La prospection électrique, comme la prospection magnétique, est très largement utilisée en archéologie375. Elle mesure les variations de la résistivité électrique (ρ) du sol qui traduit la difficulté avec laquelle un courant électrique peut traverser un volume de terrain donné. La résistivité électrique dépend essentiellement de la porosité des sols, c'est-à-dire de la taille et de l’homogénéité des grains constitutifs du sédiment. Un sol très hétérogène, avec une part de gravier grossier importante est donc très résistant. Une couche sédimentaire alluviale argileuse, où les grains sont fins et bien triés, présente une plus faible résistivité. Un des avantages de la méthode électrique découle de cette relation entre la porosité d’un sol et sa résistivité. Elle est très efficace pour détecter des différences, même minime, de la composition sédimentaire. Les valeurs de résistivité électrique et de permittivité diélectrique, dont dépend la méthode radar-sol, sont de plus très liées. Les deux méthodes donnent donc des résultats complémentaires et sont souvent couplées, comme nous l’avons fait au pied de la terrasse de Persépolis. Prenons l’exemple d’un vestige archéologique de résistivité supérieure à son encaissant, il provoque une augmentation de la valeur de résistivité mesurée (Fig. 3-5). Si les mesures sont prises sur l’ensemble de la surface, le long de profils, il est alors possible de cartographier l’anomalie de résistivité et ainsi d’obtenir une image du vestige.
Pour effectuer la mesure de résistivité, un courant électrique est injecté dans le sol, grâce à deux électrodes d’injection. Un champ électrique se crée et des lignes de courant se forment dans le sol entre les deux électrodes d’injection. Le long de ces lignes de champ, d’intensité électrique connue (exprimée en Ampère), une mesure de potentiel (exprimée en Volt) est effectuée entre deux électrodes de mesure. Une simple application de la loi d’Ohm (le potentiel électrique est égal à la résistance du milieu multiplié par l’intensité mesurée) permet de calculer la valeur de résistivité du sol. Cette résistivité étant mesurée entre deux points, le long des lignes de champ électrique, elle est exprimée en Ω.m. La valeur de résistivité mesurée prend en compte un volume de sol hétérogène et intègre l’ensemble des contributions de l’ensemble des milieux de résistivité propre. La valeur mesurée est donc appelée résistivité apparente du sol, une même mesure peut en effet correspondre à des réalités géologiques très différentes.
L’un des principaux avantages de la méthode électrique est la possibilité de modifier la géométrie des électrodes et donc la forme des lignes de champ créées dans le sol. Le plus souvent, on joue sur l’écartement des électrodes. Plus les électrodes de mesure sont écartées, plus le volume de sol pris en compte est important (Fig. 3-5). La profondeur d’investigation est de ce fait directement proportionnelle à l’écartement des électrodes. Cette profondeur peut être estimée proche de la distance qui sépare les électrodes. Donc un écartement d’électrode de 1 m permettra une profondeur d’investigation proche du mètre. Si une structure archéologique se trouve à 1 m de profondeur, il faut donc opter pour un écartement des électrodes de mesure de 1 m. En faisant varier l’écartement des électrodes, il est donc possible d’obtenir des informations à des profondeurs différentes. Toutefois, plus les électrodes sont écartées, plus le volume de sol pris en compte est important donc la résolution des cartes de résistivité diminue. La taille des structures détectées est donc également proportionnelle à l’écartement des électrodes.
L’inconvénient principal de la méthode électrique est la lourdeur et l’encombrement du matériel de prospection électrique. La nécessité d’injecter un courant dans le sol consomme beaucoup d’énergie et il est indispensable de transporter de lourdes batteries reliées aux électrodes par des mètres de fil électrique. La méthode électrique peut être utilisée dans tous les types de milieu mais elle est généralement réservée à de petites surfaces.
Pour une présentation complète des principes physiques sous-jacents à la prospection électrique voir Scollar et al. 1990 : 307-372