5.1.1.1.3. Conséquences et persistance de l’hypothèse

L’importance symbolique de Persépolis est largement acceptée par l’ensemble des chercheurs et n’est pas contestable. Que la terrasse ait été construite comme un symbole de la puissance royale ne peut guère faire de doute. Cet aspect a été largement étudié à Persépolis à travers l’architecture et l’iconographie officielle. Ce qui paraît plus contestable, c’est de faire de Persépolis un site à vocation essentiellement symbolique, cette fonction supposée étant souvent mise sur le même plan que d’autres, mieux attestées.

L’absence de réponses archéologiques ou épigraphiques à certaines questions fondamentales concernant la fonction du site induit une réflexion circulaire. On présuppose que la cité est rituelle ou, dans une version moins nuancée, qu’elle a certainement une fonction religieuse, donc l’ensemble des données archéologiques sont étudiées et interprétées à travers ce prisme. Dans un mouvement de balancier, l’étude des données matérielles renforce l’idée que le site a avant tout une fonction symbolique. Comme l’a évoqué M. Root520, les interprétations des bas-reliefs sont particulièrement symptomatiques de ce mode de pensée circulaire. Ainsi le site n’est pas une ville à part entière, c’est un site rituel. Les bas-reliefs ont donc forcément une signification rituelle et représentent probablement une cérémonie. Puisque les achéménides étaient zoroastriens, il s’agit de la cérémonie du Nouvel-An521. Enfin, les bas-reliefs sont une représentation de Nowrouz, donc le site est à réinterpréter entièrement pour en faire un site dédié essentiellement au bon déroulement de cette cérémonie522.

Malgré les doutes qui devraient subsister, cette fonction cérémonielle de l’ensemble monumental de Persépolis est régulièrement reprise dans les publications synthétiques récentes, et mise parfois au même plan que ses autres fonctions523. S. Shabbazi, en introduction de son guide de Persépolis, qui constitue l’ouvrage à destination du « grand public » le plus récent sur le site, défend par exemple toujours la thèse de la célébration de Nowrouz524. Ainsi, peut-être par effet d’entraînement, du fait de la masse de publications, la fonction essentiellement rituelle de Persépolis reste donc régulièrement reprise. Cette affirmation est ainsi devenue un lieu commun des commentaires sur Persépolis, et occulte une réalité plus complexe.

Notes
520.

Root 1980 : 5 « The architectural reliefs have thus been studied simultaneously as a reflection of and as a primary source on the presumed ceremonial nature of the city itself (a circular methodology, of course) »

521.

Pope 1957

522.

Ghirshman 1957

523.

Par exemple : Huyse 2005 : 62

524.

Shahbazi 2004 : 11-12 où néanmoins les autres hypothèses concernant la fonction du site sont également évoquées.