II.3.4.2.2 Les barrières socioéconomiques – les « MIR » socioéconomiques

La diffusion des informations ou des innovations demande que la structure qui transmet et que celle qui accepte soient au moins dans une certaine mesure semblables, autrement la transmission ne peut pas être effectuée (Magnusson, Ottosson, 1997). Les deux structures doivent être compatibles. Le transfert des informations dans une région et avec cela la capacité d’apprendre et d’innover sont influencés par l’existence des réseaux de contacts entre les acteurs pertinents (Blažek, Uhlíř, 2002), et en même temps par la qualité et par le contenu de ces contacts, y compris la confiance pour la plupart des transactions économiques (Blažek, Uhlíř, 2002). L’existence seule de ces réseaux de contacts n’est pas suffisante au succès d’une région (Blažek, Uhlíř, 2002). L’interconnection aux niveaux locaux et régionaux ne suffit pas pour la génération et la transmission des innovations quelle que soit la qualité de cette interconnection. La connectivité globale, c’est-à-dire l’interconnection avec les réseaux pertinents éloignés devient de plus en plus importante (voir Cooke et al., 2006). Le principe de la diffusion ou de la « non-diffusion » est essentiellement la compatibilité ou la non-compatibilité d’un phénomène et avec structure où il devrait être implanté (voir aussi le chapitre I.3.3.2 La compatibilité avec l’environnement de la version tchèque). Si l’une transmission est arrêtée, éventuellement si elle n’est pas initiée, cela signifie que ces réseaux y sont manquants ou bien qu’il y un obstacle objectif qui l’interrompt. Ces barrières de la diffusion ou du développement qui se sont développées suite à l’évolution à long terme d’un autre phénomène, peuvent être comprises comme les « MIR socioéconomiques ». Elles se sont développées de manière semblable au cas de la spéciation des espèces, c’est-à-dire comme une adaptation progressive à un certain phénomène. La trajectoire choisie est renforcée par la suite et protégée.

Il est possible de trouver une idée similaire chez Checkland (1976) qui a analysé l’évolution de l’industrie navale de l’Écosse et a essayé d’y appliquer le concept appelé upas tree effect. Les légendes sur cet arbre décrivent de manière pittoresque quel danger cet arbre cachait pour ses alentours car il distillait un poison qui a décimé toute la végétation sur un périmètre de quelques mètres et même les animaux qui se sont approchés de lui. La réalité est un peu moins effrayante. Son lait de latex est vraiment toxique, il a même servi à la production des flèches empoisonnées, néanmoins il n’a pas dévasté ni la faune, ni la flore de ses alentours.

Checkland présume que l’industrie navale de l’Écosse a eu un effet destructif semblable à l’upas tree des légendes car il n’a permit le développement d’aucune autre industrie et a provoqué une forte crise structurelle dans la région. Il est aussi possible de l’interpréter de façon que la région spécialisée dans l’industrie navale a été fortement locked-in. Beaucoup de structures qui ont d’abord renforcé la position de cette industrie ont été créées, pourtant ces structures construites par le processus path dependence ont plus tard représenté les barrières pour un autre type de l’industrie dont la localisation fut envisagée dans cette région.

Les MIR socioéconomiques présentent ainsi avec moins de déterminisme une certaine analogie avec le concept upas tree car ils essayent d’expliquer quels obstacles peuvent se produire à l’égard des innovations au cours de l’évolution à long terme d’une certaine industrie, éventuellement d’un autre phénomène socioéconomique. Pour la tentative de leur identification et classification, nous allons nous inspirer de la classification des MIR biologiques. Le terme « les MIR » – les mécanismes d’isolement reproductif – perd naturellement dans le contexte socioéconomique son importance d’origine. C’est la raison pour laquelle le terme « les barrières socioéconomiques » est utilisé ci-après (voir le texte plus détaillé au-dessous). Comme il est mentionné plus haut, vu le contexte complètement différent des deux concepts, l’application se passe naturellement au niveau de la métaphore.

Les modes possibles de classification des barrières socioéconomiques

Il est possible de fonder la classification de ces barrières sur plusieurs critères. Pour cette thèse quatre critères de base ont été choisis, notamment au regard des implications pratiques pour l’aménagement du territoire. Le premier critère peut être la question si une barrière est lisible sans grand effort ou avec difficulté (1). Du point de vue de l’aménagement du territoire, la possibilité de classifier des barrières sur la base du taux de la perméabilité joue aussi un rôle important, ou plutôt sur la difficulté avec laquelle elles peuvent être franchies (les barrières franchissables sans grand effort ou avec difficulté (2)). Le niveau auquel il faut intervenir pour qu’une barrière soit retirée est aussi un aspect non-négligeable ; cela signifie de savoir s’il est plus fonctionnel d’inervenir sur le niveau local, régional ou national voire global (3). Enfin, il est possible de trier les barrières thématiquement (4).

1) « La lisibilité » des barrières socioéconomiques – les MIR prézygotiques et postzygotiques

Les différences entre les MIR prézygotiques et postzygotiques reposent notamment sur la quantité d’énergie investie dans une tentative de reproduction sans succès (Rosypal et al., 2003). Il s’agit en principe de la quantité d’énergie qui a été dissipée dans le cas d’une altération sans succès des barrières entre des espèces. Du point de vue des MIR prézygotiques, la tentative de reproduction ne parvient pas à l’évolution d’un embryon, la perte n’est pas aussi sérieuse que dans le cas des MIR postzygotiques car l’organisme perd une quantité considérable d’énergie pour les stades initiaux de l’évolution d’un descendant qui n’est pas capable de vivre ou de se reproduire. Pour une espèce, les MIR prézygotiques sont ainsi plus profitables car ils la protègent relativement effecacement et avec moins d’énergie.

Dans le monde socioéconomique, il ne s’agit pas naturellement de la postérité, ni de l’énergie dépensée par les parents qui n’ont pas respecté « l’interdiction » du croisement entre espèces. Il s’agit de l’impression de la non-franchissabilité qui fait qu’une structure construite sur la base du processus path dependence pour les structures alternatives. Dans certains cas, il sera évident au premier coup d’oeil qu’il est inutile de dépenser des ressources pour une tentative d’implantation d’une technologie concurrentielle ou d’une nouvelle industrie dans certaine région car la technologie ou la spécialisation de la région existantes sont à ce point fortes qu’elles ne permettent pas leur prospérité. Dans ce cas les barrières socioéconomiques « prézygotiques » ainsi fonctionnent, dans le sens d’un contact direct irréalisé des deux structures qui peuvent être marquées comme « lisibles sans grand effort ». Il est possible de présumer que l’attribut commun de cette catégorie est qu’elle est relativement facile à définir ou à formaliser.

Certaines barrières ne sont pourtant pas si faciles à saisir et si simplement lisibles et les structures alternatives peuvent tenter d’altérer l’arrangement établi – par exemple un investisseur étranger va essayer de pénétrer dans une région qui se montrera plus tard impropre à ses intentions. Les barrières socioéconomiques postzygotiques ou les barrières « lisibles avec la difficulté » sont donc activées. Cet investissement contrarié amène des coûts plus importants que dans la situation où l’investisseur voit déjà à partir d’un monitoring extérieur si cette région est convenable ou pas pour ses projets. D’un autre côté, la réaction d’un investisseur qui entre sur une marché jusque là « non-lisible » facilite la lisibilité de cet environnement pour d’autres investisseurs. Si cet investisseur reste dans la région ou s’il s’en retire, il fournit une information précieuse pour ceux qui hésitent encore à se localiser. Cela correspond en principe à l’idée d’Arthur sur l’expression spatiale du processus path dependence (Artur, 1989). Il est convaincu que l’entreprise choisit la région où déjà d’autres entreprises ont leur siège à cause des rendements croissants, liés à la coexistence dans la même région. Surgissent des risques moins graves que les obstacles empêchant le développement de succès, c’est-à-dire que la vérification par les sociétés venues auparavant, peut avoir un rôle non-négligeable.

2) La franchissabilité des barrières

Des barrières socioéconomiques font obstacle au développement suivant des intensités différentes. Il est possible de les classifier selon le taux de la perméabilité des barrières franchissables sans grand effort ou avec difficulté. Cette franchissabilité est néanmoins différente dans tous les cas, les spécificités d’une région ou d’un état se manifestant. Il est possible de présumer que, de manière semblable à la classification des barrières selon leur lisibilité, la franchissabilité est d’autant plus facile aussi dans le cas des barrières qu’elles sont plus à définir ou à formaliser précisément. C’est probablement la raison pour laquelle se sont par exemple les barrières technico–mécaniques qui appartiennent à celles qui sont franchissables relativement sans grand effort. Leur franchissement demande naturellement une quantité considérable d’investissements pour qu’il soit faisable. Les aspects comme les traditions culturelles par exemple, l’existence ou la non-existence des réseaux des contacts, les routines dans le comportement ou la capacité d’apprendre sont franchissables avec une difficulté beaucoup plus importante et sont en même temps difficiles à saisir. Justement ces caractèristiques sont considérées comme très importantes pour la compréhension des différences régionales, en relation avec la capacité d’innover et de progresser (Blažek, Uhlíř, 2002).

3) Le niveau convenable de l’intervention pour le dépassement des barrières

Du point de vue des implications pratiques pour l’aménagement du territoire, le niveau auquel il est convenable d’effectuer des interventions pour le dépassement des barrières identifiées est naturellement aussi important. Il peut être plus efficace de résoudre un obstacle au niveau local ou régional ou au contraire il peut s’agir d’une affaire de système. Dans un tel cas, cet obstacle ne peut être que modéré, mais pas retiré. Dans un autre cas, le niveau national peut accepter des mesures de système mais l’activité des régions peut être un facteur clée. Le niveau supranational ou global peut avoir aussi dans certains cas une influence décisive – c’était d’ailleurs aussi la vue des théories du développement régional néomarxistes. Selon l’avis présenté dans ces théories, le centre du problème des inégalités interrégionales consiste en une organisation capitaliste (Blažek, Uhlíř, 2002). Le niveau supranational peut également avoir une influence importante, en relation entre autre avec l’effort de s’intégrer dans des groupements supranationaux – par exemple l’acceptation de l’acquis communautaire ou en cherchant une solution d’une „course aux armements“ quant aux stimulants pour les investissements étrangers (voir le chapitre I.3.2.3 dans la version tchèque). Nous n’allons néanmoins y prêter qu’une attention limitée au niveau dans la classification suivante car la plupart des exemples sont fondés sur le niveau local, régional, éventuellement national. Le niveau supranational ou global est seulement mentionné dans ce texte, il ne fait pas partie explicite de la classification délimitée ci-dessous.

4) La classification thématique des barrières socioéconomiques

Les catégories suivantes ont été identifiées sur la base d’une analyse des études de cas orientées vers les concepts path dependence et lock-in et avec l’emploi de l’inspiration du concept MIR. Cette classification néanmoins ne peut pas être considérée comme exhaustive car elle reflète seulement les types de barrières les plus fréquents qui sont apparus dans l’ensemble des études de cas qui est cependant loin d’être complet.

Dans chaque cas, le point de départ théorique et des exemples concrets sont mentionnés. Une partie des catégories constitue aussi une tentative de classification selon les critères esquissés plus haut, c’est-à-dire selon la „lisibilité“, le taux de franchissabilité de ces barrières et selon le niveau convenable d’intervention. Il faut prendre cette classification seulement pour indicative car ces aspects sont probablement spécifiques pour tous les cas et sont difficiles à généraliser. Tandis que dans certaines régions, les barrières institutionnelles représentent un obstacle franchissable relativement sans grand effort, dans les autres elles seront la cause d’une crise structurelle. Les types suivants de barrières sont délimités et discutés:

  1. Les barrières spatiales et les conditions physico-géographiques,
  2. Les barrières technico-mécaniques,
  3. Les barrières institutionnelles et politiques,
  4. Les barrières sociales.

1. Les barrières spatiales et les conditions physico-géographiques

Ce type de barrières est inspiré par les MIR écologiques pour lesquels la séparation spatiale et temporelle est essentielle (voir plus haut). Il faut dire au départ que les barrières spatiales et les conditions physico-géographiques en général sont la seule catégorie que ne réponde pas à la définition des barrières issues d’une évolution à long terme cumulative. Il s’agit plutôt d’obstacles qui ont existés tout au début et qui ont conditionné une évolution spécifique. Dans la réalité socioéconomique, ces obstacles ont été davantage importants par le passé qu’aujourd’hui car pour la société contemporaine la conception de la distance – mais dans beaucoup de cas aussi l’importance du bon approvisionnement en ressources naturelles ou la présence des conditions physico-géographiques spécifiques – est devenue dans une large mesure relative.

La distance géographique (surtout dans le sens de la distance horizontale) était importante notamment dans le passé où certaines innovations sont restées dans la région d’origine et n’étaient pas diffusées à cause de la mobilité limitée. Aujourd’hui la diffusion des innovations est beaucoup plus rapide grâce au transport plus efficace et à la communication intense. Si le transfert du papier de la Chine en Europe a duré 12 siècles, la diffusion pratiquement mondialement des téléphones portables a été effectuée déjà en quelques années.

Les barrières entre divers niveaux hiérarchiques sont aujourd’hui probablement beaucoup plus importantes – dans le sens de barrières entre des centres mondiaux d’innovation et des périphéries (dans le sens de la distance géographique verticale) et aussi dans le sens des obstacles entre les couches sociales. C’est lié aussi à la distance « du développement » ce qui sera discuté en relation avec d’autres types des barrières ci-dessous.

2. Les barrières technico-mécaniques

L’inspiration pour les barrières technico-mécaniques est partiellement issue également des MIR biologiques, plus précisément les mécaniques. Dans la réalité sociale, il est possible de comprendre qu’appartiennent à ce type de limitations celles pour lesquelles il est nécessaire dans l’intérêt de la diffusion d’une certaine innovation, d’adapter cette innovation à la structure existante d’un certain phénomène dans la région où il est envisagé qu’elle spot implantée, ou d’aménager la structure existante de ce phénomène selon l’innovation venue, et cela du point de vue technico-mécanique. Il peut s’agir d’obstacles communs comme par exemple une autre forme des prises de courant dans divers états du monde, l’écartement de voie ferrée sur la péninsule Ibérique et en Europe, la non-possibilité de la diffusion des ordinateurs dans les pays où il est impossible de compter sur la fourniture régulière d’une quantité suffisante d’électricité etc.

Ce dernier cas est illustré par la situation de la région Kerala en Inde. Le gouvernement indien a présenté cette région comme une localité convenable pour les investissements dans l’industrie chimique et l’un des arguments de cette campagne était l’abondance de l’énergie électrique à bon prix. Néanmoins la réalité était différente. Les centrales hydrauliques locales ne produisent pas assez d’énergie pour la demande des producteurs industriels et il y a des manques fréquents. Cela peut être l’une des causes du retard de l’industrie de cette région, selon Thomas (2005).

3. Les barrières institutionnelles et politiques

Il faut comprendre les institutions selon David (1994) comme l’un des « porteurs » principaux du path dependence. North a aussi attiré l’attention sur le fait que le changement institutionnel est path dependent de la même façon que le changement technologique. North a été certain qu’il y a une relation profonde entre l’évolution historique et l’évolution des institutions (North, 1991, In: Rizzello, 1997). Les institutions sont ainsi un facteur très importants stimulant le processus de path dependence. Par ailleurs, c’est la raison pour laquelle elles peuvent fonctionner deuxièmement aussi comme une barrière à un autre développement assez significante, et cela du point de vue des institutions dans le sens d’organisations comme du point de vue des institutions formelles (les institutions d’une forme légale) ou des institutions informelles (des habitudes, des coutumes, des routines) (la classification selon Mlčoch, 1996). L’existence de beaucoup d’institutions formelles mais aussi des institutions dans le sens d’organisations est étroitement liée à la décision politique, néanmoins également au régime politique d’un état ou aussi à l’orientation politique de la représentation régionale qui peut fonctionner comme une barrière politique.

Les institutions dans le sens d’organisations diverses (formées par le processus path dependence) peuvent représenter pour le développement de la région dans beaucoup de cas une composante du développement assez importante qui sert d’appui pour la production industrielle locale ou pour un autre système. Les institutions ne font pas partie des barrières les plus rigides, leur modification peut être relativement bien faisable. En considérant la modification réelle, cela signifie bien sûr le changement de toute l’institution, de sa fonction, ses relations, non seulement de son nom, ou son rôle proclamé. Cela peut être déjà plus difficile, en plus ces aspects qui peuvent être plus difficiles à changer peuvent être décisifs.

La région Franche-Compté peut illustrer d’un bon exemple comment il est possible de changer l’équipement institutionnel d’une région au cours d’un changement de spécialisation. Besançon, le centre régional était pendant deux siècles considéré pour la capitale de l’horlogerie, spécialité qui s’est propagée depuis la Suisse. Il s’agissait d‘une spécialisation à long terme qui a été soutenue par beaucoup d’institutions spécifiques. Dans les années 1965-1975, les problèmes liés à la production moins chère par l’Asie et aux technologies nouvelles sont néanmoins apparus (Bergeon-Carel, 2003).

Dans les années 80 du 20e sciècle, un changement a été initié qui a mené à la modification de la spécialisation régionale de l’horlogerie très étroitement orientée vers la microtechnique, une spécialisation plus large. La transformation des institutions y a été liée. Depuis 1977, la Société Chronométrique de France a figuré comme La Société Chronométrique et microtechnique de France, de manière analogue Chambre française de l’Horlogerie a été transformée en Chambre française de l’Horlogerie et Microtechnique ou encore l’Institut des Microtechniques est apparue. Selon Bergeon-Carel (2003), cette modification marche et des relations entre des acteurs pertinents existent également. Il est possible d’objecter à juste titre que ce cas ne peut pas être considérer comme un exemple représentatif d’une telle modification car le transfert de l’horlogerie vers la michotechnique n’a pas demandé des changements si significatifs parce qu’il s’agit des domaines apparentés (la microtechnique a été élargie à l’optique ou à l’électronique). Le changement a pourtant été effectué, et il s’agit donc d’un cas de succès indiquant que les institutions dans le sens des organisation ne forment pas une barrière si insurmontable si la région est bien déterminée.

Les institutions non-formelles, c’est-à-dire de diverses normes, pratiques, habitudes, routines etc. sont néanmoins beaucoup moins flexibles et leur changement exige davantage de temps. Cette barrière est relativement à long terme et dans certains cas elle peut être même insurmontable. Cela se manifeste souvent en contraste avec des normes formelles, dans le sens des lois ou de la constitution (par exemple la tolérance des violations des règlements). Les normes écrites sont plus faciles à changer que les normes non-écrites, et cela aussi pour la raison de la relation de ces normes avec certaines restrictions qui servent à les faire respecter. L’une des mesures restrictives issues d’une décision politique fut par exemple l’une des barrières les plus fortes à la propagation de la technologie de la sériculture et à la production de la soie. La propagation de ce secret chinois en Europe a pris plusieurs siècles. Selon Gontier, la vie de n’importe qui aurait trahit ce secret aurait été menacée ce qui a eu pour conséquence que l’Europe ne l’a connu qu’au 6e siècle. À cette époque, deux moines ont rapporté, cachés dans des cannes de bambous, quelques œufs de ver à soie (Bombyx Mori) et ont partagé le secret de la sériculture avec les Européens (Gontier, 1979).

L’inertie de certaines des institutions informelles en comparaison avec les formelles est illustrée par Meyer-Stamer (1998) par le cas des difficultés qui ont accompagné le changement de certaines routines au cours de la transition de soi-disant import-substituting industrializazion à l’économie ouverte dans trois clusters industriels dans la région Santa Catarina au Brésil. La culture d’origine de caractère non-coopératif, entre des acteurs qui pratiquaient le commerce entre eux, a mené à la situation où les entreprises industrielles ont maintenu toute une gamme des activités à la place d’une spécialisation. Par exemple, une société électromécanique possédait aussi ses propres plantations pour la production de ses caisses en bois encore aux années 80, d’autres entreprises ont seules instruit ses futurs employés. Le système politico-administratif, était nénamoins encore plus rigide que la communauté des entreprises, même s’il n’y eut que peu d’entreprises qui changèrent leurs relations de commerce en coopératives (Meyer-Stamer, 1998). La transition en économie ouverte provoquée par le changement de certaines lois s’est passé relativement facilement, néanmoins le changement des relations, ou plutôt de la culture locale, a été effectué avec un retard assez important.

Tandis que certains types des barrières discutées plus haut perdent plutôt de leur importance ou cette importance est modifiée (les barrières spatiales), ce n’est pas le cas des barrières politiques et institutionnelles, ou du moins pas dans une telle mesure. Les décisions politiques de la part de l’Union européenne sont très importantes (par exemple du point de vue de la Politique agricole commune). Ces décisions modifient beaucoup de facteurs non seulement au niveau des pays membres mais aussi des États qui ont demandé leur adhésion car par exemple l’accord de la législation de ces pays avec l’acquis communautaire est exigé entre autres. Le développement des réacteurs nucléaires, déjà mentionné, peut servit d’exemple direct et concret d’un cas où l’Union européenne a formé une barrière de la propagation, ou plutôt du développement d’une technologie. L’organisation EURATOM qui a été créée en 1958 et qui est devenue plus tard l’une des pierres de construction de la future Union européenne, s’est efforcée d’unifier le programme nucléaire des pays membres. En dépit de la préférence des réacteurs à graphite en Europe à l’époque (surtout en France), l’EURATOM a décidé du renforcement de la coopération avec les États-Unis où au contraire les réacteurs à eau légère ont prédominé. Selon Cowan (1990), la technologie à graphite était vraisemblablement meilleure, néanmoins l’accord politique de l’EURATOM et des Etats-Unis a fait obstacle à son développement.

4. Les barrières sociales

Les barrières sociales embrassent un spectre relativement large des barrières – surtout les barrières comportementales, psychologiques, esthétiques, religiauses ou culturelles, elles concernent aussi l’opinion sociale des habitants mais également l’érudition ou plutôt la capacité à s’instruire de la population. Les barrières sociales ont été inspirées également par une catégorie biologique, les MIR éthologiques.

Même si les limitations comportementales peuvent être progressivement affaiblies grâce à l’information croissant, aux grandes possibilités du tourisme et aussi à la migration, elles restent toujours un facteur qui influence réellement le succès de la propagation des innovations et aussi la localisation des entreprises dans les régions avec les conditions culturelles fortement différentes. Les sociétés supranationales qui offrent leurs produits dans le monde entier en savent certainement beaucoup sur la nécessité de respecter les habitudes locales et le goût spécifique. S’il ne s’agit pas directement de la différenciation d’un certain produit, il faut sans doute orienter autrement la publicité qui devrait propager leur produit, ils choisissent peut-être une autre composition des couleurs ou un autre nom du produit, ou une autre stratégie de la vente. Le système d’opération Windows Vista peut servir d’exemple où un nom n’est pas vraiment propice dans certaines régions. Le mot « vista » veut dire une poule en letton ce qui ne fait pas l’impression d’un titre propice pour un nouveau produit du point de vue du marketing. Néanmoins il est naturellement impossible d’attendre qu’une entreprise produisant un software pour le monde entier change le titre d’un produit pour un marché pas trop grand comme cului de la Lettonie. Elle aurait peut-être hésité avec ce titre plutôt dans une situation où ce nom ne serait pas propice du point de vue d’un client avec un volume de la vente potentiellement plus important. Les difficultés des campagnes promotionnelles globales sont selon Laurent et Macé (2004) aussi importantes que ces campagnes restent rares. Parmi les facteurs qui rendent souvent difficile la mise en oeuvre d’une campagne globale sont entre autres : une hétérogénéité des objectifs des campagnes, car les cibles ne sont pas toujours les mêmes dans tous les pays, le cycle de vie de la marque différente (dans un pays, l’objectif des campagnes peut être la fidélisation alors que dans un autre de créer du trafic), des obstacles sociaux ou culturels, des différences entre les marchés locaux, etc.

Pour que les entreprises puissent pénétrer sur un nouveau marché, elles doivent connaître ses spécificités. Si elles ne sont pas respectées, il est possible que le transfert de manière désirable ne se passe pas de la manière désiré car une ou l’autre des barrières comportementales sera activée. Des différences causées par des ordres de religion peuvent être considérées comme un exemple de ce type de barrières à la propagation d’une innovation. Si l’islam interdit de portraiturer des hommes, il est évident que ces pays où domine cette confésion ne seront pas justement des acheteurs importants d’appareils photo. Cela se manifeste très fortement en Afghanistan, dans une mesure moins élevée par exemple au Pakistan où la prise de photo en public comme en privé est considérée comme un péché. Cela ne signifie pas que l’on n’y trouve pas de tel appareil, seulement que l’orientation vers ce segment du marché dans cette région sera plus difficile et exigera une attitude très sensible. Mais cela change aussi – pour fortifier le tourisme, l’Arabie Saudide qui se déclare partisanne de cette interprétation stricte de l’interdiction de la représentation des personnes vivantes, a permit en 2006 la prise de photo en public (Lidové noviny, 2006).

L’une des fortes barrières psychologiques est la peur. Un cas relativement fréquent, surtout dans le passé, a pu être la crainte des innovations ayant l’air vraiment révolutionnaire. La peur a été selon Copan (1990) l’un des facteurs clés dans la lutte concurrentielle entre les voitures à essence et celles à vapeur. Aux États-Unis au début du 20e siècle, les deux technologies avaient des résulats plus ou moins similaires, néanmoins en 1914, une épidémie de limasse et de fièvre aphteuse a éclaté et duré à peu près six mois. Vu que les chevaux qui ont servi pour compléter l’eau dans les voitures à vapeur étaient aussi menacés par la maladie, la société a considéré ce mode de propulsion pour potentiellement dangereux. L’épidemie de six mois a ainsi aidé à la propagation du moteur à essence et est devenue une barrière au développement du moteur à vapeur. La peur liée aux préjugés est, selon Laurent et Macé (2004), également la raison pour laquelle il vaut mieux éviter une promotion « 4 pour le prix de 3 » au Japon car le chiffre 4 y est considéré comme maléfique.

C’est aussi le climat social qui peut se trouver en travers du chemin de la propagation et du développement de certaines technologies et dans certains cas également du développement des régions. Ce climat peut être en principe compris comme une faculté d’acclimatation de la population et comme la présentation de leur capacité d’accepter les changements.

Checkland (1976) a décrit comment l’esprit de rébellion de la population a été fortifié après le déclin de l’industrie navale. Le syndicat avait une position assez faible à l’époque de la prospérité de cette industrie (1875-1914), néanmoins avec la crise qui s’amplifiat, leur force a grandi et a aussi acquis du militantisme. La main d’œuvre de Glasgow a gagné une mauvaise réputation car elle était habituée aux bons salaires et a provoqué des conflits fréquents. La position du parti communiste s’est également fortifié, une pensée s’est répandue entre les employés selon laquelle il est normal de détester ses supérieurs et ainsi en principe toute l’entreprise. Naturellement, cela n’a pas amélioré les conditions déjà difficiles de la région structurellement défavorisée, surtout dans le contexte de forte concurrence avec d’autres régions mieux équipées et notamment mieux présentées en Grande Bretagne.

La capacité de la population locale à s’unifier le cas échéant et aller au but commun est aussi un aspect relativement non-négligeable – par exemple en s’opposant à un géant industriel qui aurait pu créer des emplois mais dont la présence aurait eu des impacts négatifs pour l’environnement. Cela s’est passé en République tchèque en relation avec l’investissement de l’entreprise mexicaine Nemak. Elle avait pour projet de construire une usine pour la production des composantes d’aluminium pour les moteurs de voitures à Plzeň (Pilsen). Cette intention a été sutenue par les représentants de la ville, néanmoins les habitants ont protesté contre sa construction et Nemak a finalement changé ses projets de localisation en réaction aux pétitions. En 2001, la direction de Nemak a décidé que la nouvelle usine serait construite dans la zone industrielle de Havraň vers Most (Fránek, 2005).

Il est possible de présumer que les régions qui ont une tradition industrielle longue et intensive ont un seuil pour ce type d’investissements un peu plus élevé. D’un autre côté, les institutions spécialisées qui savent ce qu’il faut observer et connaissent la manière avec laquelle il est possible de protéger les habitants, peuvent être préparées aux risques grâce à la longue tradition industrielle et aussi à la longue histoire de la pollution de l’environnement qui y est liée. Il ne s’agit donc pas seulement de l’acceptation d’un pollueur dans la région mais aussi du cadre législatif d’un pays, de l’exigibilité des lois, de l’environnement de corruption, du niveau complet de développement d’un pays et du niveau d’érudition, et cela aussi au sens de la conscience de ses droits. C’est l’une des raisons pour laquelle des sociétés nationales localisent certaines de leurs filiales dans les pays en voie de développement dont les lois écologiques sont moins strictes (Blažek, Uhlíř, 2002).

Naturellement, ce militantisme des habitants envers des pollueurs industriels est déterminé par l’attitude des acteurs locaux. L’industrie chimique est l’une des spécialisations importantes de Lyon depuis le 19e siècle. Cette industrie exige de la part des habitants beaucoup de tolérence quant à la pollution de l’environnement et aussi à la sécurité. Il est possible de présumer que la population du département Rhône est plus tolérante envers ces deux facteurs car cette industrie y a des racines profondes. Cette évolution à long terme a mené en même temps à un degré d’organisation plus élevé dans la région et à l’ancrage institutionnel de certains aspects et en cela aussi à la plus grande force contre les pollueurs principaux (par exemple l’existence du Conseil de salubrité du Rhône, fondé en 1845). L’existence de telles institutions pourtant ne signifie pas que ces organes ont réellement lutté pour l’environnement propre. La situation à Lyon était telle que les habitants ont protesté à certaines époques contre la pollution (par exemple la pétition en 1870) mais la représentation politique était probablement d’avis que les ouvriers s’adapteraient progressivement aux nuisances auxquelles ils étaient exposés. Des contrôles et divers décrets ont existé pour les entreprises déjà au 19e siècle, de la part de la police ou de la chambre de commerce, néanmoins la recommandation générale pour ces contrôles était de ne pas trop déranger les firmes (Dufaug, 2000).

Un cas relativement spécifique dans cette catégorie sont les manières de manager dans les entreprises. Elles peuvent mener au cours d’une implantation dans les conditions impropres non à la croissance envisagée de l’efficacité mais au contraire à des problèmes entre les employés et la direction. L’exemple de la manière de manager des sociétés asiatiques appliquée en Europe l’illustre – il peut néanmoins avoir en principe un impact comme une barrière sociale en Europe (voir le chapitre II.3.1.2).

La structure de formation des habitants peut être aussi une barrière au développement d’une région du point de vue de la propagation d’une innovation ou d’une spécialisation. Il ne s’agit pas seulement d’un niveau d’érudition qui dans le cas idéal supporte la spécialisation de la région mais aussi de pratiques établies et la manière d’instruire. Les barrières aussi graves comme le fort taux d’analphabétisme d’une grande partie de la population ou en général l’instruction seulement minimale de certaines populations ne sont pas un problème non – franchissable mais qui ne peut être résolu à longue durée que de manière systématique, cela signifie notamment au niveau national, et qui exige beaucoup d’énergie et de ressources. Ces barrières sont assez visibles déjà avant qu’un nouvel investisseur ne vienne. Toutefois, elles sont aussi liées à la faculté de la population à réagir activement sur les impulsions externes et à créer des occasions pour le développement. La manière d’instruire et les pratiques établies dans l’instruction sont aussi une barrière relativement difficile à modifier qui démontrent en plus un taux élevé d’inertie. L’activité locale est essentielle aussi au cours d’une solution de système au niveau national qui la conditionne en principe dans une certaine mesure. Ces barrières font néanmoins partie des barrières lisibles avec plus grande difficulté car elles ne peuvent pas du tout être observables de l’extérieur.

Dans le cas des reconversions, ce sont probablement des barrières comportementales qui sont plus importantes, surtout les barrières psychologiques, plus que la franchissabilité impossible réelle de la structure d’érudition. Dans les régions dont la majorité de population ne sait ni lire ni écrire, il n’y a pas de sens à s’occuper de la capacité de travailler avec des ordinateurs ou des connaissances des langues étrangères.

La région Franche-Compté peut également servir d’exemple positif d’un changement des pratiques d’érudition. Bergen-Carel (2003) explique que l’impulsion vers le changement de la spécialisation régionale, décrit ci-dessus, a été donnée justement par le secteur de l’instruction. De ce stimulus, un changement d’orientation de certaines institutions d’instruction a été effectué et l’École d’Ingénieurs de Chronométrie et de Microméchanique est devenue l’École Nationale Supérieure de Mécanique et de Microtéchnique. Cette modification n’a pas pourtant touché seulement l’instruction tertiaire, l’instruction secondaire était aussi concernée et la base microméchanique d’origine étroitement spécialisée fut élargie à d’autres domaines, surtout à l’optique et à l’électronique. En 1972, un nouveau type de baccalauréat (Baccalauréat technologique F 10 microtechnique) est apparu.

Un exemple des pratiques établies de l’instruction et de la manière d’instruire peut être trouvé en République tchèque. Le taux insuffisant de coopération entre des acteurs fondamentaux a été identifié parmi les barrières de croissance de la compétitivité de la République tchèque, ce qui influence également la croissance vers l’économie de la connaissance et vers les innovations (MMR, 2006, MMR, 2005). Le problème fondamental n’est pas autant l’orientation sectorielle des diverses institutions d’instruction que leur faculté de leur connexion avec le secteur d’entreprises seulement très limitée. Dans le cas idéal, cette coopération provoquerait une situation où les entrepreneurs pourraient influencer dans une certaine mesure le curriculum des écoles spécialisées, ce qui aurait pour effet une intégration plus intense des étudiants de ces institutions d’instruction dans la pratique et par cela aussi la meilleure préparation pour l’entrée sur le marché du travail. Ce domaine est supporté par la politique de cohésion de l’Union européenne dans la période de 2007 – 2013. Grâce à cet effort déclaré, incluant les projets supportés par exemple par cette politique, la situation peut avoir un effet tout à fait satisfaisant sur un observateur externe, même si le changement réel est incertain.