C. Les tombes associées au palais

1. Ebla (pl. 12, 14)

Le site se présente sous la forme d’un tell oblong de 55 hectares environ délimité par un rempart ellipsoïdal, dont les pourtours sont bien visibles dans la stratigraphie (2,5 km de long ; 18 à 22 m de haut). Le tell est dominé, au centre, par une butte principale de 170 m de diamètre (pl. 12).

Le développement d’une culture urbaine s’étend de 3000 à 2350 av. J.-C. (Mardikh IIA)722. La seconde moitié du Bronze Ancien (2350-2250 av. J.-C.) marque la période d’apogée de la cité et son hégémonie sur la Syrie du Nord-Ouest (Mardikh IIB1). C’est de cette période que date le premier établissement palatial, le « palais G ». Un palais antérieur G2, daté du Bronze Ancien III (2700 av. J.-C.), eut probablement une fonction de stockage. Le palais G est la phase finale d’une longue tradition de bâtiments, décrivant ainsi le long processus pour aboutir à un développement urbain et une domination régionale723. Après l’incendie de la ville par les rois d’Akkad, la ville est détruite de nouveau (Mardikh IIB2). Au IIème millénaire (Mardikh IIIA), malgré sa perte de puissance, la cité garde un certain lustre qui coïncide avec la période amorrite. Les bâtiments conservés sont datés de cette période, ainsi que les fortifications, une des plus anciennes de la Mésopotamie septentrionale datée de BMI-II724.

La ville paléo-amorrite (Mardikh IIIA-B) compte alors trois ensembles monumentaux: sur la butte centrale s’élève le temple d’Ishtar (temple D) ; sur le sommet Nord de l’Acropole est bâti le « palais E » ; à l’emplacement du noyau le plus ancien de la ville se trouve le palais occidental, le « palais Q » (7300 m2), dévolu au prince héritier et recouvrant en partie la Nécropole Royale. Fouillés dans les années 80, les trois hypogées dits « de la princesse », « du seigneur aux capridés », « des citernes » ont fourni un matériel d’une grande richesse, pas seulement par la qualité des objets, mais dans l’apport historique des relations entre Ebla et ses voisins, comme l’Egypte. À proximité des tombes, un temple au dieu Rasap et un sanctuaire dédié aux ancêtres avaient été bâtis.

Au Nord-Ouest du tell, s’étendait le second ensemble monumental de la Ville Basse, composé d’un palais septentrional recouvrant le palais proto-syrien et d’un second temple d’Ishtar, le plus vaste de la ville (33 x 20 m), ouvrant sur une aire sacrée à proximité de laquelle s’étendait un curieux ensemble « le monument P3 ». Il s’agit d’une terrasse haute, en forme de pyramide tronquée au centre de laquelle se trouvait une cour complètement close.

Le « palais G » (pl. 13) est l’une des découvertes qui a bouleversé l’histoire de la ville : les archives ont été retrouvées dans le quartier administratif du palais situé au niveau de la « salle des audiences », vaste esplanade bordée sur deux côtés de portiques et de bâtiments palatiaux, au pied du complexe central qui s’élève sur le côté Sud de la butte. En contrebas, se situe la ville basse. Dans ces archives, datées du Bronze Ancien IVA, il est question de rites rendus aux rois défunts. Le fouilleur a donc recherché les sépultures royales du Bronze Ancien (Mardikh IIB), sur la base des découvertes antérieures des tombes des rois du second millénaire, en partie recouvertes par le palais Q725. Les documents épigraphiques indiquent le rôle primordial de l’héritier au trône dans les rites rendus aux rois défunts. Il existe donc une relation de proximité entre les rois vivants et les rois morts qui se traduit dans des rites et dans une relation géographique.

Dans l’aire Ouest du palais G, durant les fouilles de 1993-1994, est apparue une chambre L5762. Cette structure est identifiée comme un hypogée G4 (pl. 14)726.

La localisation des tombes à l’Ouest a une signification cosmique, c’est la région des morts. D’après la topographie, c’est le secteur des tombes royales pour la phase ancienne et la phase récente. De plus, l’autre similarité entre les secteurs des tombes du Bronze Ancien et Bronze Moyen est qu’elles sont situées sous le sol des bâtiments du palais727. Le troisième élément qui semble indiquer une ancienne tradition, persistant dans la phase récente, c’est la proximité d’une aire de culte728 : durant la période des Archives, le secteur antérieur au Temple D, près ou dans le secteur du palais G, est probablement dédié à la Grande Déesse, et au Bronze Moyen, le secteur du temple B de Rasap et le sanctuaire B2, probablement dédiées au culte des rois défunts et aux ancêtres royaux729.

Notes
722.

Cf. chronologie 1, volume 3.

723.

Pinnock 1993 : figs 1, 14 ; Porter 2000 : 224-225.

724.

Matthiae 1997b : 3, fig. 3.

725.

Matthiae 1997a.

726.

Matthiae 1995a : 651-681, 656-58, fig. 3-5.

727.

Matthiae 1995a : 662.

728.

Matthiae 1993 : 613-662.

729.

Matthiae 1993 : 271.