8.2.2. Combiner mesures standard et relatives. Combiner repères standard et ad hoc

Dans les foyers observés, de très nombreuses pratiques organisationnelles mobilisent des mesures relatives standard (non-autonomes)551 et des repères ad hoc 552, ainsi que des mesures et des repères chronométriques standard (autonomes et non-autonomes)553. Des exemples seront donnés, afin de montrer comment les acteurs décrivent et appréhendent temporellement le contexte. Comme nous l’avons ébauché plus haut, mesures et repères de nature différente se combinent sans cesse au cours de la gestion pratique quotidienne des activités domestiques.

Notes
551.

« Dans un quart d’heure » est un repère temporel standard mais la référence est indexée. Il faut connaître le moment de production de cet énoncé pour calculer le quand référentiel, le moment « objectif » auquel fait référence l’énoncé.

552.

Nous préférons parler de ressources ad hoc plutôt que indexicales dans la mesure où la valeur temporelle absolue d’un énoncé tel que « dans 10 minutes » ne peut être induite que si l’on connaît l’heure à laquelle le locuteur s’exprime. Ainsi, de nombreuses expressions duratives seront à la fois basées sur le temps standard (ou mécanique) et indexicales. Le terme ad hoc se réfère ici aux manières de marquer le temps de l’action (durée, rythme, ordre, initiations et clôtures) par des moyens lexicaux et des opérations cognitives autres que celles s’appuyant sur des secondes, des minutes, des jours, etc.). Plus classiquement, en sémantique pragmatique, Moeschler (1993) distingue expressions temporelles autonomes et non-autonomes du point de vue de la saturation référentielle (28 janvier 2010 vs. hier, par exemple), c’est-à- dire nécessitant ou pas d’informations supplémentaires pour le calcul de la référence temporelle. L’auteur distingue deux types d’expressions temporelles non-autonomes : les déictiques, qui reçoivent une référence temporelle relativement au moment de l’énonciation et les anaphoriques, qui ont besoin d’une autre expression temporelle pour assigner une référence à l’énoncé qu’elles déterminent. Notre corpus serait une base très riche pour revisiter la pragmatique de la temporalité à l’aune d’une approche écologique de l’interaction et de la communication sociale qui intègrerait systématiquement les opérations cognitives distribuées.

553.

« A 19 heures » est un repère temporel standard absolu, autonome, qui pointe le moment « objectif » auquel fait référence l’énoncé. L’aspect référentiel, du point de vue de la sémantique classique, ne pose pas problème.