Chapitre V : Problématique du changement institutionnel en Algérie.

Introduction

La question du changement institutionnel est complexe. Elle fait appel à des approches pluridisciplinaires et son analyse mobilise des concepts qui, très souvent, dépassent le cadre très réduit de l’analyse économique. C’est pourquoi il convient de définir, autant que faire se peut, une perspective analytique qui, tout en permettant de rendre compte de la richesse des déterminants du changement institutionnel, soit à même de permettre une lisibilité plus ou moins accessible du phénomène231.

Pourquoi poser la question du changement institutionnel en Algérie ? Dans les chapitres précédents nous avons essayé de montrer que la médiocrité des résultats économiques de l’expérience algérienne de développement, aussi bien dans sa phase étatiste que « libérale », s’explique fondamentalement par l’incapacité du pays à générer des configurations institutionnelles en adéquation avec les nécessités de l’évolution de la situation économique et sociale, notamment celles se rapportant au dépassement du caractère rentier du régime d’accumulation. Il nous semble que, n’était-ce la chute des prix des hydrocarbures en 1986, la pratique étatiste aurait sans doute continué encore longtemps. De même, nous observons depuis la fin des années 80, que les réformes libérales sont souvent menées par à coups, avec beaucoup d’hésitations, donnant parfois lieu à de profondes remises en cause. C’est dire combien la question du changement institutionnel se pose avec acuité dans l’évolution de l’économie algérienne.

Bien qu’il ne soit pas possible, dans le cadre de ce chapitre, de revenir sur les différentes théories du changement institutionnel, quelques points de repère s’avèrent toutefois indispensables pour avoir l’éclairage théorique nécessaire.

Après donc une revue succincte de la littérature consacrée à cette question, nous reviendrons sur l’approche de la régulation dont le cadre général de la recherche s’articule autour de la question de la genèse et de l’évolution des institutions de l’économie d’un pays  dans un contexte historique donné. Par-delà les mécanismes de changement auxquels elle renvoie, la TR fournit, en identifiant quelques facteurs du changement institutionnel et en insistant sur le caractère conflictuel de celui-ci, une grille d’analyse fort intéressante. Enfin, dans le contexte historique spécifique de l’économie algérienne, il semble qu’il faille admettre que c’est le politique qui détermine le contenu et le rythme du changement institutionnel. C’est là une hypothèse largement admise, mais qui gagnerait à être davantage étayée par l’examen des transformations institutionnelles récentes.

Notes
231.

Bien que les dernières années aient mis au premier plan du débat la question des réformes institutionnelles, qu’il s’agisse de la grande transformation des économies de l’Europe de l’Est ou des programmes d’ajustement structurels mis en œuvre sous l’égide du FMI, beaucoup moins de travaux ont cependant été consacrés à l’analyse de l’évolution des institutions. En outre, une revue de la littérature consacrée à la question montre qu’aucune des théories pures ne parvient à rendre compte de la richesse des déterminants des changements institutionnels qui ont eu lieu ces dernières années.