1.1.4. Jean Dubuffet, un artiste à retardement.

Le peintre peine lui aussi à connaître le succès, ou du moins une véritable reconnaissance dans le milieu artistique. Werner Spies dira ainsi de lui :

‘Un artiste à retardement, telle est l’attitude intellectuelle que Dubuffet revendique très consciemment.108

Selon l’optique traditionnelle, chaque artiste « découle » des précédents, non pas par imitation, mais, dans la plupart des cas, par esprit d’opposition ; cette relation existe toujours, de façon parfois implicite ou inconsciente. Jean Dubuffet peut être envisagé comme un artiste de la contestation, qui se propose de remettre en cause la domination et l’intimidation culturelles, et de dépasser les lieux communs de la tradition, en particulier celui de l’asservissement de l’image au texte. Le constat par lequel commence la réflexion du peintre sur ce sujet109 témoigne de sa lucidité sur le statut de l’image et de son désir de le voir évoluer. Bien plus qu’une simple « illustration » muette l’image doit être considérée comme un moyen d’« expression de la pensée »110, c’est notamment dans le cadre du livre que doit se produire ce changement d’« opinion », comme il l’indique dans une lettre à Gaston Gallimard :

‘Il vous appartient justement, éditeur d’ouvrages de luxe illustrés, de redresser cet état de choses et faire des livres où les images ne jouent plus un piètre rôle d’enluminures mais constituent une œuvre aussi méditée, aussi inventée, aussi capitale que l’œuvre littéraire à laquelle elle est liée.111

Jean Dubuffet dénonce, dans de nombreux textes, cette dévalorisation du pictural au profit du textuel, dévalorisation qu’il juge infondée et injustifiée. L’artiste s’insurge donc de façon virulente contre cette soumission, cet asservissement de l’image au texte. Il affirme ainsi que ces deux moyens d’expression sont aussi naturels et nécessaires au développement humain l’un que l’autre :

‘Exprimer sa pensée par le moyen de signes, de dessins et d’images est aussi naturel à l’homme que le langage verbal (on le voit bien chez les enfants).112

Il estime en outre que cette soumission de l’image n’a désormais plus aucune raison d’être et envisage, par réaction, de démystifier la littérature, de la repenser comme moyen de création et de communication, tout comme l’art. Jean Dubuffet abordera ainsi le thème des « fonctions mentales »113 propres aux langages visuels et écrits ; ces fonctions, même si elles diffèrent, n’en sont pas moins tout autant importantes et nécessaires. Le peintre démontrera ainsi que l’image, toute « asservie » qu’elle était, n’en a pas moins conquis, au fil des siècles, une liberté esthétique et une autonomie formelle qui font désormais défaut au texte114. Jean Dubuffet déplore que la littérature, étouffée dans le carcan de sa propre importance, ne prenne plus de risques, s’abîmant pour le peintre dans un immobilisme et un conformisme dangereusement sclérosant. La radicalité des positions de l’artiste sur ces questions est la conséquence de « la loi de l’économie psychique, qui veut que ce qu’on dit soit la contrepartie de ce qu’on fait », cette loi s’appliquant, comme le montre Michel Thévoz dans Détournement d’écriture, en particulier aux peintres qui se confrontent à l’écriture afin d’expliquer leur démarche artistique. Il s’agit de considérer ces écrits non comme « une élucidation mais comme un alibi à leur pratique réelle »115. Gilbert Lascault considère ce « perpétuel recours au principe de contradiction » comme un « mode de défense »116. L’ennemi de l’art, au fond, c’est la conclusion à laquelle Jean Dubuffet aboutit, c’est le mot, le terme, qui définit en finissant, qui encadre dangereusement la pensée.

‘Le langage me fait l’effet d’une très grossière sténographie ; un système de signes algébriques très rudimentaires, qui détériore la pensée au lieu de la servir.117

La façon dont il parle du langage nous oriente immédiatement sur l’une des lithographies de l’album, « dactylographe », sur laquelle nous remarquons une distorsion des lettres alphabétiques du clavier de la machine à écrire, au point qu’elles sont difficilement identifiables. Pour Jean Dubuffet, le langage, s’il reste un moyen de communication et d’art, peut aussi constituer une limite, se révéler comme un obstacle à l’échange, comme un écueil du sens : « comme instrument de communication, il ne livre de la pensée que le cadavre » et ,« comme instrument à penser, il alourdit le fluide, il le dénature »118. Ainsi, quand l’artiste affirme que la littérature est en retard d’un demi siècle sur la peinture, il ne songe pas à un retard historique mais qui possède sa raison d’être dans une différence statuaire profonde, comme il l’explique dans L’Homme du commun à l’ouvrage.

‘La peinture est un langage beaucoup plus immédiat que celui des mots écrits et en même temps bien plus chargé de significations. Elle opère par des signes qui ne sont pas abstraits et incorporels comme ceux que sont les mots.119

Jean Dubuffet s’attache, au cours de ses propres expériences plastiques, à dégager les caractéristiques propres à l’image qui, loin d’être inférieures à celles de la littérature, lui sont complémentaires. Cette « domination » traditionnelle du texte sur l’image n’a pas concrètement de raison d’être puisque le trait, la forme, tout comme le mot recèlent et suscitent toute une palette de sens, dénotatifs et connotatifs : Maurice Blanchot dit ainsi que « la peinture doit nous apparaître comme un langage spécifique », langage qui est plus ou moins « expressif » et « manifeste »120. Pour Jean Dubuffet l’art est un instrument de connaissance, l’image est un langage qui possède toute une palette de fonctions de communications.

‘Le but de l’art, depuis les Grecs, est supposé l’invention de belles lignes et de belles harmonies de couleurs. Abolie cette notion, que devient l’art ?
Je vais vous le dire. L’art alors retourne à sa vraie fonction, bien plus efficiente que l’arrangement de formes et de couleurs pour un prétendu plaisir des yeux.
La fonction d’assembler des couleurs en arrangements plaisants je ne la trouve pas très noble. Si la peinture était cela, je ne donnerais sûrement pas une heure de mon temps à une telle activité.
L’art s’adresse à l’esprit, et non pas aux yeux. C’est sous cet angle qu’il a toujours été considéré par les sociétés « primitives » et elles sont dans le vrai. L’art est un langage : instrument de connaissance et instrument de communication.121

Un autre des arguments de l’artiste est que la peinture, notamment à l’époque moderne, s’est affranchie progressivement de toutes contraintes, qu’elles soient figuratives, esthétiques ou conceptuelles, de façon beaucoup plus constante, soutenue et radicale que n’a pu le faire la littérature. Jean Dubuffet explique cet immobilisme par le fait que le langage est un produit direct de la culture :

‘C’est par où l’écrivain, qui n’a d’autre recours que le vocabulaire, c’est-à-dire un matériel qui est un produit de la culture, aura beaucoup plus de peine à se libérer d’elle que le peintre. Car ce dernier peut indéfiniment modifier ses signes, en inventer qui se prêtent à véhiculer le regard novateur qu’il porte aux choses, au lieu que les mots dont dispose l’écrivain sont lourds et grossiers signes résultants d’un regard porté une fois pour toutes et immuablement sur les choses par la culture, excluant toute autre incidence de regard que celle qu’a prescrite celle-ci, contraignant la pensée à adopter la même incidence, et l’empêchant de se rénover.122

L’image, par sa puissante charge émotive et poétique, livre directement le sens, du regard à l’esprit, sans passer par l’intermédiaire systématique et obligatoire du concept. C’est pourquoi, malgré les apparences, l’art jouit d’un espace plus grand de liberté et d’une meilleure disposition à l’expression de la spontanéité. Prenons pour simple exemple les œuvres d’art brut : l’expression des délires, de l’intime, de l’inconscient, passe de façon instinctive par le dessin, mais beaucoup de ces artistes intègrent du texte à l’image. Michel Thévoz explique ainsi cette co-existence instinctive :

‘Le fait est que, dans l’art brut en général, on rencontre très souvent, intégrés aux formes, des éléments de texte. Cela ne serait pas surprenant si des siècles de culture occidentale ne nous avaient accoutumés à une rigoureuse ségrégation de l’écriture et de l’image […]. Il reste que, dans les cultures plus anciennes, ou non occidentales, ou même chez les individus mal acculturés de notre société, on ignore cette ségrégation. […] Il est d’ailleurs symptomatique que les enfants intègrent spontanément des simulacres de textes dans leurs dessins, et que les « malades mentaux » en général (ceux que nous considérons comme auteurs d’art brut et les autres) passent sans discontinuité de l’image à l’écriture […]. Les enfants et les déviants nous rappellent en tout cas que l’écriture et le dessin ont pour support le même instrument, et pour origine la même pulsion.123

Mais lorsqu’ils écrivent les artistes bruts semblent simplement régurgiter la culture, sans chercher à davantage s’exprimer ; l’écriture devient le lieu d’un « réinvestissement libidinal », « le refoulé corporel fait retour dans les signes même de son oblitération »124. Celle-ci est marque, trace plutôt que signe, souvent une résurgence du passé (souvenir de la scolarité, du contexte familial ou professionnel), alors que le trait, la forme, expriment de façon plus manifeste la dimension intime du sujet.

Jean Dubuffet est particulièrement attaché à la notion d’instinct, cette faculté, essentielle selon lui en ce qui concerne l’acte de création, rapproche la peinture de la musique ou de la danse bien plus que de la littérature ou de la philosophie, comme il l’indique, toujours dans L’Homme du commun à l’ouvrage.

‘Je porte quant à moi haute estime aux valeurs de la sauvagerie : instinct, passion, caprice, violence, délire. J’ai dit que ce qui de la pensée m’intéresse n’est pas le moment ou elle se cristallise en idées formelles mais ses stades antérieurs à cela […] La peinture est un langage beaucoup plus spontané et direct que celui des mots : plus proche du cri, de la danse.125

Par ce dernier argument le peintre rétablit l’équilibre et réajuste sa pensée, en démontrant qu’à la soumission de l’image au texte répond dorénavant celle du texte à la culture. Le problème n’est donc plus dans une quelconque insuffisance sémantique de l’image – à laquelle nous ne croyons pas – mais dans l’influence, l’intimidation et l’emprise de la culture sur le milieu artistique, notamment dans le domaine des lettres. L’artiste va donc s’attacher à combattre cet ennemi commun aux arts, cette culture qui fige, pétrifie et atrophie au lieu d’épanouir. Cette contestation de la culture passe nécessairement par l’emploi du langage, avec la rédaction de ses « Positions anticulturelles » ; dans le domaine de l’art, ce parti pris se manifeste par l’emploi notamment de matériaux vulgaires et communs, par un refus systématique de répondre aux goûts du public, par l’absence, de fait, de tout esprit de complaisance. Jean Paulhan, dans son Guide d’un petit voyage en Suisse, fait le portrait du peintre Limérique126, qui s’apparente à Jean Dubuffet (ce dernier était du voyage, à la recherche d’œuvres d’artistes bruts) :

‘Le peintre Limérique porte les cicatrices et le crâne écabossé d’un enfant. Il vit content. Ses colères sont violentes et ses haines durables, mais à tel point privées de motif qu’on perdrait son temps à tacher de les prévenir. Il est poursuivi de l’idée d’un art immédiat et sans exercice – un art brut, dit-il – dont il pense trouver le rudiment chez les fous et les prisonniers. S’il apprenait qu’en quelque canton, un ours s’est mis à peindre, il y bondirait.127

Jouant sur le sens du mot anglais limerick, Jean Paulhan dévoile en un seul terme un portrait vivant du peintre, qui s’apparente à ce poème de 5 vers, souvent humoristique, irrévérencieux ou indécent, parfois obscène. Court, facile à mémoriser et ne nécessitant pas de talent poétique particulier, le limerick convient tout particulièrement aux comptines pour enfants et aux rengaines d’ivrognes, sa forme simple le destinant à un public populaire. Le dernier vers, appelé « punch line », clôt l’ensemble par une pique, un trait d’humour ou d’humeur, souvent paradoxal ou absurde. La définition s’accorde en effet parfaitement à la personnalité et à l’œuvre du peintre, à son « populisme naïf et sa verve grotesque »128.

Il serait bien trop long de chercher à retracer la vie du peintre, nous renvoyons ici à l’ouvrage biographique de Marianne Jakobi et Julien Dieudonné intitulé Dubuffet 129 et qui déroule le parcours sinueux de l’artiste, marqué par de long épisodes de renoncement. Arrivé à Paris en 1918, inscrit dans une académie de peinture, il fait beaucoup de rencontres, dont certaines seront décisives pour le reste de sa carrière. Max Jacob, en 1921, qui devient le premier mentor du peintre, Charles-Albert Cingria qui fait figure de modèle littéraire, et André Malraux, de vingt ans son aîné. Le peintre fréquente André Masson et dessine sous son influence paysages et personnages en plein repas, puis Fernand Léger, se reconnaissant dans cet artiste qui préfère l’objet industriel, la vie des rues et le quotidien aux sujets académiques.

En parallèle il s’essaye parfois à l’écriture, à l’instigation souvent de Jean Paulhan130 : « tu veux toujours me faire écrire. Les diables d’écrivains ont la manie de faire écrire tout le monde comme les ivrognes ont la manie de vous faire boire »131. En 1933, 1938 et 1940 il se lance mais les projets n’aboutissent jamais132. Il n’est pas fait pour les lettres, dira-t-il, il n’est pas réellement « écrivain » mais « écrivant »133, selon la distinction établie par Roland Barthes. Il prend le plus souvent la plume pour rendre compte de ses travaux picturaux, pour en établir la chronologie, l’analyse, pour se faire critique de lui-même ou des autres, pour manifester ses positions. Michel Thévoz, dans Détournement d’écriture, s’interroge sur l’attrait et la répulsion mêlés qu’éprouvent en général les artistes à l’égard de l’écriture. Il remarque que ceux-ci choisissent la plupart du temps de s’exprimer sur le mode de la dénégation. Nous pouvons expliquer ce phénomène par le fait que l’art, dans son principe même, engage

‘son auteur dans des espaces mentaux inexplorés, c’est-à-dire non encore balisés par les mots. La création d’art est une aventure qui excède, qui devance ou qui contredit la théorie.134

De plus, ces écrits vont avoir, chez la plupart de ces artistes, une influence proprement interne, dans le sens où l’incursion dans le domaine de l’écriture affecte d’une certaine manière leurs productions plastiques. « Une intervention dans l’un des domaines affecte le système tout entier »135, Michel Thévoz illustre cette théorie en prenant les travaux de Jean Dubuffet pour exemple.

En effet, les essais littéraires du peintre, suscités par sa pratique picturale, vont souvent infléchir la genèse de ses œuvres, leur donner une signification ou une orientation nouvelles, et par là même déterminer ou affirmer ses positions vis-à-vis de l’art, de la littérature, de la culture. Un chapitre entier de Détournement d’écriture est consacré à l’artiste, « Dubuffet et le casseur de noix »136. Michel Thévoz s’appuie sur une nouvelle de Franz Kafka137, qui démontre que la maladresse du profane éclaire souvent bien plus sur une technique, une discipline, que les gestes concertés du « virtuose »138.

‘Ce n’est certainement pas un art que de casser une noix et personne ne se risquera donc à convoquer tout un public pour le distraire en cassant des noix. S’il le fait cependant et que son projet réussisse, c’est la preuve qu’il s’agit malgré tout d’autre chose que de casser de noix. Ou bien qu’il s’agit vraiment de casser des noix, mais il apparaît que nous n’avions pas pris cet art en considération, parce que nous le pratiquions sans peine et que ce nouveau casseur de noix nous en a le premier fait apparaître la vraie nature, et peut-être vaut-il même mieux, pour obtenir cet effet, d’être un peu moins habile à casser des noix que la majorité d’entre nous.139

La maladresse peut donc être une composante de l’art, elle peut dévoiler les ressources insoupçonnées d’une technique, inaccessibles au virtuose ou au spécialiste140. C’est le cas notamment lorsque le peintre se confronte à l’écriture, mais aussi à la lithographie : à la fois amateur et « agitateur »141, il absorbe une technique pour mieux la disloquer, comme lorsqu’il peint avec des matériaux du bâtiment (plâtre, ciment, chaux, sable, cendres…). C’est ce qu’il fera par la suite dans le domaine littéraire en créant, en 1947, les notions de « jargon relatif » et de « jargon absolu »142 :

‘Mon étude du dialecte parlé à El Goléa eut pour fruit détourné la rédaction d’un texte en jargon dont m’avaient donné l’idée les notations que je faisais des mots parlés avant de m’initier à l’écriture arabe. J’étais intéressé par la grammaire étrange de notre propre français tel qu’il est parlé s’il était écrit phonétiquement par un illettré, et par le caractère sibyllin et incantatoire de telles inscriptions.143

Le premier transcrit le langage phonétique sans se préoccuper de la grammaire ou de l’orthographe. Les espacements entre les mots ne sont pas respectés et l’on est obligé, pour comprendre le texte, de le lire très lentement à voix haute. Le « jargon absolu » radicalise cette pratique, puisque les mots même sont inventés.

Contraint – à cause de sérieuses difficultés financières – de reprendre les rênes du négoce de vin familial, Jean Dubuffet ne se consacre définitivement à la peinture qu’à partir de 1942, à l’âge de quarante et un ans. Cette année marque une réelle rupture, ses finances stabilisées, le négociant à la retraite peut se jeter corps et âme dans sa vie d’artiste. Les peintures de cette époque, d’une grande diversité, sont reproduites dans leur intégralité dans le premier fascicule du catalogue de ses travaux, sous le titre de Marionnettes de la ville et de la campagne 144 . Il peint alors à la gouache ou à l’huile des thèmes que nous retrouvons, pour la plupart, dans la série de lithographies de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école : des femmes et leurs enfants, des leveuses de bras, des portraits, des scènes à bicyclette... Dès ses débuts Jean Dubuffet est la cible d’articles virulents, tout en suscitant chez les poètes (tels que Francis Ponge, Pierre Seghers, André Frénaud, Paul Éluard…) une telle exaltation que certaines de ses peintures, et ce sera notamment le cas pour quelques lithographies de Matière et mémoire, vont directement influencer la genèse de textes poétiques tout autant que critiques. Tout commence avec la série des « Métros », un petit album de gouaches sur le thème du métro que Jean Dubuffet compose en mars 1943 pour son propre usage. Alors qu’il le montre à Jean Paulhan, ce dernier, enthousiaste, lui propose d’écrire un texte sur cette série de peinture. L’ouvrage parait quelques mois plus tard, agrémenté de nouvelles lithographies que l’artiste compose pour l’occasion, estimant que les gouaches originales ne valaient pas le texte écrit par Jean Paulhan.

Dès le mois d’avril 1944, le peintre s’intéresse aux rapports entre le texte et l’image. Critiquant violemment le principe d’illustration traditionnelle, qui incarne pour lui une soumission systématique de la peinture à l’écriture, il va tenter, dans nombre de ses œuvres, d’inverser la tendance. Pour lui, l’image est source de sens au même titre que l’écrit ; il déplore ainsi, dans L’Homme du commun à l’ouvrage « la position de condescendance » des écrivains à l’égard des artistes. C’est en s’emparant du livre, lieu de savoir et domaine des lettres, que Jean Dubuffet va notamment s’inscrire en opposition avec cette tradition de l’art au service du texte. Car l’on a bien plus écrit sur l’artiste qu’il n’a peint pour les autres, et il sera presque toujours à l’origine des diverses collaborations à venir :

‘C’est bien vrai que j’ai les plus grandes peines à combiner des illustrations pour un texte qui m’est soumis ; à vrai dire je ne l’ai encore jamais fait ; je n’ai jamais pu. Mais si c’est au contraire ton texte qui prend point de départ dans des images déjà par avance faites, je me sens tout à fait à l’aise, et il me semble que c’est là le processus normal et sain de la chose.145

La correspondance avec Jean Paulhan se montre révélatrice des conceptions de l’artiste, qui sont affirmées dès l’année 1944. Son rapport à l’écriture se révèle conflictuel, comme nous l’avons vu, et ce malgré les pressantes sollicitations du mentor. Mais il écrira du moins une quantité prodigieuse de textes, considérations techniques, propos sur l’art ou la culture, critiques d’art proprement dites, littéraires parfois (« Céline pilote »146), carnets d’atelier. Sa profonde admiration du style de Louis Ferdinand Céline l’inspire et l’intimide147 ; il dit préférer Mort à crédit, ou Nord, au Voyage au bout de la nuit. Jean Dubuffet ne cessera jamais, en marge de ses productions picturales, de « noter et connoter »148, même si l’écriture demeure pour lui « matière où on s’empêtre »149. Nous ne possédons par ailleurs que très peu d’informations concernant les écrits antérieurs à 1943, qui, pour la plupart, ont été détruits ; il en fait mention dans sa Biographie au pas de course 150 . Cette période est dorénavant qualifiée, par les critiques, de « préhistorique »151. Les textes composés par le peintre entre 1944 et 1945 sont peu nombreux, en voici la liste152 :

1944 : « Saint-Ouen. Le marché » (t. I, pp. 108-110)
« Localisations et partages » (t. III, pp. 239-244)
1945 : « Avant-projet d’une conférence populaire » (t. I, pp. 31-53)
« Préface à l’édition de Londres d’un Court traité des graffiti de René de Solier » (t. II, pp. 9-
18)
« Plus Modeste » (« Notice commune ») » (t. I, pp. 89-93)
« Notes pour les fins lettrés » (t. I, pp. 54-88)
1945 ? : « Fleuret et Fleurette, Gaston Pralins – Biographie – » (t. III, pp. 175-179)
« Juhot dit Biot – Biographie – » (t. III, pp. 180-182)
« J.B. Fleury – Biographie – » (t. III, pp. 183-185)

Le peintre explique, dans une lettre à Jean Paulhan, qu’il lui est encore plus difficile d’écrire sur ses propres travaux ; il le fera pourtant, d’une manière détournée, dans les textes qui composent les Prospectus, quatre gros volumes débordants de notes, de manifestes, et d’exposés d’opinions artistiques, littéraires et culturelles.

‘Mal parce que trop vite et aussi parce qu’il est si malaisé de parler des œuvres d’art (et surtout celles qu’on fait soi-même). Les mots sont trop lourds, ils frappent comme des pavés, assommant tout ce qu’ils touchent.153

Ainsi, le 25 d’avril 1944, il expose au mentor ses exigences en matière de critique d’art, et notamment celles le concernant, insistant sur la nécessité de l’indépendance esthétique de l’écriture : celle-ci doit accompagner l’œuvre plastique, dire autre chose que ce qui s’y trouve déjà, remplir les « vides du tableau »154. Le texte de Francis Ponge fonctionne, à notre sens, comme une merveilleuse réponse aux désirs du peintre.

‘Pour la critique dite d’art, mon Système est la souplesse même, pas têtu du tout, infléchissons-le. Il faut que les auteurs se souviennent d’être poètes avant toutes choses ; en toutes entreprises humaines il faut d’abord être poète, c’est la clef de tout. Pas experts, pas savants, mais : poètes. Et se souviennent qu’un morceau de critique d’art doit être d’abord lui-même une œuvre d’art. Et non pas seulement une doublure cousue au revers de l’œuvre d’un autre, un envers postiche et superflu : pas besoin de doublures.155

Cette position est emblématique d’un certain nombre de choix que va faire l’artiste lors de la conception de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école. Ainsi, l’on comprend mieux qu’il ait songé – ou que Jean Paulhan lui ait soufflé, cela reste difficile à déterminer – à Francis Ponge, qui à l’époque, ne connaissait pas grand-chose du principe lithographique. C’est un amateur qu’il fallait à Jean Dubuffet, un « esprit non prévenu » (M.M., p. 1) qui sache se pencher sur les choses avec son regard d’homme et non pas de spécialiste : quelqu’un qui sache écouter la matière et lui répondre, comme le montre cette lettre à Maurice Auberjonois :

‘Ecoutez-moi bien, vous n’avez pas raison votre papa et vous – et tous nos actuels peintres professionnels qui pensent aussi que les écrivains devraient s’abstenir de traiter de la peinture. Méfiance en tous domaines aux spécialistes ! […] C’est au passant non averti, moi, que j’en veux. Mon plus grand plaisir est d’émouvoir quelqu’un qui n’a jamais auparavant aimé de peintures. Que le plombier, l’épicier, expriment alors ce qu’ils éprouvent, cela m’intéresse bien plus que les commentaires de M. André Lhote. Et s’il s’agit de l’écrire, alors pour l’écrivain, je veux dire évidemment le bon écrivain, celui qui sait mieux qu’un autre écrire, il me parait mieux que tout autre y être capable et sûrement que je m’intéresse grandement à ce qu’il en dit.156

Ainsi, tous deux se rejoignent sur ce point : ils se présentent, en effet, comme de simples artisans et refusent d’être assimilés aux divers mouvements en vogue ; Francis Ponge, dans nombre de ses lettres, répète à qui veut l’entendre qu’il n’est pas poète, tandis que Jean Dubuffet se pose, du moins au début de sa carrière, comme un amateur plus que comme un professionnel. Il existe une anecdote intéressante à ce sujet : quelques années plus tard, l’artiste aura un différent avec la propriétaire de l’atelier qu’il occupait alors et qu’elle voulait récupérer. La seule façon de conserver l’usage des locaux était d’être déclaré sous une catégorie professionnelle. C’est la seule fois où Jean Dubuffet acceptera d’être considéré comme un peintre, demandant même à Jean Paulhan de lui établir un certificat de profession157. Car, très vite, il se révèle débordé par le succès inopiné dont il fait l’objet, dans une partie du monde de l’art et de la littérature. Depuis sa rencontre avec Jean Paulhan, ce dernier lui envoie, chaque jeudi, des auteurs ou peintres de sa connaissance. Il est l’objet de constantes sollicitations, qui gênent son travail et qu’il ressent parfois comme des agressions. Il signera ainsi, le 6 mai 1944, avec un humour grinçant, une de ses nombreuses lettres à Jean Paulhan : « Jean Dubuffet, ex peintre, actuellement écriveur de lettres, receveur de visites et de congratulations »158.

La vocation enfin trouvée lui semble déjà entravée par le succès. Il continue toutefois d’expérimenter, aménageant des horaires de visites aux indiscrets amateurs de ses recherches plastiques. Les travaux de l’époque, marqués notamment par des grattages, ressemblent par leurs sujets mêmes aux lithographies de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école : scènes de maternités, de toilettes, de promenades à vélo, portraits hommes qui fument, de femmes qui se coiffent, de vaches… Ces dessins sur lesquels il s’échine alors, des dessins à l’encre de chine, vont l’amener à s’intéresser aux diverses réactions du papier, lorsqu’il est travaillé. Ses travaux s’orientent vers un désir matérialiste qui sera comblé par la suite par le principe lithographique : il appliquera ainsi, comme nous le montre le texte de Francis Ponge, les mêmes traitements à la pierre qu’au papier. Le peintre donne de ses nouvelles, le 14 mai 1944, dans une lettre destinée à Jean Paulhan.

‘Je me tiens constamment ces jours en claquant des dents, vu que je m’occupe à longueur de journée à des dessins à l’encre de Chine. Pas des graphismes déliés (j’en ferai aussi) respectant la fleur du papier ; mais au contraire le papier je le besogne, l’arrache, le griffe, l’écorche. Il me fait apprendre à dessiner ; je n’ai jamais su le faire d’une manière qui me satisfasse et il y a longtemps que je voulais faire cet apprentissage. Bien entendu en disant dessiner, je ne pense aucunement à reproduire fidèlement des objets ; cela tout le monde sait le faire et moi aussi naturellement ; mais il s’agit de toute autre chose : animer le papier, le faire palpiter. Il s’agit d’apprendre à faire un trait, un petit trait de cinq centimètres de longueur : mais qui vive, dont le pouls batte.159

Cette lettre de Jean Dubuffet témoigne d’une soif d’apprentissage constante que la plupart de ses œuvres de démentiront pas : il est en effet de ces artistes qui se prennent de passion pour une activité ou un domaine, sur lequel il vont se focaliser « comme des forcenés »160, jusqu’à ce qu’ils décident de passer à autre chose. Dès le mois de juin, le peintre présente les premiers signes d’intérêts pour la lithographie, il en fait part, comme à son habitude, au confident Paulhan. C’est lui qui, à la demande de Jean Dubuffet, introduira le peintre auprès de l’imprimeur-lithographe Fernand Mourlot. Son atelier, comme l’indique Robert Mélançon, était alors déjà considéré comme prestigieux, ayant accueilli, depuis 1937, des peintres tels que Georges Braque, Henri Matisse, Juan Miro, Pablo Picasso…

‘Fernand Mourlot a su intéresser les plus grands artistes contemporains à la lithographie, qui était pratiquement réduite, au début du siècle, à l’impression d’affiches commerciales ; on doit à son action la place éminente qu’elle a retrouvée dans l’art contemporain.161

Le 14 juin 1944, Jean Dubuffet demande à Jean Paulhan de lui écrire une lettre d’introduction auprès de l’imprimeur, pressé d’apprendre par son récent amour du papier.

‘Je suis fort content de mes dessins à l’encre. Je me prends de passion pour le papier ; vous verrez comme je le larde, et comme, ce faisant, j’arrive à le faire parler.
À ce propos, pourriez-vous écrire à M. Mourlot pour me recommander auprès de lui, croyez-vous que je pourrais lui demander de m’initier à la technique de la litho en couleur : car je voudrais, non pas faire des gouaches que ses spécialistes reproduiraient ensuite sur pierres mais je voudrais travailler moi-même les pierres, et même faire moi-même les tirages. Une lettre d’introduction de vous auprès de Mr Mourlot, dès à présent, me serait bien utile.162

Le peintre fait ici preuve d’une farouche volonté de liberté, mais c’est là encore Jean Paulhan qui lui ouvre la voie ; ce dernier écrit sur le champ la lettre demandée.

La rencontre a lieu six jours à peine après cette lettre, soit le 20 juin 1944. Elle nous est, là encore, relatée dans tous ses détails par le peintre, dans une lettre datée du jour même et adressée à Jean Paulhan.

‘Je téléphone chez Mourlot, en fin de matinée ; il n’y est pas. À deux heures il a la bonté de me rappeler lui-même spontanément ; à cinq heures il est à mon atelier. Montre de peintures et de dessins : marques d’approbation. Déclare s’intéresser à tout cela, et qu’il reviendra bientôt, et qu’on fera des choses ensemble etc. Témoigne en particulier de l’intérêt pour les dessins, et pour les graffiti du « petit épistolier » ; les examine attentivement du point de vue reproduction ; dit que la reproduction est possible (les dessins plus faciles, les graffiti moins mais très possible néanmoins) paraît disposé à s’intéresser à des recueils des uns et des autres (coûterait un peu cher pour les graffiti).163

Nous voyons donc que dès le mois de juin, l’artiste a déjà dans l’idée d’intégrer les lithographies à venir dans un recueil, d’installer l’image au cœur même du livre. Le premier contact du peintre avec la technique lithographique date du mois de juillet 1944 : Pierre Seghers lui propose de réaliser une lithographie pour la couverture de son livre L’Homme du commun ou Jean Dubuffet 164 . Le peintre est alors convié à se rendre à l’atelier de Fernand Mourlot pour s’essayer à cette technique, et cette première lithographie en entraînera quantité d’autres, comme celles de la série des Murs 165 .

En juillet 1944, Jean Dubuffet également fait la connaissance d’un de ses voisins, un dénommé M. Pons, dont parle Pierre Seghers dans La Résistance et ses poètes 166 , qui possède chez lui une presse lithographique. M. Pons, imprimeur de métier, travaillait activement et clandestinement pour le compte de la résistance, publiant tracts, textes, au péril de sa vie. Seghers lui rend visite, à son atelier, qu’il compare à une « véritable usine de faux »167, les manuscrits côtoient fausses cartes d’identité, faux passeports, faux tampons et cachets de la Gestapo ou de la milice, tracts et journaux clandestins. Les deux hommes sympathisent et M. Pons met sa presse à la disposition de Jean Dubuffet, qui l’installe dans son atelier rue de Vaugirard. Il lui donne également les quelques bases nécessaires pour commencer. Cinq premières épreuves vont être tirées avec son aide, « Jojo est reparti », « Quatre petits motifs », « Paysage au veilleur », « Tête et paysage » et « Homme mangeant une petite pierre »168. Peu de temps après, la presse est démontée et emmenée, il s’agit alors pour l’artiste de pouvoir continuer sa « manie ». Jean Dubuffet se considère ici encore comme un amateur, un dilettante, et entend le faire savoir autour de lui, comme le monte cette lettre du mois de juillet 1944 à Jean Paulhan.

‘Il faut signaler tout cela à André Lhote, et bien lui dire aussi que moi dans le domaine de la peinture je suis un amateur, je ne cherche pas à en tirer quelque profit ni quelque gloire que ce soit, je fais cela pour me distraire, pour m’amuser (ça m’amuse à un degré insoupçonnable), par récréation (pas du tout comme une tâche et pour y acquérir du mérite), somme toute par passion tout à fait gratuite, par manie (la passion est une manie, l’amour est une manie, Roméo à la manie de Juliette) et bien tranquillement sans rien demander à personne.’ ‘Je m’occupe toujours à mon étude sur le langage, et à la rédaction de mes réflexions sur ce sujet.169

Nous retrouvons ici encore une référence à l’école, comme Francis Ponge le peintre se place en mauvais élève, seule semble l’intéresser l’aspect récréatif. Il ne manque pas toutefois de faire état de l’avancée de ses « devoirs », cette étude sur le langage qui lui donne tant de mal et qui intéresse tant Jean Paulhan.

Jean Dubuffet est de plus en plus captivé par la lithographie, qui lui offre la possibilité et les moyens de reproduire ses œuvres originales en autant d’exemplaires qu’il le désire ou qu’il est nécessaire à ses expérimentations de matière : il suffit à chaque fois de mouiller la pierre et de l’encrer à nouveau. Le peintre a vraisemblablement apprécié cette possibilité de liberté, car cette technique, une fois acquise, permet aux artistes de se passer de l’intermédiaire – souvent contraignant et onéreux – d’un graveur pour voir leurs œuvres reproduites. Jörge de Sousa Noronha, peintre lithographe qui consacrera un nombre important d’ouvrages à cette forme d’estampe, nous éclaire sur l’apport de cette méthode d’impression, qui concerne justement les notions de « matière » et de « mémoire », qu’il s’agit de concilier.

‘La lithographie permet donc de conserver les avantages du manuscrit sans perdre ceux de la reproduction.170

La lithographie incarne une alternative pour le peintre, en lui permettant d’allier l’intime au public, le pouvoir évocateur de la matière picturale à celui, générateur, d’une plus grande diffusion de ses travaux.

Notes
108.

Werner Spies – Artistes pour notre temps, p. 36.

109.

Cité en intégralité dans notre introduction.

110.

Jean Dubuffet – « Désaimantation des cervelles », in. L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 363.

111.

Lettre de Jean Dubuffet à Gaston Gallimard, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, p. 789.

112.

Jean Dubuffet – « Notes pour les fins-lettrés », in. L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 61.

113.

Jean Dubuffet – « Deuxième lettre à Jean-Jacques Pauvert », in. Prospectus et tous écrits suivants, t. III, p. 309.

114.

« Les artistes ont pris conscience de la liberté que leur offrent des modes d’expression débarrassés de la lourde contrainte du vocabulaire, ils ont découvert les possibilités, que leurs donnent leurs recours propres, d’exercer la pensée dans un champ infiniment plus vaste que celui de l’écrivain […] et lui révéler des pouvoirs qu’elle ne se connaissait plus, que la paralysante domination de la littérature lui avait fait depuis longtemps oublier. D’où il est advenu que les situations respectives des artistes et des écrivains se sont maintenant inversées. […] C’est sans doute ce long asservissement, ce long engourdissement des artistes qui leur procure aujourd’hui de récuser, plus facilement qu’on ne l’obtiendra d’un écrivain, les modes traditionnels, et de se vouer en immense nombre […] à des explorations nouvelles entièrement coupées du passé, pendant que la littérature piétine dans ses hésitations… », Jean Dubuffet, « Désaimantation des cervelles », in. L’Homme du commun à l’ouvrage, pp. 363-364.

115.

Michel Thévoz – « La nuit du logos », in. Détournement d’écriture, pp. 11-12.

116.

Gilbert Lascault – « La Pensée sauvage en acte », in. Écrits timides sur le visible : « Selon J. Dubuffet, l’application radicale de ce principe, les inepties qui en résultent trouvent leur origine dans le mépris du quantitatif. À tort ou à raison, il estime que notre asphyxiante culture, prisonnière de ses propres valeurs, fera trop grand cas du qualitatif. La subversion devrait alors réhabiliter les quantités, trop décriées par les idéalistes professionnels. », pp. 109 et 110.

117.

Jean Dubuffet – « Positions anticulturelles », in. L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 70.

118.

Jean Dubuffet – « Positions anticulturelles », ibidem p. 71

119.

Jean Dubuffet, ibidem, p. 74.

120.

Maurice Blanchot – L’Amitié, p. 37.

121.

Jean Dubuffet – « Positions anticulturelles », p. 73.

122.

Jean Dubuffet – « Désaimantation des cervelles », in. L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 362.

123.

Michel Thévoz – « L’Écriture et la figure », in. L’Art brut, pp. 130-131.

124.

Michel Thévoz, ibidem, p. 134.

125.

Jean Dubuffet – L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 141.

126.

Le mot anglais « limérick » désigne un poème de cinq vers, toujours comique et absurde.

127.

Jean Paulhan – Guide d’un petit voyage en Suisse, 1947, pp. 19-20.

128.

Jean-Charles Gateau – Éluard, Picasso et la peinture (1936-1952), p. 125.

129.

Marianne Jakobi et Julien Dieudonné – Dubuffet.

130.

Pour mieux comprendre la relation qui s’instaure entre Jean Dubuffet et Jean Paulhan nous renvoyons le lecteur à l’article de Julien Dieudonné, « Le prince et la bergère : la relation Paulhan/Dubuffet d’après leur correspondance (1944-1968) », in. Revue d’Histoire Littéraire de la France, n° 103, pp. 153-168.

131.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, p. 425.

132.

En janvier 1945 il écrira ainsi dans une lettre à Jean Paulhan : « Ce n’est pas la première fois que je me fais écrivain. C’est la quatrième » in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, pp. 167-168. Pour plus de détails sur ces écrits disparus nous renvoyons à l’article de Jacques Berne, « Un jargon acompli », in. Dubuffet : conférences et colloques.

133.

Roland Barthes – « Écrivains et écrivants », in. Essais critiques : « L’écrivain accomplit une fonction, l’écrivant une activité… » ; « est écrivain, celui qui veut l’être. Naturellement aussi, la société, qui consomme l’écrivain, transforme le projet en vocation, le travail du langage en don d’écrire, et la technique en art : c’est ainsi qu’est né le mythe du bien-écrire… » ; « Les écrivants, eux, sont des hommes « transitifs » ; ils posent une fin (témoigner, expliquer, enseigner) dont la parole n’est qu’un moyen ; pour eux la parole supporte un faire, elle ne le constitue pas ». pp. 148, 150 et 151.

134.

‘Michel Thévoz – ’ ‘ Détournement d’écriture ’ ‘, p. 11.’

135.

Michel Thévoz, ibidem, p. 21.

136.

Michel Thévoz – « Dubuffet et le casseur de noix », in. Détournement d’écriture, pp. 30-44.

137.

Franz Kafka – « Joséphine la cantatrice ou Le peuple des souris », 1924.

138.

Michel Thévoz, ibidem, p. 30.

139.

Franz Kafka – « Joséphine la cantatrice ou Le peuple des souris », in. Un Médecin de campagne et autres récits, p. 193.

140.

Paul Valéry explique ainsi la différence entre singularité et maîtrise : « L’acquisition de la maîtrise suppose donc l’habitude prise de penser ou de combiner à partir des moyens et de ne penser à une œuvre qu’en fonction des moyens : ne jamais aborder une œuvre par un sujet ou un effet imaginé à partir des moyens. Il en résulte que la maîtrise est parfois prise en défaut et vaincue par quelque original, qui, par chance ou par don, crée de nouveaux moyens… », in. Œuvres complètes, t. II, p. 565.

141.

Michel Thévoz – « Dubuffet et le casseur de noix », p. 33.

142.

Jean Dubuffet définit le « jargon absolu » dans une lettre à Carlo Cardazzo : « formé de mots inventés et dont la signification est problématique. », in. Prospectus et tous écrits suivants, t. I, p. 480.

143.

Jean Dubuffet – Biographie au pas de course, p. 57.

144.

Catalogue des travaux de Jean Dubuffet, fascicule I, Marionnettes de la ville et de la campagne, Paris, Minuit, 1993 (1ère éd. 1966).

145.

Lettre de Jean Dubuffet à André Martel, in. Prospectus et tous écrits suivants, t. IV, p. 568.

146.

Jean Dubuffet – « Céline Pilote », in. Cahiers de l’Herne, n° 5, mars 1965, pp. 223-227.

147.

Nous verrons, au cours de notre analyse, quelles sont les manifestations de cette attraction dans les thèmes choisis pour les lithographies de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école.

148.

Jean Dubuffet – Poirer le papillon, août 1968, p. 128

149.

Jean Dubuffet, ibidem.

150.

Jean Dubuffet – Biographie au pas de course, pp. 36, 41 et 42.

151.

Jacques Berne – « Un jargon accompli », in. Dubuffet : conférences et colloques, p. 8.

152.

Les indications concernant la publication des textes se trouvent dans Prospectus et tous écrits suivants, ce sont les dates de publication (en revues pour la plupart) qui sont ici données. Entre parenthèses, nous avons indiqué les numéros de page et les volumes dans lesquels se trouvent ces textes.

153.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, 17 avril 1944, p. 80.

154.

Jean Dubuffet – « Mémoire sur le développement de mes travaux à partir de 1952 », in. Prospectus et tous écrits suivants, t. II : « C’est les vides d’un tableau qui sont très importants et qui constituent son pouvoir », p. 125.

155.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, p. 83.

156.

Lettre de Jean Dubuffet à Maurice Auberjonois, août 1945, in. Prospectus et tous écrits suivants, t. II, pp. 240-241.

157.

« Je soussigné Jean Paulhan, demeurant à Paris, 5 rue des Arènes, atteste par les présentes que Jean Dubuffet occupait, en 1942, 1943 et début 1944, Rue Lhomond, deux locaux, savoir 1°) au n° 34 de cette rue, un appartement à usage d’habitation ; et 2°) au n° 35 de la rue, un local de travail, composé de trois petits ateliers, où il travaillait journellement et continuellement à ses peintures jusqu’à ce que, en avril 1944, ses travaux s’étant amplifiés et nécessitant des locaux plus vastes, il en transportât le siège dans le pavillon sis 114 Bis Rue de Vaugirard, où s’est depuis exercée son activité. Il était considéré à cette époque, dans les milieux artistiques, comme un peintre professionnel, et de nombreuses personnes appartenant à ces milieux (amateurs d’art, critiques d’art, marchands de tableaux, etc.) lui faisaient visites, au cours des années précitées, dans son atelier du n° 35 rue Lhomond, qui était bien connu, et où je me suis rendu moi-même, à maintes reprises, pour y examiner ses œuvres », Jean Paulhan, « Projet de libellé », in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, p. 814.

158.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, ibidem, p. 91.

159.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, p. 101.

160.

Lettre de Jean Dubuffet à Pierre Bettencourt, in. Poirer le papillon, p. 40.

161.

Robert Mélançon – « Notes sur Le Peintre à l’étude », in. Francis Ponge, Œuvres complètes, t. I, p. 940.

162.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, pp. 111-113.

163.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, ibidem, p. 114.

164.

Pierre Seghers – L’Homme du commun ou Jean Dubuffet, Poésie 44, 1944.

165.

Jean Dubuffet et Eugène Guillevic – Les Murs, Éditions du Livre, 1950.

166.

Pierre Seghers – La Résistance et ses poètes (France 1940-1945).

167.

Pierre Seghers, ibidem, p. 345.

168.

Ces cinq lithographies, datées du mois de juillet 1944, sont reproduites dans le premier fascicule du Catalogue des travaux de Jean Dubuffet, Marionnettes de la ville et de la campagne, pp 193-194.

169.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Dubuffet/Paulhan, Correspondance, pp. 125-126.

170.

Jörge de Sousa Noronha – La Mémoire lithographique, 200 ans d’images, p. 10.