4.3. Le nouveau mode de régulation : un compromis institutionnel ambigu.

Les configurations institutionnelles décrites dans le chapitre précédent définissent, ensemble, un mode de régulation dont il convient à présent de souligner les principales caractéristiques au regard de la problématique qui nous intéresse ici, à savoir la dynamique de l’accumulation dans un régime rentier191.

Qu’est ce qui caractérise ce mode de régulation ? La réponse à cette question nécessite que l’on mobilise les principes de hiérarchie et de complémentarité évacués dans le chapitre précédent. Outre les points déjà abordés et qui portent sur la configuration de chacune des formes institutionnelles prises séparément192, plusieurs éléments peuvent être évoqués lorsque l’on considère ces formes institutionnelles en tant qu’élément complémentaires d’une combinaison193. En particulier :

1. Le rapport salarial n’y occupe qu’une place secondaire . Il n’est pas au centre de la configuration institutionnelle. Celle-ci semble dominée par les formes institutionnelles « insertion internationale » et « Etat », dont les configurations respectives consacrent le poids écrasant de la rente pétrolière. L’Etat, à travers son budget, financé par la rente, joue un rôle central dans cette configuration d’ensemble.

En effet, dans l’état actuel de l’économie algérienne, le rapport salarial, ou plus proprement le rapport d’emploi, est déterminé par le processus de circulation de la rente beaucoup plus qu’il ne le détermine.

D’une manière générale, la rente pèse sur l’ensemble des rapports sociaux. En particulier, elle interfère de façon très nette dans la formation de la productivité, des salaires et les modalités de la protection sociale. La répartition du surplus, dont l’essentiel provient de la rente externe, fait toujours appel davantage aux rapports clientélistes qu’à l’activité productrice des personnes.

Cependant, d’un point de vue général, la place du rapport salarial dans la hiérarchie des formes institutionnelles demeure centrale puisque, quel que soit le contexte historique considéré, la mobilisation de la main d’œuvre est un facteur clé de tout processus de développement.

Dans cette perspective, il nous semble permis de penser que la disponibilité d’une rente externe est de nature à permettre, lorsque la configuration du rapport salarial correspond à celle que le complexe de machines requiert, une atténuation de l’intensité du taux d’exploitation du travail, ne serait ce qu’à travers la prise en charge d’une partie du salaire indirect. A l’évidence, la présence de la rente externe n’est, en principe, pas antinomique avec l’instauration d’un rapport salarial de type « taylorien ». Elle peut même la favoriser sachant que dans le contexte de laconfiguration actuelle de la DIT, il semble de plus en plus exclu pour un pays pauvre et attardé de déclencher le processus d’augmentation de la productivité autrement que par un sursaut du taux d’exploitation du travail.

L’instauration d’une configuration « taylorienne » des rapports de travail, préalable incontournable à la réhabilitation du rapport salarial comme forme institutionnelle centrale, relève, pour le moment, d’une possibilité purement théorique. Dans les faits, nombreux sont les indices qui montrent le caractère invraisemblable d’une telle évolution. Pour ne retenir que le principal d’entre eux, on note le maintien de la productivité globale des facteurs à des niveaux anormalement bas194. Par ailleurs, la privatisation, opération qui n’a d’intérêt que parce qu’elle est une modalité efficace d’introduction d’un rapport salarial à même de contribuer à la création d’un surplus, semble buter sur de sérieux obstacles, politiques pour l’essentiel, qui en empêchent la concrétisation, ce qui témoigne du caractère hypothétique de la perspective de la réhabilitation du rapport salarial dans son statut de forme institutionnelle centrale, comme cela est le cas dans les économies de marché195.

2. Il existe des incompatibilités manifestes entre les configurations respectives des différentes formes institutionnelles ; ces incompatibilités traduisent l’absence de projet de développement à même de donner un sens aux décisions de politique économique.

Le tableau ci-après permet de dresser un récapitulatif des incompatibilités éventuelles entre les configurations des formes institutionnelles au regard de la nécessité de promouvoir un projet de développement national dont l’objectif serait de dépasser le fondement rentier de l’accumulation196.

Ainsi, l’incompatibilité (1) consisterait en le maintien d’un rapport salarial de type clientéliste dans le secteur public industriel et l’exposition de ce dernier à la concurrence d’un secteur privé fonctionnant à la marge, ce qui à la longue condamnerait le premier à la disparition, avec ce que cela implique comme destruction de capacités industrielles.

L’incompatibilité (2) renvoie, quant à elle, à l’impossibilité de concilier, sur la longue période, un rapport salarial de type clientéliste et une politique de gestion de la contrainte monétaire de type monétariste.

L’incompatibilité (3) pose la question de l’impact des dépenses d’équipement sur l’allocation des ressources. Il est évident que les programmes publics d’équipement contribuent grandement à résorber le chômage, mais il n’en est pas moins certain que ces programmes sont générateurs de comportements de recherche de rente, notamment dans le secteur privé, du fait qu’ils orientent l’essentiel des ressources vers les secteurs du BTP, au détriment de l’industrie.

La confrontation ainsi menée entre configurations de chacune des formes institutionnelles permet d’identifier, de manière plus ou moins exhaustive, un ensemble d’incompatibilités dont l’effet handicapant sur l’activité économique en général et l’activité productive en particulier est plus ou moins important197.

Pour n’en retenir que les plus importantes, il semble que c’est surtout l’ouverture commerciale qui pose, dans les circonstances actuelles, l’obstacle le plus difficile à surmonter.

Configuration des formes institutionnelles Rapport salarial Régime de concurrence Rapport monétaire Budget Insertion internationale
Rapport salarial :
- Clientélisme (secteur public)
- A la marge (secteur privé)
- Secteur informel

Incompatibilité
(1)
Incompatibilité
(2)
Incompatibilité
(3)

x
Régime de
concurrence :
- Monopoles de branches
- Concurrence biaisée par les pratiques clientélistes
    x x x
Rapport monétaire :
- Monétarisme
- Rationnement du crédit
      x x
Budget :
- Impératif économique de l’accumulation
- Impératif politique de la redistribution
        x
Insertion internationale :
- Ouverture commerciale
- Taux de change
       

Ainsi, une des incompatibilités de la configuration institutionnelle d’ensemble se situe entre le désarmement douanier et la nécessité de promouvoir des exportations industrielles198 dans la mesure où la suppression totale de la protection extérieure affecte considérablement les conditions de rentabilité d’une vaste gamme d’industries, dont notamment les industries potentiellement exportatrices. Cette incompatibilité peut être reformulée plus généralement en considérant le rapport salarial comme second terme : l’incompatibilité  serait alors entre l’ouverture tous azimuts et la nécessité d’instaurer un rapport salarial efficient199.

Cette contradiction est d’autant plus grande que même les économistes libéraux qui plaident habituellement pour le libre échange admettent l’argument de « l’industrie naissante » en ce qu’ils reconnaissent la nécessité de protéger de la concurrence extérieure des activités nouvelles tant que celles-ci n’auraient pas effectué avec succès leur apprentissage et atteint leur maturité.

Dans l’état actuel des choses, force est de noter que le démantèlement des barrières douanières, la circulation libre des marchandises n’ont fait émerger aucune capacité productrice ou exportatrice nouvelle. Au contraire, cette ouverture, menée au pas de charge, fait subir à la fragile industrie nationale (publique et privée) une concurrence brutale qui risque de l’anéantir.

Dans la mesure où il vise à accroître le degré d’efficience de l’industrie locale, le désarmement douanier doit par conséquent être sélectif plutôt que systématique. Or, comme le note F. Yachir (1990), la sélection de « créneaux » renvoie à la nécessité d’une véritable politique industrielle qui puisse assurer le développement prioritaire d’activités à la fois dynamiques à l’échelle internationale et conformes à la configuration actuelle et prévisible des ressources du pays. La politique industrielle est incompatible avec une ouverture indiscriminée de l’économie à la concurrence étrangère. Pour conclure, on peut dire cette fois-ci qu’il y a compatibilité entre l’ouverture tous azimuts et l’absence d’une stratégie industrielle200.

Par ailleurs, il y a lieu de mentionner l’incompatibilité manifeste entre l’ouverture extérieure et le maintien d’un rapport salarial de type clientéliste, notamment dans le secteur public industriel.

Ce dernier s’apparente toujours davantage à un marché politique, non seulement parce que ses gestionnaires sont souvent nommés sur des bases clientélistes, mais aussi parce que ses recrutements, son fonctionnement et ses activités obéissent moins aux impératifs de rentabilité qu’aux interférences et interventions directes d’une multitude de centres de pouvoir (Yachir, 1990)201. Sur la longue période, une telle situation n’est tenable que si des ressources extérieures considérables sont mobilisées pour le financement des déficits structurels qui en découlent.

Ce qui vient d’être dit des incompatibilités liées à l’ouverture commerciale peut être étendu à l’autre composante constitutive de l’insertion internationale : le taux de change. La détermination du taux de change est, contrairement à ce que l’on entend ici et là, une décision éminemment politique. Cela est d’autant plus vrai que nous sommes dans un contexte où l’essentiel des ressources en devises provient de l’exportation d’une matière première et que, en outre, c’est l’Etat qui en est le détenteur exclusif. Au même titre que l’ouverture commerciale et le démantèlement douanier, la surévaluation de la monnaie nationale, puisque c’est de cela essentiellement qu’il s’agit dans le cas d’une économie rentière, est une configuration porteuse des mêmes incompatibilités que celles qu’on vient d’évoquer, de sorte que c’est la promotion d’un régime de croissance indépendant de la rente qui s’en trouve compromise.

En somme, le mode d’insertion internationale de l’économie revêt, au travers des configurations concrètes de ses principales composantes, un statut particulier dans la question de la cohérence du mode de régulation. Les expériences sommairement évoquées au chapitre I montrent toutes que l’un des enjeux de tout processus de développement est la capacité du pays considéré à articuler ses mécanismes internes de régulation économique et sociale avec les contraintes et opportunités qui naissent de son insertion internationale.

Si l’on se réfère encore une fois à la typologie développée par M. Pereira et B. Theret202, on peut, en prenant cette fois-ci en compte simultanément l’ensemble des configurations des principales formes institutionnelles, construire un schéma simplifié, sous forme d’espace tridimensionnel, dans lequel on pourrait visualiser les incompatibilités qu’on vient d’évoquer.

La figure ci-dessous en fournit une illustration.

Ainsi, le point A, qui représente la configuration initiale203, constitue le point de départ à partir duquel le changement institutionnel va s’enclencher. Un changement sans incompatibilités impliquerait que le déplacement de la position du pays s’effectue sur l’axe-diagonale AB. Tout écartement, plus ou moins grand, de cette trajectoire impliquerait l’apparition d’incompatibilités plus ou moins significatives.

L’incompatibilité dont il est question entre configurations institutionnelles peut être appréhendée en termes de cohérence sociétale du mode de régulation. Se référant aux cas du Mexique et du Brésil, M. Pereira et B. Theret (2000) définissent deux configurations idéales-typiques  ayant chacune une cohérence sociétale forte : le clientélisme politique et le corporatisme étatique. La première configuration appelle une politique économique « structuraliste » faisant de nécessité vertu (contrôle social faible, politique de haute inflation favorable à une croissance forte, condition de légitimité du régime politique) ; la seconde configuration nécessite une politique économique de type monétariste et libéral à l’égard de la finance privée, avec contrôle étatique étroit du secteur productif… Dans le graphique ci-dessus, la première correspondrait au point A, la seconde au point B.

Remarquons que si la grille analytique qu’on vient de mobiliser permet de visualiser des trajectoires institutionnelles cohérentes, ne comportant pas d’incompatibilités entre configurations institutionnelles, elle permet également de mettre en évidence un autre type de contrainte  dont il faut tenir compte : la dépendance de sentier. Graphiquement, celle-ci implique que le déplacement sur les axes soit limité à un seul degré à la fois.

La figure ci-dessus pourrait être reprise en intégrant la forme institutionnelle « budget », avec ses configurations polaires et intermédiaires, à la place du rapport salarial dont on sait que le rôle, en régime rentier, est de moindre importance.

3. L’inaptitude avérée de l’architecture institutionnelle d’ensemble à susciter et « piloter » une dynamique d’accumulation productive, conséquence de l’incompatibilité des régulations partielles.

Cette incapacité découle du fait que la hiérarchie institutionnelle demeure déterminée par l’Etat et l’insertion internationale. La nouvelle configuration institutionnelle, dont on vient de décrire, à grands traits, les composantes essentielles, semble obéir davantage à une volonté de mettre l’économie nationale ou, plus précisément, le régime rentier d’accumulation, à l’abri des effets de la volatilité des cours du pétrole sur le marché mondial204 ; le but final étant de garantir l’existence de capacités d’importation adéquates et le plus longtemps possible.

Les changements institutionnels opérés depuis maintenant deux décennies semblent donc dessiner les contours d’une nouvelle régulation dont l’objectif premier est de contrer les effets induits par les fluctuations du prix du pétrole sur la balance des paiements, les revenus budgétaires et la masse monétaire, effets qui sont autant de sources de fragilité pour l’économie dans son ensemble. Ces changements ne paraissent pas être destinés, jusque-là du moins, à faire émerger un secteur productif performant, mais présentent les caractéristiques d’une gestion distributive, bien qu’un peu plus « prudente », de la rente.

On retrouve là les termes du diagnostique classique selon lequel les incohérences qui caractérisent les changements institutionnels, c'est-à-dire la réforme, découlent précisément du fait que ceux-ci sont, dès le départ, pensés dans le cadre d’une problématique de la circulation, problématique qui évacue totalement les déterminations sociales de la production. En réhabilitant le marché à partir de la circulation, la nouvelle configuration institutionnelle ne fait que modifier le mode d’appropriation de la rente externe. Elle ne lève pas les blocages auxquels est confronté le système productif interne205, et par suite l’accumulation interne. La persistance de ces blocages, dont l’origine est à rechercher dans la configuration institutionnelle d’ensemble, empêche le développement et l’extension des activités productives.

Dans un régime rentier, la rente de base comporte la capacité d’ « intoxiquer », au travers les formes institutionnelles, le comportement des agents et des acteurs de telle façon que ces derniers se retrouvent incités à chercher à transformer les opportunités qui se présentent en lieux et formes de captation d’une rente. Le comportement rentier est une résultante de l’environnement institutionnel. Il s’agit là d’une idée largement admise par l’approche institutionnaliste dans ses différentes variantes. Ainsi, pour D. North (2005), la matrice institutionnelle définit l’ensemble des opportunités, que les rendements les plus élevés y soient dus à une redistribution des revenus ou à l’activité productive. Usant d’une image, l’auteur écrit que si l’activité la plus rentable dans une économie est le piratage, on peut s’attendre à ce que les agents et acteurs investissent dans les compétences et les connaissances qui feront d’eux de meilleurs pirates. Tel semble être la difficulté première de l’industrialisation dans un pays rentier : comment faire pour que les hauts rendements soient le fait d’activités industrielles ? Autrement dit, comment faire pour que les acteurs s’orientent vers les activités productives en général, et industrielles en particulier ?

La réponse à la question n’est pas aisée, mais il semble, à la lumière de l’expérience accumulée, que certaines configurations institutionnelles sont incompatibles avec la nécessité, constamment prônée dans le discours économique officiel, d’enclencher une dynamique industrielle. Il en est ainsi par exemple de la gestion du taux de change du dinar, du démantèlement douanier, du maintien d’un secteur public dont le fonctionnement demeure dominé par la logique clientéliste... etc.

Dans ces conditions, l’on ne peut ne pas évoquer l’idée simpliste selon laquelle les dépenses budgétaires consacrées à l’extension et la modernisation des infrastructures de base, principale caractéristique de l’action économique de l’Etat durant la décennie 2000, sont à même de stimuler l’investissement productif privé. S’il est vrai que de tels équipements socio-économiques sont de nature à réunir les conditions matérielles nécessaires à l’investissement et à améliorer la compétitivité économique du pays, il n’en demeure pas moins vrai que l’investissement productif privé est tributaire d’autres facteurs institutionnels. Pour H. Benissad (2009), ces conditions sont loin d’être réunies dans l’Algérie des années 2000.

La question de l’efficacité productive ne se réduit pas à celle de l’émergence des relations concurrentielles, au développement du marché. Dans l’approche en termes d’institutions, l’économie ne se réduit pas au marché qui, au demeurant, est lui-même une construction sociale. C’est l’absence de projet de « cité industrielle » qui est le point faible des réformes, et non pas l’omniprésence de l’Etat ou son absence.

L’expérience récente montre que la libération des comportements marchands, qui, par ailleurs, s’accommodent bien des relations clientélistes, ne suffit pas à engendrer une industrie compétitive apte à se placer dans le marché international. Et il serait naïf de croire à cet égard que l’IDE a vocation à moderniser les structures productives, tâche que seul un projet de stratégie industrielle nationale est à même de concrétiser.

Un autre exemple illustre l’inaptitude du nouveau mode régulation à « susciter » et piloter une dynamique d’accumulation en rupture avec la rente  et sur lequel on ne peut faire l’impasse. Il s’agit de l’usage qui est fait du crédit. On peut admettre qu’une gestion centralisée du crédit206 crée un canal de transmission entre la volonté politique de l’Etat, quand celle-ci est porteuse d’un projet industriel national, et l’action économique des agents privés. L’arme du crédit demeure un puissant outil dans la soumission du monde des affaires à la volonté économique de l’Etat. En effet, le contrôle étatique du système bancaire ouvre la possibilité que des objectifs économiques définis par l’Etat soient réalisés par les entreprises, quand bien même ces dernières sont pour l’essentiel privées207. Mais à voir la configuration institutionnelle du système bancaire en Algérie, l’on ne peut que s’étonner du fait qu’en deux décennies de réformes, cet instrument n’ait jamais été mobilisé, d’une façon ou d’une autre, par l’Etat. Il va sans dire qu’une gestion centralisée du crédit n’aurait eu pour but que l’encouragement de certains secteurs et activités en particulier, mais en l’absence d’un projet industriel, une telle gestion n’a pu être mise en œuvre. D’où le « spectacle » d’un système bancaire étatique livré à lui-même, fonctionnant à vue et croulant sous le poids de surliquidités oisives.

Notes
191.

Il n’est pas inutile de rappeler ici qu’à la base des approches institutionnalistes en général et de la théorie de la régulation en particulier se trouve l’idée essentielle que des arrangements institutionnels particuliers infléchissent la trajectoire de croissance d’une économie donnée (Julliard, 2002, 225). Pour la théorie de la régulation, le mode de régulation a pour vocation de  reproduire les rapports sociaux fondamentaux à travers la conjonction des formes institutionnelles historiquement déterminées ; soutenir et « piloter » le régime d’accumulation en vigueur ; et, enfin, assurer la compatibilité dynamique des décisions décentralisées (Boyer, 2004).

192.

Voir chapitre III, section 1.

193.

Nous avons, dès l’introduction, donné une définition du principe de complémentarité des institutions (voir introduction générale). L’importance du principe tient en l’occurrence dans le fait qu’il tend à attribuer la qualité de mode de régulation au degré de perfection du couplage des institutions.

194.

D’après le document « Arab Human Development Report 2002 » du PNUD, l’Algérie est le pays arabe qui enregistre le plus bas niveau de productivité du capital physique, ce qui vient s’ajouter à une très faible productivité de la main d’œuvre. Selon ce rapport, la productivité par travailleur est tombée de 2.2 % par an entre 1989 et 1997. Bien que, selon les estimations du FMI, la situation se soit légèrement améliorée durant les années 90 et 2000, la productivité totale des facteurs demeure très faible.

195.

La privatisation n’est pas nécessairement synonyme d’efficacité, mais elle en est un préalable. En l’absence d’un environnement concurrentiel, pour ne prendre que cet aspect, le secteur privé ou le capital privé peut se révéler aussi inefficace que le secteur public. Mais à la différence du secteur public, le secteur privé parvient toujours à s’assurer une rentabilité financière. Dans le contexte institutionnel qui prévaut en Algérie, et si l’on fait abstraction du principe de complémentarité qui préside à l’action de chacune des formes institutionnelles, il nous semble que la privatisation est un préalable pour doter l’activité productive de l’organisation sociotechnique à même de la rendre économiquement efficace.

196.

D’une manière générale, la compatibilité peut être définie comme une contrainte qui doit permettre de statuer sur la qualité d’une transition institutionnelle effectuée et donc sur l’éventualité d’apparition de tensions dans les phases ultérieures du changement institutionnel.

197.

Signalons que dans le tableau ci-dessous, le signe (x) signifie l’éventualité de l’existence d’une incompatibilité entre les configurations institutionnelles correspondantes. La présentation en tableau à double entrée nous permet par ailleurs de distinguer entre ce qui relève de l’incompatibilité entre régulations partielles, prises deux à deux [cases contenant le signe (x)] et ce qui relève de l’inaptitude de chaque régulation partielle, prise séparément, à piloter l’accumulation [cases de la diagonale principale].

198.

Une politique industrielle n’aurait de sens que si elle ambitionne de dépasser le fondement rentier du régime d’accumulation, ce qui passe, entre autres, par la promotion des exportations industrielles.

199.

Dans les conditions actuelles, on parlerait, à juste titre, de rapport d’emploi efficient plutôt que de rapport salarial dans la mesure où ce dernier est un mode de mise au travail des producteurs qui suppose une efficacité productive que n’implique pas nécessairement le premier.

200.

Il est d’ailleurs symptomatique de noter que l’un des traits significatifs de la période d’ouverture entamée depuis le début des années 90 est l’absence presque totale de documents sur les objectifs et les moyens de cette politique.

201.

En cela l’auteur rejoint la thèse de L. Addi (1990) selon laquelle l’économie en général et le secteur public en particulier sont mobilisés comme ressource de pouvoir politique.

202.

Cette typologie repose sur l’identification des configurations polaires et intermédiaires de chacune des formes institutionnelles. Ainsi, au rapport salarial correspond les configurations : clientélisme, pluralisme, néo-corporatisme, corporatisme étatique ; Au rapport monétaire correspond : le structuralisme, le keynésianisme structurel, le keynésianisme commercial, le monétarisme ; …etc. Pour plus de développements, voir Pereira et Theret (2000).

203.

Autrement dit, celle qui a prévalu jusqu’à la fin des années 80.

204.

Cela se traduit par l’accumulation, au-delà des nécessités, des réserves de change, l’institution du Fonds de Régulation des Recettes (FRR) dont les ressources atteignent des sommes considérables. Voir section 1 du chapitre précédent.

205.

Si tant est qu’on puisse parler de système productif.

206.

Gestion qui peut en l’occurrence reposer sur le caractère directement étatique d’une large majorité d’institutions bancaires et financières ainsi que sur le contrôle que l’Etat exerce sur l’accès au crédit externe par les mécanismes d’ approbation et d’octroi de garanties. En outre, cette gestion apparaît d’autant plus faisable que les banques ayant l’Etat pour principal actionnaire ont une implantation nationale.

207.

Il convient de remarquer que l’expérience de certains pays qui ont entrepris, avec succès, de s’industrialiser montre que la planification étatique est possible même si elle doit reposer sur un appareil productif composé majoritairement d’unités privées.