Interférences entre les items

Nous avons mis en avant le fait que, dans nos expériences, l’agencement temporel était une variable intra-sujets contrairement aux expériences réalisées antérieurement, en particulier Gay (1973) et Tsai (1927). Ce type de design intra-sujets nous a permis de recourir à un plus faible effectif de participants, étant donné la grande variabilité des scores entre les sujets. Cependant, il est possible que ce design intra-sujets ait pu favoriser des phénomènes d’interférences entre les items cibles. En effet, dans nos expériences, chaque sujet était confronté à tous les agencements en même temps. Imaginer que des interférences ont pu se produire revient à imaginer, par exemple, que le fait d’apprendre chat-sanumi dans un agencement donné a pu perturber l’apprentissage de chien-pocuga dans un autre agencement, et que ces interactions ont pu être davantage favorables à un agencement plutôt qu’à un autre. En particulier, on pourrait imaginer que c’est uniquement ce jeu d’interférences qui a amené à l’avantage général de l’agencement expansif puisque c’est dans cette condition que les items sont appris « en premier », si l’on met de côté le fait que tous les items cibles aient été vus le premier jour de la phase d’étude. Il est possible que les items vus les premiers ensuite, à J2, aient été favorisés par rapport aux autres, selon une sorte d’ « effet de primauté à long terme », c’est-à-dire bénéficiant d’un statut mnésique particulier parce que vu au début. Ensuite, l’apprentissage des autres items aurait pu pâtir d’interférences proactives dues aux items de l’agencement expansif. De la même façon, l’apprentissage des items de l’agencement expansif auraient pu également subir des interférences rétroactives de la part des items des autres agencements. Ainsi, on ne peut pas exclure l’existence de tels phénomènes d’interférences pro- et rétroactives, ni exclure que ces effets aient participé à avantager ou désavantager certains agencements par rapport aux autres. Il est également possible que certains de ces effets se soient mutuellement annulés. Le fait de globalement répliquer les observations des expériences réalisées en inter-sujets (Gay, 1973 ; Tsai, 1927) nous pousse à considérer ces effets comme minimes. Enfin, il est difficile d’expliquer comment ces effets d’interférences, s’ils étaient la source des résultats observés, pourraient expliquer la modulation de l’effet de l’agencement par le délai de rétention observée dans l’Expérience 3.

Une autre source d’interférence pourrait également exister du fait de l’utilisation des items distracteurs. En effet, afin de pouvoir réaliser une comparaison des agencements en intra-sujets, il a été nécessaire d’inclure des paires distractrices afin de présenter le même nombre d’items dans chacune des sessions. Premièrement, selon nous, l’inconvénient éventuel apporté par les paires distractrices, sous forme d’interférence pro et rétroactive, est de moindre importance que la situation alternative dans laquelle un nombre différent d’items est présenté dans chaque session. En effet, dans une session comportant moins d’items, on peut penser que chaque item aurait pu bénéficier de plus de ressources attentionnelles de la part des sujets. De plus, moins d’interférences auraient eu lieu dans les sessions les plus courtes, favorisant les items présentés dans ces sessions, par rapport aux items présentés dans des sessions plus longues. Deuxièmement, et comme nous l’avons déjà mentionné, une expérience menée en inter-sujets aurait nécessité un très grand nombre de sujets, étant donné la grande variabilité entre les participants du point de vue des performances. Une telle étude n’aurait effectivement pas présenté les problèmes d’interférences mettant en jeu les paires cibles et les paires distractrices.