5.3.3.2.3. Comparaison avec les données d’une prospection à vue sur sol nu

Sur l’ensemble des champs prospectés avec la méthode magnétique, nous avons procédé à une évaluation des concentrations de céramiques de surface. Nous avons évalué les valeurs de concentration par comptage des tessons le long de lignes régulièrement espacées, complété par un échantillonnage ponctuel sur des carrés de 1 m de côté825.

La carte de concentration de la céramique montre une répartition très hétérogène des tessons (Fig. 5-21). Au sud de la zone prospectée, on observe de fortes valeurs de densité de tessons sur une bande d’une soixantaine de mètre de large. Les concentrations mesurées dans ce secteur dépassent généralement les 10 tessons/m², et une valeur maximale de 82 tessons/m² a été enregistrée au sud-ouest. D’après nos observations de surface, la céramique est essentiellement de catégorie achéménide/LPW. Comparées avec les résultats de nos prospections en-dehors de la zone d’occupation de Persépolis, ces valeurs de concentrations sont très élevées pour la plaine de Persépolis826. L’ensemble de la partie nord se signale quant à elle par une quasi-absence de céramiques en surface, les valeurs de concentration étant le plus souvent inférieures à 1 tesson/m².

Lorsque l’on compare la carte du gradient magnétique (Fig. 5-17) et la carte de répartition de la céramique (Fig. 5-21), elles se caractérisent toutes deux par la même différence entre la partie nord et la partie sud de la surface prospectée. La zone de fort magnétisme au sud du champ se superpose parfaitement au secteur présentant les plus fortes concentrations de céramiques. La présence de concentrations de céramiques pourrait traduire la présence d’un secteur d’occupation ancien au sud de la surface prospectée, et plus particulièrement l’existence de bâtiments (lieux de stockage, habitats, ateliers…). Les terrains les plus magnétiques pourraient donc être reliés à l’existence d’une occupation ancienne, et plus précisément à d’anciennes surfaces bâties. La prospection magnétique ne permet toutefois pas de détecter le plan des différents édifices qui auraient pu s’élever au sud des parcelles étudiées. Il est en effet probable que la succession des labours ait en grande partie arasé les aménagements anciens. L’occupation ancienne a toutefois provoqué une modification des propriétés magnétiques des sols827, et il est également possible que les couches superficielles renferment de fortes concentrations de matériaux plus magnétiques provenant des vestiges détruits. La plupart des céramiques étant de catégorie achéménide/LPW, cette occupation serait probablement à dater de la seconde moitié du Ier millénaire av. J.-C.828.

En dehors de cette zone de fortes concentrations de céramiques, vers le nord, les densités de tessons sont généralement nulles (Fig. 5-21). Parallèlement, la carte magnétique (Fig. 5-17) présente des valeurs du gradient beaucoup plus faibles au nord qu’au sud. Les cartes sont donc à nouveau cohérentes, l’absence de céramique correspondant à une zone de plus faible magnétisme. En ce sens, il serait dans un premier temps possible de conclure que le nord de la surface étudiée n’était pas occupé aux alentours de l’époque achéménide. Toutefois, au nord, on remarque une continuité du réseau d’anomalies rectilignes linéaires : le nord a par conséquent été aménagé, et donc occupé. Par comparaison avec les résultats obtenus au sud, il pourrait s’agir d’une occupation de nature très différente, qui n’a laissé que peu d’artefacts en surface, et a peu modifié les propriétés magnétiques du terrain. Elle ne correspondrait pas à une zone bâtie, mais peut-être à des parcelles agricoles ou à des jardins, qui ont laissé peu de traces en surface mais s’intègreraient dans le plan d’organisation orthogonal dessiné par les longues anomalies linéaires rectilignes.

Figure 5‑21 : Carte de répartition de la céramique au nord-ouest du parking ouest, présentant à titre indicatif certains points de comptage des concentrations
Figure 5‑21 : Carte de répartition de la céramique au nord-ouest du parking ouest, présentant à titre indicatif certains points de comptage des concentrations

Au centre de ce secteur nord, un petit secteur de 200 m² présente toutefois des concentrations de tessons estimées à environ 4 tessons/m² (Fig. 5-21). Son emplacement correspond à une assez forte anomalie magnétique de forme à peu près rectangulaire. Elle est délimitée au sud et à l’est par deux anomalies rectilignes qui appartiennent au réseau décrit auparavant. Il pourrait éventuellement s’agir d’un bâtiment isolé, dont le plan n’apparaît pas clairement sur la carte magnétique. Les anomalies reliées à ce possible vestige semblent en tout cas s’intégrer dans le plan d’organisation esquissé par les longues anomalies rectilignes. Les quelques céramiques repérées en surface pourraient a priori correspondre à de l’achéménide/LPW, mais aucun tesson diagnostique n’a pu être relevé. L’existence de ce secteur témoigne à nouveau de la remarquable corrélation entre les résultats de la prospection à vue et ceux de la prospection magnétique.

Notes
825.

Cf. § 3.2.4

826.

Cf. § 6.2.7.2.1

827.

Cf. § 3.3.2.1.1

828.

Cf. § 4.2.2