3. Tell Banat (pl. 18-19)

Tell Banat est un tell d’une superficie de 30 hectares ; c’est le centre urbain d’un complexe regroupant des tells de différentes dimensions et de fonctions différentes, dont le tertre funéraire de Tell Banat Nord (pl. 18a).

L’occupation du complexe s’étend sur le Bronze Ancien (2900-2000 av. J.-C.) ; une occupation urukéenne est également détectée739. Cinq périodes sont distinguées : le Bronze Ancien II, correspondant à la phase V, est détectée par la présence du Monument Blanc III dans le secteur C740. La phase suivante du Bronze Ancien III se divise en deux périodes : la période IV (2600-2450 av. J.-C.) et la période III (2450-2300 av. J.-C.). Le Bronze Ancien IVA correspond à la phase II et la dernière phase I au Bronze Ancien IVB. Le site est abandonné par la suite jusqu’au milieu du IIème millénaire ; au Bronze Récent l’occupation ne semble pas être localisée à Tell Banat, mais sur des tells au Nord du site.

Des secteurs d’habitats domestiques ont été fouillés (secteur F), ainsi que plusieurs lieux de production céramique (secteurs D, G, A)741  , appartenant au Bronze Ancien III (périodes IV, III) (pl.17b). La céramique retrouvée dans le secteur D correspond au matériel retrouvé dans une tombe localisée aux limites du tell sur le versant Ouest et ligne Ouest du mur du Bronze Ancien. Cette tombe 1, à trois chambres, creusée dans le roc, est une tombe de prestige742. Le secteur central C est occupé par des bâtiments publics et la sépulture monumentale 7.

Le centre est constitué par des bâtiments publics, chacun indépendant en plan (pl.19). Ils sont construits sur une série de terrasses artificielles orientées autour d’une place pavée de briques cuites. De cette place, on descendait, à l’Est, vers une aire ouverte avec des colonnes d’un mètre de diamètre. Au Sud de cette colonnade et du bâtiment 7, se situe la tombe de prestige 7743. Cette tombe construite en pierre calcaire, possède cinq chambres. La tombe est associée aux deux niveaux successifs de bâtiments publics. Elle est associée à des tombes « satellites » (tombes 4-6, 9)744.

Les bâtiments subirent deux phases de transformation : la phase 7, correspondant à la première moitié du BA III (Banat IV) et la phase de reconstruction 6, Banat III (2450-2300 av. J.-C.), durant laquelle le bâtiment 6 est agrandi, les terrasses sont abandonnées pour un agencement sur un même niveau et l’orientation devient Nord-Sud745. Les bâtiments 7 et 6 forment un ensemble complexe de plusieurs salles dont certaines disposent d’aménagements particuliers (banquettes situées dans la salle 12, et des conduits). Il ne s’agit que d’une vue partielle, ce qui rend difficile l’interprétation de ces structures en tant que « palais » ou structures cultuelles746. La tombe 7 est localisée dans une aire ouverte, et l’étude stratigraphique permet de supposer que l’entrée et la pierre de couverture étaient en partie exposées durant la phase IV, permettant ainsi sa réouverture pour des rituels747. Une tombe d’équidé apparaît sur les coupes du secteur C ; elle appartiendrait à la phase III, c’est-à-dire la phase de reconstruction du secteur. Elle se situerait plus au sud de la tombe 7748.

Sous le bâtiment 7, ont été détectées des traces d’activités artisanales (os incisés, puits avec des cendres, scories) sans doute contemporaines de la construction. Les bâtiments reposent sur un dépôt artificiel de graviers de 3 m d’épaisseur formant le terrassement. Dessous, était construit un monticule de forme conique de 7 m de diamètre et une profondeur approximative de 3 m désigné sous le nom de « White Monument III ». Aucun reste humain ou ossement n’a été découvert. Le Monument Blanc III est antérieur à Banat IV et précède l’expansion urbaine749.

La succession entre le Monument Blanc III et la phase d’expansion urbaine sur un même emplacement n’est pas anodine. Celui-ci se serait installé sur le centre funéraire et l’emplacement traditionnel de la cité (Monument Blanc). Il existe ainsi une continuité dans la localisation et dans la construction (les Monuments Blancs). Il semble qu’il s’agisse d’une acropole.

Notes
739.

Porter 2000 : 315, n.3, une occupation urukéenne a été détectée sur le village moderne de Misrab, au Nord de Tell Banat Nord, et à Tell Kabir. Cf. chronologie 1, volume 3.

740.

Porter 2000 : 315-316.

741.

Porter 1995 : 21 ; Porter 2000 : 314-315, 332, 349-350.

742.

Porter 1995 : 1-51 ; Porter 2000 : 371, fig. 54, pl.17a.

743.

McClellan, Porter 1999: 108.

744.

Cf. infra pp. 186-187. Porter 2000 : 363-367 : fig. 50-53 ; Porter 2002a : 17-18, 19-20, fig. 7 ; Porter 2002b : 165. L’auteur définit ces tombes comme des « cistes » (définition d’une ciste cf. infra n. 834, p. 154). Le mode de construction se rapproche néanmoins des constructions en moellons calcaire en encorbellement que l’on retrouve dans d’autres régions, et dont sont issues les constructions monumentales de notre corpus telles que Mari T221-222,300, Jerablus-Tahtani, Umm el-Marra.

745.

Porter 2002b : 157-166.

746.

Porter 2000 : 322-330, figs 33, 39-41 ; voir la discussion sur la fonction des bâtiments publics, pp. 337-354 ; Porter 2002a : 109.

747.

Porter 1995 : 357-362, figs. 44, 49, pour la stratigraphie, fig. 48, pour la localisation, fig. 39.

748.

Porter 2000 : 366 ; Porter 2002a : 16, fig. 6.

749.

McClellan, Porter 1999 : 109.