6.3.4.3. Tombes

Les tombes sont nombreuses sur l’ensemble de la zone prospectée. En tout ce sont 104 aménagements funéraires qui ont été enregistrés (Pl. 49). Elles constituent donc un des éléments importants de la carte archéologique sur le piedmont sud-ouest du Kuh-e Rahmat. Il serait fastidieux de détailler l’ensemble des points d’observation et seule une étude synthétique est proposée ici.

Une première catégorie de tombes rassemble les inhumations clairement datées de la période islamique, présentant une orientation nord-ouest/sud-est. Elles sont regroupées dans deux cimetières (Pl. 49), l’un au nord de la région prospectée, l’autre au sud, comportant respectivement 20 et 15 tombes. Il s’agit de sépultures de pleine terre, entourées par une ligne simple de blocs bruts de taille décimétrique, l’emplacement de la tête est marqué par une stèle dressée non-inscrite (Fig. 6-46- en bas à droite). Les contours des tombes sont généralement rectangulaires et de tailles très diverses, au plus 2x1,5 m. Elles correspondent certainement aux sépultures des habitants qui occupaient les diverses bâtiments relevés aux alentours. Par exemple, dans un rayon de 250 m autour du cimetière le plus au sud, se situent les points MD071193, MD071195, MD071196, MD071200, MD071201 représentant un ensemble de 8 bâtiments. Ce cimetière aurait donc pu accueillir les dépouilles des habitants occupant ces différents bâtiments et constituer la preuve que ces différents bâtiments définissent une seule et même occupation, une sorte de hameau. Néanmoins, le cimetière pourrait également regrouper les sépultures d’une seule de ces habitations, qui a pu être occupée sur une longue période. Enfin, la présence de ces deux cimetières islamiques apporte, avec la présence de céramiques islamiques éparses sur l’ensemble du piedmont, un argument supplémentaire à une datation haute des différentes constructions repérées. En dehors de ces deux nécropoles, des tombes islamiques isolées, présentant une orientation conforme et de type comparable à celles des deux cimetières, ont pu être repérées au moins en deux endroits.

Figure 6‑46  : Piedmont sud-ouest du Kuh-e Rahmat, exemples de tombes ; en haut, vue vers l’est d’une chambre rectangulaire d’un cairn pillé ; en bas à gauche, vue vers le nord d’une tombe circulaire à ciste central ; en bas à droite, vue vers le nord-ouest d’une tombe islamique
Figure 6‑46  : Piedmont sud-ouest du Kuh-e Rahmat, exemples de tombes ; en haut, vue vers l’est d’une chambre rectangulaire d’un cairn pillé ; en bas à gauche, vue vers le nord d’une tombe circulaire à ciste central ; en bas à droite, vue vers le nord-ouest d’une tombe islamique (clichés TDS, printemps 2007)

La seconde catégorie de tombes correspond aux cairns1803. Nous en avons relevé 15 sur l’ensemble de la zone prospectée (Pl. 49). Il est probable que la région en abrite bien plus : ils peuvent en effet être situés assez haut sur le versant, et nous nous sommes limités à la prospection du seul piedmont. La totalité de ces cairns ont été pillés. Ils sont donc très détruits et la chambre funéraire n’est généralement pas visible1804. Dans quelques rares cas (Fig. 6-46-en haut), les pillages ont mis au jour, sans les détruire, les restes d’une chambre simple1805. La datation de ces installations funéraires, pour la région du Fars, est discutée par R. Boucharlat1806. Les cairns du Fars auraient été construits sur une période de temps relativement courte, peut-être au tournant de l’ère chrétienne, mais une datation antérieure est possible. Pour le piedmont sud-ouest du Kuh-e Rahmat, ils attestent en tout cas de la fréquentation de la région par des populations, sédentaires ou nomades, avant l’ère islamique.

La troisième catégorie correspond à un vaste ensemble de 54 tombes délimité par un cercle de blocs décimétriques (Pl. 49). Il peut être constitué d’une seule ou de deux rangées de blocs. Au centre a été aménagée une chambre rectangulaire délimitée par des blocs dressés (Fig. 6-46-en bas à gauche). Ces cistes sont généralement de petite taille, entre 1 m et 1,5 m de long pour une largeur comprise entre 0,5 m et 1 m. Leur taille est donc insuffisante pour accueillir un corps humain. L’orientation de ces cistes peut être très différente d’une tombe à une autre. Le diamètre du cercle de blocs externe, qui entoure la chambre centrale, peut être très variable. Il peut mesurer de 2 m, et entourer de près la ciste, à plus de 7 m. Il faut souligner qu’il ne s’agit que d’un cadre général et qu’il est possible de distinguer plusieurs sous types. En effet certaines de ces tombes ne présentent pas de ciste, qui a peut-être disparu ; pour d’autres l’encadrement circulaire est plutôt ovale, voire rectangulaire. Enfin, plusieurs tombes présentent de fortes concentrations de pierres entre la chambre centrale et la limite extérieure. Parfois ces pierres sont scellées dans le sol et peuvent correspondre à une sorte de dallage ou de radier. Dans d’autres cas, il s’agit d’un cailloutis en surface, pouvant s’étendre au-delà de la limite périphérique. Il est donc possible que certaines, voire l’ensemble, de ces tombes correspondent en fait à des cairns complètement nivelés dont il ne resterait que les blocs de fondation. Sauf si l’on considère qu’ils correspondent à des cairns détruits, la datation de ces vestiges est tout à fait énigmatique1807. Au cours de nos prospections, nous n’avons pas retrouvé de céramiques sur ou autour de ces tombes. De plus, nous ne connaissons par d’exemple comparable, et daté, dans la région du Fars. Toutefois, on peut supposer que ces tombes sont très probablement antérieures à la période islamique, sans exclure leur réutilisation à cette dernière époque. Un relevé de ces tombes ainsi que des fouilles seraient nécessaires pour en déterminer une typologie précise ainsi qu’une chronologie. Soulignons ici que la totalité de ces tombes paraît détruite, mais certaines, moins visibles, ont pu échapper aux pillages.

Notes
1803.

Boucharlat 1989 : 676 propose une définition d’un cairn : il s’agit d’un amoncellement de pierres prélevées sur place, de forme généralement circulaire dont la couverture est réalisée par encorbellement.

1804.

Ces cairns correspondent donc au type 1 définit par ibid. : 677 « Amoncellement de pierres, sans chambre intérieur visible ; parfois un mur annulaire soutient la construction »

1805.

Type 2.1 définit par ibid. : 677 « Empilement de pierre ménageant un espace intérieur […], l’espace intérieur ne comprend qu’une seule chambre »

1806.

ibid. : 691 – 697

1807.

Nous n’en connaissons pas d’exemples comparables dans le Fars.