1.8.6 Critique sur les hypothèses explicatives

Plaza (2004) affirme concernant les TSL que ‘si aucune théorie ne doit être exclue, aucune ne doit non plus être exclusive’ (p. 465). Néanmoins, la phonologie semble être le seul facteur qui intervient dans toutes les hypothèses explicatives. Ce constat est bien illustré dans une étude de Bishop (1992) où elle examine six candidats potentiels pour expliquer les troubles du langage 1/ atteinte neurologique, 2/ déficit de production, 3/ déficit auditif, 4/ trouble de la fonction sémiotique (explication "piagétienne"), 5/ faible capacité de traitement de l’information et 6/ déficit au niveau des stratégies d’apprentissage. Sa conclusion est que, bien qu’aucun de ces facteurs, pris de manière isolée, ne permettent d’expliquer les TSL, la phonologie le pourrait puisque c’est le facteur commun à toutes ces hypothèses.

Il faut évidemment considérer la phonologie non pas de manière unitaire mais dans ses différents aspects ainsi que dans ses différentes fonctions, linguistiques, mnémoniques et cognitives qui la composent. Selon la théorie phonologique, la cause des TSL est un trouble phonologique spécifique qui interfère avec l’apprentissage des contrastes et des régularités phonologiques de la langue que l’enfant apprend et qui par conséquent l’empêche de développer des représentations phonologiques suffisamment spécifiées. Un déficit linguistique qui semble être "pur" au départ va sûrement avoir des conséquences sur le plan cognitif à travers les mécanismes mnésiques impliqués dans l’apprentissage du langage. Lorsque l’enfant apprend des nouveaux mots, il utilise le langage dans sa dimension phonologique et fait intervenir des mécanismes mnésiques. Un trouble spécifiquement phonologique perturberait le développement lexical avec des conséquences sémantiques et cognitives que l'on peut prévoir. Enfin, un problème phonologique au niveau perceptif entièrement limité au départ à ce registre précis va donner lieu à un traitement insuffisant des morphèmes grammaticaux, souvent peu saillants sur le plan phonologique. Cette déficience phonologique va avoir ainsi des conséquences sur le plan du développement morphosyntaxique. Ces exemples illustrent l'importance de la phonologie dans les activités cognitives en général via la mémoire, ainsi que son implication dans l'évolution de l'ensemble du système linguistique, lexical et syntaxique notamment.