La céramique LPW est donc le seul assemblage connu pour l’ensemble du Ier millénaire. Pour la suite de l’exposé, nous avons choisi d’appeler cette céramique par le terme double : achéménide/LPW. Pour le besoin de son article sur l’occupation achéménide de la plaine, W. Sumner publie cet assemblage de céramique (Pl. 13 et pl. 14) sous le titre de « Achaemenid ceramic forms » 486 . Toutefois, s’il est prouvé que cette céramique est bien utilisée tout au long de la période achéménide, elle reste en usage au cours de la période séleucide. Nous avons donc choisi de garder le terme « Late Plain Ware » introduit par W. Sumner487. Cela signifie que nous considérons cette céramique comme un marqueur de l’occupation achéménide, étant entendu qu’elle peut s’étendre à l’ensemble de la seconde moitié du Ier millénaire. Sur le terrain, l’indentification de cette céramique achéménide/LPW s’est faite essentiellement à partir des descriptions données par W. Sumner et de la comparaison avec les deux planches de formes publiées (Pl. 13 et pl. 14). Il s’agit uniquement d’une collection de référence utilisée par W. Sumner pour effectuer ses identifications au cours de ses prospections, à laquelle il a également rajouté des exemples de céramiques achéménide/LPW retrouvées sur divers sites de la plaine. Ces formes correspondent aux formes diagnostiques mais le corpus des céramiques achéménides est beaucoup plus riche et varié. En 2005, au début de nos prospections nous ne disposions toutefois que de ces exemples, auxquels s’ajoutaient les quelques céramiques publiées de Persépolis488.
Considérées dans leur ensemble, les céramiques publiées par W. Sumner correspondent à des récipients de petite taille, ne dépassant pas les 30 cm de diamètre, présentant des formes ouvertes semi-sphériques et une grande variété de bords. L’épaisseur des parois est généralement fine. Il n’y a que très peu de céramiques présentant des formes plus fermées (cruche ou flasque)489 et on notera la présence d’une anse double490. Il faut souligner l’absence de céramiques plus grossières, céramique culinaire ou jarre de stockage. Le corpus disponible ne représente donc probablement qu’une petite partie de l’ensemble de la céramique utilisée. Enfin, cette céramique ne porte aucun décor.
La qualité et la couleur des pâtes ainsi que le traitement de surface des céramiques pourrait rentrer en compte dans l’identification de la céramique achéménide/LPW. W. Sumner a donnée une courte description générale de cette céramique dans sa thèse491. Dans le cadre de ses prospections, il considérait la céramique achéménide/LPW comme une céramique à pâte rouge claire, présentant un dégraissant minéral noir, à cœur souvent gris. La surface est lissée, elle présente parfois un engobe lissé de rouge (le plus souvent) à noir492. Si l’on compare cette description à celles données en légende des planches de céramiques, on s’aperçoit qu’il peut exister des variations importantes par rapport au modèle défini pour sa thèse. Ainsi, sur les 40 exemples publiés, 18, soit près de la moitié, présentent une couleur de pâte grise (5 tessons) ou chamois (13 tessons). Donc si la couleur de pâte des tessons publiés est majoritairement rouge, elle peut connaître d’importantes variations. Lorsque nous avons pu repérer de la céramique achéménide/LPW, cette même diversité de couleur de pâte a été constatée, avec effectivement une dominante de pâte rouge. La présence, en surface, d’un engobe lissé n’est indiquée que pour 6 des 40 céramiques publiées. On note de plus que cet engobe présente des couleurs assez différentes (gris, chamois ou rouge). De même, sur le terrain, nous avons noté très peu de tessons à engobe. Ces deux critères, couleur de pâte et présence d’un engobe lissé, n’ont de ce fait pas été jugés déterminants pour l’identification des céramiques achéménide/LPW. Ils ne sont entrés en compte que pour confirmer une identification essentiellement basée sur les formes.
La forme le plus souvent considérée comme diagnostique pour déterminer la présence d’un ensemble de céramiques achéménide/LPW correspond aux bols, coupes ou plats carénés493. Ces formes sont bien représentées sur les planches publiées par W. Sumner494. Au cours de nos prospections, nous n’avons toutefois que rarement pu identifier des tessons de bols carénées495. Dans l’ensemble, sur les quelques sites où nous avons pu détecter de la céramique achéménide/LPW496 (Table 4), avec plus ou moins de certitude, l’identification s’est faite sur la base d’un ensemble d’indices, d’abord sur la forme et la présence de petits bols semi-sphériques, non carénés, puis sur la couleur et la qualité de la pâte ou encore, dans de rares cas, la surface à engobe lissée. Cette faible présence de tessons diagnostiques nous a donc obligés à considérer nos identifications de manière prudente. Ceci d’autant plus que généralement les densités de céramiques achéménide/LPW, ou supposée telle, sont faibles et les tessons généralement très érodés. L’absence de décor sur la céramique achéménide/LPW rend souvent son identification difficile : celle-ci doit se faire essentiellement sur les formes alors qu’il est difficile de retrouver des fragments de bords ou de fonds. Il convient donc de conclure que d’une manière générale, sur le terrain, la céramique achéménide/LPW a été souvent délicate à détecter.
Concernant ces problèmes d’indentification, les fouilles récentes du Tang-e Bulaghi et de la région de Mamasani ont permis de mettre au jour des ensembles complets de céramiques achéménide/LPW. Ainsi dans les différents chantiers de fouilles du Tang-e Bulaghi, un grand nombre de jarres de stockage a été découvert497. Elles semblent présenter des décors en bandes ; particuliers à la période achéménide. Au cours des prospections effectuées dans la région de Mamasani, la présence de jarres présentant une variété de décors en bande et de forme de bord a également été considéré comme diagnostique pour identifier la céramique achéménide/LPW498. Au cours de nos prospections, il ne nous a pas été donné de pouvoir déterminer des formes de jarres de stockage typiquement achéménide/LPW499. Le plus souvent, les quelques tessons sur lesquels nous avons basé notre identification étaient associés à un ensemble de tessons de céramique commune, épaisse, bien cuite à dégraissant grossier, présentant une grande variété de couleur. Ces céramiques pourraient se retrouver sur des sites beaucoup plus tardifs et ne permettent en rien d’identifier un ensemble achéménide/LPW. Elles correspondent à ce que nous avons nommé auparavant la céramique postérieure à l’Age du Bronze500. A partir de la publication définitive des fouilles du Tang-e Bulaghi et avec les données provenant de Mamasani, il sera possible de dresser une synthèse complète de l’ensemble du corpus de la céramique achéménide/LPW, à partir duquel les identifications seront facilitées. En particulier, il serait nécessaire de définir de nouvelles formes diagnostiques ou de déterminer des caractéristiques techniques de fabrications typiques de la céramique achéménide/LPW.
Sumner 1986a : 5-ill.1, 6-ill.2 (Pl. 13 et 14)
Sumner 1972 : 50-51
Du fait des incertitudes chronologiques de la séquence stratigraphique des fouilles du Tall-e Takht, la céramique de Pasargades n’a pas été à la base de nos identifications. Notons que les données des fouilles dans la région de Mamasani et les quelques exemples publiés issus des fouilles du Tang-e Bulaghi ont été publiées respectivement en 2006 et en 2009, soit après le début de nos travaux.
Sumner 1986a : 5-ill.1 : T, U (Pl. 13)
ibid. : 5-ill.1 : T, V (Pl. 13)
Sumner 1972 : 51, plate XLII ; il faut noter que Sumner 1986a : 5-ill.1 correspond intégralement à la planche XLII, ibid. : 5-ill.2 est une nouvelle planche de formes rajoutée à l’occasion de la rédaction de l’article. Il s’agit pour la majorité des formes, des céramiques achéménide/LPW récoltées à la surface de Tol-e Malyan auxquelles s’ajoutent des tessons provenant de ses prospections.
Cette description rejoint celle faite de la céramique, mis au jour sur la terrasse de Persépolis, par Schmidt 1957 : 97, concernant le traitement de la surface il souligne qu’elles sont généralement lissées et délavées.
Boucharlat & Haerinck 1992a désignent le bol caréné comme caractéristique du groupe des « céramiques perse ». Voir aussi pour les recherches dans la région de Mamasani : Zeidi et al. 2006 : 156 soulignent que lors des prospections de cette région, la présence de bols carénés a servi, entre autre, à diagnostiquer une occupation achéménide/post-achéménide ; Askari Chaverdi et al. 2010 : 290-291 où la présence de bols carénés sert à caractériser la céramique achéménide ou post-achéménide sur les sites de Tol-e Spid et Tol-e Nurabad. Il est également intéressant de souligner qu’en Anatolie, Dusinberre 1999 propose de voir dans l’apparition de nombreux bols carénés dans les couches perses et hellénistiques de Sardes un indice de pénétration de traditions perses.
Sumner 1986a : 5-ill.1 : A,B,C,D, E, H, I, L, O, P, Q (Pl. 13)et Sumner 1986a : 5-ill.2 : A, B, C, I, J, K (Pl. 14)
Sur Tol-e Qaleh cf. § 6.2.3.2.2 ; et sur Tol-e Gap cf. § 6.2.6.2.1
Cf. 6.4.2
Zeidi & Adachi 2009 : 2-5 ; Askari-Chaverdi & Callieri 2009 : 15 ; Ata’i & Boucharlat 2009 : 18-19 (les jarres représentent 20 % de l’ensemble de la céramique retrouvée, seuls quelques bols carénés ont pu être mis au jour) ; Helwing & Seyyedin : 5-6 ; Asadi & Kaim : 9
Zeidi et al. 2006 : 156
Pour la plaine de Persépolis, voir toutefois les tessons de jarres publiées par Kleiss 1981 sur le site de Madakeh et datés de la période achéménide ; cf. § 6.2.3.5.4
Cf. § 4.1.2.2