C. Les tombes à char de Kish

À l’extrémité Est du site d’Ingharra, sur le tell E se situe la petite ziggourat, sur le tell F, la grande ziggourat, le temple de Ninlil et le petit temple de Nin- E-Nanna (pl. 26a). Au Nord-Ouest de la grande ziggourat et au Sud du temple de Ninlil se situe l’aire Y (pl. 26b).

Six niveaux successifs ont été identifiés sur 17 mètres de profondeur : les niveaux 8-9, « strate rouge », datés de 2900-2750 av. J.-C. comportent trois tombes contemporaines du cimetière A, les niveaux 9-11, «strate du Déluge », enfin le « cimetière Y », associé à un habitat en briques crues plano-convexes, correspond aux niveaux 11-14 (pl. 27a). Les tombes sont au nombre de deux cents non publiées selon l’estimation de Gibson788, sept font l’objet d’une étude ostéologique dans l’annexe du rapport de fouille789 et seulement quatre sont décrites dans leur contenu par le fouilleur et bénéficient d’un schéma. En ce qui concerne les tombes à chars : trois sont mentionnées dans la publication de Watelin, une quatrième est ajoutée par Gibson, enfin Algaze en totalise six, en se référant à la correspondance échangée par les fouilleurs. Mais la localisation de trois seulement est connue approximativement par les recoupements des documents (pl. 27b)790. La première tombe (à quatre mètres sous le « Plain Level ») est associée à douze autres tombes : deux des roues du char ont été retrouvées, ainsi que trois corps (cinq selon la description de Langdon). Le deuxième char apparaît à 6 m en dessous du « Plain Level ». Dans ce second groupe se trouvent quatre des plus riches tombes (tombes 360, 363, 393, 401). La dernière tombe Y529 est située à quatre mètres sous le « plain Level », au même niveau que le premier char mais plus au sud. Un quatrième char non enregistré est mentionné par Gibson, il était situé au bord de la ziggourat.

Il n’y a pas de phénomène de continuité à Kish et la tradition de cimetière est très discutée791 notamment pour le « cimetière Y » car les tombes sont en relation avec un habitat. Le problème est d’établir si les maisons étaient abandonnées lors de l’utilisation du « cimetière ». Mais il est moins affirmatif concernant les tombes à char792. Les tombes du « cimetière Y » sont datées du DA II, mais l’utilisation du « cimetière » se poursuit au DA III avec trois tombes, parallèlement au cimetière A. Les cimetières Y et A sont installés sur deux tells différents : le tell A est au Sud du cimetière Y. Dans le cimetière A, le mode d’inhumation est homogène : ce sont des tombes en fosse, individuelles, non construites793. Contrairement à Kheit Qasim il n’y a pas de continuité de construction : les tombes construites du DA II sont remplacées à la période suivante par de simples fosses creusées. Les nécropoles de Kish ont une évolution et une répartition fragmentées dont les causes sont liées à la situation du tell.

L’aire Y est placée au centre de l’aire sacrée d’Ingharra ; la zone d’habitat au-dessus du cimetière pourrait être, comme le suggère Gibson, de nature religieuse. La situation topographique de la tombe Y 529 est décalée par rapport aux autres tombes ; elle se rapproche plus de la ziggourat, au Sud. La quatrième tombe à char est située sous un côté du bâtiment religieux. Le mobilier des tombes simples est de qualité ; pour les tombes du cimetière A, Breniquet le qualifie de « modeste »794. Cependant, les trois tombes de l’aire Y (Y306, 344, 317), contemporaines du cimetière A, sont identifiées par le fouilleur comme appartenant à des personnes royales (Y306)795. Ce sont des tombes en fosse, non construites, identiques à celles du cimetière A ; seul le mobilier les distingue. C’est sans doute la proximité immédiate d’un sanctuaire lié à un symbole de prestige qui a incité certains individus à se faire inhumer sur le tell Y alors que le cimetière est abandonné.

Notes
788.

Gibson 1972 : 84.

789.

Watelin 1934 : 68- 72, l’étude concerne les tombes Y468, 518, 519, 426, 419, 500, 420.

790.

Gibson 1972 : 83-86 ; Algaze 1983 : 135-191, 165, fig. L.

791.

Cf. supra pp. 34-35. Moorey 1966 ; Gibson 1972 ; Algaze 1983. Pour le « cimetière » Y ; pour le « cimetière » A, Breniquet 1984 : 21.

792.

Algaze 1983 : 149-155.

793.

Langdon 1924 ; McKay 1925 ; Moorey 1970 : 86-128.

794.

Breniquet 1984 : 19- 28.

795.

Watelin 1934 : 50, la tombe Y 306 serait la tombe de la reine Ku-Bau ; Moorey 1970 : 127.