Les transitions comme négociations, la négociation comme apprentissage

Notre travail a montré l’importance des moments de transition dans l’organisation des activités familiales : démarrer un petit-déjeuner, éteindre la télévision pour aller prendre une douche, etc. sont des phases transitionnelles prototypiques. Dans l’accomplissement des transitions entre activités, les parents donnent les moyens aux enfants de se préparer à clore l’activité en cours et de se projeter vers la suivante. Ces efforts systématiques permettent surtout d’obtenir une co-orientation graduelle, de construire une vision partagée du contexte (y compris lorsqu’il y a négociation, voir conflictualité). Les négociations sur l’organisation des activités créent des occasions où l’organisation sociale est produite, où les enfants acquièrent le sens de l’ordre social. Cette question de la socialisation à la vie collective marque les ressources linguistiques de manière importante : depuis les plus jeunes enfants jusqu’aux adultes en passant par les adolescents, les participants baignent quotidiennement dans un chronolecte, ou plutôt dans un kaïrolecte à travers lequel et auquel ils sont socialisés. Les processus par lesquels on construit une certaine normalité familiale et domestique semblent indispensables pour comprendre à la fois les temps sociaux et les interactions familiales, dans la mesure où ils contribuent à l’accountability de l’action à travers des répertoires d’action et d’interaction particuliers.