B . Les circonstances de notre arrivée

a . Notre rattachement institutionnel et notre cadre de travail

Les circonstances de notre arrivée nous ont déjà renseignée sur les clivages et les enjeux institutionnels : travaillant sur le développement durable, mais appartenant à un champ disciplinaire de sciences dites molles, il était impossible de concevoir notre travail dans une direction territoriale et technique. Il était tout aussi difficile que nous travaillions dans la direction s’occupant de prospective territoriale et de l’agenda 21 de la collectivité, pour des raisons de suspicion à notre égard. En effet, le développement durable était alors devenu un tel enjeu institutionnel, mais aussi de négociation entre les élu.e.s et la technostructure, que notre arrivée, issue d’une initiative politique, ne pouvait pas être bien accueillie. Par ailleurs, la négociation de notre arrivée avait lieu en période pré-électorale, et notre recherche en période post-électorale, périodes charnières où le doute et l’incertitude prédominent quant à l’avenir des budgets, de l’organisation des services, de la distribution des missions, etc. Nous devons aussi préciser que ce doctorat a été rendu possible grâce à une initiative de la conseillère en développement durable au cabinet du Président de la collectivité. Elle est donc de nature politique, ce qui là encore n’est pas anodin puisqu’il existe un rapport de pouvoir, voire une concurrence et une défiance entre le politique et la technostructure.

Nous avons donc eu affaire à deux clivages : celle entre l’appartenance « naturelle » de notre sujet à des directions techniques, ce qui nous a mis dans l’incapacité de travailler dans ces directions ; quand bien même il y a une direction de nature administrative qui s’occupe de la stratégie développement durable de l’institution, il est impossible pour nous d’y travailler en raison du clivage entre notre « filiation » politique et la technostructure.

Nous étions donc rattachées à la Direction des Ressources Humaines, une direction qui correspondait à la fois à notre profil disciplinaire, mais aussi nous éloignait du lieu où le développement durable se décidait. Ce placement institutionnel a fortement influencé le cours de notre thèse dans la mesure où appartenir à la DRH est loin d’être anodin sur le plan institutionnel, surtout dans cette collectivité où cette direction a mauvaise presse et relativement peu de pouvoir comparé aux directions techniques. De plus, si nous envisagions une étude territoriale avant notre immersion, elle a été orientée vers une étude organisationnelle correspondant par là aux compétences de notre direction de rattachement. Finalement, ce rapprochement qui était pourtant jugé illogique entre le développement durable et la DRH a été fructueux puisque c’est justement sur la mise en œuvre organisationnelle du développement durable que les préconisations du début de second mandat du Président ont porté, ce qui donnera tout son poids à notre travail qui s’inscrit dans cette réflexion.