5.2.4.1.1. Problématique archéologique des prospections géophysiques menées au pied de la terrasse royale

Les fouilles iraniennes, conduites successivement par A. Sami et A. Tadjvidi entre les années 1960 et 1970, constituent notre principale source d’information sur l’archéologie au pied de la terrasse758.

Le sondage à proximité de l’inscription de Darius a révélé que la base du parement sud de la terrasse est située à une profondeur de plus de 6 m759. Ce sondage aurait de plus mis au jour les soubassements d’un escalier donnant accès à une porte située au sud de la terrasse royale760. Les couches plus superficielles n’ont pas révélé de traces d’occupation, à part des traces de foyers et des alignements de pierre à proximité de la surface et attribués à des installations très récentes761. Des sondages effectués plus à l’ouest ont donné des résultats sensiblement différents concernant les profondeurs d’enfouissement des vestiges archéologiques. Ils ont révélé la présence, non loin de la surface, d’après les photographies de fouille, de plusieurs sections de fondations en pierre d’un long mur et d’un ancien système de canalisation. Parmi les interprétations possibles, ce mur pourrait correspondre aux fondations du second rempart de Persépolis762. La profondeur d’enfouissement des vestiges semble donc très variable, de 6 m au pied du parement sud de la terrasse, à quelques centimètres au sud-ouest de la terrasse royale.

Les dynamiques d’enfouissement ont donc été différentes suivant les secteurs. Du fait des apports de sédiments argileux issus de l’érosion des bâtiments en brique crue de la terrasse, elles ont en effet été probablement plus fortes au pied de la terrasse. Comme le montre d’anciennes prises de vue du site remontant à la fin des années 1920763, l’érosion des constructions en brique crue a pu former, au pied de la terrasse, d’importantes accumulations de sédiments de plusieurs mètres de hauteur. Une photographie aérienne de Persépolis datant de 1937764 montre que très tôt ces collines ont été aplanies, ajoutant une couche probablement assez épaisse de sédiments au niveau topographique naturel. Ces observations peuvent expliquer l’enfouissement plus important des vestiges au pied de la terrasse. A une centaine de mètres du pied de la terrasse, la situation paraît donc très différente, puisque les vestiges ne semblent pas être enfouis à plus d’un demi-mètre de la surface. Depuis les fouilles, il faut toutefois prendre en compte les aménagements récents, l’installation des lampadaires et des réseaux électriques, ou la construction de la route asphaltée, qui ont probablement nécessité des terrassements importants et entraîné une perturbation ou un recouvrement des couches archéologiques les plus superficielles.

Les fouilles au pied de la terrasse offrent de plus quelques informations sur la nature des vestiges recherchés. Il est ici nécessaire de distinguer le pied de la terrasse du reste de l’esplanade plus à l’ouest. La construction de la terrasse a obéi à un projet architectural qui a pu évoluer, comme le prouve la construction d’une porte au sud, bouchée ensuite à une époque indéterminée, ou encore les évolutions du parement de terrasse devant l’Apadana765. Au pied de la plateforme, il est donc possible de retrouver des témoins de réaménagements du mur de soubassement. Ces vestiges doivent être plutôt situés au niveau des fondations, donc à des profondeurs importantes, dépassant les 2 m sous la surface actuelle. Pour les couches plus superficielles, entre 0 et 2 m, le sondage effectué au pied de l’inscription de Darius, au sud, n’a pas permis de révéler la présence d’aménagements d’époque achéménide. L’absence de traces en négatif d’accroche de mur ou de trous de mortaises dans le parement de la terrasse pourrait également démontrer une absence de constructions adossées au mur de soubassement. Rien n’indique donc qu’au pied de la terrasse, les niveaux superficiels renfermeraient des vestiges archéologiques. Les investigations géophysiques à cet endroit doivent donc se concentrer sur la recherche de structures de taille importante et enfouies profondément.

Plus à l’ouest, les résultats des sondages menés par A. Tadjvidi montrent qu’il est possible de retrouver plus superficiellement des vestiges de canalisations, ou des fondations en blocs calcaires de superstructures probablement construites en brique crue. Ici, à une centaine de mètres du pied de la terrasse, l’objectif est donc de retrouver des structures de plus petite taille mais plus superficielles. Il est possible qu’entre ce secteur et le pied de la terrasse des constructions aient existé mais en l’état actuel des connaissances rien ne l’indique.

La problématique des prospections géophysiques sur l’esplanade à l’ouest de la terrasse royale est donc complexe. Il est nécessaire de choisir des méthodes qui permettent de détecter des vestiges aussi bien dans les niveaux proches de la surface qu’à plus de 2 m de profondeur. De plus, les premiers décimètres de sol correspondent à du remblai ou ont été perturbés par les aménagements récents. La méthode choisie doit donc donner une information sur la stratigraphie, pour permettre de séparer les résultats obtenus pour les couches superficielles, largement perturbées par les terrassements récents, de ceux obtenus pour les couches plus profondes, correspondant éventuellement à des niveaux archéologiques en place. La méthodologie mise en place doit donc répondre à ces diverses contraintes, auxquelles s’ajoutent la nature de la surface du sol et un environnement actuel peu favorable à l’emploi de certaines méthodes.

Notes
758.

Tadjvidi 1976

759.

Cf. § 5.2.2.1

760.

Cf. § 5.2.3.4.1

761.

Tadjvidi 1976 : 61

762.

Cf. § 5.2.2.3

763.

Herzfeld 1929 : fig.3

764.

Schmidt 1940 : plate 2

765.

Tilia 1969, Cf. § 5.2.2.1