5.5.3.4.2. La partie orientale du grand vallon au sud-ouest d’Istakhr

  • ISO3 : coordonnées UTM 39R : E 683633 m ; N 3317303 m

Au pied du versant, sur un talus étroit, un alignement de blocs équarris de taille décimétrique affleure sur 30 m selon une orientation nord/sud perpendiculaire à la pente. Cet aménagement pourrait constituer une section construite du canal (Pl. 32). Au centre de cet alignement, un petit talweg coupe la structure en deux sections. Les blocs sont en partie recouverts de sédiment mais il est visible en coupe que la construction est en fait composée d’un double alignement de 80 cm de largeur. Les altitudes mesurées le long de cette structure se situent autour de 1631 m et dessinent l’existence d’une pente régulière vers le sud. Toutefois le dénivelé entre le point le plus au nord et celui le plus au sud est de 1 m pour une distance de 30 m, ce qui donnerait une valeur de pente de plus de 3‰, plus forte que celle des sections amont. Toutefois, les mesures de pente sur une section construite ne sont pas fiables car il est impossible de restituer le niveau du fond du canal.

A nouveau les valeurs d’altitude mesurées ici posent un problème par rapport à celles de la section rupestre ISO2, décrite précédemment. Elles sont de près d’un demi mètre supérieures à celle de l’extrémité occidentale de la section ISO2. Cette observation pourrait apporter un nouvel argument en faveur d’un inachèvement du tracé rupestre ISO2. Néanmoins, la base de la structure à double parement est située 1 m plus bas que sa surface, niveau qui serait équivalent à celui de ISO2. Toutefois la présence d’un blocage de gravier entre les deux parements interdit toute circulation de l’eau au niveau de la base des blocs.

  • ISO4 : coordonnées UTM 39R : E 683665 m ; N 3317192 m

Au sud de ISO3, à 100 m, une grande fosse rupestre a été aménagée dans les affleurements calcaires situés au-dessus d’un chemin en terre. Cette fosse paraît isolée, cependant le relief qui la domine n’a pas été prospecté.

  • ISO5 : coordonnées UTM 39R : E 683583 m ; N 3316833 m

Plus au sud, à 300 m, le vallon est barré par une grande digue en terre de 170 m de long et de plus de 2 m de haut (Pl. 32 et Fig. 5-76). Cet ouvrage a été construit au pied d’un cône sédimentaire formé par un talweg provenant du sud : le terrain au sud de cette digue est donc recouvert d’une nappe alluviale de gravier. Ce long talus a probablement une fonction de protection des terres arables en aval contre les crues du talweg.

Figure 5‑76 : ISO5, vue vers l’est de la digue (cliché TDS, printemps 2008)
Figure 5‑76 : ISO5, vue vers l’est de la digue (cliché TDS, printemps 2008)

La construction de cette digue de protection doit être assez ancienne. En effet, en amont deux fermes se sont installées sur le cône sédimentaire : une, qui est aujourd’hui abandonnée, construite en brique crue au niveau de l’extrémité est de la digue, l’autre au sud-ouest est plus récente et encore habitée. Si cette digue de protection était moderne, il est certain que ces bâtiments ne se seraient pas installés à cet emplacement. La plantation d’arbres fruitiers âgés sur le versant nord de la digue, ainsi que les traces de terrassements récents sur le versant sud, indiquent de plus que la digue n’est plus entretenue depuis un certain temps. Enfin autre indice d’ancienneté, comme on le voit sur le profil nord/sud de la digue (Fig. 5-77), la surface du terrain en amont et en aval ne dessine par une pente régulière : en amont le sol est près de 2 m au-dessus du niveau de la plaine ce qui indique une importante accumulation de sédiment et probablement une mise en fonction ancienne de cet ouvrage de protection.

Il est par contre difficile de dater avec précision sa construction. En effet, 100 m plus à l’ouest, aligné avec l’axe principal de la digue, nous avons retrouvé une probable section construite du canal de 15 m de long (ISO6) suivie d’une courte section rupestre de 3 m de long (ISO7). Il est donc probable que le canal devait passer à l’emplacement où s’élève aujourd’hui la digue. De ce fait, la digue serait plus récente que le canal, canal probablement lié au développement de l’occupation d’époque achéménide autour de Persépolis1139. Si l’on étudie à nouveau le profil, l’altitude de la digue est en effet trop élevée pour que le canal ait été construit dessus. Le sommet de la digue s’élève à 1635 m et l’altitude du canal est de 1631 m au niveau de la section ISO7. Toutefois, il est possible que la construction de la digue ait profité de la présence d’un talus servant de base au canal.

Figure 5‑77 : ISO5, profil topographique nord/sud de la digue
Figure 5‑77 : ISO5, profil topographique nord/sud de la digue

Concernant la géomorphologie des versants, il est par ailleurs intéressant de noter que la présence de bâtiments modernes en amont du talus indique peut-être un changement de régime du talweg. Si une occupation est présente en amont de la digue de protection, cela veut probablement dire que la fréquence ou l’intensité des crues est plus faible qu’à l’époque de construction de la digue. La présence des fermes indique également que la sédimentation en aval du talweg doit être faible. La déforestation des versants nord du Kuh-e Rahmat devant être assez ancienne, les pentes sont de ce fait lessivées1140, comme le montre la présence de la dalle calcaire affleurant sur la majorité de la surface de cette partie du massif, les volumes de sédiment transportés par les cours d’eau du massif sont donc moindres.

  • ISO6 : coordonnées UTM 39R : E 683583 m ; N 3316833 m

A 50 m au sud-ouest de la digue, des terrassements récents dans le piedmont ont fait apparaître en coupe plusieurs blocs alignés (Pl. 32 et Fig. 5-78). Il pourrait s’agir très vraisemblablement des vestiges d’une section construite du canal. Il a été impossible de prendre des points topographiques sur cet alignement, il était en effet masqué par une rangée d’arbres lorsque nous avons procédé au levé. Toutefois, il est situé sur une même ligne de niveau et dans l’axe de la section rupestre suivante, ISO7, située à 20 m plus à l’ouest. L’alignement, long de 15 m et large de 80 cm, est composé d’un double parement de blocs dégrossis.

Il paraît intéressant de s’arrêter sur le mode de construction à double parement de cette très probable partie construite. L’aménagement a été éventré et laisse apparaître sa structure interne. Les deux parements sont maintenus entre eux par un blocage de cailloutis hétérogène. Cette technique n’est pas sans rappeler les résultats des fouilles récentes sur des portions construites d’un canal sur la rive droite du Pulvar dans la vallée du Tang-e Bulaghi, non loin de Pasargades. Dans cette région, des alignements à double parement et blocage de gravier ont été construits sur des talus en terre destinés à maintenir un niveau constant1141. Il est à noter que si le mode de construction est identique dans les deux cas, la largeur entre les deux parements est proche de 2 m dans le Tang-e Bulaghi, donc beaucoup plus large que dans le cas de la section de canal ISO6.

Figure 5‑78 : ISO6, vue vers le sud des vestiges d’une section construite du canal, en partie détruite par des terrassements modernes. Cette destruction partielle laisse apparaître la structure de la construction, deux rangées de blocs enserrant un blocage de cailloutis (cliché SG, printemps 2007)
Figure 5‑78 : ISO6, vue vers le sud des vestiges d’une section construite du canal, en partie détruite par des terrassements modernes. Cette destruction partielle laisse apparaître la structure de la construction, deux rangées de blocs enserrant un blocage de cailloutis (cliché SG, printemps 2007)
  • ISO7 : coordonnées UTM 39R : E 683583 m ; N 3316833 m

Ce point correspond à une section rupestre du canal de 3 m de long (Pl. 32). La roche est entaillée au pic sur environ 5 cm d’épaisseur et sur une largeur de 70 cm, le fond n’est pas lissé. Il devait s’agir d’un aménagement de la roche servant de base à une superstructure où circulait l’eau. L’altitude de cette section rupestre est de 1630,1 m, soit environ 1 m au-dessous de la section ISO3, à l’est du vallon. Si l’on considère la pente du canal en amont de ISO3 proche de 2,5‰, la pente entre les deux sections serait de ce fait un peu plus faible, sachant qu’environ 800 m les séparent en suivant la ligne de niveau des 1630 m. Il faut toutefois rappeler les incertitudes concernant les mesures d’altitude du canal sur les portions construites.

Notes
1139.

Cf. § 5.5.4.1.2

1140.

Cf. § 2.3.3

1141.

Ata’i & Boucharlat 2009 : 23-31