II.3.1.3.2 Le concept la préadaptation et les sujets choisis du développement régional

Le concept de la préadaptation ne s’utilise pas dans le développement régional bien qu’il puisse contribuer à l’explication au moins de certains aspects de la spécialisation régionale. Les applications sont fondées aussi dans ce cas surtout sur le niveau métaphorique. De manière analogue comme dans le cas des traits adaptatifs et non-adaptatifs, il ne faut probablement pas chercher un autre terme car le terme biologique est relativement compréhensible et en plus il exprime des rapports au terme de l’adaptation qui est aussi dans la réalité socioéconomique couramment utilisé.

Avant de discuter la conception même du concept étudié dans le développement régional, il faut s’arrêter auprès d’un trait caractéristique de l’évolution régionale qui l’approche par sa nature de l’évolution biologique davantage que par exemple la progression technologique ce qui peut probablement avoir une plus grande influence sur l’importance de la préadaptation pour le développement régional. Les régions, de façon semblable comme des espèces biologiques, portent toute leur histoire avec elles et elles ne peuvent effacer aucune de ses parties. Les étapes historiques particulières dans l’évolution des régions se sont manifestées par la formation des structures (non seulement dans le sens de l’infrastructure physique, il s’agit aussi ou surtout de diverses caractéristiques socioéconomiques et culturelles, comme par exemple l’éducation dans un certain domaine ou la façon de la pensée) qui restent dans la localité même après la fin de la période qui a imposé leur création. Les nouvelles directions de la progression cependant doivent en majorité sortir de la configuration existante. De façon semblable comme des espèces biologiques au cours de l’adaptation à un environnement « modifient » (conformément à la conception passive d’adaptation expliquée plus haut) un organe ou leurs mode de vie, elles ne peuvent pas faire le retour même si cela serait plus avantageux. Elles doivent fonder d’autres modifications éventuelles sur l’état actuel. Cela peut représenter de nombreuses désavantages dans certains cas car ces structures peuvent empêcher la création des adaptations éventuelles plus flexibles qui peuvent mieux correspondre à un autre changement de l’environnement. Néanmoins il est impossible de retourner à un aspect qui a peut-être été plus propice mais s’est déjà transformé par une nouvelle adaptation. Si l’une région veut changer sa spécialisation et passer par exemple d’une spécialisation à l’industrie d’extraction vers la microélectronique, il est impossible de démolir toute l’infrastructure technique qui ne convient pas à ce nouveau but, il est impossible de modifier la structure de l’éducation de la population du jour au lendemain (la modification de l’infrastructures « molle » est encore plus difficile, surtout quant aux connaissances non-codifiées et d’autres aspects difficilement définissables).

La situation des firmes, des organisations socioéconomiques et du développement technologique est de ce point de vue plus simple. Les entreprises en effet peuvent refuser certaines de leurs adaptations dans une certaine mesure, faire le retour vers le stade préalable (par exemple d’abolir des usines obsolètes, licencier des employés avec l’éducation qui laisse à désirer et embaucher les autres dont l’éducation est plus satisfaisante) et renouer avec la fabrication interrompue plus ancienne d’un produit ou de développer une technologie jadis abandonnée. Il est aussi possible d’interrompre à une certaine date un fonctionnement d’une entreprise – au cours d’un inventaire, un congé de tout l’établissement, etc. – l’entreprise n’est pas en service à une certaine date et pourtant elle fonctionne complètement après cette période. C’est néanmoins impossible dans le cas de régions. Tous les investissements ne peuvent pas être déposés dans la formation d’un nouveau centre technologique. La région ne peut pas arrêter de financer toutes les autres fonctions et services qu’elle assure pour ses habitants. Et pas plus qu’une partie limitée des ressources qui lui reste pour de nouveaux investissements peut être progressivement, pas à pas insérée dans un nouveau but et peut stimuler des petits changements qui vont renouer avec l’état existant. Le développement doit avancer de manière qui assure le fonctionnement de tout le système dans tous les moments47.

Il est cependant possible de présumer que ce caractère de l’évolution des régions n’apporte pas seulement des désavantages ; une longue histoire d’une région peut offrir aussi des avantages, sous la forme des préadaptations socioéconomiques. Certaines structures existantes qui étaient formées à l’origine dans un autre but peuvent plus tard contribuer à remporter un avantage dans la concurrence quant à une nouvelle orientation car il n’est pas nécessaire de construire tout le cadre depuis le début. Il peut s’agir d’une infrastructure « dure » (de caractère d’investissement) mais cela peut être encore plus important quant aux aspects « mols » dont l’ancrage dans la région peut être de caractère de longue durée. Quant à cette catégorie, des facteurs comme l’éducation, des diverses caractéristiques sociales, culturelles ou de comportement y appartiennent (par exemple la franchise des innovations ou d’autres cultures, le degré de confiance, l’ambiance sociale).

Ce concept peut donner l’impression qu’il est possible de considérer comme la préadaptation pratiquement quoi que ce soit à l’origine déterminé à un autre but mais plus tard par hasard convenable aussi pour une nouvelle utilisation. Il faut essayer de préciser la position de la préadaptation pour que ce concept ne soit pas pris pour banal. Cela va probablement nous ramener à constater qu’il est possible d’identifier seulement un nombre limité des vraies préadaptations.

Tout d’abord il faut exclure toutes les structures qui peuvent être considérées comme polyfonctionnelles, éventuellement celles où il n’y a eu qu’une modification – adaptation modérée pour l’acquisition d’une nouvelle fonction.

Les structures qui ont une application universelle, aucunement spécialisée, peuvent être comprises de même manière. Elles sont liées à l’évolution socioéconomique de la région et l’amélioration de la qualité de vie. Cela concerne par exemple l’accessibilité de transport du centre de région ou le taux du fait de savoir lire et écrire de la population.

Il faut délimiter la position de la préadaption aussi du point de vue des autres concepts liés à la spécialisation industrielle. Ce concept ne devrait pas être confondu au moins avec les économies d’agglomération, le concept de l’hasard ou avec les facteurs de localisation. Les économies d’agglomération représentent les structures avantageuses dans la région, liées á l’état actuel, à la présence de l’environnement d’entreprise favorable qui sont désignées à l’exploitation actuelle. La préadaptation indique en revanche plutôt une spécialisation historique et des phénomènes qui sont par hasard utiles mêmes sous les nouvelles conditionnes mais qui n’étaient pas construits avec le but de supporter un développement contemporain.

La préadaptation ne peut pas non plus remplacer le concept du hasard pour lequel il était relativement difficile de trouver sa position dans les sciences sociales. Une préadaptation ne détermine ni la création, ni le développement d’aucune activité, de l’autre côté les éléments conditionnés par la préadaptation ne peuvent pas être considérés comme fortuits. La préadaptation n’a pas apparu par hasard dans une région, mais elle était liée à l’évolution précédente. Le hasard est sans le moindre doute un facteur important mais l’explication menée dans ce sens peut être dans certains cas trop simplifiante. Elle peut produire une impression que les phénomènes sont fortuits au moment où on n’a pas d’autre explication. A l’aide de la préadaptation, il est possible d’arriver d’un pas plus loin et de rétrécir cet ensemble aux événements vraiment fortuits.

La préadaptation ne peut pas non plus être confondue avec les facteurs de localisation traditionnels. Ils fournissent une explication de l’état primordial des activités industrielles et avec un peu d’imagination il est possible de les comparer à l’état primaire de succession écologique48. Ces activités industrielles profitent des conditions primaires d’une localité et en principe il s’agit de la présence primaire d’une industrie. Les facteurs de localisation néanmoins perdent de leur importance car la localisation d’une industrie est souvent davantage conditionnée plutôt par des facteurs socioéconomiques, avec l’accent mis sur l’éducation, la flexibilité de la main d’œuvre, etc.

Il faut mentionner encore une autre dimension de la préadaptation dans la description biologique, à savoir son influence sur la vitesse de l’évolution. Grâce à la préadaptation, il n’est pas en effet nécessaire de créer toutes les structures de nouveau pour tous les changements de l’environnement. L’évolution socioéconomique est considérée comme la plus rapide (par exemple Wilson, 2000, Hodgson, 2002, 2001, Hampl, 1998) et cette vitesse plus importante est causée par beaucoup de facteurs. Il est possible de présumer que les préadaptations socioéconomiques peuvent probablement accélérer l’évolution dans un sens désirable dans une certaine région car il ne faut plus créer des structures de soutènement pour cette orientation. Et cela en dépit du fait que son influence sur la vitesse d’ensemble de l’évolution socioéconomique, dûe, selon Hampl (1998), à l’interconnection progressive des tendances évolutives aux niveaux différemment complexes et au degré plus important de l’action inverse des éléments sur le niveau plus complexe, n’est pas probablement très importante.

Dans le contexte mentionné plus haut, il faut donc comprendre le cas suivant décrivant la spécialisation industrielle de la région Rhône – Alpes.

Exemple 1 : La production de la soie comme une préadaptation pour un autre développement
Exemple 1 : La production de la soie comme une préadaptation pour un autre développement

Le concept de la préadaptation indique des avantages possibles de la spécialisation précédente, et ce n’est pas actuellement un point de vue tout à fait ordinaire. Les régions structurellement défavorisées restent toujours l’objet d’intérêt des politiques d’aménagement du territoire nationales et la politique régionale (la polituque de la cohésion économique et sociale de l’Union européenne) et des institutions ossifiées, des routines mais aussi une infrastructure physique non-utilisée de la spécialisation précédente sont en principe comprises comme une barrière pour un autre développement. Même si dans certains cas, la construction des nouvelles structures de fond en comble peut être plus facile, cette approche ne devrait pas devenir universelle. En plus certaines structures, surtout les « molles » ne peuvent pas être éliminées, l’élimination serait trop coûteuse ou cela prendrait trop de temps. Sous certaines conditions, la spécialisation préalable peut représenter un avantage de compétition qui peut assurer une avance pour cette localité. L’un des devoirs de l’aménagement du territoire pourrait donc probablement être aussi la recherche des préadaptations possibles, au sens de la nouvelle exploitation pour des structures non utilisées (même si dans une certaine mesure cette orientation de l’aménagement du territoire déjà existe – par exemple la politique de la revitalisation des brownfields).

Tableau 1 : Résumé des applications des concepts de la biologie évolutionnaire en relation avec l’adaptation des thèmes sélectionnés du développement régional
Le concept biologique L’intensité de l’utilisation précédente dans le développement régional Le mode de l’application et le niveau hiérarchique convenable Les caractères fondamentaux de l’application proposée
Les implications pour la politique de l’aménagement du territoire
L’adaptation ● Utilisée de manière relativement intense ● le niveau analogique et métaphorique
● tous les niveaux (l’acteur, la pluralité des acteurs, l’environnement plus large)
● l’adaptation dans le sens de l’accommodation active et consciente et en même temps dans le sens de la contre-action offensive
● en se décidant, les sujets tentent de prévoir les changements futurs et l’orientation future de l’environnement
● les sujets se décident avec la connaissance des circonstances surtout de l’horizon à court terme, leur décisions peuvent néanmoins avoir des conséquences imprévues de la perspective à moyen ou longue terme
● les conséquences complexes des adaptations vastes au niveau hiérarchique plus élevé (par ex. la spécialisation des régions) et au bout du temps le changement inévitable qui peut détruire des côtés positifs de ces adaptations – il est convenable d’envisager un dilemme entre le niveau de la spécialisation et le niveau de la diversification – dans le sens de la spécialisation plus large visée de région – comme une prévention des changements de l’environnement
Les traits adaptatifs / non-adaptatifs ● jusqu’à présent non utilisée ● le niveau analogique et métaphorique
● possible dans tous les niveaux
● les caractéristiques qui figurent dans certain contexte comme avantageuses, émergeant dans son environnement comme le résultat de l’adaptation, représentent les traits adaptatifs
● les trais adaptatifs peuvent devenir désavantageux après un changement de l’environnement du point de vue temporel et géographique, c’est-à-dire non-adaptatifs (le sens opposé aussi possible)
● dans le cas d’une tentative de l’application des démarches éprouvées dans d’autres régions, il est nécessaire d’analyser non seulement l’intervention mais aussi les deux environnements (le nouvel et celui d’origine)
● le concept renforce l’importance de la spécificité des interventions de la politique de l’aménagement du territoire pour une certaine localité
La préadaptation ● jusqu’à présent non utilisée ● le niveau métaphorique
● surtout le niveau régional (vu les spécificités de l’évolution régionale)
● la structure (l’infrastructure physique ou les caractéristiques socioéconomiques et culturelles) à l’origine déterminée pour un autre but mais plus tard par hasard convenable aussi pour la nouvelle utilisation
● le concept ne devrait pas être confondu avec les structures au début polyfonctionnelles, les structures qui ont une application universelle ou les structures progressivement adaptées, ce concept ne devrait pas être confondu avec les économies d’agglomération, le concept du hasard ou avec les facteurs de localisation
● le concept permet avant tout de comprendre des spécialisations précédentes souvent mal perçues non seulement comme des problèmes structurels ou comme des barrières d’un autre développement mais il permet une interprétation potentiellement positive
● la préadaptation peut représenter dans certains cas une avantage de compétition qui peut probablement accélérer l’évolution dans un sens désirable

Notes
47.

Il est pourtant impossible de denier l’existence des changements évolutifs radicaux, comme des guerres, des crises globales, des désastres naturels, etc., qui ont le caractère de sauts et qui ne permettent pas de maintenir la continuité dans tous les aspects.

48.

La succession écologique primaire représente le processus lent de l’évolution et du développement des biocénoses (des communautés vivantes) de l’écosystème d’un stade initial, c’est-à-dire d’un territoire qui n’était pas jusqu’au moment colonisé – par exemple sol vierge ou après l’éruption d’un volcan (Rosypal et al., 2003).