Conclusion

Ce chapitre a parcouru les principaux apports de notre discipline (les sciences du langage) et des disciplines connexes (socio-anthropologie, psychologie) vers lesquelles nous nous sommes penchée afin d’étoffer nos connaissances sur l’épineuse question de la temporalité. Après avoir montré les limites de l’approche linguistique classique dans l’étude de la temporalité, en particulier lorsque l’on s’intéresse au temps comme élément central de l’accomplissement de l’ordre social, l’idée a été de faire appel aux concepts et traditions scientifiques susceptibles d’éclairer notre problématique et nos objets d’analyse. Outre les principaux enseignements de la sociologie, la psychologie et les courants ethnométhodologiques qui traitent la temporalité, nous avons élargi l’état de l’art aux travaux portant sur la temporalité des familles contemporaines et aux problèmes qui se posent à elles. Lorsque l’on considère le nombre de travaux sur la vie familiale et domestique abordés du point de vue de l’expérience du temps, de l’affairement, des contraintes et des exercices d’équilibre entre genres et entre « sphères », il apparaît que les sociétés occidentales sont aujourd’hui confrontées à des enjeux particuliers. De notre point de vue, et tel que nous tenterons de le montrer par la suite, il semble aussi qu’une analyse des temporalités de la famille d’un point de vue interactionnel apporterait des éléments originaux aux questions que se posent les chercheurs travaillant sur la famille ainsi que ceux travaillant sur le temps. Etudier en détail les façons de faire des acteurs sociaux implique le plus souvent de reconnaître leurs compétences, leur créativité et leurs préoccupations. Dans ce sens, reconnaitre des compétences, des rationalités et des moralités spécifiques aux membres des familles apporte des éléments de réflexion aux débats sur les activités ordinaires en tant qu’accomplissements, mobilisant des ressources et des efforts particuliers, et promouvant ainsi la valorisation sociale de la vie quotidienne.

Dans le chapitre suivant nous verrons que les sciences humaines et sociales, après avoir traité le foyer comme un objet périphérique, trop ordinaire, s’y intéressent à nouveau, en particulier au sein de courants d’inspiration pragmatiste. La quotidienneté domestique sera également abordée du point de vue de la relation avec la matérialité et les technologies.