3.1 Objectifs de l’étude

L’hétérogénéité de la population d’enfants TSL constatée par les cliniciens et les chercheurs se reflète dans la difficulté à définir de manière précise les causes du trouble et les critères diagnostiques, ainsi qu’à trouver un consensus sur le terme utilisé: dysphasie ou dysphasie développementale ou trouble spécifique du développement du langage ou trouble spécifique du langage. Plusieurs classifications ont jusqu’à ce jour tenté de tenir compte de l’hétérogénéité qui caractérise les enfants TSL (Bishop, 1997 ; Botting & Conti-Ramsden, 2004 ; Gérard, 1993 ; Parisse & Maillart, 2009 ; Rapin & Allen, 1988 ; van Weerdenburg et al. 2006). Dans le chapitre 1 nous avons présenté les plus importantes parmi celles-ci (voir 1.6.2). Au regard de ces classifications on observe qu’elles partagent de points communs, par exemple dans la définition de certains des sous-groupes (ex. syndrome phonologico-syntaxique). On observe, toutefois, de discordances relatives aux différentes méthodologies appliquées (classifications empiriques, études épidémiologiques, basées sur des scores à différents tests ou sur des jugements cliniques etc.), aux différentes mesures utilisées et aux différentes définitions que les auteurs accordent aux troubles spécifiques du langage. L’absence de cohérence dans la définition des troubles du langage résulte de la description des populations qui ne sont pas toujours tout à fait comparables. D’autant plus que le TSL est une pathologie complexe et hétérogène et que les enfants diagnostiqués porteurs des TSL varient non seulement dans leur profil langagier et la sévérité des troubles qu’ils présentent mais aussi dans les troubles cognitifs associés au trouble du langage. La présence des troubles cognitifs associés peut influencer non seulement le profil langagier mais aussi la sévérité des déficits langagiers que l’enfant présente et son pronostic. Pour illustrer cela, Parisse et Maillart (2009) incluent dans leur classification des facteurs non verbaux, comme la mémoire de travail (verbale et visuospatiale), le raisonnement spatial, l’attention visuelle, la coordination motrice et grapho-motrice. Enfin, une critique concernant les classifications actuelles porte sur la description de certains profils qui ne sont pas pourtant confirmés par des classifications plus empiriques, autrement dit qui ne semblent pas exister dans la réalité clinique. Par exemple, le syndrome ‘d’agnosie auditivo-verbale’ de Rapin et Allen (1988) n’est pas confirmé par l’étude empirique de Botting et Conti-Ramsden (1999), ou le ‘syndrome de déficit sévère en réception du langage’ qui n’est pas confirmé ni dans l’étude de Botting et Conti-Ramsden (2004), ni dans celle de Parisse et Maillart (2009).

Dans ce contexte d'une hétérogénéité importante et face à des définitions opérationnelles aussi variées, nous avons conduit une étude afin de déterminer les profils cognitifs et langagiers d'enfants diagnostiqués TSL ayant consulté dans un Centre de Référence ‘Troubles des Apprentissages’ en France. Cette étude a été réalisée à partir d'une base de dossiers d'enfants. Nos objectifs sont de déterminer : 1/ des profils d’enfants diagnostiqués TSL sur la base de leurs scores à des épreuves d’évaluation du langage oral dans les versants réceptif et productif et 2/ si des profils langagiers différents sont associés ou non à des scores différents aux sous-tests du WISC-IV (pour la version française, Wechsler, 2005). Nous visons à décrire la diversité et la sévérité des troubles langagiers et à mettre en lien ces données avec celles d’une évaluation de l’intelligence (Zourou, Magnan, Ecalle & Gonzalez-Monge, 2009).