Les résultats obtenus par le P.P.R.F. dans le secteur nord au cours de l’année 2005 sont présentés ici, car ils apportent un complément d’information aux quelques données archéologiques exposées au cours du chapitre précédent752. Les prospections ont concerné l’ensemble des terrains suffisamment plats pour pouvoir être parcouru par l’opérateur, ce dernier évitant le lit du talweg sud qui présente une topographie très irrégulière. La surface totale prospectée mesure environ 10 ha, séparée en deux secteurs, l’un au sud de 2 ha et l’autre couvrant 8 ha au nord du vallon. Pour ces prospections, nous n’avions à notre disposition qu’une image de qualité moyenne de la carte du gradient magnétique, tirée du rapport rédigé à l’attention du P.P.R.F., ce qui limite les interprétations. Par exemple, la carte faisant apparaître des zones avec des concentrations d’anomalies de forte amplitude, le géophysicien a choisi une échelle de couleur assez étendue comprise entre -6 et 6 nT/m. Les variations dans les secteurs présentant de fortes valeurs de gradient apparaissent de ce fait avec un meilleur contraste, en effet une échelle plus resserrée amènerait une saturation. Néanmoins, la carte présente des anomalies intéressantes de plus faible amplitude, dont la résolution se trouve ainsi diminuée. N’ayant pas les mesures à notre disposition, il nous est impossible de modifier l’échelle de couleur et d’appliquer des traitements pour tenter d’améliorer la résolution de la carte.
La carte magnétique du secteur nord montre en premier lieu de nombreuses anomalies de forme sinueuse, liées aux évolutions des lits des talwegs et aux dépôts alluviaux associés. Au nord du talweg nord, la carte magnétique présente une réponse magnétique du terrain plutôt hétérogène à cause de la topographie irrégulière des pentes du Kuh-e Rahmat, la surface étant très caillouteuse. Les réponses obtenues au centre du vallon sont plus homogènes du fait de la nature alluviale du remplissage.
La partie nord de la carte du gradient magnétique ne présente pas, avec l’échelle de couleur choisie, d’anomalies identifiables pouvant être liées à la présence d’aménagements anciens. Au nord-est, les fortes anomalies qui délimitent un rectangle correspondent à l’emplacement des fouilles du bâtiment post-achéménide753. Au niveau de l’angle nord-ouest de ce rectangle, la carte présente une anomalie de forme circulaire, peut-être liée à cette occupation. Au sud de cet ensemble, de longues anomalies linéaires parallèles à la pente apparaissent avec une faible résolution (Fig. 5-3-flèches jaunes). Les données demanderaient à être traitées pour tenter de diminuer l’effet de la topographie de surface, afin de mieux repérer et étudier le tracé de ces lignes.
La partie de la carte située au sud du talweg nord montre plusieurs zones présentant des réponses magnétiques intéressantes. Sur la carte (Fig. 5-3), elles sont signalées par des flèches de couleur rouge ou orange. Les trois flèches rouges pointent en direction de regroupements de fortes anomalies ponctuelles. Les deux flèches orange désignent des anomalies linéaires rectilignes.
A l’ouest, une première flèche rouge pointe vers un ensemble de fortes anomalies qui délimitent un espace rectangulaire de 50 m sur 40 m situé à proximité de la jonction des deux talwegs. La réponse du terrain à l’intérieur de cet espace est très hétérogène, en particulier à l’emplacement du tepe (Fig. 5-3-cercle rouge en pointillé), sans pour autant pouvoir détecter le plan d’une organisation ancienne. La partie sud de cet ensemble est également largement érodée par un paléoméandre. L’interprétation archéologique de ces anomalies est particulièrement difficile en l’absence d’une étude précise de la répartition et de la nature des artefacts archéologiques présents en surface sur l’ensemble du vallon. N’ayant obtenu cette carte que tardivement, nous n’avons pas eu l’occasion de prospecter la surface de ces divers secteurs. Le matériel archéologique de surface, s’il y en a, pourrait éventuellement apporter des informations sur la nature des anomalies détectées. Ces fortes valeurs indiquent la présence de matériaux très magnétiques, or nous avons vu que des fragments de brique cuite ont été retrouvés dans le secteur, en particulier autour du tepe au sud du vallon754. La brique cuite, comme tout matériau argileux chauffé, provoque de fortes anomalies magnétiques. L’orientation de ces fortes anomalies apparaît tout à fait aléatoire, ce qui pourrait s’expliquer par l’existence de champs magnétiques induits différents pour chaque morceau de briques, les anomalies créées dépendant de la position de chaque fragment. Néanmoins, ce tepe ne semble pas correspondre aux vestiges d’un four de brique, car une telle structure produirait des anomalies de plus forte amplitude que celles enregistrées ici755.
Plus au sud, les deux autres flèches rouges pointent vers des groupements de fortes anomalies de morphologie proche. Il s’agit d’anomalies ponctuelles alignées, ces alignements délimitant des zones de forme rectangulaire. Pour l’ensemble le plus à l’est, cet espace mesure environ 35 m sur 15 m. Celui situé en bordure ouest est largement perturbé par l’érosion fluviatile, toutefois sa partie sud laisse entrevoir une organisation des anomalies comparable. Dans les deux cas, les orientations des anomalies sont toutes identiques et respectent celle du champ magnétique actuel, soit à peu près la direction du nord géographique. Cette cohérence d’orientation des anomalies pourrait être due à la présence de métal dans le proche sous-sol. Le caractère organisé de ces ensembles indique par ailleurs qu’ils sont liés à des activités humaines qu’il est impossible de caractériser à partir des seules données géophysiques.
Deux endroits ont été désignés par une flèche orange sur la carte. Il s’agit à l’ouest d’une anomalie positive linéaire, dont on ne repère que très partiellement le tracé, mais qui semble délimiter la zone de fortes anomalies situées autour du tepe vers l’est. L’autre flèche, située au centre du vallon, pointe vers une zone particulièrement intéressante. Une succession d’anomalies magnétiques rectilignes dessine les contours d’un vaste espace rectangulaire orienté vers le nord-ouest. L’amplitude des réponses à cet endroit étant plus faible, l’échelle de couleur choisie pour éditer la carte ne permet pas de les repérer avec précision. La forme générale et le domaine d’amplitude de ces réponses pourraient indiquer la présence de vestiges d’une vaste construction au centre du vallon. Un travail plus poussé sur les données magnétiques, associé à des prospections sur le terrain, pourrait permettre de confirmer cette hypothèse.
Plusieurs conclusions peuvent être tirées des investigations magnétiques : d’une part, les prospections magnétiques entreprises dans le vallon nord ne permettent pas de restituer un plan d’occupation dense à caractère résidentiel, les indices d’occupation étant épars et difficiles à interpréter ; d’autre part, la carte magnétique n’a pas révélé d’anciens fours artisanaux. Le secteur nord serait donc essentiellement destiné à l’extraction de la pierre, en liaison avec les chantiers de construction de la terrasse. Il semble encore moins abriter de bâtiments à caractère royal ou aristocratique, si ce n’est au nord-est pour la période post-achéménide. Il pourrait donc être tentant d’en faire un quartier artisanal de Persépolis dédié à la taille de la pierre. Néanmoins les traces de carrière ne sont pas limitées à ce seul vallon ; elles se poursuivent en effet bien plus au nord, sur l’ensemble du piedmont nord-ouest du Kuh-e Rahmat756. Le vallon nord constituerait alors la limite sud d’une plus vaste zone de carrières, et non le quartier des tailleurs de pierre de Persépolis.
Pour une présentation de l’ensemble des prospections magnétiques menées par le P.P.R.F., cf. § 5.3.1.4
Cf. § 5.2.3.5.1
Cf. § 5.2.3.5.1
Cf. § 3.3.2.1.1
Cf. § 5.5.4.2