A. Les matériaux de construction

1. La pierre

La pierre est employée sous plusieurs formes. Les moellons non équarris, les blocs ou les dalles de pierre sont employés à Ur, Tell Ahmar, Jerablus-Tahtani, Tell Hadidi, Umm el-Marra et Mari ; les blocs équarris sont moins employés (Tell Banat 7, Ebla).

L’emploi de ces modules différents ne permet pas de conclure de leur influence sur la largeur des maçonneries. Les tombes 777, 779, 1236 à Ur ont des murs de plus d’un mètre de largeur, entre 2 m et 2,50 m pour la tombe 779 (pl. 45). Dans les tombes plus récentes, les murs sont moins épais. Les murs de la tombe de la Reine sont inférieurs à 1 m (entre 0,47 et 1 m). En réduisant l’épaisseur de la maçonnerie, les constructeurs ont élevé des murs plus hauts: dans la tombe de la Reine les murs mesurent de 1,40 à 1,50 m de haut (pl. 48). D’après la coupe de la tombe 779, les murs ont 5 à 6 assises de moellons de la base du mur jusqu’au sommier de la voûte, ce qui ferait environ 1 m de haut (pl. 45b).

Ce sont les problèmes architectoniques qui ont contraint les bâtisseurs à des maçonneries épaisses pour les tombes de la première période. À Tell Banat, les murs ont environ 1 m d’épaisseur, comme à Mari dans la tombe 763 (pl. 67, 69). Les murs dans cette dernière s’élèvent à 1,80 m. Une autre technique de construction est employée par la mise en place de piliers (Tell Banat) ou de contreforts. À Mari, les contreforts ont un rôle dans l’organisation de la couverture (pl. 67b, 68). Deux contreforts sont disposés sur le côté Est et un sur le côté Ouest ; verticaux, ils réduisent la surface entre les piles1030. Mais à Tell Banat la couverture est en dalles plates. Les piliers sont placés dans l’encadrement du passage E et dans le passage menant de B à C (pl. 69b). Des piliers sont rectangulaires, un est de forme ronde.

La pierre est utilisée pour les voûtes ce qui n’est pas sans poser des problèmes architectoniques puisque la voûte est le point fragile d’une structure et le matériau est lourd. L’épaisseur de la maçonnerie dans les tombes d’Ur de la phase 1 est une façon de contenir la poussée de la voûte. Le type le plus répandu est la voûte en encorbellement (Ebla, Mari, Ur), mais à Ur le dôme en encorbellement est aussi utilisé1031. Les tombes d’Ur sont remarquables car elles allient différents matériaux et différentes techniques de construction. Dans les tombes 779 et 1236 ces deux types de couverture sont employés parallèlement (pl. 45b, 46)1032. Celles-ci sont divisées en quatre chambres A, B, C, D. Les chambres A et D de forme oblongue, sont les plus grandes ; elles sont voûtées d’un berceau monté en encorbellement. La portée de la voûte se réduit progressivement en montant vers le sommet ; par exemple, dans la tombe 779, la portée se réduit de 2,50 m à 0,30 m au sommet1033. Deux ou trois assises verticales ferment la voûte. Pour la tombe 1236, la portée de la voûte est de 2 m et 0.65 m et elle s’élève à 2 ,35 m de haut ; elle est fermée par des pierres plates (pl. 46b)1034. Les assises sont légèrement inclinées vers l’intérieur de la chambre.

Dans la tombe 779, la voûte se termine par des demi-voûtes fermées, réalisées par une progression en encorbellement effaçant peu à peu l’angle. Dans la tombe 1236, au contraire, les voûtes sont fermées par des murs verticaux (pl. 46b).

Les chambres B et C, situées au centre des tombes, sont couvertes d’un dôme (« domed » est le terme employé par le fouilleur). Le passage d’un plan carré à un plan circulaire se fait à l’aide de pendentifs incorporés au dôme aux quatre angles de la chambre (pl. 46a). Ce type de dôme sur pendentifs est courant dans les Tombes Royales. Il en existe plusieurs exemples, dont la tombe 1054 qui est restée intacte (pl. 52, 53). Il est parfaitement adapté à la taille et à la forme des chambres funéraires (tombe 779 : 2,60 x 2,40 m ; tombe 1054 : 2,60 x 1,70 m).

Dans la chambre principale de la tombe 7771035, la voûte est réalisée en encorbellement. Nous nous reportons à l’analyse de Besenval1036: elle commence dès le sol dans les angles de la chambre pour former progressivement des assises annulaires. Il n’y a pas de photographies qui l’illustrent car la tombe est trop endommagée. Le passage est décrit par Woolley comme « barrel vaulted », c’est-à-dire voûté en berceau, comme les chambres A et D des tombes 779 et 1236.

Les maçonneries extérieures sont nécessaires pour contrebuter les poussées des voûtes. Mais l’épaisseur des murs intérieurs de séparation est réduite (1 mètre environ) avec le contrebutement des voûtes juxtaposées (tombes 777, 779, 1236).

L’évolution de l’architecture est perceptible au niveau de la couverture par l’emploi d’un nouveau matériau, plus léger que la pierre : la brique cuite.

Dans les tombes de Jerablus-Tahtani, Tell Hadidi, Tell Ahmar et les tombeaux en pierre de Mari (21-22, 241-242 et 300), la technique de construction est identique. Les blocs sont posés sur le sol, les interstices sont comblés par des petits éclats de pierres (pl. 38a). Les murs ne sont pas verticaux, ils accusent une inclinaison vers l’intérieur de la chambre (Tell Ahmar, Jerablus-Tahtani, Mari) (pl. 32a, 36b, 37). À Mari, les tombeaux sont décrits avec un encorbellement débutant dès le sol (pl. 37). Le tombeau LI de Tell Hadidi a des parois presque verticales (pl. 31b). La couverture est en dalles posées transversalement sur la largeur de la tombe. Pour la tombe T302 de Jerablus-Tahtani, la partie supérieure n’est plus en place, cependant les parallèles connus permettent d’envisager la forme de la tombe. La surface des tombes s’organise d’une autre façon : les tombes sont longues et plus étroites. L’épaisseur des murs est comprise entre 1 mètre et 1,50 mètre de la largeur des blocs. Alors que les tombes en pierre à chambres sont soumises à des contraintes architectoniques, l’ensemble est plus aisément stable et la couverture, plate et large, permet de renforcer la stabilité. Ainsi, la hauteur sous voûte est plus élevée que dans certaines des tombes d’Ur par exemple.

Tableau 13-Hauteur sous voûtes
Tombes Hauteur sous voûte (m)
Tell Ahmar 2,10
Tell Hadidi LI 1,8
Mari 21-22 2,05-1,95
Mari 241-242 2,6 -2,2
Mari 300 1,85

Ce type de sépulture est simple dans la mise en œuvre par rapport aux autres tombes à chambre ce qui montre le passage aisé d’une forme simple (« steingalerie » T5) à une forme monumentale, car ce qui change ce sont les dimensions des tombes (entre 5 et 10 mètres de long).

Notes
1030.

Margueron 1984 : 204, 202, fig. 3, 206, fig. 5.

1031.

Besenval 1980 : 81-82, 84-86.

1032.

Woolley 1934 : la tombe 779, p. 57-62, plate 24 ; la tombe 1236, p. 111-113 ; 234 -235.

1033.

Besenval 1980 : 82.

1034.

Cf. les photographies de la tombe 1236 montrent clairement les détails de la voûte (Woolley 1934 : pl. 63a-68, particulièrement les photographies pl. 64 b, 65, 67 b).

1035.

Woolley 1934 : 53-57, 55, fig. 6.

1036.

Besenval 1980: 81.