1.3.2.1 La semaine et la journée

Lorsque l’équipe - sur la base des réflexions menées au préalable par M . Zouinar et M. Relieu - a défini que les enregistrements se tiendraient sur une semaine, cela a paru un allant-de-soi : la semaine est un temps suffisamment long pour accéder à une diversité de situations et de phénomènes, mais aussi une durée relativement courte, susceptible d’être acceptée sans difficultés majeures par les participants. Selon un raisonnement de sens commun, la semaine est aussi une durée structurée et structurante, une unité temporelle qui fait sens globalement. Dans cette optique,la recherche socio-historique désormais classique The seven day cycle (Zerubavel, 1985), montre que la semaine constitue un horizon temporel particulier pour les sociétés humaines depuis des millénaires, et qu’elle joue un rôle socio-économique fondamental dans les sociétés contemporaines : la semaine est une unité temporelle conventionnelle (et arbitraire), qui, contrairement aux jours, aux mois ou aux années (cycles cosmiques) n’est pas donnée par la nature mais constitue un pur produit historique.

Comme Zerubavel, qui souligne la variabilité des rythmes de la semaine à travers des analyses socio-historiques et des faits religieux, M. Douglas (1971) met l’accent sur la manière dont les jours de la semaine créent une expérience du temps particulière, que nous ne ferions pas sans eux. Les jours (et les nuits) ont non seulement des caractéristiques propres (repos/activité ; repas comme colonne vertébrale autour de laquelle se construisent les activités de la journée, etc.), mais tirent aussi du sens de leur position dans la séquence hebdomadaire et de la relation mutuelle entre jours, ainsi qu’entre « jours de la semaine » (lundi à vendredi) et week-end.

Dans les foyers que nous avons observé, outre l’importance de la relation entre organisation de la journée et organisation de la semaine, et au-delà des différences rythmiques entre jours marqués/non-marqués par les activités professionnelles et scolaires, nous avons souligné que la planification d’une journée donné se fait en partie la veille, notamment le soir. Ainsi, les enchaînements entre des jours différents (souvent mais pas nécessairement successifs), nous obligent à traiter l’inter-jour : l’unité temporelle de la journée n’est pas une unité autonome et suffisante mais plutôt un élément à tout moment susceptible d’être articulé à, et d’influer sur, l’organisation de la semaine. Et de ce point de vue, la question des relations entre jours de la semaine est cruciale (on ne s’oriente pas vers la soirée du jeudi et vers celle du vendredi de la même manière).