5.6.1.2. Les monuments funéraires rupestres du Kuh-e Hussein, au nord de Naqsh-e Rustam

Immédiatement au nord de Naqsh-e Rustam, le versant occidental du Kuh-e Hussein présente de nombreux vestiges archéologiques (Pl. 39). Vers l’ouest, les pentes sont abruptes et très rocailleuses, puis, plus à l’est, au-dessus des falaises de la nécropole, elles se font plus douces de sorte que se forme un petit plateau, de pente moyenne orientée vers l’ouest. Il est incisé du nord au sud sur sa bordure orientale par le lit d’un talweg provenant des hauteurs du massif et débouchant au-dessus des tombes rupestres royales. Les vestiges archéologiques disséminés sur l’ensemble du versant témoignent de la diversité et de la densité de l’occupation ancienne autour de Naqsh-e Rustam : aménagements funéraires rupestres, traces de carrières, groupes de bâtiments, inscriptions rupestres, ouvrages de protection hydraulique.

Parmi ces vestiges, ceux de nature funéraire ont fait l’objet de nombreuses publications. Ils renforcent effectivement, en lien avec la présence des quatre tombes royales achéménides, l’hypothèse de l’existence d’une vaste zone cultuelle funéraire que l’on suppose zoroastrienne. Les débats entre archéologues se sont surtout concentrés sur deux types de vestiges rupestres : les petites fosses circulaires ou carrées et les plateformes au sommet des falaises de la nécropole royale.

Situées au pied du versant, deux fosses carrées à bourrelet, aménagées chacune au sommet d’un tronc de pyramide, décorées toutes deux d’arcatures aveugles, ont longtemps été interprétées comme des autels du feu1265. Leurs dimensions (40 cm de côté et 15 cm de profondeur), comparables à celles d’autres petites fosses de la région clairement identifiées comme des ostothèques, conduisent D. Huff à supposer que ces monuments correspondent à des aménagements funéraires1266. De plus W. Kleiss relève 7 petites fosses circulaires disséminées le long d’un axe nord/sud, de 500 m de long au pied du versant du Kuh-e Hussein1267, entre le vallon de Shah Ismaël et Naqsh-e Rustam. Ses descriptions ne sont pas très précises, mais on sait toutefois que trois d’entre elles possèdent un diamètre inférieur à 30 cm ce qui paraît petit pour une ostothèque ; elles pourraient donc avoir une autre fonction1268. Sur cette même portion du piedmont, R. Boucharlat a également relevé la présence de 8 chambres et 2 grandes fosses rupestres1269, auxquelles il faut rajouter les 24 niches de la nécropole de Shah Ismael (Pl. 39).

En outre, on relève la présence de deux plateformes rupestres situées dans les affleurements rocheux au sommet des falaises (Pl. 39), qui seraient des aménagements funéraires inédits pour la région. L’une correspond à une plateforme dont la surface est plane, mesurant 180 cm de long pour 80 cm de large, prolongée par un oreiller de 30 cm de large1270. Sur la paroi du rocher, à proximité, une inscription illisible a été repérée1271. La seconde, plus à l’est, est une plateforme de 3x2 m environ, de surface irrégulière, creusée entre 40 cm et 1 m de profondeur dans la roche, à laquelle on accède par l’angle sud-est via une volée de 5 marches d’escalier1272. Du fait de leur différence morphologique, E.F. Schmidt a assigné des fonctions différentes à ces monuments. Le premier serait un lit d’exposition pour le décharnement des corps, alors que le second correspondrait aux vestiges d’un mausolée1273. D’autres pensent que les deux monuments correspondent à des mausolées1274. Leur datation varie suivant les auteurs entre les périodes achéménide et sassanide. Du fait de l’illisibilité de l’inscription, il n’y a en effet pas d’élément de datation déterminant1275. Finalement, nous ne retiendrons que le caractère funéraire de ces aménagements qui, du fait du contexte, semble faire consensus, mais rien n’indique une datation de l’époque achéménide.

Notes
1265.

L’interprétation remonte à Flandin 1851 : 120, voir aussi Flandin & Coste : 1843-1854 : Pl.180 ; par la suite elle a été largement reprise.

1266.

Huff 1995 : 301-302, 2004 : 610 où il expose également un argument de bon sens dans le fait que les fosses sont trop hautes pour être facilement accessibles et entretenir le feu.

1267.

Kleiss 1976 : 144-145

1268.

Leurs diamètres les rapprocheraient plus des fosses circulaires peu profondes et sans bourrelet relevés le long du Kuh-e Rahmat entre Istakhr et Persépolis mais elles sont plus profondes, Cf. § 5.5.4.3.2

1269.

Boucharlat 1978 : 362-363 et Fig.13 ; Kleiss 1976 : 142-Abb.13 a également relevé certaines d’entre elles sans les décrire précisément.

1270.

Description Boucharlat 1978 : 363

1271.

Schippmann 1971 : 189

1272.

Description Huff 1988 : 152-154

1273.

Schmidt 1970 : 10 ; ces interprétations sont reprises et développées par Schippmann 1971 et paraissent acceptées par Kleiss 1976 : 145-146.

1274.

Trümplemann 1984 : 328 estime que cet aménagement ressemble aux lits mortuaires grecs ; Huff 1988 152-154 et 2004 : 617 pense que les deux monuments étaient couverts et correspondaient à des mausolées dont la superstructure aurait disparu.

1275.

La graphie de l’inscription ressemblerait à du pahlavi pour Schippmann 1971 : 189 alors que Trümplemann 1984 : 328 pense qu’il s’agit d’une écriture arsacide.