2. Les parallèles

La vaisselle en albâtre est la plus répandue, elle est généralement désignée par le terme de calcite. L’étude des répartitions de matériaux au sein des tombes montre qu’une grande partie de la vaisselle n’a pas de matériau précisé1792.

Les vases sont attestés au Proche-Orient, de la Bactriane à l’Egypte, pour les formes apparaissant en Mésopotamie1793. Les premiers auteurs ont mis en parallèle les vases égyptiens et ceux d’Ur : Woolley, reprenant la suggestion de Reisner, souligne que les deux régions ont développé des caractéristiques spécifiques1794. Il suggère également la présence d’une production locale dès l’époque de Djemdet Nasr. Cette hypothèse repose sur la présence de formes imitant les objets en métal, telles que les vases à bec et le bol ovale U.10480 décrit supra. Les études récentes sur la production et la diffusion de la vaisselle en pierre ont montré qu’une majorité des vases du Cimetière Royal et de Mésopotamie sont des importations. L’Iran et le Golfe sont des lieux de production ; les vases en calcite non décorés et les vases de chlorite sont largement attestés dans le Sud-Est de l’Iran et la Bactriane.

L’identification du lieu de production est difficile pour la vaisselle en pierre. Le matériau provient des sources les plus proches, mais il n’est pas certain qu’il soit travaillé localement ; il existe donc une incertitude sur les proportions de la production locale et des importations. Néanmoins, Potts souligne, et l’étude de Casanova le montre également, que des formes sont spécifiques à des régions et des ateliers, comme certaines pierres sont adaptées à certaines formes1795. Les vases mésopotamiens d’origine locale sont les vases en gypse (vert et blanc) et en calcaire. Le bol de Tell Banat est certainement un produit local, fabriqué à Mari ou Ebla, et échangé sur un marché régional1796.

Les vases, provenant de sites mésopotamiens tels que Kish, Mari, Tello ou Tell Asmar, sont susiens. Les contextes de découvertes sont cultuels et funéraires, il est rare d’en retrouver en contexte domestique1797. À Mari, lors des fouilles récentes dans le temple archaïque de Ninhursag, les archéologues ont mis au jour un ensemble votif de soixante vases en pierre, majoritairement en albâtre1798 ; une coupe à fond plat et à long bec verseur en rigole a été également retrouvée dans une tombe du chantier B1799.

Les coupes deltoïdes anthropomorphes sont identifiées à Kish, dans un contexte non funéraire de l’époque akkadienne : elles représentent un taureau à barbe bouclée, proche de ceux d’Ur (figure 66b). Il s’agit d’une forme unique, probablement d’origine locale, le matériau employé est le calcaire.

Le bol en lapis-lazuli de la tombe 800 est unique dans sa forme et son matériau dans le cimetière d’Ur et en Mésopotamie. Des exemplaires plus tardifs proviennent de contexte funéraire en Asie Centrale (figure 68a, b)1800. La forme à bec est une reproduction de modèle en métal ou en céramique.

La vaisselle de chlorite se divise en deux séries : la « série récente » et « la série ancienne », d’après la typologie des vases de Suse par Miroschedji1801. La « série ancienne » est aussi désignée par Khol en tant que « Intercultural style »1802, de caractère iranien. Elle est datée du DA II à la fin du IIIème millénaire, et elle s’étend de la Syrie à l’Asie Centrale et l’Indus.

La vaisselle de chlorite décorée se divise en quatre types à Ur dont les deux exemplaires de type 10 se rapprochent de certains exemplaires de Suse et de l’île de Tarut dans le Golfe Persique1803. Ils appartiennent à la « série ancienne » ou « Intercultural style ». La production provenant de la vallée de Kerman (Shaddad, Tépé Yahya)1804 puis les nouvelles découvertes de Jiroft confirment une provenance de l’Ouest iranien d’une majorité de la vaisselle. Les coupes en chlorite non décorées d’Ur (types 49-51), les bols (type 36) d’Ur et de Kish sont typiques de cette production1805. Parmi les exemplaires du Kerman, provenant du cimetière A de Shaddad, nous avons retrouvé les boîtes à compartiments en chlorite semblables à celle en albâtre du cimetière d’Ur. Miroschedji avait également identifié cette catégorie d’objets à Suse : les boîtes sont plus petites (environ 10cm de côté) et sont décorées1806. Des exemplaires provenant de Bactriane sont datés du Bronze Ancien1807.

Les bols à fond bombé, incisés de motifs de triangles, du corpus de Tépé Yahya appartenant à l’ «Intercultural Style »1808 sont peut-être une inspiration pour le bol de Tell Banat.

La « série récente » est identifiée dans le corpus, elle est datée de la fin du IIIème millénaire. Les exemplaires d’Ur (types 52, 53) seraient proches du groupe de vaisselle du Golfe (groupe C de Miroschedji) qui se caractérise par un décor de cercles concentrique sur le bord de la lèvre1809.

Notes
1792.

Casanova 1991.

1793.

Casanova 1991 : 18-21, tableau 10.

1794.

Woolley 1934 : 379.

1795.

Potts 1994 : 219.

1796.

Pinnock 1981.

1797.

Casanova 1991 : 71-77.

1798.

Margueron 2004 : 111-112, figures 89-90, pl. 32.

1799.

Margueron2004 : 115, figure 95.

1800.

Schmidt 1937 ; Pottier 1984 : figure 30 ; Zettler 1998 : 151.

1801.

Miroschedli 1973.

1802.

Potts 1994 : 250.

1803.

Cleuziou 2003 : 114-125.

1804.

Lamberg-Karlovsky, Tosi 1973 ; Lamberg-Karlovsky 1988 ; Hakemi 1997.

1805.

Lamberg-Karlovsky 1988 ; Hakemi 1997 : 12-13, figure 1-1.

1806.

Miroschedji 1973 : pl. VIIIo, figure 11.15 ; Hakemi 1997 : 30- 32, figures 37-38, 39-40.

1807.

Pottier 1984 : 35, 165, figure 31, n° 226.

1808.

Lamberg-Karlovsky 1988 : 79-80, catalogue 455, 456, 479.

1809.

Potts 1988 : 262-265.