Partie théorique

Chapitre 1 Les troubles spécifiques du langage chez les enfants: concepts de base.

1.1 Bref historique des études sur les TSL : évolution de la terminologie.

Les premiers travaux dans le domaine des Troubles Spécifiques du Langage (TSL) remontent à la première moitié du 19ème siècle (voir Leonard, 2000, pour une présentation détaillée). En 1866, Väisse introduit le terme “aphasie congénitale” pour décrire les enfants qui ont un déficit de production de la parole en absence des troubles non verbaux ou des difficultés de compréhension. Dans la même époque en Allemagne, on trouve le terme “mutisme auditif” (Coën, 1886). Quelques années plus tard, McCall (1911) introduit le terme “surdité congénitale du mot” pour les enfants ayant des troubles expressifs. Au 20ème siècle, surtout dans sa première moitié, le terme ‘aphasie de développement’ introduit par Kerr (1917) est le terme dominant (Benton, 1964 ; Eisenson, 1968 ; Ingram & Reid, 1956 ; Morley, Court, Miller & Garside, 1955). Le terme ‘aphasie infantile’ est aussi utilisé à cet époque (Gesell & Amatruda, 1947 ; Van Gelder, Kennedy & Laguite, 1952).

Au début des années 60, le terme ‘dysphasie’ fait ses premières apparitions à coté du terme ‘aphasie’ (de Ajuriaguerra et al. 1965 ; Inhelder, 1963 ; Weiner, 1969). Progressivement, le suffixe –a commence à être appliqué pour désigner l’absence de langage tandis que le suffixe –dys est utilisé pour désigner les problèmes de langage (Eisenson, 1972). Aujourd’hui, les deux syndromes sont clairement dissociés, l’aphasie ayant une origine lésionnelle, vasculaire, tumorale ou infectieuse qui peut être datée avec précision. Ce n’est qu’au début des années 80, que les auteurs favorisent le terme ‘dysphasie développementale’ (Chiat & Hirson, 1987; Clahsen, 1989; Wyke, 1978). D’autres termes apparaissent dans la même période tels, ‘langage déviant’ (Leonard, 1972), ‘difficultés langagières’ (Rees, 1973), ‘retard simple de langage’ (Weiner, 1974), ‘difficultés développementales du langage’ (Aram & Nation, 1975), ‘trouble développemental du langage’ (Wolfus, Moscovitsch & Kinsbourne, 1980), ‘déficit spécifique du langage’ (Stark & Tallal, 1981) et ‘trouble du langage’ (Johnston & Ramstad, 1983).

Aujourd’hui, dans la littérature Anglo-saxonne, le terme adopté le plus souvent est ‘specific language impairment’ introduit par Leonard en 1981 ou son abréviation ‘SLI’ introduit par Fey et Leonard en 1983. Dans la littérature francophone, on trouve généralement les termes ‘dysphasie’ (Audollent & Tuller, 2003 ; Leybaert, Van Reybroeck, & Ponchaux, 2004 ; Maillart, Schelstraete, & Hupet, 2004; Pierart, 2004 ), ‘dysphasie de développement’ (Billard, Duvelleroy-Hommet, de Becque & Gillet, 1996 ; Billard, 2001), ‘troubles du langage’ (Plaza, 2004), ‘troubles spécifiques du développement du langage’ ou son abréviation ‘TSDL’ (Maillart & Parisse, 2006 ; Parisse & Maillart, 2009 ; 2010), ‘troubles spécifiques du langage oral’ (Bonneau, Verny & Uzé, 2004; Gérard, 2006 ; Plaza, 2002). Certains auteurs francophones réunissent sous le terme ‘troubles spécifiques du langage’ l’ensemble des enfants ayant des difficultés dans l’acquisition du langage et qui diffèrent en degré et en nature de leurs troubles (Pierart, 2004). Dans le cadre de cette thèse, nous utilisons le terme ‘Troubles Spécifiques du Langage’ et son abréviation ‘TSL’ qui fait aussi référence au terme ‘Specific Language Impairment’ (SLI), terme le plus couramment utilisé dans la littérature anglo-saxonne.