3.2.2.1. Le couplage interaction sociale / espace-temps

A. Giddens a été un des premiers théoriciens à déplorer le fait que les sciences sociales conçoivent le temps et l’espace comme de simples cadres, ou conteneurs, de l’action humaine et du jeu social. De ce point de vue, la théorie de la structuration de Giddens fournit à la construction du sens une ontologie de l’espace-temps (ensemble avec celle du langage et des pratiques)199. Inspiré par le courant de la Time-geography de T. Hägerstrand (1970 ; 1975 ; 1978), Giddens insiste sur la nature contraignante du couplage entre interaction sociale et espace-temps : l’objet géographique de l’espace-temps est l’expression des axes matériels de l’existence humaine, qui conditionnent les tissus formés par les trajectoires de vie quotidiennes, hebdomadaires, mensuelles, etc. des personnes en interaction.

Notes
199.

Pour l’ethnométhodologie, on peut dire que la notion de contrainte de l’espace-temps doit être reconsidérée sous l’angle de la notion d’opportunité des rapports sociaux rendant l’action possible. A l’instar de G. Simmel (1981) ou E. Goffman (1973, 1974a), l’ethnométhodologie et les approches linguistiques qui s’en inspirent, mettent sur un pied d’égalité les interactions banales, ritualisées, quotidiennes, et les organisations : groupe social, territoire ou langue ne sont pas des entités a priori mais sont conçus comme émergeant d‘« un acte de configuration (permanente), comme le résultat d’un processus d’assemblage et de liaison d’éléments hétérogènes qui fait apparaître une totalité intelligible, différenciée et individuée » (Quéré, 1989).