Lorsque l’enquêteur « dit l’action », ou l’artefact qui la supporte, cela suffit souvent à déclencher une expansion chez l’interviewé, sur la nature mais aussi sur les traits temporels ou aspectuels de l’action nommée (durée, ordre, fréquence, rythme). En voici deux exemples :
‘IF : et Internet ? vous l’avez ici, hein, c’est ça ?L’extrait suivant est en revanche un contre-exemple de ce phénomène, et montre que certaines activités se prêtent mieux que d’autres à des déploiements descriptifs :
Christine R., entretien du 28/12/2004
Au-delà d’une éventuelle gêne liée à des questions d’intimité, ici l’enchaînement temporel des phases d’un cours d’action individuel est présenté comme trop serré pour donner lieu à des opportunités d’action autres, à des bifurcations, etc. Dire l’action « dormir » implique selon Christine une série d’actions ne méritant pas d’être décrites davantage. En fait, Christine s'oriente vers le caractère quelque peu bizarre de la question de l'intervieweur l'activité dormir (qui n’est pas coucher), semble être une activité sur laquelle il n’a rien à dire369. L’enquêteur reformulera la question autour des TICs, cherchant à savoir si elle regarde la télévision dans sa chambre, et une description des pratiques de lecture suivra. C'est donc l'activité « coucher » qui est susceptible d'être décrite comme telle.
Remarquons que de nombreux développements thématiques et sémantiques au regard des activités en tant qu’actions déployées non seulement dans le temps mais aussi dans l’espace et ancrées dans un e écologie matérielle particulière, concernent les activités et pratiques autour des TICs. L’exemple suivant montre l’orientation d’une interviewée vers le caractère plus ou moins intéressant de ses propos au regard des intérêts supposés de chercheurs travaillant pour un opérateur des télécommunications :
alors, oui, peut-être ça, ça vous intéresserait… quand je me lève et que Albert ne se lève pas, comme le réveil est de son côté, ça m’arrive de plus en plus souvent d’utiliser mon portable comme réveil, à côté de ma tête parce que, comme ça, je lui passe pas par-dessus pour écraser [incompris ?]. donc, oui, je m’en sers pas mal et quand je suis en déplacement pour formation ou autre, notamment… enfin, ça m’est arrivé (continue)
Christine R., entretien du 28/12/2004
Merci à L. Mondada d'avoir attiré mon attention sur ce point.