1. Méthodologies et thèmes des approches conjointes : changements de l’organisation sociale au travers du funéraire de presitge

L’approche conjointe pour les archéologues est évidente et constructive : Parker Pearson aborde la mort et le domaine du funéraire d’un point de vue diachronique421. Il présente, au travers de l’archéologique, et de références anthropologiques, une réflexion sur les implications de la mort, du traitement des morts dans la société, pour les individus. Son étude est particulièrement éclairante et construite pour confirmer l’intérêt des pratiques funéraires et du phénomène social de la mort. D’autres historiens et archéologues ont également nourri leurs réflexions des orientations sociales et ont ainsi approfondi les fonctions sociales et symboliques des pratiques funéraires422. Les problématiques soulevées par Porter, telles que l’organisation des populations tribales pastorales, les relations au territoire et aux morts, sont largement documentées par des références anthropologiques. Les changements intervenant dans l’organisation politique sociétale des populations, le passage d’une structure simple à une structure complexe sont également au centre des observations et des recherches communes. L’identification des systèmes sociétaux et leur évolution (chefferie, tribus, État)423 permet par certains traits d’établir certaines références dans l’étude des populations anciennes mais les traits reconnus dans le funéraire ou dans l’organisation spatiale (ville, territoire) sont dépendants de l’appréciation.

La méthodologie est considérée comme essentielle dans une approche mixte lorsque les sources sont distinctes dans le temps et l’espace424. Par contre, Chesson ne propose pas de « méthode », mais « des thèmes communs de la recherche funéraire »425 : le cérémoniel (« arenas of public communication »), les ornements personnels (identités, mémoires sociales), les rituels sont pris en considération car ils révèlent l’émotion, l’engagement collectif dans la reconstruction sociale. Le facteur émotionnel n’est pas anodin ; il est souligné par Peltenburg qui perçoit l’enjeu des funérailles dans la reconstitution psychologique et organisationnelle du groupe (famille restreinte et élargie) et de la société426. Il met en perspective la dimension idéologique et sociale des cérémonies funéraires et tous les enjeux qu’elles constituent (« arènes de communication » selon Chesson). Le cérémoniel a été reconnu en tant qu’expression des pratiques sociales et identitaires427. Il fait partie des thèmes développés dans les recherches archéologiques récentes, concernant les tombes de prestige, expression de la communication développée dans la construction des sépultures et les cérémonies funéraires publiques liminaires, post mortuaires ou de commémoration428.

Cette analyse de la fonction émotionnelle, autant que sociale, de la cérémonie est abordée d’emblée dans l’introduction de The Celebration of Death 429. Un paradoxe est souligné, l’émotion est « rarement évoquée », alors que : « the potentiality of the death to release the most powerful emotions in the survivors is so obvious (notre insistance) that is often assumed to explain the rite that follow »430. Il semble évident que l’émotion dégagée au moment des funérailles marque une phase dans la reconstitution de l’équilibre social, le deuil et l’acceptation de la perte, par le rassemblement du groupe autour du défunt. L’impact émotionnel, autant que l’enjeu idéologique et social des cérémonies, est à mettre en perspective dans une étude des pratiques funéraires concernant les sépultures de prestige ; c’est un facteur non quantifiable, mais il apparaît sans doute dans le développement des cérémonies funéraires.

Notes
421.

Parker Pearson 2002.

422.

Hodder 1982 ; Morris 1992, 1998 ; Forest 1998.

423.

Earle 1991 ; Stein, Rothman 1994 ; Parkinson 2002a,b ; Fowles 2002.

424.

Aurenche 1995 ; Bazzana, Delaigue 1995 ; David, Kramer 1999.

425.

Chesson 2001 : 3-8.

426.

Peltenburg 1999 .

427.

Cf. supra pp. 59-60. Van Gennep 1981[1909]; Humphreys, King 1981 ; Bloch 1981 ; Metcalf, Hungtington 1995.

428.

Salles 1995 ; Jonker 1995 ; De Cesari 2002 ; Cohen 2005.

429.

Huntington, Metcalf 1991 : 2-5.

430.

Huntington, Metcalf 1991 : 2.