5.5.3. Les prospections sur le piedmont du Kuh-e Rahmat entre Istakhr et la terrasse de Persépolis

5.5.3.1. Présentation du secteur

Encadrés par deux sites majeurs de la plaine, Persépolis et Istakhr (Pl. 15), chacun étant pour leur période d’occupation respective des centres politiques et symboliques importants, les pentes nord-ouest du Kuh-e Rahmat présentent des vestiges archéologiques à relier très probablement au développement de ces deux pôles. Le centre de gravité de l’activité se déplaçant de Persépolis à Istakhr, c’est la totalité du piedmont entre ces deux sites qui a été exploitée et aménagée par l’Homme.

Sur l’ensemble des versants nord-ouest du Kuh-e Rahmat, les bancs de calcaire affleurent. Le piedmont proprement dit, le cône sédimentaire produit par l’érosion des versants1091, est généralement d’une largeur réduite à quelques dizaines de mètres (voir par exemple Fig. 5-79 et 5-81). Tout le long, une route goudronnée suit le massif alors qu’en contrebas s’étend la plaine alluviale. Sur la plus grande partie du piedmont, les affleurements calcaires présentent généralement un pendage parallèle à celui de la pente naturelle. Ils sont très fracturés et le développement des réseaux de diaclases produit de gros blocs parallélépipédiques qui se détachent progressivement du substrat rocheux. Néanmoins, les reliefs de la pointe nord du Kuh-e Rahmat, à proximité d’Istakhr, sont généralement moins escarpés, le pendage des couches étant proche de l’horizontale. Au sud-ouest d’Istakhr, la présence de bancs de calcaire plus épais explique l’existence de falaises d’une dizaine de mètres de haut. Sur toute sa longueur la partie occidentale du piedmont est entaillée de plusieurs petits vallons escarpés et rocailleux (Pl. 15, 33 et 35). La partie nord présente quant à elle une succession de vallons plus vastes, à la topographie plus plane ; le plus grand, au niveau de la pointe nord-ouest du massif, mesure un kilomètre de long et 500m de large (Pl. 15 et 32).

Les piedmonts nord-ouest Kuh-e Rahmat paraissent difficilement constructibles du fait des reliefs escarpés et de la présence d’affleurements calcaires. Seuls les vallons au nord présentent une topographie plus favorable à la construction de bâtiments. Ils sont actuellement tous cultivés ou occupés par des exploitations agricoles modernes et n’ont pas pu être prospectés systématiquement. Nous verrons par la suite que les indices d’occupation ancienne relevés sont essentiellement de nature rupestre, tandis que les concentrations de céramiques ou les vestiges architecturaux sont très rares. La zone de piedmont paraît donc en grande partie inhabitée, probablement à cause de sa topographie. Cette observation pourrait également s’expliquer par la présence des deux sites de Persépolis et d’Istakhr, qui ont dû, chacun à leur époque d’occupation respective, concentrer la population et la plupart des activités artisanales. Pour autant, les traces d’aménagements rupestres, de carrières ou encore la présence de nombreuses niches ou fosses funéraires témoignent d’activités et d’une fréquentation de ces espaces par l’Homme.

La route qui longe la montagne entre Istakhr et la terrasse de Persépolis est une route historique parcourue par nombre de savants et d’archéologues. Les monuments principaux la jalonnant ont très tôt été publiés. Ainsi, Naqsh-e Rajab, situé entre Persépolis et Istakhr, est le site le plus connu1092 (Pl. 15 et 33) : dès le milieu du XIXe siècle, E. Flandin et P. Coste publiaient des reproductions des bas-reliefs sassanides1093. Plus au nord, en face du site d’Istakhr, les mêmes voyageurs ont relevé les vestiges d’une construction monumentale en gros blocs de calcaire1094 (Pl. 31 et Fig. 5-71). Outre ces deux sites, le piedmont du Kuh-e Rahmat a fait l’objet d’études ponctuelles. Les données proviennent, entres autres, des observations des fouilleurs de Persépolis et d’Istakhr ou sont publiées au détour d’études spécialisées dans lesquelles sont indiqués les vestiges du piedmont. Par exemple R. Boucharlat, dans le cadre de son étude portant sur l’époque sassanide, a parcouru, relevé et étudié une grande partie des monuments funéraires rupestres au nord-ouest du Kuh-e Rahmat1095. Suite à des prospections dans la région de Persépolis, W. Kleiss a publié l’ensemble de ses observations effectuées le long piedmont du Kuh-e Rahmat. Les informations sont distillées dans trois articles, parus à des intervalles de temps assez espacés1096.

Notes
1091.

Sur la mise en place des cônes de bas de pente, cf. § 2.3.3

1092.

Cf. § 5.5.3.5.1

1093.

Flandin & Coste 1843-54 : Pl. 189-192bis

1094.

ibid. : Pl. 58-60, Cf. § 5.5.3.3.2

1095.

Boucharlat 1978

1096.

Kleiss 1976, 1993 et 1994