3.2.4. Le critique comme artiste.

Dans Palimpsestes Gérard Genette recense cinq modalités de « transtextualité » qu’il définit comme tout ce qui met un texte en relation, « manifeste ou secrète »878, avec un autre texte. La métatextualité est celle qui s’approche le plus du rapport qui s’instaure entre la production littéraire de Francis Ponge et celle, lithographique, de Jean Dubuffet lors de la réalisation de l’album : relation de commentaire qui unit le texte à un autre, dont il parle sans nécessairement le nommer ou le citer, cette « pratique de dérivation » – qui n’est pas le « privilège de la littérature »879 – correspond à la relation critique.

‘Le texte littéraire peut aussi se donner en son entier comme création à partir d’une œuvre plastique. La limite est alors incertaine avec la pratique de la critique d’art.880

Élaboré « à partir » de l’œuvre lithographique de Jean Dubuffet « Matière et Mémoire » doit être considéré, selon la définition qu’en donne Daniel Bergez, comme une « création libre »881 plus que comme une « transposition d’art ». L’autonomie affichée du texte, qui s’éloigne de toute « référence iconographique précise » pour se faire célébration de la matière minérale et de la figure générique de l’artiste, est le signe de cette « appropriation créatrice »882. Comme l’écriture la lithographie est la trace figée, l’empreinte d’une impulsion de la plume, du pinceau et de l’esprit à jamais disparu, « inscription dans le temps aussi bien que dans la matière » (M.M., p. 4). Tout tracé participe à l’inscription d’un mouvement dans l’espace et le temps et se fait célébration perpétuelle de ce mouvement. Le texte critique doit retranscrire ce mouvement, son propre mouvement est double, il s’agit du même coup d’aimer une œuvre et de la comprendre : la connaissance doit prolonger le « goût des arts » (M.M., p. 1) – selon Jean-Claude Pinson le terme « goût » désigne, pour Francis Ponge, « la connivence première avec les choses »883 –, le relayer.

Pratique d’écriture à la fois « transitive et intransitive », « médiatrice et centrée sur elle-même »884, la critique d’art a « fonction d’intermédiaire »885. Cette fonction, Gérard Farasse la retrouve dans le texte « pongien », « à la fois tourné vers son dehors (l’objet) et vers lui-même (le texte) »886. Giovanni Joppolo propose cette définition du critique d’art qui doit, par son « accompagnement », participer à la formulation de l’expression originelle ainsi qu’à sa propagation :

‘Le rôle du critique d’art […] serait donc celui d’accompagner conceptuellement une œuvre, de contribuer à sa gestation, au moment même de son apparition, de sa naissance, ce travail critique étant donc partie intégrante de l’œuvre en train de se constituer par la main et l’esprit de l’artiste qui la désire.
Le rôle du critique d’art serait donc celui d’accompagner la pensée plastique sous-jacente à une œuvre ou à un ensemble d’œuvres, afin que cette poïetique […] soit accueillie par une collectivité sociale plus ou moins importante…887

Albert Dresdner, dans son ouvrage La Genèse de la critique d’art paru en Allemagne en 1915, retrace l’histoire de ce genre. Partisan d’une représentation subjective et poétique des œuvres commentées, le théoricien considère le critique d’art comme un intermédiaire entre l’art et la science, l’art et la littérature, l’histoire et la théorie, ce qui lui donne un rôle essentiel dans la réception et la compréhension d’une œuvre. Car la pièce unique ne peut aller rencontrer son public, c’est à lui de se rendre auprès d’elle, dans les institutions culturelles ou les lieux d’expositions : l’écrit sur l’art, instrument de communication, qui témoigne d’une réception singulière, permet ainsi d’instaurer une « correspondance » entre l’artiste et l’amateur.

La critique d’art doit donc être considérée comme un genre littéraire autonome, qui combine d’une manière particulièrement complexe le voir et l’écrire : c’est la contemplation de l’œuvre de l’artiste, de l’artiste à l’œuvre qui construit l’expression, celle-ci pouvant devenir, comme c’est le cas dans « Matière et Mémoire », le reflet d’une théorie littéraire personnelle. Albert Dresdner ne peut concevoir de critique d’art sans théorie, pour lui, « tout critique d’art digne de ce nom fait en réalité œuvre de théoricien de l’art »888. Comme Francis Ponge, qui cherche à dégager les « caractéristiques » et les « lois » (M.M., p. 5) de l’art lithographique, Albert Dresdner considère la littérature, en particulier la critique, comme un « moyen de connaissance » (p. 5). Si la création artistique se traduit par une action, le critique manifeste dans son texte une réaction à cette action, à cette création-source qui l’assaille et qu’il interroge :

‘Encore dans l’atelier, "toutes chaudes", à peine sorties des mains de leur créateur, les nouveautés, souvent étranges et incompréhensibles, assaillent le critique de leur présence terrible et énigmatique.889

Chaque œuvre est un phénomène qu’il s’agit de comprendre à partir de son expérience personnelle : le critique, tel que l’envisage Francis Ponge, doit découvrir « les lois de cet art » et participer à la « formulation de l’expression » (pp. 5 et 2). La série lithographique s’apparente à la pierre, son « mystère », conséquence de sa « nature muette » (pp. 4 et 5), sollicite l’expression : « ce qui ne se conçoit pas bien mérite d’être exprimé, le souhaite… » (p. 5).

Dans la Grèce antique l’artiste, dont le savoir faire n’engage pas de réflexion, est considéré comme un simple artisan. Mais bientôt, cherchant à maîtriser la théorie, certains créateurs s’attachent à la rédaction de traités techniques ; comme dans « Matière et Mémoire » c’est la pratique, et la nécessité de conserver et de diffuser une expérience créatrice, qui attise le désir d’expression. L’art se rapproche des domaines scientifiques et devient l’objet d’un enseignement : apparaissent alors dans le monde hellénique des guides et des manuels destinés non plus seulement aux praticiens, aux techniciens mais aussi aux amateurs. Oscar Wilde, dans son texte « Le Critique comme artiste » 890 souligne la modernité de la critique d’art antique qui mêle librement pratique individuelle et théorie générale. C’est ensuite durant la période humaniste que s’épanouit l’alliance des lettres et des arts : les auteurs considèrent les peintres comme des « alliés » dont ils célèbrent les travaux ; les artistes recherchent leur compagnie et échangent leurs commentaires contre des portraits qu’ils font d’eux. Les portraits de Francis Ponge, réalisés par Jean Dubuffet après la parution de l’album, semblent inscrire la relation entre le peintre et le poète dans cette tradition.

Le siècle des Lumières voit l’apparition des critiques de salon qui privilégient la discussion et le dialogue : les essais se répondent entre eux891 au fil des publications et sont truffés d’allusions personnelles. En fréquentant les artistes et leurs ateliers, Denis Diderot incarne le renouveau de la critique d’art : en cherchant à parfaire ses propres connaissances techniques il affûte son regard au fil des expériences. Le philosophe va du particulier au général, de la critique à la théorie esthétique. Son œuvre critique témoigne d’une rencontre et d’un dialogue avec les artistes. Mais c’est un siècle plus tard, avec Charles Baudelaire, que la critique devient véritablement poétique ; il envisage l’œuvre d’art comme « prétexte à inventer un genre littéraire où l’écrit et le visuel aspirent à se rencontrer. »892 :

‘Il serait prodigieux qu’un critique devînt poète, et il est impossible qu’un poète ne contienne pas un critique. Le lecteur ne sera donc pas étonné que je considère le poète comme le meilleur de tous les critiques […] Qui parle mieux de la peinture que notre grand Delacroix ? Diderot, Goethe, Shakespeare, autant de producteurs, autant d’admirables critiques.893

Dans Pour un Malherbe Francis Ponge semble s’accorder à cette opinion, tout en émettant une restriction d’importance, puisqu’elle explique la volonté d’autonomie affichée par le poète dans « Matière et Mémoire » : « Qu’un poète se fasse critique, mauvais signe […] Qu’un poète se fasse critique, les critiques le trouvent aussitôt mauvais signe, et les poètes eux-mêmes le pardonnent difficilement. […] Pour ma part, je n’y vois aucun mal, pourvu que notre poète devenu critique reste lui-même, car voilà ce que je souhaite seulement. »894 Bernard Beugnot voit dans la réfutation de ce lieu commun une allusion au siècle de Malherbe, une « valorisation » de la « critique des créateurs » et la revendication d’une « fidélité à soi-même »895.

Albert Thibaudet, dans son texte « Physiologie de la critique », dénombre trois catégories de critique, dont celle des artistes, qu’il place au dessus de la critique parlée ou de celle des professionnels :

‘La critique spontanée représente le côté de ceux qui parlent et qui jugent ; la critique d’artiste, le camp de ceux qui créent et qui rayonnent ; la critique des professeurs est une critique faite par des hommes qui lisent, qui savent et qui ordonnent.896

Cette forme critique, déjà baptisée par Chateaubriand « critique des beautés »897, est fondamentalement subjective : elle éclaire et illumine l’œuvre, tandis que le regard puise dans l’image la matière du langage. Elle s’incarne dans la symbolique du miroir ébloui, développée par le poète Jean Tardieu, qui voit en elle un acte d’interprétation. En ce sens, elle est toujours « partiale et partielle » :

‘Mais le besoin heureux de belles images est aujourd’hui incorporé à la critique, ou elles ne servent pas seulement à illuminer, mais à éclairer. Je sais bien qu’on ne saurait nier les limites et les lacunes de la critique d’artiste. Elle est presque toujours partiale et partielle. En général un grand poète voit dans les autres grands poètes des reflets de lui-même, salue en eux les formes du génie qui l’habite […] La critique d’artiste porte sur les artistes et les éclaire. Elle porte aussi sur la nature de l’art, du génie, qu’elle nous rend sensible par l’expérience même.898

La « critique d’artiste » est donc un regard visant à la fois le particulier et le général qui doit permettre la « fusion de l’objectif et du subjectif »899.

Comme le souligne Albert Thibaudet le choix du sujet par le poète est souvent partial, c’est le témoignage d’une communauté de pensée, d’une rencontre ou d’une relation amicale. Le texte critique est alors la conséquence d’une intime nécessité et l’œuvre « intéresse » la partie la plus secrète du poète qui s’engage dans le choix de son sujet. Paul Éluard, dans son Anthologie des écrits sur l’art, envisage le peintre et le poète critique comme des « frères voyants », selon l’expression qui désignait autrefois les hommes mariés à des femmes aveugles :

‘Le rôle de l’artiste est de guider, d’ouvrir les yeux les plus rebelles, d’enseigner à voir comme on enseigne à lire et de montrer le chemin de la lettre à l’esprit. Les critiques d’art, et j’entends par là tous ceux qui ont essayé de transposer littérairement leur émotion, sont eux aussi, des frères voyants.900

« Œuvre d’art » poétique à part entière, la critique d’artiste est «  reconstitution d’un style par un autre style », « métamorphose d’un langage en autre langage »901. « Lithomorphose »902, le texte de Francis Ponge s’apparente à ce que Jean-Yves Tadié appelle « la critique d’identification », qu’il définit comme une contemplation, une rêverie où dominent les sensations, la quête d’une formulation fidèle à l’émotion, ressurgie des profondeurs de la mémoire et fixée en surface par les mots. La référence aux « mouvements browniens » (p. 4), au « microscope », aux « grouillements microscopiques » (p. 3) et aux « sunlights » (p. 4) semble faire écho à un texte de Georges Clemenceau, consacré aux « Nymphéas » de Claude Monet :

‘Quand le peintre nous découvre, comme par l’éclairage de l’ultra-microscope, des profondeurs élémentaires que, sans lui, nous n’aurions pas connues : Ne sommes-nous pas là bien près d’une interprétation représentative des mouvements browniens ?903

Présentant ce texte, Pierre Sterckx souligne que « faire allusion aux mouvements browniens est un acte de critique supérieure »904. Jean-Charles Gateau remarque lui aussi l’importance de cette référence dans les textes de Paul Éluard, se demandant si celui-ci « perçoit avec autant de complicité que Ponge le mouvement brownien de la vie à l’intérieur de ses limites ? »905

Le procédé critique se matérialise dans la technique lithographique : le trait, « la trace » de l’artiste, « à la fois manifestée et enfouie » (M.M., p. 4) par la matière minérale, incarne une « profondeur de mémoire », « une profonde répétition intérieure du thème qui fut inscrit à la surface » (p. 4). Ces deux notions, « surface » et « profondeur », se retrouvent constamment dans « Matière et Mémoire » et symbolisent les deux versants de l’écriture critique : « non seulement s’inscrivait […] dans la profondeur de sa tête, mais apparaissait en même temps en propres termes à la surface, sur l’épiderme, sur la peau du visage » (p. 2) ; « s’étaler à sa surface », « transformer chaque ligne en surface », « sa seule victoire est en profondeur » (p. 3). Le texte critique s’apparente à une « transformation immobile », il est « l’effet superficiel d’une émotion ou décision profonde » (p. 4). Comme la pierre le poète s’« intéresse à l’expression » du lithographe, il « réagit » sur elle et « manifeste cette expression modifiée » (p. 2), qui sera « répétée » autant de fois que le texte sera imprimé : « Et je la répéterai comptez-y (peut-être plus souvent qu’il ne vous aurait plu) » (p. 3). Le poète-critique s’incarne dans la pierre « utra-sensible » (p. 2).

« Un bon tableau étant la nature réfléchie par un artiste », la « meilleure critique », selon Charles Baudelaire, est « celle qui sera ce tableau réfléchi par un esprit intelligent et sensible »906 ; le poète reconnaissait « apprécier un tableau uniquement par la somme d’idées ou de rêveries » qu’il apportait dans son « esprit. »907 Le plus emblématique représentant moderne de cette critique d’identification est Gaston Bachelard, que Jean Paulhan présente à Jean Dubuffet en juin 1944. Le peintre lit ses œuvres dans la foulée, une lettre à Jean Paulhan parle ainsi de ses lectures et d’un « projet Bachelard »908. Le philosophe prend comme objet d’étude l’imaginaire de la matière, sa critique est fondée sur une rêverie personnelle et une réflexion sur la portée des mythes véhiculés par la mémoire collective : pour lui, « la légende humaine trouve ses illustrations dans la nature inanimée »909 et c’est la « matière qui conditionne toute technique »910 humaine. Ainsi lorsqu’il se penche sur l’imaginaire de la matière minérale, c’est sur sa dimension résistante, intime et humaine qu’il insiste, tout comme Francis Ponge deux ans plus tôt dans « Matière et Mémoire » :

Camus dit d’une manière énigmatique : « Un visage qui peine si près des pierres est déjà pierre lui-même ». Je dirais, tout à l’inverse, qu’un rocher qui reçoit un si prodigieux effort de l’homme est déjà homme lui-même […] Le rocher explicite l’effort humain. 911

Cette rêverie poétique est source de savoir, comme la « littérature » dans « Matière et Mémoire » elle devient « moyen de connaissance » (p. 5) de la matière, complétant l’expérience scientifique, elle « contribution à une critique matérialiste de la peinture »912. Les travaux de Gaston Bachelard vont inspirer un texte à Francis Ponge, « À la rêveuse matière », dans lequel le poète compare la « Nature entière » à une écriture et affirme qu’il suffit de « nommer quoi que ce soit » pour « glorifier la matière » et « exprimer tout de l’homme ».913

« Matière et Mémoire » s’apparente donc au « poème critique »914 dont parle Stéphane Mallarmé dans Divagations, il s’inscrit dans la tradition d’une « critique d’art poétique », selon la définition qu’en donne Giovanni Joppolo :

‘Il s’agit d’une critique d’art créative et poétique qui peut accompagner la peinture dont elle s’inspire plus que de l’expliquer ou d’en faire la chronique.915

Refusant d’expliquer l’œuvre lithographique de Jean Dubuffet, le texte de Francis Ponge ne se réduit pas à une simple commande, à un poème de circonstance ou, selon l’expression de Jean Paulhan, à une « poésie de fortune »916. Écrivant sur le travail d’un autre il fait œuvre lui aussi. Son projet critique, qui exige que le poète reste lui-même lorsqu’il parle de l’autre, s’accorde avec le « Système » de Jean Dubuffet tel qu’il le décrit dans sa correspondance :

‘Pour la critique dite d’art, mon Système est la souplesse même, pas têtu du tout, infléchissons-le. Il faut que les auteurs se souviennent d’être poètes avant toutes choses ; en toutes entreprises humaines il faut d’abord être poète, c’est la clef de tout. Pas experts, pas savants, mais : poètes. Et se souviennent qu’un morceau de critique d’art doit être d’abord lui-même une œuvre d’art. Et non pas seulement une doublure cousue au revers de l’œuvre d’un autre, un envers postiche et superflu : pas besoin de doublures.917

Le peintre propose également, dans une lettre à Jean Paulhan datée du 29 novembre 1944, que « tous les articles de critique soient obligatoirement rédigés dans la forme des arrêts de justice »918. Francis Ponge, qui à l’époque avait connaissance des lettres du peintre, semble faire écho à ce désir lorsqu’il écrit : « Interrogé sur la provenance de ces pierre, M. Mourlot déclare… » (M.M., p. 1). Gilbert Lascault remarque que Jean Dubuffet souhaite que son œuvre soit appréhendée par un « regard moins culturel »919. Ce regard « non prévenu » (M.M., p. 1), le philosophe le définit selon trois critères, que le peintre considère comme essentiels : il doit être « actif » et retrouver le « temps de la genèse de l’œuvre », jubilatoire et mettre le regardeur en joie, et, enfin, « oblique », « regard de côté », « regard à côté »920. Le texte de Francis Ponge, par l’attention portée au procédé d’impression, par son plaisir d’écriture affiché et par son autonomie manifeste, s’accorde parfaitement à ces trois critères. Gilbert Lascault souligne par ailleurs que nous pourrions « apprendre à parler » des peintres « en relisant des textes de Ponge, qui ne les concernent pas. »921

Pour Jean Paulhan, la critique est, par essence, terroriste : Henri Bergson incarne pour lui « le métaphysicien qui la démontre, mais en même temps l’aggrave et la précipite »922. Il consacre ainsi quelques textes au problème de la liberté critique, comme « Petite préface à toute critique »923, dans lequel il affirme que la critique « est l’un des noms de l’attention »924 ou « À demain la poésie »925, au chapitre intitulé « Bête comme une pierre », dont voici un extrait significatif :

‘C’est même pourquoi l’art est aisé, la critique difficile ; mais tous deux à la vérité exigeant d’abord de qui les exerce une certaine modestie, un effacement devant le mystère, et que l’on se résigne à le jouer ou le mimer plutôt qu’à le connaître : qu’on se tienne tout sot devant lui. Les mythes ont la vertu de suggérer ce qu’il serait trop long d’expliquer en détail ; encore est-ce à la condition de bien les entendre. Et je vois que l’on retient surtout des aventures d’Orphée ou d’Amphion l’étrange pouvoir d’une poésie qui assemble les pierres ou séduit les animaux. […] Ce n’est pas dire qu’il faille, pour éprouver le charme, faire grand usage de son intelligence ou de sa raison. C’est plutôt dire qu’il faut d’abord se faire bête ou pierre.926

Jean Paulhan démontre ainsi que le critique « n’a pas à prendre le parti d’Amphion » mais « plutôt celui du quartz ou de la pierre ponce »927, il doit se laisser « posséder »928, exactement comme Francis Ponge prend le parti de la pierre lithographique plutôt que celui du lithographe.

Le texte du poète, en tant qu’introduction à une démarche artistique plutôt que décryptage de l’œuvre, répond parfaitement aux vœux de Jean Dubuffet. L’ensemble de son projet poétique doit même être envisagé, selon Eric Pellet, comme une « permanente célébration de la pensée critique »929. Dans « Natare Piscem doces » Francis Ponge affirme « qu’il n’y a aucune dissociation possible de la personnalité créatrice et de la personnalité critique » :

Le poète ne doit jamais proposer une pensée mais un objet, c’est-à-dire que même à la pensée il doit faire prendre une pose d’objet.
Le poème est un objet de jouissance proposé à l’homme, fait et posé spécialement pour lui. Cette intention ne doit pas faillir au poète.
C’est la pierre de touche du critique.
930

La critique est, pour reprendre les mots de Paul Claudel, « le côté négatif de la création »931. Ainsi Michel Butor souligne que toute invention constitue une critique et que toute critique est une invention932. Pour Francis Ponge, le « mariage de la critique et de la création »933 est un élément essentiel de sa « méthode » poétique : le texte critique est implication plus qu’explication.

Dans « Le Critique comme artiste », paru en 1891 et initialement intitulé « La Fonction et la Valeur véritable de la critique », Oscar Wilde fait l’apologie de ce genre littéraire qu’il considère comme un acte de création et qu’il élève au rang d’œuvre d’art. Il met en scène sa réflexion dans un dialogue entre deux personnage, Ernest et Gilbert, le second incarnant ses propres positions en affirmant que « sans esprit critique il n’y a pas de création artistique digne de ce nom » : « Il n’y a pas d’œuvre d’art sans conscience claire, conscience et esprit critique ne font qu’un. »934. Pour Oscar Wilde la critique est conscience contemplative. Pour être considéré comme une œuvre à part entière le texte critique doit absolument conserver son autonomie : la bonne critique doit être « créatrice et indépendante ».

‘Est critique celui qui nous montre une œuvre d’art sous une forme qui diffère de celle qu’elle avait à l’origine ; l’usage d’une nouvelle technique est donc un acte critique autant que créateur.935

Ernest s’interroge sur l’intérêt de la critique d’art, selon lui elle ne fait que couvrir de clameurs inutiles le chant de l’artiste, et l’éloigne du silence et de la solitude indispensables à la création. Il avance alors l’idée que ce qui se conçoit bien se passe d’explication, lieu commun tiré d’une formule de Nicolas Boileau que Francis Ponge reprend lui aussi dans le texte de « Matière et Mémoire » :

‘Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement : sans doute… Mais seulement ce qui ne se conçoit pas bien mérite d’être exprimé, le souhaite et appelle sa conception en même temps que l’expression elle-même.936

Pour le véritable critique le sujet n’est que matière première. C’est la façon dont ce sujet est traité qui importe. Oscar Wilde compare la critique à la poésie qui donne forme et vie à la matière : « La critique est une création dans une création […] la forme la plus pure de l’impression personnelle […] le témoignage d’une âme »937.

La critique est profondément subjective : elle est tout autant impression qu’expression. Selon Oscar Wilde la forme parfaite du genre est ainsi celle qui traite l’œuvre comme le déclencheur de la propre créativité de l’auteur. L’œuvre d’art, motif d’inspiration, est aussi « moyen » de renouvellement de l’expression, comme le souligne Francis Ponge :

‘Cela suppose qu’on en soit à désirer éprouver (acquérir) des sentiments inouïs, des formes suggestives et complexes de sentiments encore inédits, que l’on considère l’œuvre d’art comme moyen de modifier, de renouveler son monde sensoriel, de lancer l’imagination dans des directions nouvelles, inexplorées.938

Le critique est interprète même s’il n’a pas vocation à expliquer l’œuvre. Sa fonction est double, de réception et d’émission à la fois, et s’apparente à celle de l’artiste, telle que la définit Jean Dubuffet939. Jorge Luis Borges dit ainsi que seul l’artiste, qu’il soit peintre ou poète, peut réunir dans le texte critique « les deux pôles antagonistes de la pensée, à savoir le pôle impressionniste et le pôle expressionniste »940. Cet aspect essentiel peut être résumé par l’expression d’André du Bouchet « Ici en deux ». Mais l’équilibre entre ces deux pôles doit être respecté, selon Jean Starobinski, le critique avisé doit tout autant se méfier de « la perte de la relation » que de « la perte de la différence »941 :

‘La solitude du discours critique est le grand piège auquel il faut échapper. Trop souvent soumis à l’œuvre, il partage la solitude de l’œuvre ; trop indépendant de celle-ci, il poursuit un chemin singulier et solitaire.942

Comme la pierre Francis Ponge ne se contente pas de répéter l’expression d’un autre, c’est une « expression modifiée » (M.M., p. 2) qu’il manifeste. La subjectivité et la profondeur du critique fonctionnent comme des « révélateurs », puisque comprendre l’autre, c’est d’abord se comprendre soi même. L’union du texte et des lithographies dans l’album fait « naître un espace de transformation des signes et de soi par l’autre »943.

Oscar Wilde considère ainsi la subjectivité comme l’élément essentiel de l’interprétation. Le critique ne doit pas être spécialiste, mais plutôt cet « esprit non prévenu », dont parle Francis Ponge au début de « Matière et Mémoire » :

‘C’est tout simplement au tempérament artistique que parle tout art. Il ne s’adresse pas au spécialiste. Il a la prétention d’être universel et de rester un à travers toutes ses manifestations.944

Cet « esprit non prévenu » est l’incarnation même du poète-critique qui se confronte à l’œuvre sans aucune forme de prévention. Émile Littré cite à propos de ce terme une phrase de Bossuet, qui compare la prévention à une sorte de folie interdisant toute possibilité d’échange ou de dialogue : « L’homme prévenu ne nous écoute pas, il est sourd ». Francis Ponge au contraire s’efforce d’écouter et de comprendre l’artiste au travers de son traitement de la matière.

L’œuvre d’art, considérée depuis Charles Baudelaire comme prétexte à l’invention d’un nouveau genre dans lequel texte et image « aspirent à se rencontrer », s’apparente à l’objet pour Francis Ponge, objet pour lequel il doit à chaque fois inventer une expression propre. Observant l’impression des planches lithographiques le poète remarque que « c’est la mémoire, l’esprit […] qui font ici la troisième dimension (M.M., p. 4).

Les objets, les paysages, les évènements, les personnes du monde extérieur me donnent beaucoup d’agrément au contraire. Ils emportent ma conviction. Du seul fait qu’ils n’en ont aucunement besoin. Leur présence, leur évidence concrètes, leur épaisseur, leur trois dimensions […] tout cela est ma seule raison d’être, à proprement parler mon prétexte […] Et, si elle n’est que mon prétexte, ma raison d’être, s’il faut donc que j’existe, à partir d’elle, ce ne sera, ce ne pourra être que par une certaine création de ma part à son propos.
Quelle création ?
Le texte.
Et d’abord comment en ai-je l’idée, comment en ai-je pu avoir idée, comment la conçois-je ?
Par les œuvres artistiques (littéraires)
945

L’œuvre d’art, comme la pierre lithographique, « modifie »946 l’expression du poète. La collaboration avec un peintre est source d’« invention stylistique »947, Michel Butor remarque ainsi : « En travaillant avec un peintre, je transforme profondément ce que j’écris. Ce que j’ai écrit pour [eux] est profondément différent de ce que j’aurais pu écrire sans eux. […] ce sont des textes véritablement qui sont issus du contact, d’une espèce de mariage »948, qui n’auraient peut-être jamais été écrits s’ils n’avaient été commandés. L’utilisation du terme prétexte prend ici toute son importance et éclaire la volonté critique de Francis Ponge : dans Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école, la série de lithographies est à la fois le « prétexte » d’écriture, c’est-à-dire la raison apparente du discours poétique permettant de dissimuler le motif réel, et sa source d’inspiration génétique, « pré-texte ». André Gide avait justement donné ce titre au recueil de ses textes critiques édités entre 1903 et 1911 : Prétextes. Cet ouvrage s’ouvre sur une apologie de l’influence en littérature, qu’il compare à un éblouissement :

L’artiste véritable, avide des influences profondes se penchera sur l’œuvre d’art, tâchant de l’oublier et de pénétrer plus arrière. […] l’artiste véritable cherchera derrière l’œuvre, l’homme, et c’est de lui qu’il apprendra. 949
Cependant lorsque je parle de critique, on a bien compris qu’il s’agit de celle qu’on applique non point tant à l’œuvre d’autrui, qu’à soi-même.
950

Milan Kundera qualifie ainsi très justement ses textes de circonstances d’« essai[s] inspiré[s] »951 et affirme que « quand un artiste parle d’un autre, il parle toujours (par ricochet, par détour) de lui-même et là est tout l’intérêt de son jugement »952. Comme le souligne Roland Barthes, la critique est toujours « critique de l’œuvre et critique de soi-même », « connaissance de l’autre et co-naissance de soi-même au monde »953. Conscient de cet état de chose, Francis Ponge avoue ne répondre qu’aux sollicitations de peintres dont les « orgasmes » sont « rigoureusement homologues » aux siens :

‘Car je n’ai souscrit jamais, qu’on m’en croie, à aucune sollicitation qui ne fut née d’abord d’un parti pris réciproque et si les textes qui suivent m’ont tous été effectivement commandés, ils le furent toujours, on l’aura bien compris, de part et d’autre.954

Parlant de l’« immanent sens critique », André Gide montre qu’il existe des « influences d’élection » ou des « affinités électives » qui permettent au sujet d’accéder, par la reconnaissance d’une communauté de pensée, à une « intime connaissance » mais qui le soumettent du même coup à la « peur de perdre sa personnalité »955.

L’explication de l’autre passe donc par l’implication manifeste du poète. Ainsi, Goethe pensait que c’est par l’intime identification à l’objet que peuvent être dégagées de véritables théories. Dans son roman Les Affinités électives, dont la troisième traduction parait en 1942, un passage concerne justement le sens scientifique de cette formule, et semble décrire la relation particulière qui se manifeste au sein de l’album entre les lithographies de Jean Dubuffet et le texte de Francis Ponge956 :

‘Nous remarquons d’abord, commença le capitaine, dans tous les produits de la nature qui nous tombent sous le sens une attraction intime. […] Représente-toi seulement l’eau, l’huile, le mercure : tu y découvriras une unité, une cohésion des parties. Cette union, ils n’y renoncent point, si ce n’est par la force ou par quelque autre cause déterminante. […] De même que chaque être a une attraction intime, de même il doit avoir un rapport à l’égard des autres.
- Et ce rapport différera, continua vivement Édouard, suivant la diversité des êtres. Tantôt ils se rencontreront en amis et vieilles connaissances, qui se rapprochent, s’unissent promptement, sans modifier quoi que ce soit l’un à l’autre, comme le vin se mêle à l’eau. Par contre, d’autres s’obstinent à demeurer étrangers côte à côte […] il existe aussi, dans notre monde chimique, des intermédiaires pour unir ce qui se repousse réciproquement. […]
Les substances qui, venant se rencontrer, se saisissent rapidement l’une de l’autre, et se déterminent mutuellement, nous reconnaissons entre elles de l’affinité. Cette affinité est assez frappante dans les alcalis et les acides, qui, bien qu’ils soient opposés les uns aux autres, et peut-être même à cause de cela, se recherchent et s’accrochent de la façon la plus prononcée, se modifient et forment ensemble un nouveau corps.957

Les personnages du roman comparent ainsi les relations amicales aux affinités électives chimiques, dont les « qualités opposées rendent possible une union intime »958, et qui sont l’expression d’une relation « choisie »959. Goethe, dans une note où il annonce la parution de son roman, précise qu’il a voulu « ramener à ses origines spirituelles une parabole chimique »960. Cette métaphore chimique, qui rappelle celle utilisée par Francis Ponge dans « Matière et Mémoire », illustre parfaitement l’ambivalence de la « rencontre » entre le peintre et le poète, et celle de leurs créations respectives. René Pons, « écrivain graphomane » comme il se qualifie, revient sur le rapport entre texte et image dans le livre de peintre, « intermédiaire » dans lequel s’expriment les affinités :

‘[C’] est une commande, cette rencontre avec qui m’offre d’élargir encore plus la variété du territoire de mes mots, ce plasticien désireux que j’accompagne son œuvre d’un texte qu’il n’illustre pas, pas plus que je ne paraphrase sa peinture, le but étant que, de la fusion de deux pratiques, naisse, dans le cas le plus idéal, un tout. 961

Émile Littré souligne que le terme rencontre peut s’appliquer à un duel, à un « combat imprévu » entre deux corps, et qu’il désigne tout autant le « concours », la « conjonction » des corps que leur « opposition ». Toute œuvre à quatre mains est, pour reprendre les expressions employées par le peintre Pierre Alechinsky, la manifestation d’un « jeu-joute-duo-duel »962, un « échange de procédés »963 qui permet de « gagner ensemble une troisième particularité, différente de chacune des deux nôtres »964 :

‘Dessinateur et pinceau conçoivent parfois tant d’étonnement envers ces productions-là, qu’ils les proposent, perplexes, à la plume et aux observations d’un ami qui écrit.
En voici justement un qui passe. […] ne pensez-vous pas qu’une description, une interprétation, un scénario peut-être, vous viendrait avec aisance ? Je veux dire, plus facilement que devant une feuille vouée à prendre son vide en patience.
Des mots de haute précision lui vinrent, qui se placèrent aussitôt en ordre rangé, toutefois pour dire autre chose que ce qu’avait trouvé mon pinceau.965

Le texte de Francis Ponge, qui manifeste son autonomie en tenant l’artiste et son œuvre lithographique à distance, fait de Matière et mémoire un livre de rencontre plus que de dialogue. Le poète s’approche de l’attitude critique défendue par Oscar Wilde, telle que l’interprète Pierre Bayard : « À la limite, la critique atteint sa forme idéale quand elle n’a plus aucun rapport avec une œuvre. »966 La critique idéale est ainsi celle qui n’a pas de rapport direct et conscient avec l’œuvre, celle qui, selon Gérard Durozoi, réalise une « fusion de l’objectif et du subjectif »967 :

‘Ce qu’il faut donc obtenir, c’est un texte qui, tant que la toile en accompagne visuellement la lecture, apparaisse en quelque sorte comme la transcription, dans un domaine différent, du travail pictural ; mais qui, isolé, se manifeste aussi comme langage indépendant, autonome.968

Critique indirecte, le texte de Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école est tout autant chronique de l’expérience artistique de Jean Dubuffet – le poète parle ainsi de « chronique d’art »969 – que manifeste du parti pris poétique de Francis Ponge. Considéré par Georges Perros comme un esprit « indirect »970, le poète applique sa méthode et concentre son regard sur l’élément minéral, son texte s’apparente au « manifeste indirect »971 ou au « poème préface »972 : leçon de création, comme le suggère le sous-titre « les lithographes à l’école », son indépendance affichée n’entame en rien la force de son regard critique :

‘Ce que je conçois comme tel : une œuvre d’art. Ce qui modifie, fait varier, change-quelque-chose-à la langue […]
Voilà une autre réalité, un autre monde extérieur, qui, lui aussi me donne plus d’agréments qu’il ne sollicite le mien […] qui, lui aussi, est pour moi une raison d’être, et dont la variété aussi me construit (me construit comme amateur). […]
Mais, ici aussi, chacun d’eux me repousse, me gomme (efface), m’annihile. Il me faut exister. Il faut une création de ma part à leur propos (différence, originalité).
Voici donc quelle création vis-à-vis du monde extérieur je conçois, tout naturellement : une création d’ordre artistique, littéraire. […]
Ce que je tenterai sera donc de l’ordre de la définition-description-œuvre d’art littéraire.
Il se trouve que j’en suis capable.973

Œuvre d’art littéraire, Matière et mémoire, ou les lithographes à l’école, par l’ajout du dossier de notes manuscrites, devient « livre d’atelier » : recueil des essais lithographiques de Jean Dubuffet et du laboratoire de l’œuvre poétique, cet ouvrage peut être considéré en ce sens comme une revue technique du processus créatif. Si le « livre de dialogue » met en scène un échange, une communication, le « livre de rencontre », lui, implique une relation plus libre, immanente, qui s’apparente au rapport amoureux et s’applique d’autant mieux à cet album.

‘« Le livre d’artiste devrait travailler précisement sur une ligne qui est celle des écarts, c’est-à-dire de c qui fracture […] C’est une tension avec un cadre […] le lien serait toujours à saisir dans un rapport d’excitation, de tension, d’écart.974
Notes
878.

Gérard Genette – Palimpsestes : la littérature au second degré, p. 7.

879.

Gérard Genette – « Pratiques hyper esthétiques », ibidem, p. 443.

880.

Daniel Bergez – « La Littérature inspirée par la peinture », in. Littérature et Peinture, p. 182.

881.

Daniel Bergez, ibidem, p 183-186.

882.

Daniel Bergez, ibidem, pp. 186 et 185.

883.

Jean-Claude Pinson – « Le matérialisme poétique de Francis Ponge », in. Habiter en poète, p. 142.

884.

Daniel Bergez – « La Critique d’art des écrivains », in. Littérature et Peinture, p. 196.

885.

Daniel Bergez, ibidem, p. 180

886.

Gérard Farasse – Déplier Ponge, entretien avec Jacques Derrida, p. 29.

887.

Giovanni Joppolo – « La Critique d’art entre progrès et tradition », in. Opus International, n° 133, pp. 23-24.

888.

Albert Dresdner – « Introduction », in. La Genèse de la critique d’art, p. 32.

889.

Albert Dresdner, ibidem, p. 31.

890.

Oscar Wilde – « Le critique comme artiste », in. Œuvres complètes, pp. 850-855.

891.

L’abbé Du Boss publie en 1719 sa Réflexion critique sur la poésie et la peinture dans laquelle il accuse la critique des connaisseurs d’être aveuglée par les règles, qui deviennent de véritables préjugés. Voltaire, dans l’article « Critique » du Dictionnaire philosophique considère que « les juges compétents » sont « presque toujours corrompus », et que le bon critique ne doit pas avoir de « préjugés », p. 221.

892.

Giovanni Joppolo – Critique d’art en question, p. 17.

893.

Charles Baudelaire, cité par Paul Éluard – « Les Frères voyants », in. Anthologie des écrits sur l’art, t. I, p. 19.

894.

Francis Ponge – Pour un Malherbe, in. Œuvres complètes, t. II, pp. 24 et 32.

895.

Bernard Beugnot – « Notice » de Pour un Malherbe, in. Œuvres complètes, t. II, p. 1447.

896.

Albert Thibaudet – « Les Trois critiques », in. Réflexions sur la littérature, p. 729.

897.

François-René de Chateaubriand – Pages choisies, 1912, p. 163.

898.

Albert Thibaudet, ibidem, p. 727.

899.

Gérard Durozoi – Espace poétique et Langage plastique, p. 9.

900.

Paul Éluard – « Les Frères voyants », in. Anthologie des écrits sur l’art, p. 8.

901.

Jean-Yves Tadié – La Critique littéraire au XX ème siècle, p. 10.

902.

Paul Éluard – « Poésie involontaire et poésie intentionnelle », 1942, in. Œuvres complètes, p. 1152.

903.

Georges Clemenceau – « Les Nymphéas du Jardin d’eau », in. Claude Monet, 1928, cité in. Les plus beaux textes de l’histoire de l’art, p. 206.

904.

Pierre Sterckx – Les plus beaux textes de l’histoire de l’art, p. 210.

905.

Jean-Charles Gateau – « Paris sous l’occupation », in. Éluard, Picasso et la peinture, p. 135.

906.

Charles Baudelaire – « À quoi bon la critique ? », in. Curiosités esthétiques, p. 96.

907.

Charles Baudelaire, cité par Paul Éluard, ibidem, in. Anthologie des écrits sur l’art, p. 20.

908.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, datée du mois de juillet 1944, in. Correspondance 1944-1968, pp. 109, 118 et 121.

909.

Gaston Bachelard – La Terre et les rêveries de la volonté : Essai sur l’imagination de la matière, 1947, p. 188.

910.

Gaston Bachelard, ibidem, p. 46.

911.

Gaston Bachelard, ibidem, p. 185.

912.

Francis Ponge, dédicace du Peintre à l’étude à Louis Aragon et Elsa Triolet, 1948, in. Francis Ponge, Album amicorum, p. 41.

913.

Francis Ponge – « À la rêveuse matière » (1962), in. Œuvres complètes, t. I, p. 869.

914.

Stéphane Mallarmé – Divagations : « La Critique, en son intégrité, n’est, n’a de valeur ou n’égale presque la Poésie à qui apporter une noble valeur complémentaire, que visant, directement et superbement, aussi les phénomènes ou l’univers », p. 188.

915.

Giovanni Joppolo – Critique d’art en question, p. 37.

916.

Jean Paulhan – « La Poésie de fortune », in. Œuvres complètes, t. II, p. 427.

917.

Lettre de Jean Dubuffet à Jean Paulhan, in. Correspondance 1944-1968, p. 83.

918.

Ibidem, p. 154.

919.

Gilbert Lascault – « La Pensée sauvage en acte », in. Écrits timides sur le visible, p. 111.

920.

Gilbert Lascault, ibidem, pp. 111-113.

921.

Gilbert Lascault – « Le Discours de l’annoncier », ibidem, p. 163.

922.

Jean Paulhan – Les Fleurs de Tarbes, p. 39.

923.

Jean Paulhan – « Petite Préface à toute critique », juillet 1950, in. Œuvres complètes, t. II, pp. 367-402.

924.

Jean Paulhan, ibidem, p. 371.

925.

Jean Paulhan – « À demain la poésie, introduction à une anthologie », in. Œuvres complètes, t. II, pp. 403-433.

926.

Jean Paulhan, ibidem, p. 422.

927.

Jean Paulhan, ibidem, p. 423.

928.

Jean Paulhan – « Du Bon Usage de la clef », in. Œuvres complètes, t. II, p. 362.

929.

Éric Pellet – « La Morale et la Rhétorique », in. Europe : Francis Ponge, p. 63.

930.

Francis Ponge – « Natare piscem doces », in. Œuvres complètes, t. I, pp. 176 et 177.

931.

Paul Claudel – « Introduction à un poème sur Dante », in. Œuvres en prose, p. 423.

932.

Michel Butor – « La Critique et l’Invention », in. Répertoire III.

933.

Francis Ponge – « L’Écrit Beaubourg », in. Œuvres complètes, t. II, p. 897.

934.

Oscar Wilde – « Le Critique comme artiste », in. Œuvres complètes, p. 845.

935.

Oscar Wilde, ibidem, p. 864.

936.

Francis Ponge – Matière et mémoire…, p. 4.

937.

Oscar Wilde – « Le Critique comme artiste », p. 855.

938.

Francis Ponge – Méthodes, p. 42.

939.

« Tout ouvrage de peinture repose, dès son départ, sur une équivoque. Le peintre s’attribue, en effet, deux rôles très différents. D’une part il veut être un interprète (un médium) des objets qu’il évoque, leur donner parole, se faire leur voix. Mais en même temps il veut faire entendre la sienne propre, ce qui est tout autre chose. Le mécanisme des deux sens, qu’on peut dire contraires – celui de la réception et celui de l’émission – mariés dans une seule opération… », Jean Dubuffet, in. L’Homme du commun à l’ouvrage, p. 197.

940.

Jorge Luis Borges – Œuvres complètes, t. I, p. 838.

941.

Jean Starobinski – La Relation critique, p. 11.

942.

Jean Starobinski, ibidem.

943.

Valentine Oncins – « À paraître », in. Le Dessin et le Livre, p. 38.

944.

Oscar Wilde – « Le Critique comme artiste », p. 893.

945.

Francis Ponge – « My creative method », in. Œuvres complètes, t. I, p. 517.

946.

Francis Ponge, ibidem, p. 518.

947.

Antoine Coron – « Entretien avec Michel Butor », cité in. Le Dessin et le Livre, p. 29.

948.

Antoine Coron, ibidem, pp. 29 et 31.

949.

André Gide – Prétextes, p. 19.

950.

André Gide, ibidem, p. 219.

951.

Milan Kundera – « Le Geste brutal du peintre : sur Francis Bacon », in. Une Rencontre, p. 17.

952.

Milan Kundera, ibidem, p. 23.

953.

Roland Barthes – « Qu’est-ce que la critique ? », in. Essais critiques, p. 254.

954.

Francis Ponge – « Au Lecteur », L’Atelier contemporain, in. Œuvres complètes, t. II, p. 566.

955.

André Gide – Prétextes, pp. 219 et 13.

956.

Une lettre de Jean Paulhan à Francis Ponge, datée du mois d’août 1944, fait référence à un passage supprimé de Natare piscem doces (première partie des Proêmes), dans lequel il était question de Goethe : « je ne puis m’empêcher de trouver gênants, presque niais, les passages de pur orgueil (Goethe) ou d’horrible humilité », in. Correspondance 1923-1968, t. I, p. 322.

957.

Wolfgang Goethe – « Les Affinités électives », in. Œuvres complètes : romans, pp. 153-154.

958.

Wolfgang Goethe, ibidem.

959.

Wolfgang Goethe, ibidem, p. 155.

960.

Wolfgang Goethe, cité par Bernard Grœthuysen dans son « Introduction » aux Œuvres complètes : romans, p. XV.

961.

René Pons – « La Pythie et la commande », in. Le Dessin et le Livre, p. 45.

962.

Pierre Alechinsky – Baluchon et ricochets, p. 24.

963.

Pierre Alechinsky – « À double fond », in. Baluchon et ricochets, p. 109.

964.

Pierre Alechinsky, ibidem, p. 113.

965.

Pierre Alechinsky, ibidem, pp.109 et 110.

966.

Pierre Bayard – Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ?, p. 152.

967.

Gérard Durozoi – Espace poétique et langage plastique, p. 9.

968.

Gérard Durozoi, ibidem, p. 34.

969.

Lettre de Francis Ponge à Jean Paulhan, in. Correspondance, t. II, p. 73.

970.

Georges Perros – Papiers collés, t. I : « Quelques esprits contemporains donnent la sensation de l’aphorisme. La lecture de leur œuvre est ambiguë, cache quelque chose : leur aphorisme personnel. J’en vois le signalement, plus ou moins prononcé, chez Paulhan, Ponge, Leiris […] Tous ces esprits sont "indirects" », pp. 15-16.

971.

Francis Ponge – « Deux récents manifestes indirects » : « Eppur, si muove ! » et « Pour Roger Dérieux », in. Œuvres complètes, t. II, pp. 1251 et 693.

972.

Francis Ponge – « Pratiques d’écritures », ibidem, p. 1015.

973.

Francis Ponge – « My creative method », in. Œuvres complètes, t. I, p. 518.

974.

François Rouan – « Une constellation de débris… », in. Peinture et Écriture 2, le livre d’artiste, pp. 365-366.