3.2.5. Méthodologie des prospections sur les piedmonts

L’espacement entre les prospecteurs a été délibérément choisi plus large sur les piedmonts que celui défini pour l’étude des concentrations de tessons dans les champs. Il ne s’agissait pas ici d’étudier la dynamique d’occupation d’une région uniquement à travers les variations de concentrations de céramiques mais en prenant en compte l’ensemble des vestiges qu’elles ont laissé. Sur les piedmonts, l’information archéologique peut être de nature très variée, outre des concentrations de tessons il est possible de retrouver : des arases de murs, des tombes, des carrières. Ces différents vestiges sont visibles de plus loin qu’une concentration de céramiques en surface. Le fait d’élargir la maille de prospection permet donc de couvrir une plus grande surface sans pour autant perdre de l’information sur l’occupation ancienne du secteur de piedmont étudié.

Le piedmont est défini comme la zone en pente, situé à l’interface entre la plaine et les affleurements rocheux des massifs. La largeur de cette zone peut-être très variable, d’une centaine de mètres à l’est du Kuh-e Ayyub348 à près de 500 m pour les piedmonts sud-ouest du Kuh-e Rahmat349. Les prospections sur les piedmonts ont été menées en ligne. Sa largeur dépendait de celle du piedmont prospecté tout en respectant un espacement maximum de 50 m entre chaque prospecteur. Dans le cas des piedmonts très larges, il a parfois été nécessaire de procéder à plusieurs trajets aller-retour pour couvrir de manière homogène l’ensemble du piedmont. Les piedmonts présentent le plus souvent une succession de petits vallons qui ont servi à délimiter les zones de prospection. Nous avons donc prospecté les piedmonts vallon après vallon. Si les vallons étaient trop vastes, nous avons limité la section de piedmont parcourue à une longueur de 300 m. De manière à contrôler la surface prospectée, un point a été pris à chaque bout de la ligne au début de chaque zone de prospection. A la fin du trajet chaque prospecteur faisait le bilan de ses observations et nous retournions aux différents vestiges repérés pour les localiser au GPS, les décrire et les photographier. Ensuite, pour chaque zone, une description générale, archéologique et environnementale, a été effectuée.

Vu que les observations peuvent être de nature très diverses sur les piedmonts, nous avons choisi de définir chaque enregistrement comme un point d’observation archéologique. Ce terme neutre permet de regrouper sous une même dénomination tous les indices archéologiques d’occupation ancienne sans avoir à utiliser le mot site, souvent compris dans le sens d’une occupation chronologiquement et spatialement homogène350. En effet, il est souvent difficile sur le terrain de définir l’existence d’un site. Par exemple, un ensemble de cairns réparti de manière homogène ou non sur l’ensemble du piedmont définit-il une nécropole ? Il faudrait alors pouvoir affirmer que ces cairns ont été construits au cours d’une même période351. Il paraît néanmoins difficile de définir chaque tombe comme un site que l’on peut considérer isolément. En effet, la présence de nombreuses structures d’inhumation, de morphologie proche, démontre pour le moins une certaine continuité des pratiques funéraires dans une même région. Parfois lorsque les tombes sont très proches, et de même type, il paraissait évident qu’elles étaient contemporaines et nous les avons regroupées sous un même point d’observation. Dans le cas des arases de murs, la définition du site pourrait être plus évidente. Il s’agit du bâtiment isolé ou du regroupement de bâtiments dont on observe les vestiges bien délimités dans l’espace. Mais dans ce cas aussi, il peut y avoir des construction proches les unes des autres sans pour autant relever d’éléments permettant de prouver qu’elles correspondent à une seule et même occupation. Parfois, aucune concentration de céramiques bien délimitée n’est associée aux murs dont la structure peut de plus être très différente. La proximité spatiale des vestiges ne peut donc pas être l’unique indice de contemporanéité. A l’inverse, des constructions éloignées peuvent également avoir été liées, dessinant une occupation du territoire diffuse basée sur des petites implantations fonctionnant en réseau. Enfin, concernant les concentrations de céramiques, la notion de point d’observation permet de traiter à la fois les concentrations bien délimitées, définissant une surface d’occupation, de celles plus difficiles à définir spatialement, qui peuvent correspondre à la présence de tessons situés à la surface ou au pied d’un terrassement récent. Même s’il est difficile de définir le site dans le second cas, celui-ci ayant probablement été détruit par les travaux récents, il n’en reste pas moins que la présence de cette céramique définit un indice d’occupation que l’on ne peut pas négliger. C’est en prenant en compte l’ensemble des points d’observation archéologique que l’on peut par la suite tenter de définir des schémas d’occupation par période et de tenter d’isoler des sites.

Les différents points d’observation ont été enregistrés suivant un code composé du préfixe MD (pour Marvdasht), des deux derniers chiffres de l’année de la mission, du numéro de la mission dans l’année (comme nous n’avons jamais effectué plus de deux missions sur une année, donc ce code se limite aux valeurs 1 et 2), et du numéro de point GPS à trois chiffres. La numérotation des points d’observation archéologiques n’est donc pas continue car de nombreux points GPS ont été pris uniquement pour permettre de localiser les surfaces prospectées. Ce système de référencement permet de conserver une certaine souplesse dans l’enregistrement sur le terrain. Toute observation, quelle que soit sa nature, est directement rattachée sur le terrain à une localisation GPS. De ce fait, la documentation acquise, parfois par des personnes différentes, restent rattachée à un numéro de point commun qui ne sera pas changé par la suite, ce qui évite la perte d’information. Un système de référencement identique a été utilisé lors des prospections des sites connus352, mais nous avons préféré présenter les données en conservant le nom des sites du Gazetteer pour permettre une comparaison plus aisée des résultats entre nos prospections et celles de W. Sumner.

Notes
348.

Cf. § 6.3.2.1

349.

Cf. § 6.3.4.1

350.

Sur les nombreuses définitions d’un site archéologique cf. Zadora-Rio 1986 : 12 qui laissent ouvertes la définition à adapter à chaque cas d’étude ; Leveau 2000 : 274 préfère par exemple relié le mot site à habitat ; voir aussi Ferdière 2006 : 22 qui donne comme définition possible du site la suivante : « […] le site est une concentration de vestiges, à la fois limité dans l’espace (on peut en reconnaître les frontières) et dans le temps (les vestiges correspondent à une période déterminée, plus ou moins longue). ». Lorsque nous utiliserons le mot site, nous nous réfèrerons à cette définition. On peut également se référer à la distinction entre les indices d’occupation correspondants au « site » et au « off-site » des anglo-saxons, cf. Wilkinson 2003 : 38, expliqué en substance par Leveau 2000 : 274 et Ferdière 2006 : 33-38.

351.

Cf. § 6.3.4.3

352.

Cf. § 3.2.3