1.1.2.2. Une filiation avec les analyses néo-classiques.

Des théories néo-classiques ont cherché à expliquer les facteurs qui déterminent la configuration des échanges internationaux. La composition du commerce international y est expliquée à partir du concept « d’abondance relative d’un facteur de production » qui est à l’origine de l’avantage comparatif.

Dans la lignée de ces théories, nous pouvons citer le théorème de Rybscynski, qui correspond à la dynamisation du modèle de Hecksher-Ohlin. Le théorème peut s’énoncer comme suit : à termes de l’échange constants, lorsqu’un des facteurs s’accumule, il y a réduction absolue de la production de biens utilisant ce facteur de façon moins intensive, tandis que la production des bien utilisant ce facteur intensivement augmente plus que proportionnellement à l’accroissement du revenu.

La conclusion principale du théorème est que le développement d’une ressource naturelle, comme le pétrole, dans un pays, est susceptible de retarder le développement d’autres produits, comme les produits manufacturés. La désindustrialisation se produit car le nouveau secteur (le secteur pétrolier) attire les ressources qui sont soustraites du secteur manufacturier. C’est donc à un phénomène de « réallocation des ressources » que la désindustrialisation est due.

De ce point de vue, le théorème de Rybscynski est compatible avec les arguments développés par les MDD. La différence, car différence il y a, est que dans ces derniers, la baisse de la production du secteur manufacturier pourrait s’expliquer aussi bien par l’effet « réallocation des ressources » que par « l’effet dépense » qui induit une appréciation de taux de change réel, ou encore par la combinaison des deux effets.

Autre théorie se situant dans la problématique du blocage de la croissance par l’échange international, la théorie de la croissance appauvrissante de Bhagwati. Celle-ci avance l’idée simple selon laquelle une amélioration de la capacité d’offre de certains produits existants, déjà exportés, tend à faire baisser leur prix sur les marchés mondiaux à un point tel que la croissance devient paradoxalement appauvrissante.

Avec la théorie du Dutch Disease, l’analyse de Bhagwati a des points communs. Ces derniers se situent surtout au niveau des prémisses : le fait de développer une nouvelle ressource peut paradoxalement appauvrir l’économie. Cependant, il y a lieu de noter que si dans la théorie de Bhagwati cet « appauvrissement » se traduit par une baisse du revenu réel, dans les MDD, il se traduit par une régression de la production des biens commercialisés autres que ceux provenant du secteur en boom, de sorte que le pays devient quasiment dépendant de sa seule ressource naturelle. Au niveau des hypothèses, contrairement à la théorie de Bhagwati, les MDD sont fondés sur l’hypothèse de petit pays. Autrement dit, nous sommes en présence d’une économie où les producteurs sont « price tackers » sur le marché international. Enfin, sur le plan doctrinal, les points de divergence entre les deux approches sont manifestes. En effet, l’argument de la croissance appauvrissante est avancé pour justifier la nécessité, pour les pays en voie de développement (PVD), de limiter les exportations de matières premières et de développer en priorité la production des biens se substituant aux importations. C’est la stratégie d’industrialisation par substitution aux importations. A l’inverse, dans les MDD, ce qui pose problème, ce n’est pas le mode d’insertion des PVD dans le marché mondial, mais l’utilisation des revenus extérieurs suite au boom dans un secteur d’exportation. Ceci explique pourquoi les MDD recommandent, entre autres, une stérilisation volontaire des revenus extérieurs par placement à l’étranger.