6.2.4.2. Observations sur les carrières situées hors de la zone d’occupation de Persépolis

Outre les quatre carrières décrites précédemment, il faut ajouter au corpus la présence d’indices d’extraction à proximité du site KR0658-Seidan1687. Les carrières indiquées sur la carte de W. Sumner le long du massif du Kuh-e Hussein, à l’est de Naqsh-e Rustam, ont été décrites et étudiées précédemment1688 (Pl. 40).

Mis à part Madjabad, les carrières situées en dehors de la zone d’occupation de Persépolis sont généralement de taille modeste. Si ce n’est les indices d’extraction à proximité de Seidan, ils ne sont pas directement reliés à des vestiges architecturaux achéménides. Il est donc difficile de les dater puisque les techniques traditionnelles d’extraction employées sur l’ensemble des carrières ont certes été utilisées par les carriers à l’époque achéménide mais ont pu se poursuivre jusque très récemment1689. Par exemple, la carrière située non loin de Dorudzan a aussi bien pu servir à fournir de la pierre pour le barrage islamique, Saad-e Nasiri, que pour le pont-digue achéménide, Bard Burideh II, étudié par M.B. Nicol1690.

Les deux carrières KR0864 et KR0323, que nous venons de décrire, présentent un point commun intéressant : dans les deux cas, l’extraction des blocs a été rapidement abandonnée. Alors que des enjarrots avaient été creusés, les blocs n’ont pas été débités. Dans les deux cas, ces vestiges correspondent peut-être à des essais d’extraction avortés car la pierre était de trop mauvaise qualité. Ces abandons peuvent également êtres liés à des problèmes d’ordre financier rencontrés par le commanditaire. La présence de carrières abandonnées et apparemment à peine exploitées a également été observée autour de Naqsh-e Rustam1691. La question se pose alors de la simultanéité, presque impossible à démontrer de manière certaine, de ces abandons. Si tel était le cas, elle pourrait indiquer une interruption soudaine des différents chantiers d’extraction, et donc d’un déclin de l’activité de construction, du fait d’un bouleversement des structures sociales et politiques, par exemple à la fin de la période achéménide.

La répartition générale des carrières permet également de tirer quelques conclusions sur les modes d’approvisionnement en pierres de construction. Les grandes zones d’extraction sont concentrées dans la zone d’occupation de Persépolis, à proximité des différentes constructions en pierre qu’elle renferme. Madjabad, dont l’exploitation est attestée à l’époque achéménide, représente une exception, elle est en effet située à plus de 20 km de la terrasse de Persépolis. Son exploitation s’explique par le fait que le massif du Kuh-e Sabz, dans lequel elle est située, est le seul endroit à pouvoir fournir les différents chantiers de la terrasse et de ses environs en pierre noire. Son éloignement est donc dicté par des contraintes géologiques et la nécessité de diversifier les sources d’approvisionnement de manière à répondre au projet architectural de Persépolis. Les traces d’extractions anciennes au nord du Kuh-e Gondashlu (KR0323) peuvent également obéir au besoin d’approvisionnement lié à une demande en pierre blanche ; toutefois l’exploitation effective de cette carrière reste à prouver. Mis à part Madjabad, les vestiges d’extraction sont de taille très limitée et doivent obéir à des besoins très locaux : l’exemple de Seidan où les traces de carrières peuvent être associées à la présence de vestiges architecturaux est en cela particulièrement caractéristique.

Notes
1687.

Cf. § 6.2.3.5.3

1688.

Cf. § 5.6.3

1689.

Cf. § 5.5.4.2

1690.

Nicol 1970 : 265-281 pour les fouilles de Saad-e Nasiri et de Bard Burideh II ; Sumner 1986a : 14 estime pour sa part que cette carrière est destinée à la seule construction de Bard Burideh II car elle se trouve à 250 m, Saad-e Nasiri étant situé à 9 km en amont. Malgré la distance, il est possible que la carrière ait été réutilisée pour la construction de ce barrage plus tardif. Il faudrait pour le démontrer pouvoir étudier plus précisément la ou les carrières dans cette région.

1691.

Cf. § 5.6.4.2