2. Tell Hariri/Mari

Le site de Tell Hariri/Mari se situe sur la rive droite de l’Euphrate. André Parrot met au jour un temple dès les premiers coups de pioches99. En surface d’un sondage (120 x 10 m), orienté Nord/Nord-Est, dans le prolongement de la première tranchée ouverte, ce sont des habitations qui apparaissent sur au moins deux niveaux. Au niveau supérieur, les habitations sont datées de l’époque précédant Hammurabi, les maisons de pisé et de briques crues du niveau suivant appartiennent à la période « présargonique ». Dans ce niveau sont dégagées des tombes en sous sol : « Tombes étranges, par les rites de sépultures qu’elles révélaient, puisque les corps étaient à peu près toujours disloqués et désarticulés, le crâne parfois loin du reste, l’inhumation coexistant souvent aussi avec une incinération plus ou moins poussée »100. Les premiers tombeaux, « plus luxueux », font leur apparition au Nord de la tranchée : « À un niveau inférieur, des constructions en énormes dalles de pierre apparaissaient »101. Le rapprochement avec les tombeaux du cimetière d’Ur permit de dater ces tombeaux du début du IIIème millénaire. Ces derniers sont identifiés comme les tombeaux jumeaux 21-22. Dans le secteur du temple d’Ishtar, sous le niveau c le fouilleur met au jour trois tombeaux dont deux sont jumelés, les tombeaux 241-242, 300. Le dégagement du Grand Palais du IIème millénaire débuta en 1934. Les fouilles mirent au jour de nombreuses tombes « néo-assyriennes » creusées dans les ruines du palais. Après une interruption pendant la guerre, les fouilles reprennent en 1951 sur différents points du site : à l’Est et au Sud, sur la Haute Terrasse, le massif rouge et les temples. Les recherches se poursuivirent dans le palais du milieu du IIIème millénaire à partir de 1964. Des rapports réguliers sont publiés dans la revue Syria 102 et les trois volumes de la Mission Archéologique de Mari constituent la publication des fouilles de Parrot à Mari103. Ces documents font état des nombreuses découvertes.

À partir de 1979 jusqu’en 2003,  Margueron reprend les fouilles avec pour objectif de préciser le réseau urbain de la cité, les quartiers des villes successives, le système défensif, ainsi que de démontrer les relations de Mari avec son environnement naturel (les réseaux d’irrigations, le canal) et géo-politique. La séquence chronologique et historique est divisée en trois périodes104 : la ville I, la plus ancienne105, la ville II, de la période Šakkanakku et la ville III. Parmi les nouveaux secteurs ouverts, c’est dans le chantier A, situé dans le cœur monumental de la ville, sur un point haut permettant d’atteindre des niveaux anciens rapidement, qu’apparaissent des structures funéraires monumentales. Un premier bâtiment est dégagé, appelé la « Grande Résidence », puis un second, le « Petit Palais Oriental ». En 1980, un premier tombeau (763) est repéré, sous la salle I de la « résidence » ; il est partiellement dégagé, puis fouillé intégralement en 1982106. Le second tombeau 928 est fouillé en 1985107. D’autres ensembles sépulcraux sont mis au jour dans d’autres points de la cité du début IIIème millénaire, dans des secteurs ouverts dans les années 90 et début 2000108. Le chantier PEC en particulier, a révélé un ensemble de six tombes construites ; le contexte est un quartier d’artisans travaillant le métal. Selon Margueron, elles appartiendraient à un ensemble plus vaste, mais non dégagé à ce jour, « il est vraisemblable que ce « cimetière » s’étendait bien au-delà »109.

La documentation rassemblée sur les pratiques funéraires à Mari est abondante ; elle met en évidence des pratiques variées selon les périodes historiques. Parayre publia un article sommaire sur une typologie des sépultures de Mari110. L’étude architecturale des tombeaux, 763 et 928 du Petit Palais Oriental donne lieu à deux articles de Margueron111 ; le fouilleur montre l’importance de ces tombeaux, sans qu’il soit possible cependant d’aboutir à des conclusions sur les rites royaux à Mari. Les tombeaux sont, en effet, vides de restes ostéologiques qui permettraient d’affirmer qu’il y ait eu des inhumations. L’étude est reprise dans la publication exhaustive des fouilles de Margueron à Mari avec une mise en perspective avec le contexte architectural du Petit Palais Oriental112 ; les hypothèses restent sans réponses tangibles en l’absence de données nouvelles. La céramique retrouvée est publiée par Marc Lebeau, parallèlement aux tombes ; l’étude permet d’avancer la date de la fin du IIIème millénaire113. Jean-Marie publia un article sur les tombeaux en pierre du quartier du temple d’Ishtar, reprenant la documentation publiée et non publiée de Parrot114 ; cet article est complété par la publication de la céramique du tombeau 300 par Lebeau115. Par ailleurs, Jean-Marie a consacré une étude aux tombes et nécropoles de Mari à partir des archives de Parrot et des documents de fouilles récentes116. L’ouvrage est un catalogue des tombes. Il détaille par périodes les différents types de pratiques sépulcrales : types d’inhumations (cercueil, nattes), types de tombes (pleine terre, coffre, construite), localisation des inhumations et du matériel ; puis, des études comparatives sont faites, dans des annexes, avec d’autres sites au Proche-Orient pour la typologie des sépultures et le matériel. L’ensemble est très synthétique et la lecture est très peu aisée. Le matériel autre que la céramique (parures, armes) manque d’une analyse de fond.

L’essor de villes importantes dès le début du IIIème millénaire dans la moyenne vallée de l’Euphrate a suscité des discussions sur l’influence de la région Sud.  Les tombeaux découverts associés au palais ancien de Tell Bi’a (interprété comme tel jusqu’à présent) et les tombeaux plus tardifs du Petit Palais de Mari démontrent néanmoins, dans la localisation, une tradition distincte de la royauté plus proche d’Ebla, par exemple. La forme, comme cela sera décrit infra, est pourtant très marquée par les tombes de Mésopotamie du Sud.

Notes
99.

Parrot 1945 : 66.

100.

Parrot 1945 : 68-69.

101.

Parrot 1945 : 70.

102.

Parrot 1935 pour les tombeaux en pierre.

103.

Parrot 1956,  1958, 1967, 1968.

104.

Cf. chronologie 1, volume 3.

105.

Margueron 2004 : 89-91.

106.

Margueron 1984 ; Margueron 2004 : 358-360.

107.

Margueron 1990 ; Margueron 2004 : 355-358.

108.

Margueron 2004 : 114.

109.

Margueron 2004 : 93, fig. 61-62, voir p.115.

110.

Parayre 1982.

111.

Margueron1984 : 197-221 ; 1990 : 401-422.

112.

Margueron 2004 : 342, 350-363, 356-361, figs 335-344.

113.

Lebeau 1984 ; Lebeau 1990b.

114.

Jean-Marie 1990.

115.

Lebeau 1990a.

116.

Jean-Marie1999.