5.7.2.1. La délimitation de Parsa

En introduction de la partie consacrée à l’étude de la zone d’occupation de Persépolis, nous avions tenté de définir ce que pouvait représenter, sur le terrain, le toponyme de Parsa1371. Ce toponyme, équivalent de Persépolis, est généralement utilisé pour ne désigner que la terrasse royale. Pourtant, sur le terrain, nous avons vu que les différents vestiges définissent les contours d’un quartier royal beaucoup plus vaste. Certains chercheurs, A. Mousavi essentiellement1372, se sont basés sur les descriptions de la ville par Diodore de Sicile pour tenter de restituer l’emprise de la ville royale, délimitée par plusieurs lignes de fortifications (Pl. 18). Dans cette hypothèse, il n’est question de Parsa que comme agglomération distincte de Matezzish, assurant le rôle de capitale et centrée sur le quartier royal. Cette proposition de restitution reste difficile à attester sur le terrain. Malgré nos prospections au pied de la terrasse et dans les champs aux alentours, nous n’avons pas pu retrouver le tracé des possibles remparts de Parsa.. Les fouilles et études anciennes ne permettent d’en retracer que des sections limitées.

Les prospections dans le secteur de Persépolis Nord-Ouest ont permis de détecter un plan d’organisation ancien, très probablement à dater de l’époque achéménide, commun à l’ensemble du secteur et qui dépasse très largement les seules limites du groupe de tepes de Persepolis West 1373 (Pl. 24). Sur l’ensemble de ce secteur, en intégrant le bâtiment dit « Temple des Fratarakas », situé non loin de l’angle nord-ouest de la terrasse, les aménagements anciens s’organisent suivant un plan cohérent qui semblerait indiquer une certaine continuité spatiale de l’occupation. Nous avons donc suggéré que les limites de Persepolis West, et si l’on reprend l’identification proposée par W. Sumner, celles du quartier d’occupation commune de Matezzish, sont à repousser bien plus à l’est, jusqu’aux abords immédiats du quartier royal. Dans cette hypothèse, la question se pose alors de l’emprise de Parsa, puisque Matezzish pourrait s’étendre jusqu’aux limites du quartier royal. Ces résultats plaideraient donc plutôt pour l’existence d’une seule et même entité, englobant dans un même schéma d’organisation le quartier royal et Persepolis West, donc Parsa et Matezzish1374. Rappelons ici que l’orientation du parcellaire détecté à Persepolis Nord-Ouest est la même que celle des différentes constructions du quartier royal. Cette hypothèse n’est valable qu’à la condition que l’identification de l’ensemble formé par le secteur de Firuzi et Persepolis West à l’ancienne Matezzish soit exacte, ce qui reste encore à prouver par l’archéologie.

L’hypothèse selon laquelle les toponymes de Parsa et Matezzish ne désignent qu’une seule et même agglomération est toutefois à nuancer. Il faut en effet, dans un premier temps, reprendre la proposition de tracé des enceintes de Parsa par A. Mousavi (Pl. 18). Dans la configuration actuelle du site, la seconde enceinte (la plus proche du quartier royal) inclurait le parking ouest et une très grande partie de l’actuel Pardis, c'est-à-dire le complexe de jardins et de tentes en dur aménagé pour les commémorations de 1971, ce qui délimite une surface totale de plus de 70 ha. Les différentes campagnes de prospection géophysique entreprises au nord et au nord-ouest du parking ouest n’ont pas permis de détecter la présence de vestiges d’un rempart1375. Dans cette partie nord, les recherches menées récemment par l’équipe irano-italienne ont mis au jour, dans un fossé d’irrigation moderne situé non loin du parking ouest, les vestiges d’un large mur1376. Ce dernier n’a pour l’instant été dégagé que sur une surface très limitée, et il faudrait préciser sa localisation pour permettre de le relier éventuellement à des anomalies visibles sur les cartes magnétiques. La découverte de cette structure constitue toutefois un élément à considérer : elle pourrait en effet constituer un vestige de ce second rempart. Au sud du parking ouest, l’espace compris entre le tracé supposé du second rempart de Parsa et le quartier royal est actuellement complètement construit ou recouvert par une forêt de résineux. Sur ce vaste secteur, les réaménagements récents empêchent toute prospection, et il est donc impossible en l’état de détecter des vestiges archéologiques. Dans le doute, il faut donc considérer ce secteur sud comme ayant pu rassembler diverses constructions directement reliées au quartier royal, à l’intérieur de l’emprise du second rempart. Si l’on considère maintenant la proposition de tracé du second rempart (Pl. 18), la surface concernée est encore plus vaste, et les zones explorées très réduites. Plus largement, entre la tombe royale inachevée au sud du Barzan-e Jonoubi et le parking ouest, il reste un très vaste espace de plusieurs dizaines d’hectares, où l’occupation achéménide n’est pas caractérisée. Il est donc éventuellement possible de restituer ici l’emplacement d’un complexe de bâtiments reliés directement au quartier royal et abritant l’administration, les bâtiments de stockage ou encore les habitations des fonctionnaires, le tout formant un ensemble (Parsa) à part.

En l’absence de données, cette dernière hypothèse est tout à fait spéculative, et en l’état actuel des connaissances il est impossible de déterminer précisément l’existence d’une ville (Parsa) distincte de celle de Matezzish. Une exploration archéologique au sud-ouest du quartier royal pourrait apporter des données nouvelles permettant d’alimenter la discussion. Il faut toutefois souligner que, dans ce secteur, les réaménagements récents sont si importants qu’il est difficile d’envisager la production de nouvelles données. Parsa, définie comme étant la cité administrative et royale, se limite pour l’instant au seul quartier royal (Pl. 41), pour lequel nous avons toutefois démontré la difficulté d’une définition précise de l’emprise. Or, ce seul quartier royal, tel que nous le connaissons aujourd’hui, n’est pas en mesure d’absorber toutes les activités dont témoignent les tablettes administratives à Parsa. Le choix, a priori, de ne pas distinguer Parsa de Matezzish reste donc valide en l’état actuel de nos connaissances.

Notes
1371.

Cf. § 5.1.2.2

1372.

Mousavi 1992

1373.

Cf. § 5.3.5.2

1374.

Cf. § 5.3.5.2.4

1375.

Cf. § 5.2.5.1

1376.

Cf. § 5.3.5.3