc inclinent vers l’une ou l’autre extrémité. Souvent, une attitude claire n’est pas évidente et il faut plutôt chercher une position sur l’axe imaginaire dont les extremités représentent deux caractéristiques opposées. L’évaluation n’est souvent qu’indicative et très générale, en se fondant sur certaines caractéristiques mentionnées seulement de manière partielle dans la description de ces théories. L’évaluation non-univoque est liée aussi à la comparabilité difficile des théories du développement régional causée entre autres par de divers niveaux hiérarchiques (par exemple le niveau local et global) ou par une autre orientation de cadre que se soit du point de vue méthodologique, économique ou du point de vue de leur philosophie. Par rapport à la complexité des aspects poursuivis, ces caractéristiques sont peut-être plus facile à saisir dans les théories du développement régional plus complexes. Néanmoins selon Blažek et Uhlíř (2002) ce sont plutôt les théories de caractère partiel qui prépondèrent. Ces théories expliquent l’évolution régionale comme le résultat des influences seulement de certain genre des acteurs ou uniquement au cours d’une période etc. Justement la description et la classification des théories du développement régional de Blažek et Uhlíř (2002) représente un ensemble fondamental pour la classification dans cette thèse. Ce n’était que dans les cas spécifiques qu’une autre littérature concernant les autres théories était prise en considération – par exemple Arthur (1994), David (1985), Boudeville (1966) ou des géographes économiques à orientation évolutionnaire.

Le premier des aspects discutés – la compréhension de l’environnement comme un phénomène plutôt stable ou instable – peut paraître au premier coup d’oeil relativement banal. L’objectif d’intérêt du développement régional est dynamique – cette discipline examine l’évolution des régions, des différences régionales, il donc semblerait que même l’environnement dans ces théories est perçu comme un phénomène changeant. Néanmoins certaines théories ne prennent pas la dynamique de l’environnement au sens plus large en considération. Tout d’abord il faut néanmoins discerner la compréhension de l’environnement au sens plus étroit et plus large. L’environnement plus étroit, c’est-à-dire l’environnement le plus proche, est représenté surtout par les autres acteurs de même niveau hiérarchique, un acteur / sujet étudié peut lui-même les activement influencer et ces sujets l’influencent immédiatement aussi. En revanche, l’environnement plus large, c’est-à-dire l’environnement de niveau plus complexe, est compris au sens des macrostructures complexes qui influencent le sujet étudié principalement d’en haut. Les contre-actions éventuelles actives des acteurs se manifestent donc à mesure plus limité.

La dynamique de l’environnement au sens plus étroit est évident pratiquement dans toutes les théories, d’ailleurs elles sont souvent basées sur l’exploration des interactions entre les structures les plus proches. Du point de vue de l’environnement plus étroit, les mécanismes qui le modifient, sont relativement souvent discutés – par exemple de divers types des mécanismes cumulatifs dans les théories centre – périphérie (surtout Myrdal, Friedman, Hirschman) mais aussi du point de vue du concept path dependence ou dans la nouvelle géographie économique. La même attitude est évidente aussi dans le cas des théories institutionnelles. Les changements de l’environnement au sens plus large n’y sont pas cependant discutés à un tel point, ce qui est causé par le fait que ces théories se concentrent souvent sur le niveau régional ou local. Une autre raison est donnée par l’horizon temporel différent étudié dans ces théories car certaines d’entre elles s’orientent à une période relativement courte qui peut être comprise comme plutôt stable – par exemple la théorie de spécialisation flexible (theory of flexible specialisation). Néanmoins justement la théorie de spécialisation flexible est souvent citée comme un exemple du régime de l’accumulation dans le cadre de la théorie de la régulation qui aspire à la compréhension d’une période plus longue. Dans cette théorie l’environnement au sens plus large est compris comme un phénomène instable. Le même regard de la variabilité de l’environnement peut être perçu dans la théorie du développement de l’évolution inégale (« third cut » of the crisis theory) de Harvey et l’environnement est compris comme un phénomène instable aussi dans les théories des stades de développement et la théorie des cycles où l’on compte avec les « chocs » extérieurs. Ces théories sont plutôt de longue durée mais ce n’est pas seulement ici où l’on discute cet aspect. Le projet ou l’initiative CURS (Changing Urban and Regional System) qui était orienté à la période relativement courte, décrit en principe la réaction des localités au changement du caractère global, c’est-à-dire le changement de l’environnement au sens plus large. L’environnement est ainsi même ici compris comme un phénomène instable. Dans la plupart des autres théories, l’environnement et sa variabilité ne sont cependant pas explicitement saisis et elles sont probablement conçues d’une telle façon qu’au moins pour la période qui est analysée dans cette théorie les conditions externes restent conservées.

La dualité – le gradualisme et le ponctualisme – manifeste nettement l’inspiration de la biologie évolutionnaire car elle reflète deux attitudes différentes des biologistes évolutionnaires envers le caractère de l’évolution. Le gradualisme présuppose que les grandes transformations parviennent de façon graduelle cumulative, alors que le ponctualisme perçoit les changements comme un phénomène rapide et soudain, qui est suivi d’une longue période de repos. Il est en principe possible d’identifier ces conceptions différentes également dans les théories du développement régional, même s’il est difficile dans certains cas d’estimer l’attitude de cadre de ces théories, surtout pour des raisons mentionnées au-dessus – elles ne sont souvent orientées qu’à une période relativement stable et elles ne fournissent ainsi pas de renseignements si l’environnement change et d’autant moins sur le caractère du changement. C’est la raison pour laquelle il est en principe impossible d’établir une classification complète de toutes les théories principales et nous n’allons donc mentionner que celles où il est possible de dépister au moins une certaine tendance.

Le ponctualisme se manifeste de manière intense surtout dans la théorie à orientation néomarxiste de Harvey (« third cut » of the crisis theory) où la vue sur l’évolution de la réalité socioéconomique est même révolutionnaire. L’attitude ponctualiste est nettement évidente aussi dans la théorie de la régulation (Aglietta, Boyer, Lipietz) où les périodes de la crise sont surmontées par l’adaptation des structure existantes aux conditions nouvelles, et probablement également dans les théories inspirées par l’économie néoclassique. Dans ces théories, l’évolution en effet procède en direction des équilibres qui sont cependant perturbés et elle est parvenue aux nouveaux équilibres. Il est possible de déduire des travaux des auteurs de la géographie économique à orientation évolutionnaire qu’ils comprennent également les changements plutôt comme soudains car selon eux les grandes innovations, y compris l’évolution spatiale d’une nouvelle industrie, sont de caractère discontinu.

Le caractère de l’évolution de certaines théories qui sont basées sur l’identification des stades évolutifs peut être en principe décrit comme une combinaison des changements continues et discontinues. Ces théories (par exemple la théorie des stades de Rostow ou la théorie du cycle du profit de Markusen (profit-cycle theory)) décrivent en principe une évolution relativement continue qui a néanmoins démarrée par un stimulant originel fort (la naissance d’une nouvelle branche industrielle pour Markusen et Rostow, pour Rostow aussi l’augmentation du taux d’investissement ou la création d’un nouveau cadre politique ou économique). La conception semblable est évidente également dans la théorie du cycle de vie du produit (product cycle theory) de Vernon car la naissance d’un produit est comprise comme un phénomène forfaitaire.

La situation est plus compliquée du point de vue des théories centre – périphérie. Même si ce groupe fait l’impression d’une homogénéité relative dans de nombreux d’aspects, il est possible de trouver des différences dans cette direction. La tendance la plus forte envers le ponctualisme est probablement dans la théorie de la base d’exportation (export base theory) de North. En réagissant aux théories gradualistes de la croissance régionale, North est persuadé que la région ne passe pas forcément par toutes les étapes de l’évolution mais elle peut « sauter » certaines d’entre elles, à savoir dans le cas que la région trouve un article d’exportation de l’importance suffisante. De l’autre côté, dans la théorie des pôles et des centres de croissance (Perroux, Boudeville), une tendance plus importante vers le gradualisme est plutôt perceptible car la formation des centres de croissance naturels est par ces auteurs comprise comme un processus long et continu. L’attitude semblable apparaît chez Friedmann, Myrdal ou Hirschman car le mécanisme continue a l’air d’être la force motrice principale de la croissance régionale. De l’autre côté, leurs recommandations pour l’aménagement du territoire du niveau régional indiquent plutôt le caractère discontinu des changements (par exemple la localisation d’une industrie motrice) même si c’est le démarrage de l’évolution cumulative en direction désirable qui est attendu. Il est ainsi possible de conclure qu’ils perçoivent l’évolution de façon gradualiste mais leurs recommandations indiquent plutôt le caractère discontinu.

L’évaluation similaire des théories plus nouvelles est encore plus difficile car elles sont orientées plutôt vers la période plus courte qui peut être considérée comme la caractéristique de ces théories et nous ne pouvons en principe qu’estimer ce qu’il a précédé ou succédé cette phase. Cela concerne notamment des directions institutionnelles des théories du développement régional, à savoir surtout les théories du district industriel (industrial disctrict theory) et des régions apprenantes (learning regions theory). Ces théories s’occupent en principe de l’explication des caractéristiques actuelles des régions étudiées sur la base de l’évolution passée. Vu les facteurs étudiés qui nécessitent l’évolution de relativement longue durée – par exemple l’enracinement régional, le sentiment partagé de confiance, les réseaux des contacts locaux, la faculté d’apprendre – il est ainsi possible renvoyer plutôt à la stabilité et la continuité qu’aux changements turbulents de l’évolution. Néanmoins de nouveau, nous ne pouvons qu’estimer comment ils perçoivent l’évolution du point de vue d’une durée plus longue.

L’activité plus importante est caractéristique pour les systèmes de la réalité socioéconomique, au sens : le rapport offensif de l’environnement des systèmes sociaux et sociogéographiques contre le rapport adaptatif de l’environnement des biocénoses (pour les détails voir Hampl, 1998), et ces systèmes ont ainsi une influence plus forte sur cet environnement. Dans l’environnement compris comme l’ensemble des institutions et des organisations socioéconomiques, la détermination d’en haut se manifeste à mesure plus importante, néanmoins en général, il est possible de percevoir l’influence de l’environnement comme moins déterminante que la réalité biologique. Nous pouvons cependant se poser la question comment les théories du développement régional voient l’influence déterminante de l’environnement.

Il semble que la tendance au regard plus libéral sur l’influence de l’environnement du point de vue de la mesure du déterminisme est claire, car les théories plus nouvelles le comprennent comme moins déterministe que les plus anciennes. La charge plus déterministe est évidente dans les théories de l’inspiration néomarxiste où la possibilité du choix d’un individu est en principe négligée. Markusen dans sa théorie du cycle du profit (profit-cycle theory) comprend les causes des problèmes régionaux comme non-régionaux ce qui influence de manière négative aussi le regard sur l’activité potentielle des acteurs vers la solution de ces problèmes. La mesure marquée du déterminisme est caractéristique aussi pour la nouvelle géographie économique où il est possible de trouver une inclination au fatalisme dans certaines explications de l’évolution régionale car certains aspects stochastiques avec les impacts vastes sont perçus comme le stimulant le plus fort. Cela concerne surtout des concepts path dependence (bien que le déterminisme aussi fort n’est pas commun pour tous les auteurs qui s’en occupent, par exemple la forme plus modérée apparaît chez David (Blažek, Uhlíř, 2002)). Une dose de déterminisme considérable est implicitement contenue aussi dans les théorie centre – périphérie car des mécanismes cumulatifs réagissant sur un stimulant originel sont d’une importance considérable. Le déterminisme de la théorie de North est partiellement limité car il admet la possibilité d’une participation active de la région pendant la recherche d’un nouvel article d’exportation. Autrement l’influence sur les acteurs est néanmoins en principe aussi de caractère déterministe. De façon semblable, il est possible de percevoir le régime de l’accumulation dans le cadre de la théorie de la régulation, c’est-à-dire en principe l’adaptation au changement des conditions internes ou de l’environnement extérieur.

Les approches du réalisme critique dans les théories du développement régional attribuent une grande importance au rôle d’un individu. Le niveau du déterminisme plus bas est évident dans la théorie des divisions spatiales du travail (theory of spatial division of labour) de Massey car elle admet la possibilité de l’existence de plusieurs formes de travail (Blažek, Uhlíř, 2002). Elle aborde le déterminisme très rationnellement car elle reflète un certain ordre hiérarchique de l’environnement. Des rapports de production sont ainsi un aspect fortement déterministe pour elle, par contre des rapports spécifiques permettent une certaine activité. L’importance encore plus forte de l’activité d’un individu est évidente dans les théories du district industriel (industrial disctrict theory) et des régions apprenantes (learning regions theory). L’accent mis sur l’activité des acteurs est encore renforcé dans le cas de l’initiative CURS (Changing Urban and Regional System) où il s’agit davantage de l’activité des acteurs de l’aménagement du territoire au sens de la représentation locale, etc., que de l’activité au niveau des individus (Blažek, Uhlíř, 2002). Pourtant, il est possible de comprendre l’environnement au sens plus large comme un élément déterminant car toutes ces activités sont causées par les changements globaux forts et les acteurs ne doivent que choisir comment réagir. Les géographes économiques à orientation évolutionnaire se sont détournés du déterminisme encore plus fortement avec leurs concepts de WLO ou weak selection et des résultats spatiaux sont expliqués davantage de façon probabiliste que déterministe. Par exemple ils sont de l’avis que les caractéristiques de la région ne peuvent pas prédestiner son développement prochain. Selon eux, le succès de la région est fortement influencé par le hasard et dans les étapes suivantes par la capacité de la région de s’adapter et par l’initiative des acteurs locaux.

Une tendance vers l’un des pôles des dualités discutées ne signifie forcément pas que cette théorie peut être marquée de caractère plus ou moins évolutif. Cette tendance exprime en principe notamment son regard sur le caractère de l’évolution de la réalité soccioéconomique. C’est surtout la situation du gradualisme contre le ponctualisme car les deux attitudes existent aussi dans la biologie évolutionnaire comme il est mentionné ci-dessus. La situation similaire concerne la mesure du déterminisme de l’environnement dans les théories étudiés du développement régional. L’influence fortement déterministe sur l’environnement s’approche davantage de l’attitude de la biologie évolutionnaire, par contre le déterminisme plus réduit répond au rôle plus actif attribué aux acteurs dans la réalité socioéconomique. La compréhension de l’environnement comme un phénomène plutôt stable ou instable est liée plutôt à l’horizon temporel d’une certaine théorie même si la conscience des changements incessants est importante surtout pour des implications pour l’aménagement du territoire, comme il est discuté dans le chapitre II.3.

Exemples de l’utilisation de plusieurs concepts de la biologie évolutionnaire dans la géographie, notamment dans le développement régional

Stoddart (1966) avait essayé une certaine généralisation de l’approche des concepts de la biologie évolutionnaire pour la géographie quand il avait identifié quatre concepts fondamentaux dont l’origine peut être dérivée de la biologie évolutionnaire même s’ils peuvent être compris comme des sujets plus généraux. Ces lignes d’idées ont certainement influencé toute la géographie, la composante de la géographie physique incluse, nous nous limiterons néanmoins à l’influence sur la géographie sociale. (1) Le concept d’un changement dans le temps, ou plutôt du temps et de l’évolution a inspiré selon Stoddart par exemple certaines interprétations historiques du développement technologique. (2) L’idée de l’organisation avait produit surtout tel effet sur les géographes qu’elle avait attiré l’attention sur le rapport mutuel et sur les liens entre des organismes et leur environnement ce qui évoque surtout l’écologie les organismes et l’écologie comme la discipline scientifique. Selon Stoddart l’importance de l’analogie de l’organisme consiste dans le fait qu’elle sert notamment d’un sujet unificateur pour la géographie régionale. (3) Les concepts de la lutte et de la sélection ont été attractifs surtout pour l’explication ou plutôt pour la justification de certaines politiques – aussi sous la forme du darwinisme social. (4) Le caractère fortuit et le hasard (randomnesss and chance) n’influencent la pensée géographique qu’au tournant des années 50 et 60 et dès lors les applications des idées darwinistes à la géographie peuvent être prises pour fortement déterministe.

Vu le sujet principal de la thèse, dans ce chapitre l’attention sera dirigée sur les concepts de la biologie évolutionnaire utilisés avec l’orientation vers le développement régional. Ce chapitre néanmoins ne représentera pas un résumé complet de tous les concepts de la biologie évolutionnaire utilisés dans toutes les sphères du développement régional. De manière analogue comme dans le cas des concepts appliqués en économie, nous avons plutôt pour le but d’illustrer l’utilisation des concepts évolutionnaires les plus connus pour les thèmes du développement régional comme l’inspiration pour les applications des autres concepts dans la partie suivante.

D’une manière semblable comme dans le cas de l’économie, la littérature pertinente sera classifiée sur la base des concepts de la biologie évolutionnaire qui y ont étés utilisés, à savoir selon les sujets biologiques plus généraux : la sélection, l’adaptation, la coévolution et la diversité. Certains de ces concepts biologiques sont au sens plus large de portée plus générale et ne se limitent pas uniquement à la problématique de la biologie évolutionnaire. Actuellement il est difficile de se figurer que la biologie évolutionnaire puisse s’approprier les concepts comme la sélection, néanmoins il semble indéniable que c’était dans la biologie évolutionnaire où ces concepts ont été identifiés et par l’intermédiaire de cette discipline ils ont été appliqué dans les autres domaines.

Cette approche a en principe les mêmes points forts et faibles comme dans le cas analogue du chapitre qui concerne des concepts de la biologie évolutionnaire appliqués aux sujets économiques. En premier lieu, ce résumé n’a que le rôle représentatif. Certainement il est impossible d’en conclure que les auteurs préfèrent ou sont convaincus que seulement les concepts qui y sont cités sont applicables ou qu’ils sont applicables seulement de la façon décrite. Les sujets discutés sont souvent interliés, il est donc très difficile de séparer des problèmes qui sont mutuellement liés (par exemple la définition de la sélection est étroitement en relation avec l’adaptation et la diversité). En plus, ce résumé ne peut pas être complet. Comme en économie, une inclination à cette attitude de pensée se manifeste chez certains auteurs qui combinent différemment ces concepts. Le but de ce chapitre est de démontrer au moins sur quelques cas comment ces applications sont réalisées.

Le fond des concepts et dans la biologie évolutionnaire et dans le développement régional n’est expliqué que très brièvement. Le cadre biologique des concepts appliqués à la problématique du développement régional est davantage discuté dans les chapitres suivants qui s’efforcent de montrer des applications directes au développement régional. Pour les autres concepts biologiques, vu le volume limité de la thèse, il faut s’adresse à la littérature biologique cité dnas le texte. Dans le cas des concepts du développement régional, seulement ceux qui sont moins connus sont expliqués (par exemple le concept WLO).

La sélection

La sélection est un sujet relativement fréquent dans les travaux des géographes économiques à orientation évolutionnaire. Ils comprennent ce concept en général comme un certain mécanisme filtrant qui choisit des arrangements qui sont dans une certaine mesure fortuits. Pour Hampl, Ježek et Kühnl (1978), la sélection est un processus du rétrécissement de l’ensemble des centres régionaux au cours de la formation d’une hiérarchie des centres. Les géographes économiques à orientation évolutionnaire attribuent la sélection au rôle de l’environnement qui est perçu comme un facteur influençant le développement d’une région. L’environnement local détermine, selon Lambooy et Boschma (2000), dans une certaine mesure les possibilités accessibles et les résultats probables. Les institutions font naturellement une partie d’un tel environnement sélectif, elles choisissent néanmoins, en accord avec la trajectoire évolutive existante, des variantes existantes, règlent le comportement des acteurs et influencent également la capacité innovative de l’environnement. Cet environnement limite en même temps de nouvelles trajectoires qui s’écartent des trajectoires existantes établies.

L’environnement local est en lui-même un mécanisme sélectif qui se développe de façon dynamique. Selon Boschma et van der Knaap (1997), l’environnement peut être un mécanisme de déclenchement même de larges innovations mais beaucoup plus souvent, les impacts de l’environnement local sur la localisation d’une nouvelle industrie sont plutôt faibles à cause de la discordance avec ses besoins, souvent aussi pour son incapacité de les définir précisément. Il est présumé que la localisation première d’une industrie est accompagnée seulement par la sélection, soi-disante faible (weak selection). Selon ce concept il est incertain où une nouvelle industrie va émerger. Il est possible de présenter d’abord certaines conditions favorables mais ces conditions sont souvent d’un caractère assez général, c’est la raison pour laquelle le hasard a un rôle important dans cette phase. Après la localisation d’une industrie, l’évolution cumulative et fortifiante qui peut stimuler la formation des conditions spécifiques pour le type d’une technologie ou d’une industrie va suivre. Ces auteurs sont donc de tel avis qu’un mécanisme sélectif n’explique pas lui-même un succès ou un échec des environnements locaux pour la création des nouvelles technologies entre autres à cause de la discordance a priori entre des conditions existantes et des exigences d’un nouvel environnement.

Grabher et Stark (1997) ont choisi une autre unité de la sélection ; ils travaillent avec des formes de l’organisation. Ils attirent l’attention sur le fait que la sélection de l’unité la plus apte (ils utilisent le terme biologique « fittest ») est effectuée par l’environnement actuel qui se néanmoins toujours développe, cette unité ne peut pas donc être assez vigoureuse pour un nouveau contexte. Ils appliquent ce fait à la sélection des formes de l’organisation pour la période de la transformation des pays de l’Europe centrale et orientale.

L’adaptation

Le terme de l’adaptation est également connu dans les théories du développement régional. Par exemple selon Blažek et Uhlíř (2002) les périodes de la crise en connexion avec la théorie de la régulation « …sont tôt ou tard surmontées grâce à l’adaptation des structures existantes et des formes institutionnelles. » (p. 126, le texte original en tchèque). L’adaptation dans le contexte des sciences sociales le plus souvent signifie et une assimilation active des institutions existantes et la survie de celles qui sont les plus aptes. Le résultat est cependant le même comme en biologie – un changement se passe, dans le cas des structures sociales un changement dans la composition de la société.

Les géographes économiques à orientation évolutionnaire comprennent l’adaptation de façon plus active qu’en biologie. Étant donné que selon eux il est impossible de trouver des conditions vraiment favorables pour la localisation des nouvelles industries, le concept WLO accentue la capacité des régions à s’adapter (leur adaptabilité) qui est selon eux pour la localisation des industries plus importante que les conditions initiales potentiellement favorables. Selon Boschma et van der Knaap (1997), il y a beaucoup de régions qui ont des problèmes à s’adapter aux nouvelles occasions car leur spécialisation ne leur permet pas un changement flexible. Les régions fortement spécialisées peuvent donc stimuler un comportement fortement spécialisé des trajectoires existantes qui font obstacle au passage dans une nouvelle orientation (Lambooy, Boschma, 2000). Le projet CURS attache aussi l’importance clée à l’activité des acteurs en réaction aux processus globaux. Les auteurs du projet (sous la direction de Cooke) étaient certains que les localités peuvent profiter des occasions offertes et qu’il dépend de leur activité et de leur expérience avec l’intervention précédente (a savoir la tradition de la coopération) comment ils vont réussir (Blažek, Uhlíř, 2002).

La capacité des régions de s’adapter a été soulignée également par le groupe appelé GREMI (Groupe de Recherche Européen sur les Milieux Innovateurs). Celui-ci s’est intéressé au développement d’après-guerre, plus précisément à la création des clusters des entreprises verticalement désintégrées, spécialisées dans une discipline spécifique technologiquement développée et il a caractérisé ces régions (Troisième Italie, Silicon Valley) comme un milieu innovateur. Dans ce milieu innovateur les rapports suffisamment cohérents entre des acteurs, la culture spécifique et le processus dynamique d’apprentissage stimulent la création des nouvelles variantes et le processus innovateur (Boschma, Lambooy, 1999).

L’incapacité de s’adapter, donc de s’accommoder aux nouvelles tendances même si elles peuvent offrir les conditions pour le développement beaucoup plus avantageuses, est en principe ancrée aussi dans le concept path dependence. Les pionniers de ce concept, à l’origine économique et plus tard avec les implications dans le développement régional (voir le chapitre II.3.4), étaient Arthur (1987, 1989) et David (1985). Il ne s’agit pas autant d’un mécanisme de déclenchement qui démarre une certaine tendance évolutive mais d’un changement difficile de cette tendance dans le cas d’une nouvelle occasion avantageuse. Cela est lié à la spécialisation à l’impulsion originale et en principe à l’adaptation à un nouveau stimulus. L’adaptation est au cours du temps ancrée dans sa propre évolution et la flexibilité suffisante ou l’adaptabilité aux nouveaux stimuli manquent a ce phénomène socioéconomique suivi.

La coévolution

Le concept de la coévolution exprime en biologie l’évolution simultanée de plusieurs espèces ou d’une espèce et de son écosystème. C’est notamment l’interaction mutuelle, ce qui signifie dans une certaine mesure aussi la dépendance des deux composants, et le rapport différent de ces composants des niveaux différemment complexes (les éléments jusqu’aux complexes, en accord avec la classification de Hampl (1998)) qui sont importants.

Dans les théories du développement régional, ce rapport n’est pas du tout rare même s’il n’est pas considéré comme une coévolution. Les liaisons de ce genre peuvent être trouvées dans la théorie de la base d’exportation (export base theory) de North quand le développement d’un article d’exportation est étroitement lié au secteur des services et vice versa. Dans le même sens il est possible de comprendre le modèle des deux secteurs (Borts et Stein, 1964) comme coévolutionnaire, quand le développement du secteur d’exportation et de celui qui est orienté vers le marché intérieur sont interliés, l’attitude semblable apparaît dans la théorie des pôles et des centres de croissance où « une industrie motrice » et « une industrie conduite » s’influencent mutuellement (Perroux, 1950, Boudeville, 1966), dans la théorie du développement inégal (Hirschman, 1958) qui porte sur le développement des deux types fondamentaux de régions – le Nord versus le Sud, et dans la théorie du développement polarisé (Friedmann, 1966) où le centre et la périphérie représentent ces types de régions. Un élément important que toutes ces théories ont en commun (même s’il a également beaucoup de différences entre elles, l’essentielle concerne leur classification fondamentale – les théories néoclassiques versus les théories du groupe centre - périphérie) représente l’exploration du rapport mutuel – et des deux industries productrices ou des deux régions, c’est-à-dire en principe des relations coévolutionnaires. Justement ce cas est davantage développé dans le chapitre II.3.2 de la vision tchèque.

Certains éléments de la coévolution peuvent être tracés aussi dans la théorie des régions apprenantes où le développement des régions est interprété en relation avec l’existence de l’environnement de l’innovation donc des entreprises ou des institutions profitent. Dans le cas où les relations plus profondes sont développées, elles fortifient par un effet rétroactif l’environnement de l’innovation ou de toute la région.

Selon les géographes économiques à orientation évolutionnaire (Boschma, Lambooy, van der Knaap), le concept de coévolution est appliqué aussi en relation avec le changement technologique. Ce changement devrait être compris selon eux comme un phénomène qui est en interaction avec le contexte spatial.

La diversité

La diversité en biologie est comprise comme un « combustible » pour la sélection car sans elle l’évolution s’arrêterait. Grabher et Stark (1997) se rallient à cette perspective biologique. En appliquant ce concept à la problématique des formes d’organisation, ils arrivent à la conclusion que davantage de trajectoires évolutionnaires diminuent le risque d’une « impasse » évolutionnaire.

Lambooy et Boschma (2000) ont essayé de proposer un certain mode d’emploi pour les acteurs régionaux qui doivent faire face à l’incapacité des régions de s’adapter aux nouvelles conditions qui sont dues à la spécialisation trop rigide. Les régions caractérisées par la diversité des secteurs assurent selon Boschma et Weterings (2005) des impulsions pour les nouvelles idées. Selon eux le plus efficace est d’assurer la soi-disante variété apparentée (related variety). Il s’agit de la variété dans le cadre du secteur, donc au niveau des sub-secteurs économiques. Frenken et el. (2004) ont empiriquement prouvé que dans les régions avec la variété apparentée, le taux d’emploi augmente plus rapidement et le taux de chômage plus lentement.

Moyens d’application des concepts évolutionnaires à la problématique du développement régional

Dans la plupart des théories classiques du développement régional, les références aux concepts de la biologie évolutionnaire sont principalement implicites. Cela signifie qu’il est possible de comparer la situation décrite à un certain concept biologique mais les auteurs de cette théorie n’y renvoient pas directement. Il s’agit le plus souvent des thèmes qui apparaissent fréquemment aussi en dehors de la biologie évolutionnaire et ils donc créent probablement un certain cadre général et pour la biologie et les sciences socioéconomiques de la même façon que Winter (1987, In : Hodgson, 2003b) où certains autres auteurs étant d’accord avec le soi-disant darwinisme général (generalized darwinisme) – basé sur l’idée que les principes clés de l’évolution fournissent un cadre général théorique pour la compréhension du changement dans l’évolution dans tous les domaines (par exemple Essletzbichler, Rigby, 2007, Hodgson, 2002, Hodgson, Knudsen, 2006b) – en sont convaincus. C’est d’ailleurs en accord avec l’idée de Hampl de l’importance de la théorie de l’évolution car Hampl (1988) est convaincu qu’elle peut être comprise dans beaucoup d’aspects comme « la synthèse la plus importante dans la connaissance scientifique existante de la réalité » (p. 37, le texte original en tchèque).

Une exception représente des réflexions des géographes économiques à orientation évolutionnaire où des liaisons avec les concepts de la biologie évolutionnaire sont déjà de caractère explicite. Néanmoins toujours, il ne s’agit pas de l’application directe d’un tel concept mais de l’utilisation des constatations de l’économie évolutionnaire pour la problématique du développement régional. Ce transfert par l’intermédiaire de l’économie par l’économie a des points forts et des points faibles. Un côté positif est donné par le fait que cette attitude ouvre l’espace pour de nouveaux concepts et perspectives. Il est aussi avantageux que les méthodes et les façons de l’application à la problématique de la réalité sociale sont ainsi vérifiées. De l’autre côté, le développement régional emprunte les concepts déjà utilisés et ne cherche pas l’application directe des concepts de la biologie évolutionnaire.