III . Les rapports sociaux de sexe et le développement durable

Je suis une maudite Sauvagesse. Je suis très fière quand aujourd'hui je m'entends traiter de Sauvagesse. Quand j'entends le Blanc prononcer ce mot, je comprends qu'il me redit sans cesse que je suis une vraie Indienne et que c'est moi la première à avoir vécu dans le bois. Or toute chose qui vit dans le bois correspond à la vie meilleure. Puisse le Blanc me toujours traiter de Sauvagesse.
An Antane Kapesh (Kapesh, 1976). Je suis une maudite Sauvagesse

Nous avons exposé précédemment les enjeux de l’approche féministe et sexe et genre, et ce que comprenait comme matière à penser le développement durable. Pour parfaire cette première approche, nous construirons un ancrage qui leur est commun pour avancer une problématique. Nous verrons tout d’abord ce qu’il en est du sort des femmes dans l’histoire des sociétés industrielles dites développées et du rôle qu’elles ont joué dans le déploiement des valeurs civiques, juridiques de ces sociétés, c’est-à-dire, dans leur développement.

Il s’agira donc de voir d’abord comment le développement durable parle des femmes, comment le développement durable les traite comme objet, puis nous verrons quelle pensée de la nature et de la société les femmes et le féminisme ont pu porter quand elles ont pu prendre leur place dans la cour des hommes. Non pas que les femmes aient une pensée spécifique de la nature et de la citoyenneté, du moins pas plus que les hommes ont une pensée spécifique de la nature et de la société qui passe, elle, pour être universelle. Nous verrons comment les femmes, passant d’objets civiques à sujets civiques, réfléchissent à la société et à la nature de leur situation d’opprimées puis d’émancipées, notamment par l’écoféminisme. Cette fois-ci, il s’agira d’analyser comment les femmes peuvent s’emparer du développement durable comme actrices.

Nous insistons sur le fait qu’il s’agit de penser la nature et la société, puisque c’est bien l’imbrication de ces deux objets qui permet de faire le lien avec le développement durable. Le développement durable ne se résume pas à l’écologie ou à la nature, mais avance l’idée qu’il faille repenser la société pour qu’elle puisse repenser la nature. Nous montrerons en quoi repenser les relations hommes/femmes peut être le point de départ d’un nouvel ordre social qui rendra aussi possible un nouvel ordre écologique.