1. 4. 1. À court terme

L’étude princeps de l’effet de l’agencement temporel de plusieurs répétitions est celle de Landauer et Bjork (1978). Nous allons la décrire en détail pour permettre au lecteur de bien comprendre le principe des différents agencements temporels.

Études de Landauer et Bjork (1978) et de Cull, Shaughnessy, et Zeichmaster (1996)

Dans la première expérience de Landauer et Bjork (1978), les participants devaient apprendre l’association entre un prénom et un nom. La présentation simultanée du prénom et du nom avait lieu une seule fois au début de l’expérience. Ensuite, lors des trois essais suivants concernant cette association, seul le prénom était présenté et les participants devaient rappeler le nom manquant. Les auteurs ont comparé entre eux de nombreux agencements temporels schématisés de la façon suivante : 0-0-0, 1-1-1, 4-4-4, 5-5-5, 10-10-10, 0-3-10, 1-4-10, 10-3-0 et 10-4-1. Selon cette nomenclature, les trois chiffres successifs représentent les IIR successifs pour un item donné, et sont exprimés en nombre d’autres items intercalés. Par exemple, la schématisation 0-3-10 signifie que la 2ème présentation (e.g., John ____ ) avait lieu immédiatement après la 1ère (e.g., John Smith), ce qui correspond au chiffre 0 ; la 3ème présentation avait lieu après que trois autres items soient apparus après la 2ème présentation, ce qui correspond au chiffre 3 ; enfin, la 4ème présentation avait lieu après que 10 items soient apparus après la 3ème présentation, ce qui correspond au nombre 10. Dans ce cas précis, l’agencement est dit expansif : d’une façon générale, les agencements expansifs consistent en des IIR successifs de plus en plus longs. Les agencements dits uniformes consistent en des IIR successifs de même durée, comme par exemple 4-4-4. Les agencements dits contractants consistent en des IIR successifs de plus en plus courts, comme par exemple 10-3-0.

Pendant la phase d’apprentissage, tous les items expérimentaux étaient présentés les uns à la suite des autres, chacun ayant son propre agencement, et chacun servant également à remplir les intervalles séparant les répétitions des autres items. Le test final consistait à donner le nom en réponse au prénom (e.g., John ____), et avait lieu 30 minutes après la 4ème présentation. Les résultats ont montré que pour un IIR moyen identique, l’agencement expansif (comme par exemple 0-3-10) permettait une performance significativement supérieure à celle de l’agencement uniforme (comme 4-4-4) qui, lui-même, n’était pas différent de la condition contractante (comme 10-3-0).

L’Expérience 2 comparait les deux agencements temporels suivants : 3-3-3-3 (uniforme) et 0-1-3-8 (expansif), qui consistaient en cinq essais par item. La première présentation de l’item comportait 3 éléments, c’est-à-dire un visage associé à un prénom et à un nom. Les quatre essais suivants concernant cet item consistaient en la présentation du visage et du prénom, et le sujet devait alors donner le nom associé. Trente minutes après, le test final consistait pour le sujet à rappeler le nom et le prénom en réponse à la présentation du visage. Les résultats ont montré que le bénéfice relatif de l’agencement dépendait du type de présentation des items. Pour la partie de l’item qui était présentée à chaque répétition (en l’occurrence, le prénom), le rappel final montrait une tendance non significative en faveur de l’avantage de l’agencement uniforme sur l’agencement expansif. À l’inverse, pour la partie de l’item qui n’était présentée que lors de la première présentation et qui était testée lors des présentations suivantes (en l’occurrence, le nom de famille), l’agencement expansif entraînait de meilleures performances de rappel lors du test final, mais aussi tout au long de l’apprentissage, par rapport à la condition uniforme.

Cette expérience montrait donc qu’il est important de considérer la façon de présenter l’information (i.e., présentation ou test) pour pouvoir prédire l’effet de l’agencement temporel des répétitions. Les auteurs proposaient que dans le cas de tentatives de récupération sans feedback, l’agencement expansif est plus efficace car il permet de maintenir élevée la probabilité de succès de récupération tout au long de la phase d’apprentissage. En effet, le fait d’avoir de courts IIR au départ favorise la récupération correcte, qui est toujours favorisée ensuite grâce aux IIR de durée croissante.

En 1996, Cull et al. (Expériences 1 à 5) ont répliqué les résultats de Landauer et Bjork (1978), en observant que, pour différents types de matériel, une succession de trois tests sans feedback agencés de façon expansive (i.e., 1-5-9) entraînait, lors d’un test de mémoire ultérieur, des performances plus élevées que l’agencement uniforme (i.e, 5-5-5).

Cependant, des études ultérieures ont remis en question l’apparente généralité de ces observations.