6.2.3.5.2. Les vestiges de constructions achéménide en pierre : Bard Burideh I

Les vestiges actuels de Bard Burideh I sont situés sur le versant nord-ouest du Kuh-e Shahrak, ils dominent de 5 m le cours d’un petit affluent du Kur, le Rud-e Bidun. Ils sont constitués d’une plateforme rectangulaire en dalles blanches reposant sur des fondations de blocs équarris de couleur grise. Les dalles et les blocs de fondation sont de taille métrique, à joints vifs. La plateforme mesure 10 par 20 m et est orientée nord-ouest/sud-est. Sur la moitié sud de cette plateforme, deux murs parallèles en élévation sont préservés sur 8 m de long, ils sont espacés de 6 m. Une seule assise de blocs est conservée, mis à part à l’ouest du mur le plus au sud où un bloc de la seconde assise est encore en place, permettant de restituer une élévation minimum de l’édifice de 2,2 m (Fig. 6-9). La moitié nord ne présente aucun vestige d’élévation. La présence d’anathyroses ou de trous de mortaise à la surface des blocs laissent toutefois présumer de l’existence d’une superstructure. Les blocs sont liés entre eux par des crampons métalliques dont les logements, en forme de queue d’aronde, sont visibles à plusieurs endroits. De nombreux blocs épars provenant de cet édifice sont disséminés dans les champs alentours. Leur présence témoigne des destructions qui ont dû se produire assez récemment du fait de l’aménagement de champs en terrasse autour de la plateforme. En effet, par rapport aux relevés effectués par K. Bergner1640, l’emprise des vestiges est réduite. Toute la partie sud-ouest de la plateforme a été détruite, jusqu’au mur sud. Elle fait place à une parcelle cultivée. En largeur également, il semble que quelques assises de blocs, à l’ouest surtout, aient disparus au cours de terrassement agricoles. Les différentes parcelles étant en culture lors de notre visite, il était toutefois difficile d’effectuer des observations précises aux alentours de la plateforme en raison du manque de visibilité. L’ensemble des détails techniques, ainsi que la qualité de la taille de la pierre, permettent d’attester d’une période de construction achéménide1641.

Figure 6‑9 : Bard Burideh I, vue vers le nord-est de la construction en pierre
Figure 6‑9 : Bard Burideh I, vue vers le nord-est de la construction en pierre (cliché SG, printemps 2005)

Outre cette plateforme, le site de Bard-e Burideh I rassemble d’autres vestiges archéologiques qui ont aujourd’hui disparus. K. Bergner a dressé un plan détaillé de la zone1642. Autour de la plateforme, sur le piedmont du Kuh-e Shahrak, il représente plusieurs zones de concentrations de blocs situées à quelques dizaines de mètres au sud-est et à l’est. De nombreux blocs sont également visibles aux alentours immédiats de la plateforme. Plus loin, en direction du nord-ouest, les vestiges d’un possible barrage construit en travers du Rud-e Bidun se signalent par l’existence d’une concentration de pierres dans le lit du petit cours d’eau. D’après le plan de K. Bergner, il est difficile d’affirmer que cet ensemble de vestiges constitue une seule et même occupation. Seul un alignement de blocs, s’étirant entre les restes du barrage et la plateforme, pourrait indiquer un lien entre les deux structures. La publication n’est cependant pas suffisamment précise pour définir un ensemble cohérent.

G. Tilia, lors de ses visites sur le site dans les années 1970, constate d’une part que les vestiges du barrage sont encore en place mais qu’ils sont très détruits ; d’autre part que la colline située au nord-est de la plateforme présente des concentrations de céramiques, sans en préciser la catégorie1643. Le plan de K. Bergner montre effectivement l’existence de deux collines sur le versant du piedmont, l’une au nord et l’autre au sud-est de la plateforme ; sur celle située au nord il représente des concentrations de blocs. L’ensemble de ces observations permet en effet de supposer que la plateforme ne représente qu’une partie préservée d’une plus large occupation qui s’étendait vers le nord et vers l’est, sur les pentes du Kuh-e Shahrak. W. Sumner classe de ce fait Bard Burideh I dans la catégorie des implantations1644. L’absence de précisions sur la nature des différents artefacts laisse toutefois planer un doute sur la datation de l’occupation qui n’est supposée achéménide que par la proximité des vestiges de la plateforme.

Aujourd’hui l’ensemble du versant, en amont de la plateforme, a été terrassé pour aménager une série de parcelles cultivées en terrasse et un vaste champ de blé s’étend au sud-ouest (Fig. 6-10). Il ne reste donc plus trace des collines sur lesquelles auraient pu exister une occupation achéménide. Les champs étant couverts de culture lors de nos visites, il nous a été impossible d’effectuer des prospections fines, seuls quelques tessons très érodés et non identifiables ont été repérés sur leur pourtour. Les amas de pierres en travers du Rud-e Bidun ont également disparu ; ils ont peut-être été enlevés pour faciliter la circulation de l’eau. Bard-e Burideh se limite donc aujourd’hui aux seuls vestiges de la plateforme en pierre.

Figure 6‑10 : Bard Burideh I, vue générale du site vers le sud (cliché SG, printemps 2005)
Figure 6‑10 : Bard Burideh I, vue générale du site vers le sud (cliché SG, printemps 2005)

La question de l’interprétation de Bard-e Burideh I est assez délicate. G. Tilia suppose qu’ils correspondent aux vestiges d’un barrage et d’un pont1645. Les interprétations de W. Sumner sont plus complètes. Il évoque Bard-e Burideh I à deux reprises dans son article1646. Une première fois, il décrit le site dans le chapitre consacré à la description des sites achéménides. Il évoque les descriptions et les hypothèses de G. Tilia et insiste sur l’absence de datation de la poterie qu’il a observée sur les collines en amont de plateforme, tout en suggérant de fait la présence d’une occupation achéménide1647. La fonction de la plateforme est étudiée plus précisément dans sa partie consacrée aux travaux d’irrigation. A propos de son étude des vestiges du tracé du canal en rive gauche du Kur, il relève la présence des restes d’un long fossé qui entaille le niveau de la plaine sur l’autre rive du Rud-e Bidun. Ce large fossé, qui doit correspondre au tracé de l’ancien canal, est situé dans l’axe de la largeur de la plateforme. W. Sumner en conclut de ce fait que cette construction devait correspondre à un aqueduc passant au-dessus du lit du Rud-e Bidun1648. Sur les cartes au 1:5000, les vestiges de ce canal sont bien visibles dans la topographie : le fond se situe à plus de 3 m de profondeur, ce qui pourrait permettre de faire circuler l’eau à peu près au même niveau que la construction de Bard-e Burideh I, dont la base se trouve à 5 m sous le niveau du sol en rive gauche du Rud-e Bidun, mais dont l’élévation minimum restituée est de plus de 2 m. L’ensemble de ce secteur, depuis Sang-e Dokhtar, fait l’objet d’une étude en télédétection, nourrie également des résultats des réévaluations sur le terrain, menée par T. De Schacht1649. Elle permettra de replacer Bard-e Burideh I dans un contexte géomorphologique plus large et reposera sur l’étude précise des sections du tracé du canal en rive gauche qui apparaissent sur des images satellites anciennes et donc au final d’étudier plus précisément l’hypothèse émise par W. Sumner. Donc, Bard-e Burideh I est un site où sont présentes une construction achéménide de fonction probablement hydraulique et une occupation plus vaste autour, mais d’époque non définie.

Notes
1640.

Bergner 1937 : Tafel II

1641.

Bergner 1937 : 1 ; Tilia 1978 : 90 ; Sumner 1986a : 10

1642.

Bergner 1937 : Tafel I

1643.

Tilia 1978 : 90

1644.

Sumner 1986a : 10

1645.

Tilia 1978 : 80

1646.

Sumner 1986a : 10 et 13

1647.

ibid. : 10

1648.

ibid.  : 13

1649.

Cf. § 6.2.5.1