1.6.3 Les limites des classifications actuelles

Les classifications des TSL dont nous disposons aujourd’hui restent assez théoriques, ne traduisant pas véritablement une réalité clinique. En effet, certains des profils langagiers proposés dans les classifications spécifiques des troubles du langage, par exemple les enfants ayant un syndrome pragmatique, ne sont pas retrouvés dans la réalité clinique (Joanisse & Seidenberg, 1998 ; Parisse & Maillart, 2009). De plus, la plupart des classifications spécifiques des TSL semblent décrire des profils langagiers qui restent stables au cours du développement. Or, il a déjà été suggéré que le profil langagier est plutôt dynamique et sensible à des changements au fur et à mesure du développement de l’enfant (Bishop, 1997 ; Botting & Conti-Ramsden, 2004). Dans leur étude, van Weerdenburg, Verhoeven et van Balkom (2006), utilisant une méthodologie similaire à celle de Botting et Conti-Ramsden (ib.) ont classifié 147 enfants de 6 ans et 136 enfants de 8 ans. Pour chaque tranche d’âge ils ont identifié quatre profils différents. Pour ces auteurs, la différence entre les profils des enfants de 6 ans et ceux des enfants de 8 ans pourrait être expliqué par une maturation de certains aspects langagiers ou par l’effet de la rééducation langagière. Sur ce sujet, Botting et Conti-Ramsden défendent que les deux aspects langagiers qui semblent être les plus impliqués dans les changements de profils langagiers des enfants TSL sont la phonologie et le vocabulaire. Toutefois, il est important de noter que les groupes qui émergent des différentes tentatives de classification sont nécessairement dépendants des mesures utilisées dans l’investigation ainsi que des propriétés psychométriques des tests utilisés.

Dans la réalité clinique, l’enfant TSL se présente le plus souvent avec une association des troubles où le trouble du langage oral serait prédominant. Les classifications que nous venons de décrire (classifications internationales et classifications spécifiques) sauf celle de Parisse et Maillart (2009) ne prennent pas en compte les troubles cognitifs associés des enfants TSL (troubles mnésiques, déficits attentionnels, troubles praxiques, retard mental, troubles du langage écrit, etc.). De plus, la définition des TSL telle qu’elle existe à ce jour ne tient pas compte du tableau clinique complexe que présentent ces enfants consultant pour des TSL. Pourtant, une large proportion des enfants TSL ont également des déficits dans d’autres sphères du développement ou des pathologies associées neurologiques, psychiatriques et/ou sensorielles (Bishop & Snowling, 2004, Gérard, 2006). Comme nous l’avons déjà évoqué, un grand nombre des enfants diagnostiqués TSL ont des difficultés en mémoire phonologique de travail (MdT) et surtout dans la répétition de pseudomots longs (Archibald & Gathercole, 2007; Archibald, Gathercole & Joanisse, 2009 ; Conti-Ramsden & Durkin, 2007; Montgomery, 2003). Baker et Cantwell (1992) ont trouvé également que parmi 65 enfants diagnostiqués comme ayant un déficit attentionnel, 58% avaient également un déficit en production, 34% un déficit en réception et 69% un déficit dans le traitement de la parole (mémoire auditivo-verbale, discrimination des sons, etc.). Enfin, Alcock et al. (2000) ont également montré que les enfants TSL ont souvent des difficultés praxiques, tant verbales que non verbales. En effet, dans la réalité clinique les enfants TSL présentent souvent, associés aux troubles du langage, une dyspraxie verbale, mais aussi une dyspraxie constructive et/ou gestuelle. Dans le chapitre 4 nous décrirons la méthodologie que nous avons utilisée ainsi que les résultats obtenus dans une tentative de caractérisation ‘écologique’ des profils langagiers et cognitifs des enfants TSL qui consultent en Centre de Référence des Troubles des Apprentissages en France.