6.2.7.5. Les sites achéménides publiés par A. Alizadeh

Au cours de nos reconnaissances dans la plaine, nous avons recherché certains des 19 sites achéménides publiés par A. Alizadeh1757. Nous en avons prospecté une dizaine avant d’abandonner. Les localisations se sont d’abord révélées trop imprécises. De plus, les identifications des occupations achéménides sur les différents sites que nous avons prospectés n’ont pas pu être confirmées.

Les coordonnées publiées pour chaque site sont indiquées en format degré/minute/seconde où les valeurs des secondes ont manifestement été souvent arrondies à la dizaine supérieure ou inférieure, or un arc d’une dizaine de seconde correspond au sol à une distance de 300 m1758. Ces coordonnées ont probablement été évaluées de manière graphique sur des cartes papiers. Sur le terrain, il s’avère que cette erreur de localisation, estimée a priori à 300 m, était souvent plus importante et pouvait être comprise entre 600 m et 1 km. De ce fait, il était très difficile de retrouver les sites publiés par A. Alizadeh, surtout quand ils ont été arasés depuis ses prospections et ne peuvent donc plus être repérés de loin.

Par exemple, le site DK1711759 (Pl. 43) est situé non loin du site de Dawlatabad, dans la banlieue sud de Marvdasht. Il s’agit d’un tepe qui mesurerait 80x80x2,4 m et présenterait, d’après A. Alizadeh, des céramiques Kaftari, Age du Fer III et achéménides. Lorsque l’on place le point sur une carte à la coordonnées indiquée (29°50’10’’ N ; 52°49’08’’ E), il est situé dans le village de Dawlatabad, à proximité de sa limite sud. Nous avons alors effectué une prospection dans les champs cultivés au sud du village et retrouvé un tepe à peu près circulaire d’une trentaine de mètres de diamètre dont la hauteur a été estimée à 2 m. Dans les champs voisins, nous avons retrouvé de fortes concentrations de céramiques essentiellement islamiques ; sur le tepe et à sa périphérie, les tessons sont principalement Kaftari. Lorsque l’on compare les catégories de céramique retrouvées ou de la hauteur du tepe, il est donc tout à fait probable qu’il corresponde au site DK 171. La surface du tepe, entre 1999 et aujourd’hui, aurait donc diminué. En effet, du fait de l’extension des parcelles cultivées voisines, la partie ouest du site semble avoir été nivelée. Le point GPS que nous avons pris sur le tepe se situe à plus de 650 m au sud-ouest par rapport aux coordonnées publiées par A. Alizadeh, illustrant ainsi les problèmes de localisation de ces sites.

Le nom de chaque tepe a été précisé par A. Alizadeh, ce qui aurait pu nous aider à retrouver les sites décrits. Il s’agit très probablement d’une toponymie vernaculaire utilisée par les habitants vivants à proximité du site. Or il se trouve que pour beaucoup de sites de la plaine, et particulièrement les plus petits, cette toponymie n’est pas fixe. De plus, ce sont souvent les mêmes noms qui sont employées, ce qui peut ajouter à la confusion : nous avons par exemple visité au cours de nos reconnaissances de nombreux Tol-e Qaleh (le tepe du qaleh) ou Tol-e Sabz (le tepe vert). Lorsque nous demandions à quelqu’un où se trouvait un tepe en lui indiquant le nom donné par A. Alizadeh, la réponse était souvent confuse ou alors ils nous indiquaient autre part dans la plaine. Même les grands tepes présentent des toponymes qui peuvent changer. Par exemple Tol-e Shoga1760 a été appelé ainsi la première fois par L. Vanden Berghe alors qu’il y a effectué des sondages archéologiques. Le nom a ensuite été repris dans les descriptions plus récentes du site. Il semble qu’A. Alizadeh a prospecté ce site. Il s’agirait certainement du site DK123 (Pl. 43) dont les périodes d’occupation et les dimensions indiquées font correspondre ce point à Tol-e Shoga1761. Il n’existe en effet pas d’autre site comparable dans les environs immédiats. Pour A. Alizadeh, le site s’appelle Tol-e Mamalis (Gap) or, renseignement pris auprès des habitants, Tol-e Mamalis est le nom vernaculaire actuel de Tol-e Shoga. Le nom de Gap, mis entre parenthèse, est donné à deux sites situés à 1,7 km au sud-est de Tol-e Shoga présentant de fortes concentrations de tessons Bakun et aujourd’hui en grande partie nivelés. Les coordonnées géographiques indiquées pour le site DK123, s’il s’agit bien de Tol-e Shoga, situent le point à plus de 1 km au sud de l’emplacement réel de Tol-e Shoga.

Concernant les identifications des périodes d’occupation, reprenons l’exemple précédemment évoqué du site DK171. Lors de nos reconnaissances, nous n’avons repérer aucun tesson pouvant correspondre à de la céramique achéménide/LPW, encore moins un ensemble de céramique grise qui serait pour A. Alizadeh datée de l’Age du Fer III. Pour s’en convaincre, il suffit de reprendre les données enregistrées par W. Sumner dans le Gazetteer. Pour W. Sumner, ce site (entrée KR0217) correspond à un groupe de tepes islamiques de 3,9 ha présentant une surface de tessons Kaftari estimée à 1,2 ha (code B). Aucun tesson achéménide/LPW n’est mentionné. L’identification de la céramique achéménide par A. Alizadeh se base sur des exemples collectés sur les pentes du Kuh-e Rahmat au-dessus de la terrasse de Persépolis1762. Il est possible que cet ensemble de céramiques choisi comme référence ne soit pas tout à fait identique à celui achéménide/LPW publié par W. Sumner. En l’absence de toute publication de la céramique achéménide de référence utilisée par A. Alizadeh, il paraissait donc difficile de réétudier ses données. En outre, A. Alizadeh indique dans sa publication que l’identification des périodes d’occupation s’est faite rapidement, à partir d’échantillons de céramiques collectés sur le terrain. Il précise qu’une étude plus poussée devrait être publiée, accompagnée de dessins du matériel diagnostique et donc que les identifications doivent être considérées avec précaution1763.

Si, a priori, les données publiées par A. Alizadeh auraient pu permettre d’augmenter le corpus des sites achéménides dans la plaine de Persépolis, suite à nos prospections, il s’avère, que les résultats publiés partiellement par A. Alizadeh nécessitent d’être précisés. Il est donc indispensable d’attendre la publication finale de ses prospections avant de pouvoir prendre en compte les différents sites achéménides retrouvés par A. Alizadeh.

Notes
1757.

Alizadeh 2003 ; Cf. § 6.1.2.2

1758.

Une seconde en coordonnées géographiques équivaut environ à une distance au sol de 30 m.

1759.

Alizadeh 2003 : 96-97

1760.

Cf. § 6.2.3.3.2

1761.

Alizadeh 2003 : 94

1762.

Alizadeh 2003. : 88. Si la céramique des pentes du Kuh-e Rahmat doit être majoritairement achéménide, elle comprend également des tessons d’autres époques, cf. § 5.1.1.2.2.

1763.

ibid : 86-87