L’un des exemplaires de l’album Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école est devenu une pièce unique, par l’adjonction d’éléments annexes, en rapport direct avec l’œuvre. La reliure, tout d’abord, réalisée bien des années après sa parution, qui introduit un quatrième nom dans la réalisation de cet exemplaire, avec ceux du peintre, du poète et de l’imprimeur. Le carton d’invitation à une exposition de Jean Dubuffet, ensuite, collé sur la première page de l’album, conviant le lecteur à une confrontation publique avec les lithographies. Le dossier de notes, enfin, manuscrites et dactylographiées, qui conduit le lecteur dans l’intimité de l’élaboration du texte de Francis Ponge. Cet exemplaire, qui porte le numéro 22, livre étape par étape la genèse du texte, mais témoigne également de la réception artistique de l’album par le relieur, qui le prolonge encore par sa propre interprétation.
Ces différents éléments, intégrés à l’œuvre conservée à la Bibliothèque Nationale de France, seront présentés dans l’ordre de leur apparition, au sein de la présente étude : ils sont liés à l’album, qu’ils précèdent (les notes) et prolongent (invitation, reliure), ils en constituent le paratexte, selon la définition établie par Gérard Genette.
‘Mais ce texte se présente rarement à l’état nu, sans le renfort et l’accompagnement d’un certain nombre de productions, elles-mêmes verbales ou non, comme un nom d’auteur, un titre, une préface, des illustrations, dont on ne sait pas toujours si l’on doit ou non considérer qu’elles lui appartiennent, mais qui en tout cas l’entourent et le prolongent, précisément pourle présenter, au sens habituel de ce verbe, mais aussi en son sens le plus fort : pour le rendre présent, pour assurer sa présence au monde, sa « réception » et sa consommation, sous la forme, aujourd’hui du moins, d’un livre.482 ’Cette définition s’applique au carton d’invitation et au dossier de notes, la reliure, quant à elle, doit être considérée comme un épitexte, puisqu’elle « ne découle ni d’une intention ni d’une responsabilité de l’auteur »483.
Pratiquée depuis des millénaires, la tradition de la reliure relève de la création artistique tout autant que de l’artisanat. Cette ornementation, longtemps accusée de détourner les lecteurs du texte, d’ôter sa dimension spirituelle au livre en le considérant comme un simple prétexte ou faire-valoir, est désormais reconnue comme l’expression d’un savoir-faire et d’une libre interprétation de l’œuvre reliée, envisagée à la fois comme support et sujet. En 1946 est fondée la Société de la Reliure Originale, chargée de promouvoir cet « art » du livre par le biais d’expositions. En effet, la reliure ne peut être considérée comme un simple écrin, une simple enluminure, surtout lorsque celle-ci est unique ; elle propose une lecture et une « illustration » personnelle de l’œuvre ainsi prolongée, elle est, selon les termes d’Yves Baudry, l’« expression abstraite du contenu sémantique de l’ouvrage »484.
De même, elle confère au livre le privilège de l’unicité, et l’exemplaire étoffé se voit élevé au rang de livre objet. Jean Tardieu, dans Le Miroir ébloui, compare la reliure à l’architecture, la seule différence étant que la première est réservée à quelques amateurs tandis que la seconde est ouverte à tous. Pour le poète, la reliure, tout comme la critique d’art, relève du principe de transposition, il s’agit d’une interprétation, d’une relecture sensible de l’œuvre qui s’imprime sur la surface du livre, dans la matière :
‘Le livre, serré entre ses murs de cuir, à la fois rigides et doux au toucher comme le marbre, est, en effet, un monument réduit, capable de se tenir debout comme un petit temple, visible comme lui et comme lui gardien de l’invisible.Revenons brièvement sur la reliure originale de l’album : ici pas de cuirs précieux ni de dorures, il s’agit d’un simple emboîtage cartonné, communément appelé « étui de protection », recouvert de papier kraft et dans lequel s’insère l’album, dont la couverture présente le même support. Le titre et les noms du peintre et du poète figurent sur de sommaires étiquettes qui rappellent celles des cahiers d’écoliers. Cette reliure témoigne, par sa simplicité, de la volonté de Jean Dubuffet d’accentuer, du moins en surface, la dimension commune du support employé, le livre. Il ironise ainsi régulièrement, lors de la vente des exemplaires, sur le caractère « luxueux » donné à Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école par Fernand Mourlot, qui met d’office à la disposition du peintre un papier rare et coûteux, susceptible d’attirer les bibliophiles et pour lequel Jean Dubuffet se prend de passion. L’artiste semble rétablir l’équilibre entre ce fastueux album et ses prises de positions, par le dépouillement affiché de cette couverture, et réinvestir l’œuvre par l’adjonction de matériaux bruts et ordinaires, comme il aime le faire dans ses tableaux.
La principale caractéristique de cet étui original est qu’il permet de ne pas relier les feuillets entre eux : les pages, pliées en deux, sont intégrées les unes à la suite des autres, les cahiers sont mobiles et peuvent être inversés, manipulés. Il est d’usage, pour les albums, de ne pas assembler les cahiers, les feuillets sont simplement glissés dans l’étui. Nous savons par ailleurs que Jean Dubuffet avait pour habitude de couper les liens des reliures des livres qu’il consultait, de les « débrocher », ce qui lui permettait de mettre les pages à plat, de les manier plus librement, ou de n’emmener que celles qui l’intéressait. Dans cet album, rien n’est figé, il est possible de déplacer le texte et les lithographies à sa guise, le format choisi permet de retirer celles-ci, pour les afficher. Cette mobilité des pages permet au lecteur de redevenir pleinement spectateur de l’œuvre graphique. L’image est autonome et peut rejoindre son support privilégié, en étant encadrée, exposée ; elle se livre aux regards, quittant l’intimité du tombeau que constitue le livre. Le lecteur est impliqué dans l’organisation de l’album : cette œuvre, articulée, modifiable à l’envi, acquiert ainsi un caractère ludique. Jean Dubuffet propose au lecteur une manipulation originale du livre, qui lui donne pleine conscience de la matérialité de l’objet qu’il tient entre les mains.
Jean Tardieu souligne très justement cet apport à la fois matériel et spirituel de la reliure, qui offre à l’œuvre une possibilité de pérennité :
‘À l’œuvre littéraire qui se veut longtemps (le plus longtemps possible) « entendue » et reconnue, une grande reliure, parachevant l’hommage d’une édition rare, souvent enrichie de gravures prestigieuses, ajoute sa propre chance de pérennité.486 ’D’abord simple mesure de conservation des livres, de l’encre et du papier, la reliure est donc devenue forme d’art à part entière, qui, outre son indéniable effet décoratif et sa valeur propre, exprime à la fois la personnalité du commanditaire et de l’artisan relieur. Ainsi, l’utilisation des matériaux nobles et des matières précieuses témoigne de l’attachement de l’usager pour une œuvre littéraire, extériorisant et matérialisant l’importance qui lui est accordée, le livre se fait objet précieux. Deux interprétations de l’œuvre se confrontent, celle du lecteur propriétaire et celle du lecteur artisan, l’une prenant souvent le dessus sur l’autre. Unanimement admiré et pratiqué, l’art de la reliure est par nature ambivalent. En ce qui concerne le relieur, deux options s’offrent à lui, qui sont mises en lumière dans l’ouvrage Le Livre s’habille. Sept siècles de haute reliure.
‘Il y a ceux qui projettent leur interprétation du texte dans le décor et ceux qui estiment que celui-ci naît en toute indépendance. L’artiste suit son désir. L’aventure recommence avec chaque commande.487 ’Jusqu’au 19ème siècle, le thème des motifs et de la décoration des reliures ne tient pas compte du sujet du livre, les relieurs obéissent aux seuls principes esthétiques. Un siècle plus tard, certains s’opposent à cette vision réductrice de leur art et revendiquent leur indépendance, comme Pierre Legrain, décorateur de métier et dessinateur pour Jacques Doucet, qui affirme que les reliures doivent résumer l’interprétation personnelle du relieur :
‘Le plat d’un livre n’est qu’un frontispice qui en résume l’âme et nous prépare à sa lecture par le choix d’une nuance ou d’un signe.488 ’Rose Adler, artiste découverte également par Jacques Doucet, estime quant à elle que « la reliure est comme un écho monté du livre… »489 Cette formule met l’accent sur l’accord qui doit s’établir entre l’œuvre et sa reliure, comme en témoigne la définition donnée par le dictionnaire Littré de ce terme : « Écho : répétition plus ou moins distincte d’un son heurtant contre un corps qui le réfléchit. »490 Rose Adler déclare que la reliure doit être au service du texte491, telle est sa vocation : elle n’est réussie que dans la mesure où elle donne au lecteur le désir d’ouvrir le livre.
Une lecture attentive de l’œuvre par le relieur est donc nécessaire, celui-ci doit prendre connaissance des travaux de l’auteur, afin de choisir au mieux les matériaux, les teintes et les motifs. Il lui faut aussi se garder de la simple reprise des illustrations du livre ou d’une trop fidèle reproduction du sujet, car une reliure au second degré est bien plus intéressante, en ce qu’elle matérialise une interprétation personnelle de l’œuvre : elle est l’expression d’une lecture incarnée. Georges Leroux, tout en adoptant une visée artistique pour le moins éloignée de celle de la reliure originale, reste néanmoins en harmonie avec l’œuvre, en mêlant aux matériaux luxueux des éléments du commun, tels que du bois, du fil de fer, qui peuvent être ramassés à la sortie de l’école : la matière incrustée dans le cuir fonctionne ainsi comme une mise en abyme des préceptes de Jean Dubuffet, mais aussi du titre de l’album. Cette reliure doit donc être considérée à la fois comme une traduction et comme un prolongement autonome de l’album par une tierce personne, elle s’apparente en ce sens à une forme d’expression artistique, une « syntaxe visuelle personnelle » pour reprendre les mots d’Yves Baudry ; ce dernier, parlant de François Brindeau, l’un des élèves de Georges Leroux, met en évidence cette double exigence :
‘Il revendique l’apport personnel du/dans le décor pour amplifier le rituel de la lecture. Pour lui un décor ne peut pas être exclusivement soumis au contenu graphique, typographique, littéraire ou sémantique du livre. Ce qui serait soit une répétition, un plagiat ou une simple illustration narrative. Il n’est pas non plus un décor de peintre détaché de sa mission d’annonce et de promesse.492 ’Le relieur doit parvenir à accorder sa « mission d’annonce », de « promesse », et son « apport personnel », tout comme le poète critique d’art.
Telles sont les ambitions de Georges Leroux : créateur reconnu, réputé pour son utilisation de matériaux hétéroclites et son style novateur, il se démarque notamment par son goût pour l’alliance de matières insolites. En effet, la reliure qu’il compose semble ne pas avoir de rapport direct avec l’esthétique des lithographies de Jean Dubuffet, ou les thèmes soulevés par Francis Ponge dans son texte, ni de liens explicites avec les co-signataires ou le titre de l’œuvre. Cette indépendance tient pour une part à l’écart temporel important – plus de quarante ans – entre l’édition de l’album et la réalisation de cette reliure. La mémoire joue son rôle, incontestablement, mais c’est ici la matière qui instaure le lien. Les matériaux utilisés par l’artisan relieur, maroquin gris doublé à décor incrusté d’écorces de platane et de fils électriques, sont emblématiques : ce type de reliure est réservé aux livres rares, aux éditions originales, illustrées et numérotées, car les matières premières sont coûteuses et le temps d’exécution très long. Le cuir luxueux n’est que le décor, un simple fond dans lequel sont incrustés les éléments les plus communs qui soient : morceaux d’écorces, pour le côté naturel, et fil de fer, expression de la main et du geste de l’homme. Un passage de l’ouvrage Le Livre s’habille. Sept siècles de haute reliure est ainsi consacré à l’importance des matériaux dans cet art, ceux-ci doivent séduire le lecteur, l’amener à franchir le seuil :
‘En fait de décor, ces reliures fonctionnent sur un mode autonome, et n’ont nul besoin de références artistico-littéraire. C’est de leur apparente simplicité et de la naturelle beauté des matières employées que découle leur force de séduction.493 ’Le bois incarne un retour aux origines de la reliure, puisque dans certaines civilisations antiques les livres étaient constitués de feuilles de palmiers trouées, reliées entre elles par une corde et protégées par deux morceaux d’écorces, formant la couverture. D’autre part, les riches motifs ornant traditionnellement le plat des reliures dès le quinzième siècle sont appelés des « fers » : Georges Leroux, incrustant des morceaux de fer dans le cuir, transpose les éléments traditionnels de son art dans la matière brute, et semble prendre l’expression « au pied de la lettre ». Au faste du maroquin, tant apprécié des bibliophiles, s’ajoute l’expression d’un quotidien ; l’ordinaire, le rudimentaire s’échappent du commun et deviennent instruments de séduction.
Nous terminerons cette réflexion sur la reliure, sur son « mariage d’affinités »494 avec l’œuvre qu’elle protège et annonce, par un autre extrait du Miroir ébloui, de Jean Tardieu, dans lequel le poète met l’accent sur les deux ambitions principales de cet art du livre, la transparence et l’autonomie :
‘Ce qui importe, c’est le grand jeu des techniques associées, des matériaux de base et des matériaux d’exception, tout concourt à ce que chaque livre construit par l’artiste devienne l’irremplaçable et transparent coffret de l’œuvre littéraire qu’il serre entre ses flancs étroits et pour que le petit monument, unique et autonome, soit digne de figurer dans cette ville en miniature que constitue une bibliothèque d’amateur.Cette reliure de Georges Leroux est un « petit monument » à la gloire de l’album, un « temple » élevé au texte de Francis Ponge et aux lithographies de Jean Dubuffet. Elle présente également de fortes similitudes avec certaines œuvres du peintre dans le choix des matériaux et des tonalités. Ainsi « La Mer de peau », tableau daté du mois de décembre 1959 et désormais conservé au Centre Georges Pompidou, est constitué d’un assemblage d’écorces de bois bleutées qui semble avoir directement inspiré la reliure de cet exemplaire de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école. Celle-ci donne corps à la « lumière intérieure » du livre, qu’elle réfléchit et manifeste en surface, comme le souligne Yves Devaux :
‘La reliure donne au livre un visage, une personnalité. Elle est le reflet d’une époque ou encore de son possesseur.496 ’Mais la reliure devient parfois un obstacle à la diffusion de l’œuvre : ainsi, l’exemplaire n° 22 ne peut plus être numérisé, car l’opération risquerait d’endommager l’écrin. Cette luxueuse reliure, devenu tombeau, enferme désormais l’album, et le dossier génétique qui l’accompagne, dans une tour d’ivoire.
Il est d’usage également que les collectionneurs « truffent » les livres, en y ajoutant des éléments en lien direct avec l’œuvre ou sa composition (dessins, lettres, articles de journaux). C’est ici un carton d’invitation à l’exposition André qui ouvre l’exemplaire conservé à la Bibliothèque Nationale de France. Ce document est justement à l’origine d’une première brouille entre le peintre et le poète, dès la parution de l’album. Tout commence par une lettre, datée du dimanche 11 février 1945, dans laquelle Jean Dubuffet demande conseil à Jean Paulhan pour l’élaboration de cette invitation :
‘Voulez-vous me donner votre avis sur ce projet de carte d’invitation. Elle serait reproduite en fac-similé par Mourlot sur papier très bon marché de couleur vive (rouge vif ou vert vif) dans le genre des prospectus de bonne aventure, et tirée à 1 000 exemplaires. Pour le catalogue ce serait le même format (celui du papier commercial plié en 4) et le même papier camelote de couleur vive. La préface, tout fort désappointé et embêté que ce soit que vous ne l’aimiez pas trop, je l’ai donnée à composer à Mourlot à peu près telle quelle parce que le temps commence à presser et je me sens la plus grande paresse à la refaire, je suis au bout de mon rouleau, j’ai vidé mon sac, je voudrais ne plus écrire une ligne et me remettre au plus vite à ma peinture.497 ’D’emblée le peintre porte son choix sur un papier très ordinaire, de « camelote », témoin de la précarité des temps et en opposition directe avec celui de l’album.
Le projet se complique suite au refus de Francis Ponge de figurer sur cette plaquette, comme le montre cette lettre du peintre à Jean Paulhan, datée du 13 février.
‘Pour la carte d’invitation exposition Michaux. Ponge paraît tout à fait disposé à l’approuver chaleureusement pourvu seulement que je la modifie en ceci : que son nom n’y apparaisse pas, ni le titre de son texte. Me voici donc embarrassé car je ne voudrais pas faire tort au bon Mourlot lequel tient évidemment à ce que cette exposition serve en même temps d’annonce à son livre. Alors changer le ton de tout cela, peut-être, éliminer le goût douteux, adopter le bon ton, petite carte en bristol, et présidence d’honneur de quelque dignitaire. Mais les lithos elles-mêmes sont de goût douteux, voilà le plus grave. Supprimer aussi les lithos ? Mais alors quoi exposer ? Supprimer l’exposition, voilà je crois bien ce que je vais faire. (Et maintenir le goût douteux).498 ’Car le nom du poète est justement un argument commercial indispensable pour Fernand Mourlot : Francis Ponge incarne, dans une certaine mesure, la caution littéraire de la qualité de la série lithographique. Jean Dubuffet n’hésite pas longtemps et, deux jours plus tard, une nouvelle lettre à Jean Paulhan témoigne de sa décision, qui ignore délibérément le souhait de Francis Ponge, au grand mécontentement de ce dernier.
‘On repart du bon pied pour l’exposition Michaux. Limbour aussi est très content. Ponge on s’en fout, on lui tartine son nom dans le programme sans lui demander son avis : fallait pas qu’il y aille. Voilà une version perfectionnée de la préface, et le projet de couverture du catalogue. Entendu pour la carte d’invitation, on n’y change rien.499 ’Celle-ci, comme prévu, est très rudimentaire : il s’agit d’une simple feuille de papier orange, pliée en deux. Sur le plat figure un dessin de l’artiste, représentant un homme portant un képi sur lequel figure la mention ANDRÉ, et tenant un dessin figurant un autre homme à la main. Dans une bulle, l’artiste a inscrit : « J’attire poliment votre attention sur la pierre lithographique ». Ouvrant l’invitation, nous découvrons, sur la page de gauche, cette affirmation en lettres capitales, dont l’écriture manuscrite est délibérément maladroite :
‘UNE ATTRACTION TRES RÉJOUISSANTE !Sur la page de droite, en regard, figure ce texte, toujours manuscrit :
‘Présentation d’un grand nombre deAu dos et au centre de l’invitation, un dessin représentant une figure humaine rudimentaire est précédé de la mention manuscrite suivante :
‘le catalogue gratuit contiendraSous le dessin figure cette dernière indication : « VERNISSAGE SAMEDI 14 AVRIL À 15 HEURES. »
Cette invitation met en avant les thèmes privilégiés de l’artiste, comme la manifestation de la simplicité de la vie quotidienne, qui se matérialise dans ce « papier bon marché », du genre « prospectus de bonne aventure ». C’est la précarité de ce document, qu’il convient d’appeler « ephemera », selon la définition qu’en donne Anne Mœglin-Delcroix, qui constitue sa valeur :
‘L’ephemera est un monument fragile qui, même quand il l’annonce comme à venir, conserve et transmet ce qui a lieu une seule fois.500 ’Document de circonstance, d’aspect modeste, ce carton, conservé au sein même de l’album peut néanmoins être considéré comme une partie de l’œuvre lithographique en ce qu’il ajoute « une contribution artistique originale à l’information communiquée »501. Cette invitation fonctionne comme l’annonce et le complément des lithographies, elle introduit le lecteur dans l’album.
Remarquons enfin que cette invitation mentionne « la préface » à l’exposition dont parle Jean Dubuffet dans quelques unes de ses lettres, et sur laquelle il peine tant. Le titre qu’il donne à ce texte est emblématique, le peintre met typographiquement en valeur et en parallèle l’art et la vie. Il s’agit d’« Une déclaration explicative avec exposé d’une conception intéressante de l’ART et par extension de la VIE ». Ce titre peut s’appliquer également au texte composé par Francis Ponge, lui qui porte l’attention du lecteur sur la pierre et les « lois » de « l’art » lithographique, faisant de la littérature un « moyen de connaissance » (M.M., p. 5).
Gérard Genette – Seuils, p. 7
Gérard Genette, ibidem, p. 9.
Yves Baudry – Le Livre, corps et décors, p. 9.
Jean Tardieu – « Reliure et architecture. Monique Mathieu », in. Le Miroir ébloui, p. 189.
Jean Tardieu – Le Miroir ébloui, p. 192.
Benoît Lecoq – Le Livre s’habille. Sept siècles de haute reliure, p. 27.
Pierre Legrain, cité par Annie Persuy et Sun Evrard, in. La Reliure, p. 28.
Rose Adler – La Reliure, p. 28.
Émile Littré – Dictionnaire de la langue française (abrégé), t. I, Éditions de Crémille, p. 362.
Alastair Duncan et Georges de Bartha – La Reliure en France : Art nouveau - Art déco 1880-1940, p. 186.
Yves Baudry – Le Livre, corps et décors, p. 11.
Collectif – Le Livre s’habille. Sept siècles de haute reliure, p. 29.
Jean Tardieu – Le Miroir ébloui, p. 188.
Jean Tardieu, ibidem, p. 191.
Yves Devaux – La Reliure en France, p. 7.
Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Correspondance, p. 176.
Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, ibidem, p. 177.
Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, ibidem, p. 178.
Anne Mœglin-Delcroix – Sur le Livre d’artiste, p. 321.
Anne Mœglin-Delcroix, ibidem, p. 314.