1.1.3. Présentation du modèle de Dutch Disease.

Le concept de « dutch Disease » est devenu un terme générique, renvoyant à l’idée de l’impact macroéconomique d’un choc externe positif. Il convient de préciser que la théorie distingue en fait l’impact d’un choc externe positif selon qu’il est anticipé comme permanent ou comme temporaire. Les modèles du Dutch Disease à proprement parler s’appliquent aux chocs anticipés comme permanents. En outre, l’origine du boom peut être multiple. Selon son origine, il aura un coût ou bien sera une aubaine22.

Il existe tout un ensemble de modèles de Dutch Disease. Dans l’impossibilité d’en exposer les différentes variantes, nous présenterons, dans ses grandes lignes, le modèle de Corden (1984), version approfondie du modèle Corden-Neary (1982). Ce choix se justifie par le fait qu’il correspond le mieux au cas qui nous intéresse puisque le cadre d’analyse est celui d’une petite économie ouverte, preneuse de prix et où les produits du secteur manufacturier sont supposés être échangeables23.

Ce modèle comprend les trois (03) secteurs suivants :

  1. Le booming sector (B), pétrole ou toute autre industrie extractive d’exportation dans une phase de prix croissants, d’exploitation d’une découverte majeure de ressources ou encore d’un progrès technique dont l’effet est une réduction substantielle de coûts ;
  2. Le secteur en retard producteur des autres biens échangeables ou Lagging sector (L), autrement dit les autres secteurs à produits exportables ou substituts à l’importation ;
  3. Le secteur des biens non-échangeables (N), à l’exemple du logement, les services, les transports… etc.

L’analyse se situe dans le moyen terme. Seul le facteur travail est supposé mobile, les autres facteurs de production sont supposés spécifiques à chacun des trois secteurs. Le capital est internationalement immobile et les stocks de facteurs sont fixes, mais leurs prix flexibles.

La figure ci-dessous illustre le fonctionnement du modèle.

Le fonctionnement du modèle peut être décrit comme suit : soit les trois secteurs B, L et N24. Les deux premiers produisent des bien commercialisés confrontés aux prix mondiaux PB, PL et le troisième produit des biens non-échangeables (ou non commercialisés) dont les prix PN se fixent au niveau domestique par confrontation de l’offre et de la demande locales. Le facteur travail est supposé mobile entre les trois (03) secteurs, égalisant ainsi les salaires entre les trois emplois alternatifs.

Corden analyse l’impact d’un boom en B sur les autres secteurs de l’économie. Pour lui, la croissance dans le « booming sector » comporte deux types d’effets : les effets réels et les effets monétaires. Nous exposerons d’abord les premiers avant d’évoquer les seconds.

Notes
22.

Un boom ayant un coût est généralement sectoriel. Il est lié à l’augmentation de l’offre dans un secteur particulier d’exportation. Ce type de booms implique une utilisation accrue des ressources domestiques. Un boom est par contre une aubaine lorsque le supplément de devises « tombe du ciel », et qu’il n’implique pas l’utilisation accrue des ressources domestiques. Il peut alors se présenter sous la forme d’un boom de transferts sans contrepartie ou bien d’un boom d’exportation dans un secteur n’utilisant que très peu de ressources domestiques, tel le secteur pétrolier.

23.

Il convient de préciser que le terme « échangeables » doit en l’occurrence être entendu dans le sens « exportables ».

24.

Dans le cas d’une aubaine, le cadre théorique reste le même, mais le secteur échangeable est homogène (puisqu’il n’y a pas de secteur boomier) ; l’économie est alors divisée en deux secteurs : le secteur non-échangeable (N) et le secteur échangeable (L), dont les biens ont pour prix respectivement PN et PL.