5.2.2.1. Le système défensif de la terrasse

Il ne s’agit pas ici d’effectuer une synthèse complète des quelques résultats obtenus au cours des différentes fouilles qui ont pu mettre au jour des éléments du système défensif de la terrasse de Persépolis, mais de tenter d’en définir la structure et le tracé.

La terrasse est tout d’abord défendue par son haut parement en pierre. Sa description architecturale précise a été faite par E.F. Schmidt613 et F. Krefter614. A.B. Tilia a également publié une étude sur la chronologie d’édification du mur de soutènement et a pu mettre en évidence plusieurs phases de construction615. Entre les différents côtés de la terrasse royale, on relève tout d’abord des différences importantes de hauteur du mur. E.F. Schmidt remarque par exemple la très faible hauteur du mur sud, et suppose qu’il devait être surélevé par un rempart de brique crue pour assurer une défense efficace616. A. Mousavi souligne également les faiblesses défensives engendrées par les plus faibles hauteurs du mur de terrassement au sud. Il remarque cependant que les sondages de A. Tadjvidi, pratiqués au pied du mur, ont prouvé que sa base se trouve enfouie 6,6 m en dessous du niveau de sol actuel. Sa hauteur à l’époque achéménide aurait donc pu être beaucoup plus élevée qu’aujourd’hui où il ne s’élève qu’à environ 5 m au-dessus du niveau de sol actuel617.

Le système de défense de la terrasse se trouve également renforcé par la construction, à certains endroits, d’un large rempart en brique au-dessus du parement de pierre de la terrasse. Un tel mur a été construit le long des limites nord et est de la terrasse, et il est étudié depuis le commencement des travaux de fouille à Persépolis. E. Herzfeld a fouillé une partie du rempart nord où il a découvert les tablettes des Fortifications618. E.F. Schmidt, quant à lui, a procédé à des fouilles dans la partie sud du mur oriental dans le secteur du « Garrison Quarters » 619. Ce secteur est délimité vers l’est par une section du rempart en brique crue, qui après avoir suivi les crêtes du Kuh-e Rahmat, longe la partie sud-est de la terrasse. Il est toutefois nécessaire de souligner que la tour de défense mise au jour ici est sortante vers l’ouest, soit vers la terrasse : le rempart était donc destiné avant tout à protéger les pentes de la montagne620. Les limites ouest et sud de la terrasse ne portent pas de fortifications. Concernant la limite occidentale, un rempart a été construit dans la partie nord jusqu’à l’Apadana, mais ne continue pas plus au sud. L’hypothèse a été faite qu’il fait place à un simple parapet suite à un réaménagement du mur de soutènement à cet endroit621. Pour la limite sud de la terrasse, A. Mousavi relève que seul un mur de taille modeste, sans tour intermédiaire, courait le long de la limite sud622.

Cette très rapide description fait donc apparaître plusieurs anomalies structurelles du système de défense de la terrasse. En effet, le degré de protection de l’ensemble ne paraît pas homogène. Au nord, le niveau de la terrasse est moins élevé, mais la défense de la terrasse est assurée par la construction d’un rempart par-dessus le mur de soubassement en pierre. A l’est, un rempart a été construit au contact de la pente du Kuh-e Rahmat et de la terrasse, néanmoins il paraît d’abord destiné à protéger les pentes du Kuh-e Rahmat plus que la terrasse royale. Au sud, non seulement la terrasse est plus basse, mais elle n’a pas été surmontée d’un rempart de brique crue sur le même modèle qu’au nord ou au nord-ouest. Enfin, le long de la limite occidentale, l’interruption du rempart périphérique au niveau de l’Apadana provoque une faiblesse dans le système défensif623. La protection des bâtiments royaux est donc très inégalement assurée par cette première ligne de défense. Ces faiblesses sont probablement des indices en creux de l’existence d’autres lignes défensives, au-delà de la terrasse, qui permettaient d’assurer une protection efficace de l’ensemble. L’absence de remparts au sud-ouest et au sud permet ainsi de supposer qu’une seconde ligne de fortification aurait été aménagée dans la plaine incluant le Barzan-e Jonoubi, puisqu’il n’a pas semblé nécessaire de continuer la construction du rempart occidental jusqu’au coin sud-ouest de la terrasse624. Vers l’est, la défense pouvait être assurée par le rempart construit pour protéger les pentes du Kuh-e Rahmat.

Notes
613.

ibid. : 61-62

614.

Krefter 1971 : 85-89

615.

Tilia 1978 : 3-27

616.

Schmidt 1953 : 62

617.

Mousavi 1992 : 218

618.

Herzfeld 1941 : 226 ; Razmjou 2008, cf. § 5.1.2.1.

619.

Schmidt 1953 : 206-211

620.

Cf. § 5.2.2.2 ; Boucharlat 1997 : 222-n.9 fait des remparts du Kuh-e Rahmat une ligne de défense indépendante du système de protection de la terrasse.

621.

ibid. : 62 ; confirmé par l’étude sur le parapet publiée par Tilia 1969.

622.

Mousavi 1992 : 218

623.

De plus Tilia 1969 et Tilia 1978 : 19-24 décrit, devant l’Apadana et le palais H, des remaniements du mur de terrassement qui a été avancé de 17,5m vers l’est.

624.

Mousavi. 1992 : 215