5.2.3.4.1. La zone non-construite au nord-est du Barzan-e Jonoubi

La définition des limites vers le nord du quartier méridional pose tout d’abord la question de la relation entre la haute et la basse terrasse, soit entre la terrasse royale de Persépolis et le Barzan-e Jonoubi. Les quelques données disponibles tendent à montrer des connexions entre les deux secteurs, et pourraient donc laisser présager d’une continuité spatiale de l’occupation702. Toutefois, on dénote une absence de vestiges sur l’ensemble de la partie nord-est du Barzan-e Jonoubi, ce qui pose donc les questions de la limite de la surface bâtie et de la réalité de cette possible continuité de l’occupation.

Ce secteur apparemment vide représente une surface de forme à peu près carrée d’environ 6ha, soit près de la moitié de l’ensemble de la surface totale estimée du Barzan-e Jonoubi. Cet état de fait peut s’expliquer tout d’abord par l’absence de fouilles archéologiques extensives dans cette zone703. Au nord du Barzan-e Jonoubi, A. Sami et A. Tadjvidi ont ouvert deux sondages, de surface limitée, situés au pied du mur sud de la terrasse704, qui n’ont pas révélé de vestige d’architecture. Certains pensent que cet endroit a dû demeurer non-bâti du fait de la présence de l’inscription de Darius, qui ne pouvait pas être cachée par d’éventuelles constructions705. Pour le reste de la partie nord-est du Barzan-e Jonoubi, apparemment vide, les quelques hypothèses émises le destinent à recueillir les eaux de pluies provenant du système d’évacuation de la terrasse et des piedmonts du Kuh-e Rahmat706. Le système de canalisation rupestre dans l’angle sud-est de la terrasse, accolé à la citerne, aurait été en effet destiné à évacuer le trop plein d’eau provenant des pentes de la montagne en direction du sud707. La partie nord-ouest du Barzan-e Jonoubi aurait donc pu accueillir un large bassin de récolement. L’eau stockée aurait pu être ainsi destinée d’une part à l’alimentation en eau des différents bâtiments du secteur méridional, et d’autre part à l’irrigation des jardins qui pouvaient entourer la terrasse708. Les vestiges d’un canal non daté ont été relevés le long de la limite orientale du Barzan-e Jonoubi ; il courrait le long du piedmont entre la terrasse et la zone construite au sud709 (Pl. 19 – en pointillé à l’est du Barzan-e Jonoubi). Il aurait pu contribuer à amener l’eau de ruissellement depuis la terrasse vers le sud, et constituer un des éléments de l’infrastructure hydraulique mise en place dans le Barzan-e Jonoubi.

Pour compléter la carte de l’occupation dans la partie nord du secteur méridional, trois colonnes en pierre se dressaient de part et d’autre du canal précédemment décrit, à mi-distance du pied de la terrasse et de la tombe inachevée. Suivant les auteurs, on a proposé des hypothèses contradictoires, toutes infondées. Il s’agirait des vestiges d’autels du feu achéménides710 ou des colonnes d’un portique d’une construction post-achéménide711. Concernant la première hypothèse, les colonnes mesurant entre 1,92 et 2m de haut, elles sont trop hautes pour accueillir et permettre l’entretien d’un foyer712. Il paraît de plus difficile de le considérer comme les vestiges d’un bâtiment : une photographie ancienne prise au milieu du 20e siècle713 montre qu’il existe un dénivelé important entre les deux colonnes les plus éloignées et qu’elles se situaient sur un terrain escarpé sur lequel il semble difficile de restituer un bâtiment. En outre, un plan schématique de localisation des colonnes montre qu’elles ne sont ni alignées, ni régulièrement espacées714. La forme de ces trois colonnes, peut-être inachevées715, ne permet pas de comparaisons avec des éléments connus, leur datation précise semble donc difficile.

Les données archéologiques au nord-est du Barzan-e Jonoubi sont donc très lacunaires et il est pour l’instant impossible de caractériser précisément l’occupation dans ce secteur.

Notes
702.

Cf. § 5.2.2.2 et 5.2.3.2

703.

Mousavi 1992 : 219

704.

Tadjvidi 1976 : 56-61 ; Mousavi 1992 : 211

705.

Mousavi 1992 : 219 ; cet argument semble un peu faible pour justifier de l’absence apparente de constructions sur l’ensemble des 6 ha, ceci d’autant plus que sur plusieurs sites achéménides les inscriptions royales ne semblent pas avoir été gravées pour être vues de tous. L’exemple le plus emblématique correspond à l’inscription multilingue de Darius Ier à Bisotun située à 60 m de hauteur.

706.

ibid. : 219-220

707.

Kleiss 1976 : 131-134

708.

Mousavi 1992 : 220, faisant part des hypothèses de A. Hakemi, l’architecte travaillant dans l’équipe de A. Sami.

709.

Kleiss 1976 : 133-Abb.2 et136 ; Tadjvidi 1976 : 71 estime pour sa part qu’il s’agissait des fondations d’un mur de protection à l’est du Barzan-e Jonoubi.

710.

Schippmann 1969 : 157

711.

Kleiss 1976 : 136

712.

ibid. : 135

713.

Schippmann 1969 : 163-pl.1. Elles sont aujourd’hui couchées au pied de la montagne, non loin de leur emplacement d’origine.

714.

Kleiss 1976 : 136-Abb.6

715.

Tadjvidi 1976 : 71