Conclusion générale

En guise de conclusion, nous souhaitons mettre l'accent sur trois points. En premier lieu, nous pensons que la recherche a pour vocation finale de bénéficier à la société dite civile. En l'occurrence, les questions d'apprentissage et de mémoire concernent l'ensemble de la population, du jeune enfant à la personne âgée. Encore beaucoup de recherches sont nécessaires pour connaître davantage les rouages de la mémoire et donc pour savoir comment optimiser nos apprentissages. Nos résultats apportent une contribution infime à cette vaste question, en montrant que la mémorisation par cœur peut être améliorée sans coût, simplement en mettant en place une certaine organisation temporelle des sessions de travail. Or, il apparaît un cruel manque de transfert des connaissances issues de la recherche vers le monde éducatif ; par exemple, l'effet de pratique distribuée -qui n'est pourtant pas une découverte récente- n’est pas véritablement mis en pratique dans les classes, les livres scolaires, les sessions de formation, etc. D’autre part, il nous semble crucial de mettre davantage en œuvre des expérimentations de type écologique, qui bien que ne permettant pas un contrôle aussi strict des conditions expérimentales que les recherches en laboratoire, possèdent en contrepartie une validité externe et donc une applicabilité plus importante. Pour ce qui concerne l’étude de la mémoire, il nous semble essentiel d’inclure davantage la dimension « long terme » dans les expérimentations.

Bien entendu, l’optimisation est une chose, mais la compréhension des processus cognitifs à l’oeuvre en est une autre, tout aussi essentielle. De façon générale, nos travaux nous ont conduit à penser qu'il est nécessaire de prendre en compte - et de favoriser - les phénomènes de récupération ayant lieu pendant l'apprentissage lui-même. Cela confirme l’idée qu’il est trompeur de considérer que la phase d’apprentissage consisterait uniquement en des processus d’encodage tandis que la phase de test consisterait uniquement en des processus de récupération. D'autre part, il nous semble indispensable d’explorer la dynamique des souvenirs sur le long terme, et notamment l'effet des répétitions sur cette dynamique. En particulier, l’exploration des effets de la durée du délai de rétention ainsi que l’étude de l’oubli nous semblent des pistes majeures et prometteuses.

Nous pensons enfin que relativement à l’étude de la mémoire, des rapprochements fertiles pourraient être davantage engagés entre les recherches en psychologie et en physiologie ; il apparaît en effet que chaque champ disciplinaire intègre difficilement les découvertes de l'autre champ. Nous en voulons pour preuve que certaines notions ont parfois une définition quelque peu différente en fonction des champs d'étude (e.g., la consolidation). Nous ne pouvons qu’espérer que l’avenir verra le développement d’une démarche fondamentalement pluridisciplinaire dans l’étude de la mémoire et, plus généralement, de la cognition.